Russie politics
L'on attend toujours les félicitations
occidentales
pour la libération de
Palmyre
Karine Bechet-Golovko
Lundi 6 mars 2017
La
semaine dernière a été marquée par un
grand évènement: l'armée syrienne, avec
l'appui aérien russe, a pu libérer pour
la deuxième fois la ville symbolique de
Palmyre. Pourtant, cette bonne nouvelle
n'a étrangement pas provoqué d'euphorie,
plutôt une surprenante réaction ironique
face à ce qui est une défaite importante
pour Daech.
En
2015, les extrémistes de Daech
s'emparent de la ville de Palmyre, le
joyau du désert. Après une importante
campagne, l'armée syrienne avec l'aide
de l'armée russe réussissent à libérer
la ville en mars 2016. Pour célébrer
cette victoire contre la barbarie, un
grand concert est organisé. Mais
ensuite, la bataille d'Alep occupe
toutes les énergies et des groupes
islamistes sont gentiment sortis de
Mossoul, facilitant la reprise de
Palmyre par les extrémistes en décembre.
La semaine dernière, après une longue
progression, les forces syriennes
reprennent tout d'abord la ville
Antique, puis libère la
ville elle-même.
Cette
nouvelle est très importante, car la
première occupation de la ville par les
extrémistes avait causé des destructions
difficiles à réparer, importance
soulignée par la directrice de
l'UNESCO:
« La
protection du site archéologique de
Palmyre est à la fois un enjeu culturel
majeur, et un impératif pour la
sécurité, la paix et le redressement de
tout un pays. » a déclaré la Directrice
générale. « Ce patrimoine a traversé les
millénaires, il représente un ferment
d’unité et d’identité pour le peuple
syrien. Sa préservation est inséparable
de la protection des vies humaines et
fait partie intégrante de la réponse à
une situation humanitaire d’extrême
urgence. Il doit être laissé en dehors
du conflit. »
Une
importance telle ... que le silence des
Etats occidentaux est assourdissant. La
seule réaction notable est celle de la
France et de la Grande Bretagne qui
présentent à l'ONU une résolution
voulant conduire à l'adoption de
sanctions contre le régime d'Assad,
accusé d'avoir utilisé des armes
chimiques contre les populations
civiles. Cette résolution est soutenue
par les Etats Unis, mais la Russie et la
Chine y opposent leur véto estimant les
preuves apportées contre le régime
syrien insuffisantes, alors que celles
apportées contre Daech existent et ne
sont pas prises en compte. Cet échange
diplomatique intervient le 28 févier,
alors que l'armée syrienne se rapproche
de Palmyre et que sa libéraiton est
quasiment acquise. Le calendrier est ici
intéressant. Il permet également de
communiquer sur l'affrontement entre les
Etats Unis et la Russie, bloquant toute
possibilité de coopération, même en
matière de lutte contre le terrorisme.
Car
l'ambassadrice américaine reprend la
vieille liturgie de l'Administration
Obama et envisage même la possibilité
d'adopter des sanctions en dehors du
cadre de l'ONU:
« La
Chine et la Russie ont fait un choix
scandaleux et indéfendable aujourd'hui,
a-t-elle dit après le vote. C'est un
triste jour pour le Conseil de sécurité
quand les membres commencent à trouver
des excuses à d'autres Etats membres qui
tuent leur propre peuple ». « Le
monde est sans aucun doute plus
dangereux », a conclu Nikki Haley.
Quant
à l'opposition syrienne, qui est censée
discuter du processus de paix et devrait
donc être satisfaite de voir reculer ce
qui doit être leur ennemi commun, à
savoir les groupes terroristes, les
déclarations de son porte-parole
laissent perplexe. Selon
Nasser al-Hariri:
Le
régime et l'EI « sont tous les deux des
terroristes.
C'est
une position qui ne présage rien de bon
pour des négociations de paix. Et
il persiste en mettant sur le même
pied le régime d'Assad qui lutte contre
le terrorisme et Daech, un groupe
extrémiste:
«
On dirait un épisode de Tom et Jerry, ironise
de son côté l’opposition syrienne en
évoquant le sort de la cité, tombée deux
fois aux mains des djihadistes et
reprise deux fois par le régime. «
Doit-on féliciter le
président Bachar Al-Assad pour la
reprise de Palmyre ? Si nous le faisons,
il nous faudra aussi féliciter Daech
s’ils reprennent une nouvelle fois la
ville à l’avenir »
La
presse française a une position très
simple: soit elle présente les faits
bruts, sans auncune interprétation en se
cachant comme elle le peut derrière une
pseudo neutralité, soit elle cache très
mal son ironie, comme dans cet article
du Monde dont la déclaration de Hariri
est tirée. L'on notera aussi les titres
très tendancieux de certains journaux:
Toujours est-il que les forces
extrémistes ont été
repoussées à plus de 20 km de la
ville et que le drapeau syrien a pu
remplacer celui de l'état islamique.
Cette victoire a eu un effet
significatif sur les militaires syriens,
dont le moral est au plus haut pour
continuer la libération de leur pays. Ce
qui, finalement, est le plus important.
Mais il est regrettable que les pays
occidentaux tiennent une position si
hypocrite, qui frise le soutien au
terrorisme.
Le sommaire de Karine Bechet-Golovko
Le
dossier Syrie
Les dernières mises à jour
|