Russie politics
Seconde Guerre mondiale :
la Russie
déclassifie des documents sur la
libération
de l'Europe par l'Armée rouge
Karine Bechet-Golovko
Dimanche 20 octobre 2019
Le ministère russe
de la Défense continue à déclassifier et
publier nombre de documents concernant
la Seconde Guerre mondiale et en
particulier la libération de l'Europe
par l'Armée rouge. Il est vrai que la
tentative de réécriture de l'histoire
voulant rabaisser l'URSS au rang des
pays agresseurs pour laisser la place
aux Etats-Unis et faire oublier la
collaboration plus qu'active des pays
européens avec les nazis, dans un
contexte d'acculturation des
populations, obligent à une réponse. Les
documents sont accessibles, les
personnes intéressées peuvent les
consulter. Ce mouvement de
réécriture de l'histoire que nous
observons s'explique par un changement
des rapports de forces sur la scène
internationale. L'URSS, vainqueur
incontesté à l'époque, a été
juridiquement remplacée par la Russie
dans les organismes internationaux, sans
avoir - objectivement - le même capital
politique. Avec le temps, les failles se
sont approfondies et l'occasion fut trop
belle pour le clan atlantique d'utiliser
cet état de fait afin de reconstruire à
leur avantage le discours sur la Seconde
Guerre mondiale, dont les conséquences
sont redevenues un enjeu géostratégique
avec la chute de l'URSS. Comme si le
monde atlantique revivait une version
hollywoodisée de cette tragédie
mondiale, le discours - adapté au niveau
de l'époque - se transforme un joli
conte pour les enfants occidentaux et
leurs petits amis.
Face à cette
dangereuse tendance, le
ministère russe de la défense rend
public de nombreux documents d'époque. A
l'occasion des 75 ans de la libération
de Riga en 1944, nombre de documents
concernant les crimes nazis en Lettonie
ont été publiés
(voir ici le site du ministère russe de
la défense), entre autres sur le
camp d'extermination de Salaspils.
La libération de
Tallinn en Estonie par l'Armée rouge et
l'accueil de la population a également
fait l'objet de publications sur le site
du ministère russe de la Défense (voir
ici). En Estonie aussi, les crimes
des nazis furent conséquents et les
Allemands tentèrent "d'effacer" les
traces face à l'avancée de l'Armée rouge
par des massacres de civils et de
prisonniers dans les camps
d'extermination :
"En septembre, les
nazis ont fusillé et brûlé dans la
région de Klooga - Rand plus de 3 000
personnes, dont 800 Estoniens. Pendant
plusieurs jours ici la fumée stagnait,
autant que l'odeur des cadavres."
Parmi ces 3 000
personnes, il y avait des civils, des
femmes, des enfants, des prisonniers de
guerre ... A l'arrivée des troupes
soviétiques, les nazis ont finalement
quasiment exterminé tous les prisonniers
des camps.
Et c'est justement
dans ces pays baltes que l'on voit la
plus grande force de réhabilitation de
la collaboration nazie, avec les Marches
annuelles des bourreaux d'alors, devenus
les héros d'aujourd'hui.
Le ministère de la
Défense a également publié les documents
concernant la libération de Bucarest (voir
ici) par les Soviétiques en
collaboration avec l'armée roumaine et
concernant la libération de Minsk (voir
ici) "d'où il était possible de
voir Berlin".
Maintenant, le
ministère vient de publier les documents
concernant la libération de Belgrade, en
collaboration avec l'armée populaire de
libération de la Yougoslavie (voir
ici). Lors de cette bataille, 2 900
membres au moins de l'armée populaire de
libération de la Yougoslavie sont morts
et environ un millier de soldats
soviétiques. Une partie des documents
est ici aussi consacrée aux crimes
commis par les nazis contre les Serbes
dans le camp de concentration de la
ville de Ruma, selon le témoignage de
l'officier allemand Carl Weimann. Le
commandement allemand des forces armées
en Serbie avait déclaré que pour chaque
soldat allemand tué, 100 Serbes seraient
fusillés et 50 pour un blessé Allemand.
Le camp de Ruma contenait environ 40 000
personnes. Chaque jour, les nazis lisait
à la population la liste des Serbes
condamnés à être fusillé.
Pour ne pas
oublier, il est important de rappeler
régulièrement les faits. L'homme oublie
vite ce qui le dérange. Ou ce qui
n'entre plus dans le cadre - rétréci -
des sociétés postmodernes est
délicatement gommé.
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