Russie politics
Le G7 est mort, que faire d'un G6 ? Rien
Karine Bechet-Golovko
Lundi 11 juin 2018
Un billet d'humeur (si, si, bonne) : Le
G7 est mort, que faire d'un G6 ? Rien
Avec sa
décontraction et sa violence
habituelles, le Président américain
vient d'écraser sous son talon le G7,
face à une UE déconfite et trop faible
pour réagir, un Canada dépassé et un
Japon qui renforce ses liens avec la
Russie. Pendant ce temps, l'Organisation
de coopération de Shangaï, réunie en
Chine, annonce une santé de fer. Que
faire d'un G6 qui n'intéresse personne?
Le modèle global mis en place par les
Etats-Unis à la fin de la Seconde Guerre
mondiale s'écroule sous nos yeux. Les
Etats-Unis modifient les règles du jeu.
Finalement, ce ne sont pas les Etats
qui auront fanatiquement tout sacrifié
au culte des "nouvelles technologies
écologiques" qui auront leur place
demain, mais ceux qui, appuyés sur une
nation solide, auront la puissance de
négocier.
Le G7 s'annonçait
difficile, il fut fatal. Malgré des
négociations particulièrement tendues,
Trump a donné un contre-ordre : ne pas
se joindre au communiqué final, Trudeau
n'ayant pas suivi les règles du jeu. Le
G7 s'est alors immédiatement transformé
en G6, puisque la crise n'est pas
conjoncturelle, mais essentielle. Les
Etats-Unis remettent en cause les règles
du jeu. Les règles qu'ils avaient imposé
eux-mêmes alors, des règles qui ne leur
sont plus favorables, qui coûtent chères
à l'économie américaine, à la société,
aux entreprises, donc aux citoyens.
Et la presse
américaine ne s'y trompe pas en titrant
sur la remise en cause par Trump de ce
qui est maintenant "l'ancien modèle", le
modèle global, qui n'est plus bénéfique
pour l'économie américaine.
Le Washington Post
s'intéresse aux anciens alliés des
Etats-Unis, ces pays satellites pourtant
si dévoués à l'ordre global
américano-centré, que justement Trump ne
veut plus payer, il préfère régler les
problèmes de sécurité de manière
bilatérale, entre Etats souverains,
comme avec la Corée du nord.
Mais combien
reste-t-il encore d'Etats souverains? La
mondialisation fonctionnait au prix du
renoncement des pays à leur souveraineté
en contrepartie d'une protection
américaine, payée par la priorité des
intérêts stratégiques américains. Or,
comme le titre le New York Times, c'est
ce monde que Trump détruit.
Le message est
répété, également en ce qui concerne
l'OTAN:
Or, les nouvelles
règles que Trump veut imposer supposent
des Etats souverains et des dirigeants
réels, non fictifs, aptes à se battre
pour défendre l'intérêt de leur pays.
Combien en reste-t-il aujourd'hui?
Les pays du G7,
incapables de s'adapter à cette nouvelle
réalité, fossilisés dans l'ordre de
l'après-guerre, tentent un G6. Ou un
G6+1. Bref, un monde global sans les
Etats-Unis. Car la globalisation
hors-sol, comme une horde de parasites,
a quand même besoin d'un corps et ce
grand corps américain vient de les
trahir. Ils sont face à une alternative:
soit Trump n'est pas réélu pour un
second mandat et ils ont une chance de
survivre, soit il est réélu et doivent
transférer le corps de la globalisation
ailleurs. Mais où? La seule solution est
l'UE, mais le corps est étroit et
faible. Très régional, sans défense,
sans moyens d'action, réduit pour une
globalité.
Mais c'est aussi
pour éviter ce risque de résurgence de
ce qui est l'ennemi premier de Trump, la
globalisation, qu'un tournant en
politique internationale a été pris par
les Etats-Unis. L'on se rappellera
l'ambassadeur américain en Allemagne
déclarer que désormais ils soutiendront
les mouvements de droite. Choc. Mais pas
"choc" qu'il y ait un soutien extérieur,
ces mouvements de gauche sont arrivés
ainsi au pouvoir, choc de la rupture
idéologique, de ne plus être entretenus.
Trahison après tant de services rendus.
Et tant de services qu'ils sont encore
prêts à rendre.
L'enfant chéri de
la nouvelle Amérique pourrait ne plus
être l'Allemagne, ni la France, mais
l'Italie. La nouvelle Italie, qui
revendique une souveraineté au sein de
l'UE. Qui revendique une Europe des
Etats, ayant droit à leurs intérêts
stratégiques. L'Italie, qui peut être le
maillon faible de l'UE. Mais un pays
dans la ligne de mire, que l'UE va
tenter à n'importe quel prix de
transformer sur le modèle Tsipras.
Alors, l'intervention de Trump soutenant
officiellement ce nouveau gouvernement
va lui donner du poids.
La crise de l'UE
est bien ici. Elle est trop petite pour
assumer seule la mondialisation, qui
deviendrait régionale. Elle est trop
faible pour défendre ce qui devient
"l'ancien modèle". Elle est dépassée
pour en proposer un autre, qui
satisfasse les intérêts des pays
membres.
Et face à cette
crise, l'on a pu assister à la réunion
des pays de
l'Organisation de Shangai, réunion
très constructrice entre pays qui
défendent leurs intérêts propres. Deux
mondes qui s'affrontent. L'un qui se
dépérit, l'autre qui se relève. Et
l'excellent réaction du porte-parole du
Kremlin concernant la proposition de
réintégrer la Russie dans le G7: la
Russie a aujourd'hui d'autres priorités.
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