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Politique israélienne en Syrie, les
masques tombent
Mikhail Gamandiy-Egorov
© AFP 2017
THOMAS COEX
Lundi 20 mars 2017
Source:
Sputnik
La Syrie est le théâtre
d’affrontement d’envergure pratiquement
mondiale, du fait de l’internationale
terroriste présente sur le territoire,
mais aussi en raison de la participation
de pays hostiles à la République
syrienne. Parmi eux, les récents
événements ont mis en lumière le rôle
d’Israël.
Si aujourd'hui, ce
n'est un secret pour personne que des
pays comme les USA, l'Arabie saoudite,
le Qatar ou encore plusieurs États
ouest-européens ont largement et
ouvertement contribué au chaos en Syrie,
le cas d'Israël était à part. D'un côté,
l'État hébreu se déclarait « neutre »
dans le conflit syrien, mais ses actions
ont plusieurs fois démontré le
contraire. La dernière en date a été la
goutte qui a fait déborder le vase.
En effet,
l'aviation israélienne a mené plusieurs
frappes en Syrie au cours de ces
dernières années. À chaque fois, elles
visaient les positions de l'armée
gouvernementale syrienne ainsi que ses
alliés, dont le Hezbollah libanais —
l'os dans la gorge de l'État israélien
depuis déjà bien longtemps. Qu'en est-il
des groupes terroristes, dont Daech ou
Al-Qaida? Réponse: ils n'ont jamais été
visés par les avions israéliens.
En septembre
dernier, lors de l'offensive de l'armée
syrienne contre les terroristes
takfiristes du Front Al-Nosra (devenu
par la suite Front Fatah al-Cham et plus
récemment encore Hayat Tahrir al-Cham)
dans le sud de la Syrie, aux environs de
Kouneitra, l'armée israélienne avait une
fois de plus attaqué les positions des
forces gouvernementales. Si les
précédentes attaques israéliennes
n'avaient pratiquement pas généré de
riposte côté syrien, ce ne sera pas le
cas de celle-ci. Un avion et un drone
israéliens seront abattus, selon les
informations de l'état-major syrien.
Israël niera les faits.
17 mars. Alors que
l'armée syrienne et les milices
progouvernementales poursuivent
l'offensive contre Daech à l'est de
Palmyre, l'aviation israélienne frappe
une nouvelle fois les troupes syriennes.
La DCA syrienne riposte et affirme avoir
abattu un avion et en avoir touché un
autre. Israël nie dans un premier temps
les faits, comme il l'avait fait au mois
de septembre. Mais la réaction qui s'en
suit deux jours plus tard d'Avigdor
Lieberman, le ministre israélien de la
Défense semble confirmer la version
syrienne. En effet, il annonce que si la
DCA syrienne riposte de nouveau contre
l'aviation israélienne, l'État sioniste
« détruira » les systèmes de défense
antiaérienne de Syrie.
De l'aveu des
médias, y compris mainstream, il s'agit
du plus sérieux incident entre les deux
pays depuis le début de la crise
syrienne. Incident suffisamment sérieux
en tout cas pour que. le ministère russe
des Affaires étrangères convoque ce
lundi 20 mars l'ambassadeur israélien en
poste à Moscou, afin de lui transmettre
l'opposition de la Russie face aux
actions israéliennes à l'encontre de la
Syrie.
Plus gênant presque
que le bombardement en lui-même, ce sont
les justifications israéliennes qui ne
tiennent tout simplement pas. Tel-Aviv a
en effet indiqué que les frappes
visaient à empêcher un transfert d'armes
au Hezbollah libanais, alors que
l'attaque a ouvertement visé les forces
syriennes aux alentours de Palmyre, là
où l'armée gouvernementale fait face à
Daech. Bien difficile désormais de
parler du manque de complicité entre
Israël et les groupes terroristes,
d'autant plus que selon divers
témoignages, de nombreux terroristes,
notamment ceux opérant dans le Sud du
territoire syrien, se font soigner dans
les hôpitaux israéliens.
Au-delà du conflit
syrien, et dans lequel les forces
gouvernementales soutenues par les
alliés prennent de plus en plus le
dessus sur les groupes terroristes,
Israël a vraisemblablement très peur du
rééquilibrage des forces dans la région
issu de l'ère multipolaire. En effet
faut-il rappeler que l'État sioniste
faisait partie des grands bénéficiaires
de la chute de l'URSS et de la fin
officielle de la guerre froide?
L'avènement de
l'ère unipolaire, avec le diktat de la
seule superpuissance étasunienne,
l'allié par excellence d'Israël, avait
donné à ce dernier un sentiment de
quasi-impunité aussi bien dans le
conflit qui l'oppose à la Palestine,
qu'à plusieurs de ses voisins. La guerre
perdue en 2006 face au Hezbollah
libanais, qui combat aujourd'hui aux
côtés de l'armée syrienne les
terroristes takfiristes, a été l'un des
premiers signes remettant en cause «
l'invincibilité » régionale d'Israël.
Puis le
renforcement de l'Iran, partisan lui de
la multipolarité et ennemi de longue
date, a ravivé les craintes de Tel-Aviv.
Enfin, le positionnement de la Russie en
faveur de son allié syrien dans la lutte
antiterroriste a complètement
reconfiguré les perspectives proche et
moyen-orientales. En effet et selon
plusieurs hauts cadres de Tsahal, la
présence russe en Syrie a totalement mis
à mal la domination aérienne d'Israël
dans la région. Pour rappel, les
systèmes de défense antiaérienne et
antimissiles russes S-300 et S-400 se
trouvent sur le territoire syrien, mais
à ce jour, ils n'ont pas été utilisés.
Cependant, la DCA syrienne a riposté au
raid israélien avec ses vieux systèmes
S-200 et il est peu probable que
Tel-Aviv souhaite que les systèmes
russes plus sophistiqués soient utilisés
contre son aviation. D'où l'importance
de l'empêcher par des canaux
diplomatiques. Cela a été fait ce lundi.
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Publié le 21 mars 2017 avec l'aimable autorisation de l'auteur.
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