Al Manar
Vie et martyre de Bassel al-Aaraj :
une flamme sur la voie de la Palestine
Leila Mazboudi
Mercredi 8 mars 2017
« Tout ce que tu payes en résistance,
même si tu ne le récoltes pas dans ta
vie, tôt ou tard, tu finiras par le
percevoir. La résistance est lucrative
sans répit ».
Les propos du testament de Bassel Al-Aaraj,
le nouveau martyr sur la voie de la
libération de la Palestine retentissent
encore et font le tour des réseaux
sociaux . Plus forts que de son vivant.
C’est que Bassel n’est pas un martyr
comme les autres. Ni de part sa mort
intervenue ay bout de deux heures
d’affrontements acharnés contre les
soldats de l’occupation israélienne.
Ni de son vivant où il s’est
distingué par ses activités inlassables
pour la Palestine .
« Le prophète combattant,
l’intellectuel révolutionnaire, l’Atlas
de la Palestine, le martyr du verbe
armé,… »
Le commun de ces appellations que lui
donnent ceux qui l’ont connu réside dans
sa culture prolifique, conjuguée à son
engagement infaillible pour la
résistance .
Il savait tout sur sa partie: la
géographie, l’art, les chansons, les
proverbes,… Mais surtout l’histoire de
son usurpation. Depuis l’occupation
britannique et jusqu’à l’occupation
israélienne. Sans oublier toutes les
étapes de la résistance palestinienne,
ses hommes, ses vergers, ses oliviers,
ses rues,… qu’il racontait d’ailleurs,
durant les sorties touristiques qu’il
organisait aux jeunes palestiniens.
De son vivant et jusqu’à sa mort, son
principal souci aura été de garder
vivante la flamme de la Palestine dans
les cœurs et les raisons des
palestiniens.
On lui rapporte qu’il a dit : «
Surtout ne prend pas l’habitude de
regarder le sioniste, pour ne pas que
ton œil s’y habitue avant ta raison.
Fais ce que les habitants de Gaza ont
coutume de faire chaque fois qu’ils
voient un sioniste, ils cherchent une
pierre pour le lapider».
Sa vie, plutôt courte (il est mort à
l’âge de 33 ans), aura donc été une
lutte acharnée contre toute
normalisation avec l’ennemi israélien,
ou un quelconque compromis qui n’a rien
apporté de bon aux Palestiniens.
En plus des manifestations et des
rassemblements, durant toute la phase
qui a précédé son arrestation, on le
voyait aussi durant les meetings de
sensibilisation pour la résistance. Il
n’omettait pas non plus d’écrire aussi
les articles.
L’Autorité palestinienne lui en
voulait son activisme infatigable.
Surtout sa participation en 2012 aux
manifestations de protestation à la
visite du ministre de la sécurité
israélien Shaoul Mofaz en Cisjordanie
occupé. Et ce sont ses forces de
sécurité qui l’ont arrêté la première
fois, ainsi que cinq autres
Palestiniens, en avril 2016, l’accusant
de concocter des opérations armées
contre les colons israéliens.
L’accusation n’étant pas assez étayée,
il est libéré 6 mois plus tard. Non sans
une grève de la faim.
Accusé d’être l’un des dirigeants du
Mouvement d’action des jeunes
palestiniens, un mouvement de
protestation pacifique soutenant
l’Intifada d’Al-Quds qui s’est marquée
par des opérations de résistance
solitaires , il se savait traqué par les
occupants israéliens. Et il n’était pas
question pour lui de se rendre, ni
d’être arrêté de nouveau, comme cela a
été le cas de ses cinq compagnons de
prison.
Il préparait son Départ.
Il n’est jamais revenu à la maison
familiale, perquisitionnée
d’innombrables fois depuis sa libération
et se déplaçait d’un endroit à l’autre.
Les deux derniers mois de sa vie, il les
a vécus dans un appartement qu’il a loué
sous une fausse identité suédoise. On ne
sait pas encore comment il a pu être
retrouvé.
Mais c’est là qu’il a livré son
premier et dernier combat armé contre
les soldats israéliens, jusqu’à la
dernière balle de ses trois
mitrailleuses. Les soldats de
l’occupation ont du entrer à la maison
pour retirer son corps meurtrie.
Parmi ses quelques livres et cahiers
éparpillés dans son appartement, on a
retrouvé son testament, écrit à la hâte,
à la dernière minute, sur une petite
feuille.
« Salutations à l’arabité, à la
patrie, à la libération.
Si vous lisez ces mots, cela voudra
dire que je suis mort, que mon âme s’est
élevé vers son créateur. Je prie Dieu
pour Le rencontrer avec un cœur pur,
sincèrement non fuyant, et sans le
moindre pouce de duplicité.
Comme c’est difficile d’écrire le
testament. Des années et moi je
contemple les testaments que les martyrs
ont laissés. Ils m’ont toujours intrigué
: concis, cursif, sans aucune éloquence
et répondant à peine à nos questions sur
le martyre.
Je vais maintenant droit vers mon
trépas, en toute conviction d’avoir
trouvé mes réponses.
Mon Dieu quel imbécile j’ai été. Y
a-t-il de plus éloquent que l’acte du
martyre ? J’aurais dû l’écrire depuis
plusieurs mois. Mais ce qui m’attarda
est sans doute vos questions à vous, les
vivants encore. Mais pourquoi devrai-je
répondre à votre place. Cherchez
vous-mêmes.
Quant à nous, gens du sépulcre, nous
ne cherchons désormais plus que la
Miséricorde de Dieu ».
Ce 6 mars 2017, Bassel Al-Aaraj s’est
sacré lui-même une flamme sur la voie de
la Palestine.
Le sommaire de Leila Mazboudi
Les dernières mises à jour
|