Le Saker
La Turquie continue de protéger État
Islamique …
Moon of Alabama
Vendredi 8 novembre 2019 Et cela va mal
finir pour elle
Par
Moon of Alabama − Le 6 novembre 2019
Lorsque la
guerre contre la Syrie a commencé, Il y
a huit ans et demi, la Turquie a joué le
rôle le plus important. Des armes ont
été introduites clandestinement, venant
de Libye et passant par la Turquie pour
être livrées aux « rebelles syriens ».
Au fil des ans, des dizaines de milliers
de djihadistes étrangers ont traversé la
Turquie pour se joindre aux divers
groupes qui luttaient contre le
gouvernement syrien. Quand État
islamique (EI) a été créé, cela en a
attiré encore plus.
Lorsque les
États-Unis ont changé de stratégie et
ont commencé à combattre EI, ils ont
exhorté la Turquie à tarir ce flot de
nouveaux combattants. La Turquie l’a
fait, dans une certaine mesure, après
que plusieurs attentats à la bombe,
revendiqués par EI, eurent tué des
dizaines de personnes dans le pays. Mais
des événements récents montrent que la
Turquie ne voit toujours pas EI comme un
adversaire. Ses dirigeants ne craignent
pas non plus les autorités turques.
Le 26 octobre 2019,
le président Donald Trump
annonçait que les forces spéciales
américaines avaient tué le dirigeant
d’EI, Abu Bakr al-Baghdadi. Bagdadi et
deux de ses femmes ont été retrouvés
dans une maison du village de Barisha,
dans le gouvernorat d’Idleb, en Syrie.
Barisha n’est qu’à 5 kilomètres de la
frontière turque et de la ville turque
de Reyhanli. La région d’Idleb (vert
plus foncé) est sous le contrôle des
djihadistes, mais la Turquie y possède
plusieurs avant-postes.
Le Guardian
a rapporté que l’entourage de
Bagdadi avait rejoint Idleb, depuis
l’est de la Syrie, en passant par la
Turquie :
Des responsables
irakiens affirment qu'à la mi-septembre,
ils avaient identifié un Syrien qui
avait été utilisé pour faire passer
clandestinement les femmes de deux
frères de Bagdadi, Ahmad et Jumah, vers
la province d'Idlib, via la Turquie. Le
même trafiquant avait déjà aidé les
enfants de Bagdadi à quitter l’Irak. Les
agents des services de renseignement
irakiens disent qu'ils avaient réussi à
à faire coopérer l'homme et la femme que
l'on croyait être son épouse, ainsi que
l'un des neveux de Bagdadi, pour leur
fournir des informations sur la route
que ce dernier avait empruntée et la
destination des personnes voyageant avec
lui. C'était une information
exceptionnelle, et elle a rapidement été
transmise à la CIA.
Le lendemain de la
mort de Bagdadi, les forces américaines
ont tué le porte-parole d’EI, Abu
al-Hassan al-Muhajir, dans le village d’Ayn
al-Bayda, près de Jarabulus. La région
de Jarabulus en Syrie est sous contrôle
turc (vert clair).
Le 28 octobre 2019,
des hélicoptères américains ont de
nouveau atterri à Jarablus et ont
capturé quelqu’un ou exfiltré un agent :
Within Syria @WithinSyriaBlog
-
19:33 UTC - 28 oct 20194-Selon des sources
locales, l'un des hélicoptères de la
coalition a atterri pendant une dizaine
de minutes près du pont al-Shuiyukh, au
sud de la ville de Jarabulus.
5-Certains
militants affirment que des hélicoptères
de la coalition ont arrêté un membre
d’EI, originaire d'Alep, la famille du
terroriste a également été évacuée par
la coalition.
6-Les hélicoptères
de la coalition ont terminé l'opération,
aucun coup de feu n'a été entendu, du
moins on le suppose. Les hélicoptères
sont retournés dans les zones contrôlées
par les Syrian Democratic Forces
(SDF), sur la rive est de l'Euphrate.
La Turquie possède
des drones, des avant-postes militaires
et écoute les communications dans
l’ensemble de ces régions. Elle dispose
de nombreux moyens de renseignement sur
le terrain. Et personne ne savait que
les dirigeants d’EI vivaient dans cette
région ?
Les trois
opérations américaines ont été lancées à
partir de l’Irak ou de zones contrôlées
par les Kurdes dans le nord-est de la
Syrie, même si le temps de vol depuis la
base américaine d’Incirlik, en Turquie,
aurait été beaucoup plus court. Il
semble que les États-Unis n’aient pas
fait confiance en leur allié de l’OTAN
et craignait qu’il n’apprenne
prématurément l’existence de telles
missions.
Après avoir été
humiliée pour sa négligence délibérée à
l’égard des activités d’EI dans les
zones qu’elle contrôle, la Turquie a
pris quelques mesures de diversion.
Le 1er
novembre, elle
a capturé, à Kilis, en Turquie,
Fatima Benmezian, membre belge de État
Islamique. Benmezian s’était échappée
d’un camp de réfugiés dans le nord-est
de la Syrie, il y a quelques semaines,
quand celui-ci a été bombardé par la
Turquie.
Le 4 novembre, les
forces turques
ont capturé la sœur de Bagdadi,
Rasmiya Awad, avec son mari et sa
belle-fille. Ils vivaient dans une
remorque porte-conteneurs près de la
ville d’Azaz, dans la province d’Alep.
Azaz n’est qu’à quelques kilomètres au
sud de Kilis et sous contrôle turc.
Aujourd’hui, la
Turquie a prétendu
avoir capturé une autre femme de
Bagdadi, mais sans dire où elle avait
été trouvée.
Aucune de ces
personnes que la Turquie a arrêtées n’a
de valeur opérationnelle. Ce sont des
personnes sans valeur.
Mais il est
vraiment remarquable que tous ces
membres de EI vivaient dans des zones
contrôlées par la Turquie, près de la
frontière turque. Faudrait-il croire
qu’ils aient choisi une région où ne se
trouve aucun autre membre de EI ? Il est
plus probable qu’il y ait encore
beaucoup d’autres membres de EI qui
vivent dans ces zones frontalières de la
Syrie, qui sont plus ou moins sous
contrôle turc.
Certains d’entre
eux
voyagent même souvent en Turquie :
Un frère du
dirigeant de EI, Abu Bakr Al Baghdadi,
s'est rendu plusieurs fois à Istanbul,
la plus grande ville d'Europe, depuis le
nord de la Syrie, dans les mois
précédant la mort du chef terroriste,
agissant comme l'un de ses messagers de
confiance pour fournir et récupérer des
informations sur les opérations du
groupe en Syrie, Irak et Turquie, selon
deux responsables irakiens des
renseignements. ...
"Nous observions
quelqu'un qui servait de messager à Al
Baghdadi et il faisait de fréquents
allers retours en Turquie", a
déclaré un haut responsable du
renseignement irakien. "C'était le
frère d'Al Baghdadi." ...
Un agent des
renseignements irakiens qui a travaillé
directement sur l'opération de traque de
Juma a déclaré que le frère du chef
terroriste a continué à réapparaître
dans les mois suivants, jusqu'à sa
dernière visite enregistrée à Istanbul
en avril. Il serait alors retourné dans
le nord-ouest de la Syrie, des mois
avant que l'emplacement de la planque de
son frère ne soit révélé. Il est peu
probable qu'il ait été introduit
clandestinement de l'autre côté de la
frontière, a dit l'agent, mais qu'il
l'ait plutôt traversé librement. ...
"Il est
impossible pour les services de
renseignement turcs d’ignorer sa
présence à cinq ou sept kilomètres de la
frontière turque", a déclaré un
ancien officier militaire turc de haut
rang.
De toute évidence,
la Turquie est en train de devenir un
autre Pakistan. Ce pays est allé de mal
en pis lorsqu’il a soutenu une
insurrection islamiste contre le régime
communiste de son pays voisin
[l’Afghanistan, NdT]. Cette guerre a
radicalisé des millions de personnes à
l’intérieur de ses propres frontières.
De nombreuses familles de combattants se
sont installées au Pakistan, ce qui a
renforcé l’extrémisme dans le pays. Cela
a parfois mené à une sorte de guerre
civile et des insurrections dans
plusieurs provinces du Pakistan.
Erdogan, le
président turc, semble croire que le
fait de protéger les membres de EI et
d’autres radicaux ne fera pas de mal à
son pays. En avril dernier, EI publiait
une vidéo dans laquelle on voyait
Bagdadi : À un moment donné,
l'une des trois autres personnes lui
donne un dossier avec des plans. Le
dossier porte l'inscription Wilayat
Turkey. (Wilayat
signifie une province d'État islamique).
Puis ça :
Lindsey Snell @LindseySnell
-
19:48 UTC - 6 nov, 2019 Il y a 5000 membres
de EI, provenant de 28 pays, dans cette
prison gérée par les SDF à Hasakah. Nous
avons demandé à un membre turc de EI
s'il voulait retourner en Turquie et il
a répondu "evet !" [Oui en
turc, NdT].
Il dit connaître de
nombreux membres de EI qui sont rentrés
en Turquie, ont été détenus pendant une
semaine environ, puis libérés.
Erdogan pense qu’il
peut garder les cellules de EI sous
contrôle dans son pays. C’est peu
probable. Je crains qu’au cours des
prochaines années, la Turquie ne vive un
réveil plutôt brutal.
Moon of Alabama
Traduit par Wayan,
relu par Jj pour le Saker Francophone
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