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Le Zimbabwe, un exemple pour
l’Afrique subsaharienne francophone?
Mikhail Gamandiy-Egorov
© AP
Photo/
Mercredi 22 novembre 2017
Source:
Sputnik
Le Zimbabwe
confirme une fois de plus sa maturité
politique de nation au bagage
révolutionnaire et résistant et qui va
de l’avant. Il vient en effet de réussir
une transition de pouvoir sans effusion
de sang et sans ingérence extérieure.
Une maturité dont pourrait s’inspirer un
certain nombre de pays du continent
africain. Après quelques
jours de suspens, c'est confirmé: le
charismatique et légendaire Président
zimbabwéen
Robert Mugabe, héros national, a
choisi de démissionner de son poste
présidentiel. Bien qu'il soit honni par
l'establishment occidental, les titres
des médias mainstream sont loin d'être
enthousiastes sur l'avenir de ce pays
d'Afrique australe. Pourquoi? Parce que
le départ de Mugabe ne change rien à la
souveraineté du Zimbabwe ni à ses
relations stratégiques avec le voisin
sud-africain, ainsi qu'avec la Chine et
la Russie.
En ce sens, ce pays
confirme avoir la carrure de ses
voisins, l'Afrique du Sud, l'Angola ou
encore la Namibie, dont les élites
entretiennent d'ailleurs des relations
étroites avec Moscou et Pékin, pour
certains depuis leurs années de
formation.
Si beaucoup ont
parlé de «putsch» à l'occasion des
récents événements, la réalité montre
que c'est loin d'être le cas, pour
plusieurs raisons. Tout d'abord, l'armée
nationale n'a pas écarté Robert Mugabe
de manière autoritaire, mais a mené de
longues discussions durant plusieurs
jours avec le Présdient, qui avait toute
latitude pour s'entretenir avec qui il
souhaitait, notamment le Président
sud-africain Zuma, ou encore faire des
déclarations télévisées. D'autre part,
le respect des militaires zimbabwéens
envers Mugabe était évident, le climat
qui a régné durant les pourparlers sur
l'avenir du pays le confirme. D'ailleurs
et au vu des déclarations faites par le
commandement de l'armée, ce n'était pas
tant le Président de 93 ans qui était
visé, mais bien certains représentants
de son entourage.
Maintenant, parlons
perspectives. Mugabe quitte la
présidence en restant un héros national
aux yeux de la majorité des citoyens du
pays, dans la dignité et avec les
honneurs. D'ailleurs compte-t-il prendre
un repos bien mérité ou continuer à
participer à la vie politique du pays?
Personne ne peut encore répondre à cette
question. Concernant l'avenir, il faut
rappeler que l'Union nationale africaine
du Zimbabwe-Front Patriotique (ZANU-PF),
le parti au pouvoir, continuera très
certainement à rester le parti politique
le plus populaire du pays, à l'instar de
l'ANC sud-africain, du MPLA angolais ou
de la SWAPO namibienne, autant d'alliés
de l'URSS en leur temps. Le ZANU-PF, à
l'instar de ses homologues des pays
voisins est un parti patriote,
panafricaniste, anti-impérialiste.
Et pour reprendre
l'exemple du voisin sud-africain, qui
comme le
Zimbabwe n'est pas sous mandat
étranger, on peut préférer Mandela,
Mbeki ou Zuma, qui ont chacun leurs
particularités et leurs caractères, mais
une chose les unit: l'amour de leur pays
et l'opposition au néocolonialisme. La
ligne politique de Harare, notamment
internationale, restera donc très
certainement inchangée.
Pour en venir au
successeur probable de Mugabe, à savoir
son camarade de longue date Emerson
Mnangagwa, les vives critiques des
médias occidentaux le visant confirment
le fait que les forces néocoloniales ne
devraient pas mettre la main sur le
Zimbabwe. En effet et selon eux,
Mnangagwa est tout aussi «radical et
anti-occidental» que Mugabe, ce qui en
dit long. Il a d'ailleurs été inscrit
sur la liste des sanctions américaines
visant le Zimbabwe, et il y figure
encore.
Mais en quoi le cas
du Zimbabwe pourrait-il et devrait-il
inspirer d'autres nations africaines,
notamment d'Afrique subsaharienne
francophone? Harare établit qu'il faut
être maître de son destin, assumer sa
souveraineté, la défendre, choisir les
bons partenaires, même lors d'une
passation de pouvoir. De plus, le
Zimbabwe démontre qu'il convient de
respecter les leaders nationaux qui ont
joué un rôle crucial dans la libération
de leur pays, même si le moment pour eux
de quitter le pouvoir est arrivé: un
contre-exemple à la manière honteuse
dont ont été assassinés Lumumba, Sankara
ou Kadhafi, sur ordre de forces
néocoloniales.
Le Zimbabwe a en
effet prouvé qu'un changement de pouvoir
en Afrique pouvait se faire sans coups
de feu, dans la dignité, sans
interférence extérieure, sans
intervention armée néocoloniale et dans
le strict respect des valeurs qui
caractérisent une nation. Avec toujours
le ferme objectif de défendre sa
souveraineté et de contrôler ses
ressources naturelles. Chapeau à lui!
Quant à la Russie et la Chine, elles
continueront à respecter la souveraineté
de ce pays et à collaborer à tous les
niveaux où elles partagent des intérêts
avec le Zimbabwe. Aucun doute là-dessus.
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Publié le 23 novembre 2017 avec l'aimable autorisation de l'auteur.
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