Créé en 1939, le
TLF, ce théâtre unique en langue
française à Moscou, est menacé de
fermeture, faute de moyens, d'absence de
publicité et donc de spectateurs. Je
n'ai pas l'habitude de "faire de la
publicité" et ce n'en est pas: c'est
juste un coup de coeur. Pour protéger
ces petites troupes historiques, ces
âmes de la scène, loin des salles
combles et des projecteurs, ces
idéalistes qui sont de moins en moins
nombreux et dont nous avons de plus en
plus besoin.
Il y a quelques
jours, j'ai reçu un mail d'un ami,
m'apprenant deux choses: qu'un théâtre
en langue française à Moscou risquait de
fermer et qu'il existait un théâtre en
langue française à Moscou. Française,
habitant à Moscou depuis longtemps, je
n'en avais jamais entendu parler.
Le
TLF, théâtre en langue française a
été fondé en Russie par une française
Alice
Oran, sur une idée de Romain
Rolland. Alice Oran, ou Alexandra
Oranovskaya, était un membre de l'Union
soviétique des écrivains, célèbre
traductrice, elle dirigeait un club de
lecture en français dans la Bibliothèque
de littérature étrangère. C'est là que
sera présentée la première pièce, le 12
décembre 1939, Cyrano de Berjerac, dans
la traduction de Tatiana Chtchepkina-Koupernic,
écrivain et poétesse russe. Ce sera la
date de naissance du TLF.
Après une période
d'errance dans différentes salles, il
s'est installé à la
Maison municipale des enseignants.
Il s'agit d'un théâtre amateur, les
artistes sont bénévoles et la fille de
la fondatrice, Elena Oranovskaya, tient
encore aujourd'hui la troupe à bout de
bras.
Ils ont joué des
auteurs classiques français, évidemment,
Molière, Beaumarchais, Pagnol etc. Mais
aussi donnent accès à la littérature
russe en français, comme avec Pouchkine.
Mais faute de
financement, pas de publicité donc peu
de spectateurs. Et l'ultimatum est tombé
formulé par la nouvelle directrice de la
Maison des enseignants, Nina
Minko, également
députée à la Douma locale de la
ville de Moscou: si les spectacles ne
font pas salle pleine, la scène leur
sera retirée. Il semblerait que cette
personne, grande partisane de "l'optimisation"à
l'école, ce à quoi elle travaille depuis
1991 dans l'administration moscovite de
l'enseignement, veuille développer les
mêmes méthodes pour le théâtre.
C'est un peu pour
les mêmes raisons que le cinéma russe
contemporain ne produit quasiment plus
que des blockbusters - ils font salle
pleine.
Le TLF met en scène
des spectacles amateurs en français,
quand la mode est à l'anglais, sans
grands moyens, avec un accent que l'on
peut déclarer comme étant à couper au
couteau ou revêtant un charme fou, selon
que vous voudrez les descendre ou que
vous apprécierez l'exploit. En plus, les
acteurs n'ont pas la bonne idée de se
déshabiller au milieu d'une scène, il
n'y a pas de danse au ras du sol la
moitié du temps. Il y a du texte. Des
textes qui ne sont pas dégradés,
transformés, mutilés pour tenir compte
des diktats de la post-modernité, de la
post-culture. Bref, totalement à
contre-temps. Aucun intérêt à financer.
Encore moins à bloquer une scène.
Mais c'est l'un des
rares véritables lieux de croisement de
nos cultures, française et russe, et de
nos langues. Au-delà des grands projets
politiques, annoncés en grande pompe,
qui ne fonctionnent pas. Ici, ça tourne.
Il y a une véritable volonté. Il y a des
acteurs passionnés. Un metteur en scène
un peu fou, Yossif
Nagle, élève de Boris Chédrine. Il
faut le soutenir!
Et il y a des
spectacles pour les grands et les
petits. Venez nombreux les découvrir rue
Pouchetchnaya, 4. Vous pouvez vous
renseigner au +7 495 315 28 70.
Espérons que
ce théâtre ne perdra pas sa scène, nous
avons plus besoin de passion que
d'optimisation!
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