Opinion
Obama accuse la Russie
de s’en prendre aux « bons terroristes »
Prof Michel Chossudovsky
Dimanche 4 octobre 2015
Abondamment confirmé dans de nombreux
textes mais rarement abordé dans les
reportages, l’État islamique en Irak et
en Syrie (EIIS) est une création des
services secrets des USA, dont les
membres sont recrutés, entraînés et
financés par ce pays et ses alliés dont
la Grande‑Bretagne, la France, l’Arabie
saoudite, la Turquie, Israël et la
Jordanie.
Jusqu’à récemment,
l’EIIS était connu sous le nom d’Al-Qaïda
en Irak (AQI). Ce n’est qu’en 2014
que le groupe est devenu l’État
islamique (État islamique en Irak et en
Syrie, État islamique en Irak et au
Levant).
La Russie entre
en guerre contre le terrorisme
Nous assistons
maintenant à un revirement majeur dans
la dynamique de la guerre en Syrie et en
Irak. La Russie est dorénavant
directement engagée dans la lutte
antiterroriste en coordination avec les
gouvernements syrien et irakien.
Washington a reconnu la détermination de
Moscou, mais voilà maintenant qu’Obama
se plaint que les Russes prennent pour
cible les « bons terroristes » soutenus
par Washington.
Information
privilégiée
Extrait du Wall Street Journal
(WSJ) :
D’après des responsables étasuniens,
les frappes aériennes russes en Syrie
ont visé des rebelles soutenus par la
CIA
Un des secteurs touchés est une position
tenue principalement par des rebelles
financés, armés et entraînés par la CIA
et les alliés.
Un élément d’information important
rapporté tacitement dans cet article du
WSJ est que la CIA soutient des
terroristes pour parvenir à un
« changement de régime » en Syrie,
ce qui implique des opérations de
renseignement clandestines dans le
territoire syrien :
« L’agence d’espionnage étasunienne arme
et entraîne des rebelles en Syrie depuis
2013 pour combattre le régime d’Assad. »
(WSJ,
le 30 septembre 2015; soulignement
ajouté. Note de l’auteur : un soutien
tacite est fourni depuis le début de la
guerre en mars 2011.)
Ce qui précède est connu et confirmé,
mais à peine rapporté dans les médias
institutionnels.
Le front Al-Nosra :
« les bons terroristes »
Le Pentagone, qui reconnaît
maintenant candidement que la CIA
soutient des groupes affiliés à Al-Qaïda
à l’intérieur de la Syrie, dont le front
Al-Nosra, déplore du même souffle
que la Russie aurait pour cible les
« bons terroristes » qui sont soutenus
par Washington :
Une des frappes aériennes [russes] a
touché une position tenue principalement
par des rebelles soutenus par la CIA et
les services de renseignement alliés,
d’après des responsables étatsuniens
(…).
Sur les sept secteurs qui, d’après les
médias nationaux syriens, ont été pris
pour cible par les frappes russes,
seulement un, qui se trouve à l’est de
Salamiyah, dans la province de Hama, a
une présence avérée de combattants de
l’État islamique. Les autres secteurs
sont largement dominés par des
factions de rebelles modérés ou des
groupes islamistes comme Ahrar al-Sham
et le front Al-Nosra, affilié à
Al-Qaïda. (WSJ,
le 30 septembre 2015; soulignement
ajouté.)
Le front Al-Nosra, qui est effectivement
affilié à Al-Qaïda, est une organisation
terroriste « djihadiste » responsable
d’innombrables atrocités. Depuis 2012,
Al-Qaïda en Irak et le front Al‑Nosra,
avec le soutien des services secrets des
USA, travaillent de concert à diverses
menées terroristes à l’intérieur de la
Syrie.
Ce qui ressort des nouveaux
développements, c’est que le
gouvernement syrien a fixé ses propres
priorités en vue de la campagne aérienne
antiterroriste russe, qui consistent
essentiellement à frapper le front Al-Nosra,
qui est décrit comme le bras armé
terroriste de l’Armée syrienne libre
(ASL).
Washington a qualifié le front Al-Nosra
d’organisation terroriste au début de
2012. Ce qui ne l’a pas empêché de
soutenir Al-Nosra et les soi-disant
« rebelles modérés » en leur fournissant
des armes, un entraînement, un soutien
logistique, des recrues, etc. Ce soutien
était fourni par l’intermédiaire de ses
alliés du golfe Persique, dont le Qatar
et l’Arabie saoudite, et entrait par la
Turquie et Israël. .
Fait ironique, dans une décision du
Conseil de sécurité de l’ONU rendue en
mai 2012, « le front Al-Nosra en
Syrie a été mis sur la liste noire en
tant qu’alias d’Al-Qaïda en Irak »,
autrement dit, de l’EIIS :
une décision qui se traduira par
l’imposition de sanctions contre le
groupe, dont un embargo sur les armes,
une interdiction de voyager et le gel
des avoirs, ont expliqué les diplomates.
La mission étasunienne auprès de l’ONU a
affirmé qu’aucun des 15 membres du
Conseil ne s’était opposé à l’ajout du
front Al-Nosra comme alias d’Al-Qaïda en
Irak ce jeudi.
Le front Al-Nosra, l’une des forces
armées les plus efficaces dans la lutte
contre le président Bachar al-Assad, a
prêté allégeance le mois dernier au chef
d’Al-Qaïda Ayman al-Zawahri. (Al
Jazeera, mai 2012)
Voilà maintenant que la Russie est
blâmée pour s’en prendre à une entité
terroriste qui est non seulement sur la
liste noire du Conseil de sécurité de
l’ONU, mais qui a des liens avec l’État
islamique en Irak et en Syrie (EIIS).
Quelle est la portée de ces accusations?
Pendant que les médias rapportent que la
Russie soutient la campagne
antiterroriste, dans les faits, la
Russie combat (indirectement) la
coalition USA-OTAN en soutenant le
gouvernement syrien contre les
terroristes, qui se trouvent à être
les fantassins de l’alliance militaire
occidentale, qui comptent des
mercenaires et des conseillers
militaires occidentaux dans leurs rangs.
Concrètement, la Russie combat des
terroristes soutenus par les USA.
La vérité inavouable, c’est qu’en
fournissant une aide militaire à la
Syrie et à l’Irak, la Russie s’en prend
(indirectement) aux USA.
Dans cette guerre par procuration,
Moscou va soutenir ces deux pays dans
leur lutte contre l’EIIS, qui est
soutenu par les USA et ses alliés.
Michel
Chossudovsky
Article original en anglais :
Obama Accuses Russia of Going After
America’s “Good Guy Terrorists”, publié
le 1er octobre 2015
Traduit par
Daniel pour Mondialisation.ca
Le
dossier Russie
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