Le Saker
L’Arabie Saoudite reconnait sa défaite
au Yémen …
Moon of Alabama
Dimanche 1er septembre 2019
… et commence à chercher un moyen de
faire la paix.
Par
Moon of Alabama – Le 29 aout 2019
Il y a deux
semaines,
nous écrivions que la guerre contre
le Yémen prendrait bientôt fin. Les
Saoudiens ont perdu leur allié, ils ont
perdu la guerre et auront à faire la
paix. C’est bien ce qu’ils font
maintenant. Mais les combats au Yémen se
poursuivront jusqu’à ce que ce pays
trouve un nouvel équilibre.
Aujourd’hui,
l’armée de l’air des Émirats arabes unis
a bombardé les forces yéménites
soutenues par son « allié »
l’Arabie saoudite :
Le gouvernement
yéménite, internationalement reconnu, a
accusé l'armée de l'air émiratie
d'attaquer ses troupes, jeudi, alors
qu'elles se dirigeaient vers la ville
portuaire d'Aden, au sud du pays, pour
combattre les séparatistes soutenus par
les Émirats arabes unis. Les frappes
aériennes ont tué au moins 30 militaires
des forces gouvernementales, a indiqué
un commandant yéménite. ...
Le colonel Mohamed
al-Oban, commandant des forces spéciales
du gouvernement de la province d'Abyan,
a déclaré que les troupes étaient sur la
route, se dirigeant d'Abyan vers Aden,
jeudi, lorsque les frappes ont eu lieu,
tuant au moins 30 personnes. ...
Au moins six raids
ont été effectués par des avions de
guerre émiratis autour de la capitale
temporaire, selon des sources militaires
gouvernementales qui ont demandé à
rester anonymes.
Les forces
séparatistes du Sud, sous l’égide du
Conseil de transition du Sud et
soutenues par les Émirats arabes unis,
détiennent Aden. Entre 1967 et 1990, le
sud du Yémen, alors appelé République
démocratique populaire du Yémen, a été
séparé de la zone montagneuse du nord.
Après avoir été réuni avec le nord du
Yémen, le sud du pays a été négligé,
même si son désert oriental renferme la
majeure partie des ressources en
hydrocarbures du pays.
Depuis 2015, la
coalition entre l’Arabie saoudite et les
Émirats arabes unis, soutenue par les
États-Unis et la Grande-Bretagne, a mené
une guerre contre les houthis du nord du
Yémen. La coalition est en train de
s’effondrer. Les deux pays prétendaient
lutter contre les houthis, qui
contrôlent la capitale Sanaa, et
soutenir le gouvernement « légitime »
internationalement reconnu du
« président » Hadi. Mais les deux
pays avaient dès le début des objectifs
de guerre plus égocentriques.
Les Saoudiens
wahhabites veulent un gouvernement
yéménite qui ne soit pas contrôlé par le
Zaydi-Shia Houthi contre lequel ils ont
mené des dizaines de guerres dans deux
provinces que l’Arabie saoudite a
annexées. Ils veulent également
contrôler le pétrole du Yémen et un
oléoduc reliant la région pétrolière
saoudienne à un port du Yémen. Cela
aiderait les exportations pétrolières
saoudiennes à éviter le détroit d’Ormuz
contrôlé par l’Iran.
Les Émirats arabes
unis sont très actifs dans le secteur
portuaire. Ils veulent contrôler le port
stratégique d’Aden et d’autres ports
yéménites situés sur la côte sud.
N’ayant pas de frontière directe avec le
Yémen, ils se moquent totalement de
savoir qui contrôle le reste du pays.
Le dirigeant
émirati, Mohammad bin Zayed (MbZ), n’est
pas un monarque absolu. Il est le fils
de l’émir d’Abu Dhabi, l’un des sept
émirats qui forment les EAU. Sa
politique étrangère agressive, avec des
engagements militaires au Yémen, au
Soudan, en Somalie et en Libye, a été
critiquée par les dirigeants des autres
émirats. Les guerres sont coûteuses et
mauvaises pour les affaires courantes.
L’alliance de MbZ avec le prince
saoudien Mohammad bin Salman (MbS) était
considérée comme dangereuse. Les
Saoudiens veulent que les États-Unis
fassent la guerre à l’Iran, mais les
Émirats arabes unis, et en particulier
Dubaï, seraient les victimes d’une telle
guerre.
En juin, les émirs
ont décidé de changer de cause. Les
Émirats arabes unis se sont retirés de
la guerre en cours au Yémen et ont
commencé à faire amende honorable avec
l’Iran. Ils espéraient que les
séparatistes du sud qu’ils avaient
formés garderaient Aden sous contrôle et
continueraient à obéir à leurs ordres.
Mais les saoudiens et le
« gouvernement légitime » d’Hadi
qu’ils contrôlent ne sont pas d’accord
avec cela.
Les Saoudiens sont
extrêmement
fâchés que les EAU aient changé de
cap :
Mais ce mois-ci,
dans son palais de la Mecque, le roi
saoudien Salman a pris la décision
inhabituelle d'exprimer son "extrême
irritation" envers les EAU, son
partenaire arabe le plus proche, selon
des sources familières avec le sujet.
Ce commentaire
semble être la preuve d'une fissure dans
l'alliance, qui est dirigée dans la
pratique par le fils du roi, le prince
héritier Mohammed bin Salman (MbS), et
le dirigeant de facto des EAU, Cheikh
Mohammed bin Zayed al-Nahyan (MbZ). ...
Selon deux sources
yéménites, et une autre informée de la
réunion, tenue le 11 août, le roi a
exprimé son mécontentement lors d'une
conversation avec le président Abd-Rabbu
Mansour Hadi, chef du gouvernement
yéménite soutenu par les Saoudiens.
A Aden, les forces
du gouvernement Hadi venaient d'être
mises en déroute par des troupes
soutenues par les EAU, alors que les
alliés nominaux du sud du pays se sont
retournés les uns contre les autres,
dans la lutte pour le pouvoir.
Les Saoudiens
doivent mettre fin à la guerre contre
les houthis qui a été lancée à la
demande de son prince héritier. La
guerre a coûté aux Saoudiens une énorme
somme d’argent, mais ils la perdent
quand même. Pas plus tard qu’hier, 25 de
leurs militaires
ont été tuées dans une embuscade
menée par les houthis. Avec l’aide de
l’Iran, les houthis ont acquis des
missiles et des drones à longue portée
et ils les utilisent maintenant dans des
tirs qui atteignent les terres
saoudiennes
en profondeur :
Dès le 24 août, les
houthis ont déclaré que leurs forces
avaient mené deux frappes de drones sur
la base aérienne du roi Khaled, à Khamis
Mushayt, et l'aéroport d'Abha, dans le
sud de l'Arabie saoudite. Le lendemain,
une autre série de frappes de drones
était signalée sur les deux mêmes
cibles.
Le même jour, dix
missiles balistiques Badr-1 auraient été
tirés sur la ville saoudienne de Jizan.
Cependant, les autorités saoudiennes ont
rapporté que les systèmes de défense
aérienne du pays avaient abattu six
missiles balistiques.
Le 26 août, un
autre missile balistique, le tout
nouveau missile Nakal, aurait été tiré
sur des troupes saoudiennes près de
Najran. Plus tard dans la journée, une
autre série de drones aurait été
interceptée près de la base aérienne du
roi Khaled, à Khamis Mushayt.
Pendant que les
drones frappaient la base aérienne du
roi Khaled, une autre attaque a
peut-être eu lieu près de Riyadh, avec
les nouveaux drones suicide Samad-3. Si
cela se confirme, ce sera la deuxième
fois que des drones houthis frappent la
capitale saoudienne. La première a été
une frappe signalée le mois dernier
contre une usine d'Aramco, près de la
capitale.
Le 27 août, les
houthis ont inauguré un autre nouveau
missile balistique, le Qasem-1, en
frappant les troupes saoudiennes
positionnées près de la frontière
yéménite à Najran. Un autre drone a
également été intercepté et détruit par
les forces saoudiennes au-dessus de
Khamis Mushayt.
Et hier, un nouveau
missile de croisière, le Quds-1, a été
lancé vers l'aéroport d'Abha. Cependant,
les autorités saoudiennes ont déclaré
que le missile avait été intercepté et
détruit.
Le roi saoudien a
dû reconnaître qu’il n’a plus aucune
chance de gagner la guerre. Il semble
qu’il ait demandé à l’administration de
Trump
d’élaborer un accord avec les
houthis :
L'administration
Trump s'apprête à entamer des
négociations avec les rebelles houthis
soutenus par l'Iran afin de mettre un
terme à la guerre civile qui dure depuis
quatre ans au Yémen, informait le
Wall Street Journal de mercredi.
Cet effort viserait
à convaincre l'Arabie saoudite de
prendre part à des pourparlers secrets
avec les rebelles d'Oman pour aider à
négocier un cessez-le-feu au conflit qui
est apparu comme un élément frontal dans
la guerre régionale par procuration
entre Riyad et Téhéran.
Le frère du prince
héritier est
venu à Washington pour préparer les
pourparlers :
Le prince Khalid
rencontrait mercredi le secrétaire
d'État, Michael Pompeo. Ils ont discuté
du "soutien des États-Unis à un
règlement négocié entre le gouvernement
de la République du Yémen" et un
groupe dissident connu sous le nom de
Southern Transitional Council, selon
une déclaration du porte-parole du
département d'État, Morgan Ortagus.
Le gouvernement de
Hadi compte pour rien. Le Conseil de
transition du Sud exigera
l’indépendance du Nord. Les houthis
exigeront le contrôle du Nord et des
réparations pour la guerre que les
Saoudiens ont menée contre eux.
L’infrastructure du
Nord Yémen est en grande partie
détruite. Il en coûtera plusieurs
dizaines de milliards de dollars pour
reconstruire ce que la guerre aérienne
saoudienne a détruit pendant cinq ans.
Comme les houthis peuvent continuer à
harceler les Saoudiens à volonté, jusque
dans leur capitale, les Saoudiens
n’auront d’autre choix que de payer ce
que les houthis demandent.
C’est le prince Mohammad bin Salman qui
a lancé la guerre contre le Yémen peu
après son arrivée au pouvoir. Il était
censé vaincre les houthis en quelques
semaines. Cinq ans plus tard, et après
avoir dépensé au moins 100 milliards de
dollars, les Saoudiens ont perdu cette
guerre.
Le Roi tiendra-t-il
son fils pour responsable de
l’importante perte d’argent et de
prestige qu’il a causée ?
Moon of Alabama
Traduit par Wayan,
relu par Jj pour le Saker Francophone
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