L'art de la guerre
Le bras long
du groupe Bilderberg
Manlio Dinucci
© Manlio
Dinucci
Mardi 4 juin 2019
Trois
Italiens ont été invités cette année à
la réunion du groupe Bilderberg, qui
s’est tenue à Montreux en Suisse du 30
mai au 2 juin. Aux côtés de Lili Gruber,
l’animatrice télévisée de La7, hôte
désormais permanente du Bilderberg, a
été invité un autre journaliste :
Stefano Feltri, directeur-adjoint du
Fatto Quotidiano dirigé par Marco
Travaglio. Le “troisième homme” choisi
par le Bilderberg est Matteo Renzi,
sénateur du Partito Democratico, ancien
président du Conseil.
Le
groupe Bilderberg, constitué en 1954,
formellement par l’initiative
d’”éminents citoyens” étasuniens et
européens, fut en réalité créé par la
Cia et par le service secret britannique
MI6 pou soutenir l’OTAN contre l’URSS.
Après la guerre froide, il a gardé ce
même rôle en soutien de la stratégie
USA/OTAN.
À ses réunions sont invités chaque année, venant presque exclusivement
d’Europe occidentale et d’Amérique du
Nord, environ 130 représentants du monde
politique, économique et militaire, des
grands médias et des services secrets,
qui formellement participent à titre
personnel. Ils se réunissent à huis
clos, chaque année dans un pays
différent, dans des hôtels de luxe
blindés par de draconiens systèmes de
sécurité militaires. N’est admis aucun
journaliste ou observateur, et aucun
communiqué n’est publié. Les
participants sont tenus à la règle du
silence : ils ne même peuvent pas
révéler l’identité des intervenants qui
leur ont fourni des informations (au
mépris de la “transparence” proclamée).
On sait seulement que cette année on a
surtout parlé de Russie et Chine, de
systèmes spatiaux, d’un ordre
stratégique stable, de l’avenir du
capitalisme.
Les
présences les plus importantes ont été,
comme d’habitude, celle d’Étasuniens :
Henry Kissinger, “figure historique” du
groupe avec le banquier David
Rockefeller (fondateur du Bilderberg et
de la Commission Trilatérale, mort en
2017) ; Mike Pompeo, ancien chef de la
Cia et actuel secrétaire d’État ; David
Petraeus, général et ancien chef de la
Cia ; Jared Kushner, conseiller
(et gendre) du président Trump pour le
Moyen-Orient et ami intime du premier
ministre israélien Netanyahu. Venant à
leur suite Jens Stoltenberg, secrétaire
général de l’OTAN, qui a reçu un second
mandat pour ses services rendus aux USA.
Pendant quatre jours, dans des rencontres secrètes multilatérales
et bilatérales, ces représentants, et
d’autres, des grands pouvoirs (affichés
et occultes) de l’Occident ont renforcé
et élargi le réseau de contacts qui leur
permet d’influer sur les politiques
gouvernementales et sur les orientations
de l’opinion publique.
Les
résultats sont visibles. Sur Il Fatto
Quotidiano Stefano Feltri défend à
couteaux tirés le groupe Bilderberg,
expliquant que ses réunions de tiennent
à huis clos “pour créer un contexte de
débat franc et ouvert, justement en tant
que non institutionnel”, et s’en prend
aux “nombreux complotistes” qui
diffusent des “légendes” sur le groupe
Bilderberg et sur la Commission
Trilatérale.
Il ne
dit pas que, parmi les “nombreux
complotistes” se trouve le juge
Ferdinando Imposimato, président
honoraire de la Cour Suprême de
Cassation (décédé en 2018), qui résumait
ainsi le résultat des enquêtes qu’il
avait effectuées : “Le groupe Bilderberg
est un des responsables de la stratégie
de la tension et donc aussi des
massacres” à commencer par celui de
Piazza Fontana, de concert avec la Cia
et les services secrets italiens, avec
Gladio et les groupes néo-fascistes,
avec la loge P2 et les loges maçonniques
USA dans les bases OTAN.
Dans
ce prestigieux club a été à présent
admis même Matteo Renzi. Étant exclus
qu’ils l’aient invité pour ses talents
d’analyste, reste l’hypothèse que les
puissants du Bilderberg soient en train
de préparer de façon occulte quelque
autre opération politique en Italie.
Feltri nous excusera de nous joindre
ainsi aux “nombreux complotistes”.
Édition de
mardi 4 juin 2019 de il manifesto
https://ilmanifesto.it/le-lunghe-mani-del-gruppo-bilderberg/
Traduit de
l’italien par M-A P.
Note pour la version française
Outre
Henri De Castries, (premier
Français) président du Directoire du
Bilderberg depuis 2012,
les participants
français à la session Bilderberg de 2019
sont :
Azoulay,
Audrey,
Directrice Générale de l’UNESCO,
présente au titre des institutions
internationales.
Barbizet,
Patricia, ex
Pinault, AXA etc. Et
Young
Leader20
(1996) de la
French-American Foundation
(https://fr.wikipedia.org/wiki/French-American_Foundation
où le lecteur trouvera la liste des
journalistes et faiseurs d’opinion anti-complotistes).
Beaune, Clément,
Bureau du Président de la République
(Affaires Européennes et G20).
Buberl, Thomas,
de nationalité allemande mais présent au
titre de Directeur général du groupe
AXA, “leader mondial de l’assurance,
(né) de la volonté d’une poignée de
personnes, avec en tête Claude Bébéar,
dont le rêve était de transformer une
petite mutuelle normande en un leader
mondial de l’assurance” (https://group.axa.com/fr/timeline/aventure-axa
).
Caine, Patrice,
PDG de Thales.
Godement, François,
historien, sinologue, membre de
l’Institut Montaigne.
Parenthèse sur
l’Institut
Montaigne, exemple des
relations entre les “groupes de
réflexion”, cabinets d’affaires, groupes
financiers et/ou industriels, faiseurs
d’opinion et le groupe Bilderberg.
“L’Institut
Montaigne est un groupe de réflexion
français, basé à Paris qui regroupe des
cadres d'entreprises, des
hauts-fonctionnaires, des universitaires
et des représentants de la société
civile. Il est d’orientation “libérale“
nous dit wikipédia.
Il est présidé
par Henri De
Castries, ancien PDG d’AXA et
président du Bilderberg.
Le président
d’honneur et fondateur de l’Institut
Montaigne est Claude Bébéar,
fondateur du groupe AXA.
Autre membre de l’Institut
Montaigne, Nicolas Baverez,
économiste, avocat
chez “Gibson Dunn & Crutcher” “parmi
les dix premiers cabinets juridiques
internationaux basés aux Usa. Baverez a
été fonctionnaire de la Cour des comptes
française, assistant du président de
l’Assemblée Nationale, membre du CA de
Fimalac, une holding active dans des
investissements financiers et
immobiliers, membre du Comité éthique du
Medef et il enseigne à l’Ena (…)”.
Il a été invité au Bilderberg en 2014.
Plume aussi de l’Institut
Montaigne, invité plusieurs fois au
Bilderberg, Dominique Moïsi
intervient fréquemment dans les médias
audiovisuels comme “géopolitologue,
spécialiste des relations
internationales et du Moyen-Orient” ou
économiste, selon les besoins. Il
enseigne dans les écoles formant les
futurs cadres administratifs,
politiques, médiatiques et autres (ENA,
IEP de Paris, EHESS etc.).
Lien solide et durable avec un
autre “groupe de réflexion”, Thierry
de Montbrial a été membre du comité
directeur du groupe Bilderberg de 1976 à
2012. Il prend part, en 1976, à la
création de la French-American
Foundation puis “introduit en
1979 la notion de think tank dans
son pays, en créant l’Institut
français des relations internationales
(Ifri), aujourd’hui classé parmi les
plus influents dans le monde”(
https://thierrydemontbrial.com/biographie/
). Fin de la parenthèse.
Le Maire, Bruno,
Ministre des Finances.
Nora, Dominique,
directrice de la rédaction de L’Obs,
French Young Leader (1996, même
année que Patricia Barbizet, François
Hollande, Anne Lauvergeon, Pierre
Moscovici etc. ).
Pouyanné, Patrick,
Total S.A.
Parmi les Français invités au Bilderberg au printemps et entrés l’été
suivant au gouvernement, on connaît les
cas d’Emmanuel Macron et de Fleur
Pellerin (2014). Bilderberg à Montreux
sera-t-il l’adoubement nécessaire de
Clément Beaune pour devenir ministre des
Affaires étrangères et européennes ?
Pour une connaissance approfondie
du groupe Bilderberg, voir :
Le
groupe Bilderberg, l”élite” du pouvoir
mondial,
du sociologue et économiste
italien Domenico
Moro (traduction M-A
Patrizio) Éditions Delga, Paris 2015 (19
euros).
Avec une “Présentation au lecteur
français” de Bernard Genet (animateur de
comaguer
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