Opinion
En Israël l'Italie
se prépare à la guerre aérienne
Manlio Dinucci
Tornado italiens @ Forza Area
Italiana
Jeudi 7 novembre 2013
Les chasseurs-bombardiers italiens
Tornado, Eurofighter 2000, F-16 Falcon
et autres, qui en 2011 bombardèrent
la Libye en participant
à 1182 missions dans l’opération OTAN « Unified
protector », sont de nouveau prêts au
décollage. Pas pour une nouvelle guerre
en Libye, désormais désintégrée et dans
le chaos (même le terminal du gazoduc
pour l’Italie est sous attaque), mais
pour préparer d’autres guerres. Ils
participeront en novembre à la plus
grande manœuvre de guerre aérienne
jamais faite en Israël.
La
manœuvre, dénommée « Blue Flag » sur le
modèle de celle de la U.S. Air
Force, se déroulera dans deux semaines
dans le Désert du Néguev. Peu nombreuses
et sélectionnées les forces aériennes
invitées : celles des Etats-Unis, Italie
et Grèce[1].
Dans l’ensemble, participeront à la
« Blue Flag »plus de 100 avions et 1000
militaires. Ce sera une manoeuvre à feu,
avec emploi de bombes et missiles à
guidage de précision.
Le scénario simulera une attaque
en profondeur dans un territoire ennemi
doté de fortes défenses aériennes (comme
par exemple l’Iran) : après les avoir
neutralisés, les chasseurs-bombardiers
frapperont les objectifs terrestres
représentés par des cibles disséminées
dans le désert. Dans les duels aériens,
l’aviation ennemie sera personnifiée par
l’ « Aggressor squadron » des forces
aériennes israéliennes, dont les pilotes
sont entraînés à simuler diverses
tactiques de combat, « en particulier
celles des forces aériennes arabes ».
Israël attribue une grande
importance à la « Blue Flag ». Les
forces aériennes israéliennes, a déclaré
le général Amikam Norkin,
sont en train d’expérimenter de
nouvelles procédures « pour abréger la
durée des guerres futures » en
potentialisant sa propre capacité
destructive : cela permettra
d’ « accroître de dix fois le nombre
d’objectifs qui sont individualisés et
détruits ». C’est maintenant le moment
d’expérimenter cette capacité dans un
exercice conjoint avec des forces
aériennes avancées, comme celles
étasuniennes et italiennes. Pour preuve
des capacités atteintes, le général
Norkin a souligné, dans une entrevue à
Defense News (21 octobre), que
pendant les 8 jours de l’opération
« Pilier de défense » effectuée à Gaza
en novembre 2012, l’aviation israélienne
a attaqué 1 500 objectifs, le double de
ceux attaqués pendant les 34 jours de la
guerre au Liban en 2006.
Les pilotes italiens aussi
pourront donc apprendre beaucoup en
participant à la manœuvre de guerre
aérienne en Israël.
La « Blue Flag » sert en même
temps à intégrer les forces aériennes
israéliennes dans celles de l’OTAN.
Jusqu’à présent elles avaient effectué
des manœuvres conjointes seulement avec
les pays individuels de l’Alliance,
comme celle de Decimomannu avec
l’aéronautique italienne. De sorte
qu’Israël, même s’il n’est pas
officiellement membre de l’OTAN, se
trouve opérationnellement faire partie
de sa stratégie et de ses opérations
militaires. Ceci entre dans le
« Programme de coopération
individuelle » avec Israël, ratifié par
l’OTAN le 2 décembre 2008, environ trois
semaines avant l’opération israélienne
« Plomb durci » contre Gaza. Il comprend
une vaste gamme de secteurs dans
lesquels « OTAN et Israël coopèrent
pleinement » : échange d’informations
entre les services d’intelligence ;
connexion d’Israël au système
électronique OTAN ; coopération dans le
secteur des armements ; augmentation des
manœuvres militaires conjointes ;
élargissement de la coopération contre
la prolifération nucléaire (en ignorant
qu’Israël, unique puissance nucléaire de
la région, refuse de signer le Traité de
non-prolifération et a rejeté la
proposition Onu d’une conférence pour la
dénucléarisation du Moyen-Orient).
A cette opération participera
l’Italie avec ses chasseurs-bombardiers.
Ils décolleront au-dessus des plus de 6
millions d’Italiens sans travail ou
presque : on ne sait pas à quel chapitre
du budget de l’Etat sera débité la
dépense pour transférer en Israël avions
et personnel militaire et pour les faire
participer à la manœuvre de guerre, mais
on sait que ce sera autant d’argent
public soustrait aux dépense sociales.
Les chasseurs-bombardiers
décolleront au-dessus d’un parlement
dont la quasi-totalité n’a probablement
pas été informée de la participation
italienne à la manœuvre de guerre
aérienne en Israël et se trouve ainsi
ignorer (ou ne pas se soucier de) ses
implications politiques, militaires et
économiques. Justement au moment où à
Palazzo Montecitorio (siège
de la Chambre des députés, NdT)
on discute des missions militaires,
présentées par la majorité comme
indispensables pour la paix
internationale, surtout au Moyen-Orient.
Si quelque député présente une question
sur la participation italienne à la
« Blue Flag », le ministre Mauro
répondra qu’il s’agit, oui, d’une
manœuvre de guerre aérienne, mais
« humanitaire ».
Edition de jeudi 7 novembre 2013 de
il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20131107/manip2pg/05/manip2pz/348224/
Traduit de l’italien par Marie-Ange
Patrizio
[1]
Et peut-être Pologne
: information non confirmée
(NdT pour la version française).
Le sommaire de Manlio Dinucci
Le
dossier Monde
Les dernières mises à jour
|