Monde
Brève histoire de l'OTAN de 1991 à nos
jours (4)
Manlio Dinucci
Mardi 17 octobre 2017
L’EXPANSION DE L’OTAN VERS LA RUSSIE
Dans cette même année -1999- où
elle lance la guerre contre la
Yougoslavie et annonce vouloir
« conduire des opérations de réponse aux
crises, non prévues à l’article 5,
en-dehors du territoire de l’Alliance »,
l’Otan commence son expansion vers
l’Est. Elle englobe les trois premiers
pays de l’ex Pacte de Varsovie :
Pologne, République tchèque et Hongrie.
Ensuite, en 2004, elle s’étend à sept autres : Estonie, Lettonie,
Lituanie (auparavant parties de l’URSS)
; Bulgarie, Roumanie, Tchécoslovaquie
(auparavant membres du Pacte de
Varsovie) ; Slovénie (auparavant partie
de la Fédération Yougoslave). Au sommet
de Bucarest, en avril 2008, est décidée
l’entrée pour l’année suivante de
l’Albanie (membre à un moment du Pacte
de Varsovie) et de la Croatie
(auparavant partie de la Fédération
Yougoslave).
En les faisant entrer dans l’Otan, Washington aliène ces pays non pas
tant à l’Alliance que directement aux
USA. Roumanie et Bulgarie mettent
immédiatement à disposition des
Etats-Unis les importantes bases
militaires de Costanza et Burgas en Mer
Noire. La République Tchèque garantit la
disponibilité de son territoire pour le
déploiement de rampes de missiles du
« bouclier anti-missiles » USA.
La Lituanie, avant même d’entrer dans l’Otan, se met à acheter des
armements étasuniens, en commençant par
60 missiles Stinger pour une valeur de
plus de 30 millions de dollars.
En 2002 la Pologne achète 48 chasseurs F-16 de la société étasunienne
Lockheed Martin et, pour les payer,
utilise un prêt étasunien de presque 5
milliards de dollars (avec intérêts non
seulement financiers mais politiques).
La Bulgarie procède, sur directive de Washington, à une drastique
épuration des forces armées, en
expulsant des milliers d’officiers
(considérés comme non totalement
fiables) pour les remplacer par plus de
2 mille officiers jeunes et fiables,
formés par des instructeurs étasuniens
et capables de parler un excellent
anglais, ou plutôt américain.
De cette façon les Etats-Unis renforcent ensuite leur influence en
Europe. Sur dix pays de l’Europe
centre-orientale qui entrent dans l’Otan
entre 1999 et 2004, sept entrent dans
l’Union européenne entre 2004 et 2007 :
à l’Union européenne qui s’élargit vers
l’Est, les Etats-Unis superposent l’Otan
qui s’élargit à l’Est sur l’Europe. Le
véritable but de l’opération est révélé
par les fonctionnaires du Pentagone :
les dix pays de l’Europe
centre-orientale entrés dans l’Otan
-déclarent-ils en février 2003- « sont
en train de prendre d’importantes
positions pro-USA, en réduisant
efficacement l’influence des puissances
de la vieille Europe, comme l’Allemagne
et la France ».
Ainsi se révèle, clairement, le dessein stratégique de Washington :
prendre appui sur les nouveaux membres
de l’Est, pour établir dans l’Otan des
rapports de force encore plus favorables
aux Etats-Unis, afin d’isoler la
« vieille Europe » qui pourrait un jour
se rendre autonome.
L’expansion à l’est de l’Otan a, en plus de celles-là, d’autres
implications. En englobant non seulement
les pays de l’ex Pacte de Varsovie mais
aussi les trois républiques baltes
autrefois membres de l’URSS, l’Otan
arrive jusqu’aux confins de la
Fédération Russe. Malgré les assurances
de Washington sur les intentions
pacifiques de l’Otan, cela constitue une
menace, y compris nucléaire, envers la
Russie.
Pour tranquilliser la Russie, l’Otan affirme « ne pas avoir
d’intention, ni plans, de déployer des
armes nucléaires sur le territoire des
nouveaux membres » de l’Europe
centre-orientale. La valeur de cet
engagement sera démontré par le fait que
l’Otan, après avoir promis
solennellement de ne pas maintenir
d’unités de combat sur le territoire des
pays de l’Europe centre-orientale sur le
point d’entrer ou entrés dans
l’Alliance, utilise immédiatement après
la base aérienne hongroise de Taszar
comme principal centre logistique des
forces étasuniennes opérant dans les
Balkans.
L’engagement de ne pas déployer d’armes nucléaires dans les pays d’Europe
centre-orientale va être démenti par le
fait que, parmi les armes nucléaires
conservées par les Etats-Unis en Europe
dans le cadre de l’Otan, se
trouvent « des bombes nucléaires pour
avions à double capacité ». Puisque des
avions de ce type, tels les F-16 de la
U.S. Air Force et les 48 achetés par la
Pologne, opèrent dans les pays de
l’Europe centre-orientale entrés dans
l’Otan, leur présence dans ces bases
avancées constitue une potentielle
menace nucléaire à l’égard de la Russie.
Episode
3
Episode 5
Le sommaire de Manlio Dinucci
Les dernières mises à jour
|