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Pourquoi la France finira-t-elle
par perdre l’Afrique?
Mikhail Gamandiy-Egorov
CC0
/ Pixabay
Vendredi 20 avril 2018
Source:
Sputnik
Malgré toutes les tentatives de
maintenir ce que l’Élysée continue de
considérer comme son «pré carré», les
événements en cours confirment
l’hypothèse d’une perte d’influence de
l’Occident sur le continent africain.
Au moment où la
Chine est en train de devenir la
partenaire privilégiée d'un grand nombre
de pays d'Afrique
et que la Russie confirme son retour sur
le continent, l'Occident politique ne
cache pas sa vive inquiétude. Et il y a
de quoi. Car au-delà de la puissance
sino-russe, ce dont il faut tenir compte
en premier lieu, c'est de la volonté des
Africains eux-mêmes. Il s'agit de leurs
pays respectifs, de leur continent, de
leur avenir.
Evidemment, dans
cette défaite qui se profile pour les
intérêts occidentaux en Afrique, Paris
sera certainement la grande perdante.
Certes, les USA et la Grande-Bretagne
sont dans le viseur des panafricanistes
et des patriotes africains. Mais c'est
la France qui est en première ligne,
pour une raison simple: c'est elle qui
dispose du plus grand nombre de bases
militaires étrangères et
extracontinentales en Afrique. Et bien
que justifiant sa présence par la
«protection» de la sécurité et de la
stabilité des États concernés, il est
aujourd'hui clair qu'il n'en est rien.
La seule raison réelle de cette présence
réside dans la nécessité de contrôler
les ressources naturelles africaines,
dont la France a tellement besoin pour
maintenir sa relative puissance
économique.
Le franc CFA est
une autre pierre d'achoppement entre
Paris et le continent africain, la
majorité de panafricanistes considérant
cette monnaie comme l'une des
principales émanations du
néocolonialisme en Afrique. Il y a bien
sûr aussi le non-respect de la
souveraineté africaine et l'ingérence
non voilée dans les affaires intérieures
de plusieurs pays, comme en Côte
d'Ivoire, en Libye, au Mali, en
Centrafrique, au Cameroun et bien
d'autres. D'ailleurs, les récents
événements en Syrie ont une fois de plus
montré aux yeux de l'opinion
internationale, y compris africaine, ce
que représentait la politique
internationale «française».
Et ce n'est pas
tout. Lorsqu'on se trouve par exemple au
Maroc ou en Algérie, et que l'on y
observe les nombreux migrants d'Afrique
subsaharienne cherchant à parvenir dans
«l'eldorado» européen, on se rend compte
d'une réalité indéniable: Sénégalais,
Maliens, Ivoiriens, Guinéens et d'autres
représentants de pays appartenant encore
au fameux système de la Françafrique
représentent probablement pas moins de
90% de ces migrants.
On n'y croise pas
d'Angolais, de Namibiens ou d'Équato-Guinéens.
Pourquoi, me direz-vous? Car il y a une
différence majeure entre les pays en
question: ces derniers assument leur
souveraineté et leurs dirigeants ont pu
faire profiter leurs populations des
dividendes des ressources naturelles
nationales. Les premiers, pourtant eux
aussi très riches en termes de matières
premières, voient la France, ou plutôt
l'élite atlantiste de l'Élysée et ses
affidés, les piller sans vergogne, ce
qui pousse leurs citoyens, notamment la
jeunesse, à aller chercher une vie
meilleure ailleurs, y compris au péril
de leur vie.
Et il y avait aussi
la Jamahiriya libyenne de Kadhafi, qui
pouvait se permettre d'accueillir un bon
nombre de ces migrants et de leur offrir
une vie décente sur le continent
africain, sans avoir à traverser la
Méditerranée. Mais cela, c'était avant.
Avant que des personnages tels que
Sarkozy ou Bernard Henri-Levy ne
transforment ce pays tantôt prospère en
une nouvelle zone de chaos et
d'extrémisme.
Évidemment certains
«bien-pensants», en lisant ces lignes,
crieront haut et fort: «et les leaders
africains alors?» N'est-ce pas à eux que
d'assurer une vie digne à leurs
concitoyens? Oui, encore faut-il leur en
donner les moyens. Et c'est là justement
que l'on en revient à la question des
bases militaires. Il suffit qu'un leader
patriote africain essaie de faire bouger
les lignes, ou en d'autres termes de
diversifier ses partenariats avec le
monde extérieur, pour qu'il fasse
certainement face à une rébellion armée
orchestrée par l'Occident, à une
tentative de putsch —suivez mon
regard…-, et si les deux premières
«options» ont échoué, à une intervention
des forces spéciales françaises, dans la
pure tradition néocoloniale. Clin d'œil
au passage à la force Licorne en Côte
d'Ivoire.
Mais le monde a
déjà beaucoup changé, continue de
changer et continuera de changer. Dans
cette nouvelle optique, et vu de ce que
pense la grande majorité de la rue
africaine, de Bamako à Bangui et
d'Abidjan à Douala, les forces
néocoloniales finiront par perdre pied.
Pas de doute là-dessus. Les puissances
partisanes du monde multipolaire, elles,
continueront de coopérer avec l'Afrique
dans le strict respect de sa
souveraineté, de ses traditions et de
ses valeurs. C'est aux Africains que de
choisir leurs partenaires. Pas à
Washington, Paris ou Londres. Cette
normalité deviendra réalité dans un
avenir proche.
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Publié le 20 avril 2018 avec l'aimable autorisation de l'auteur.
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