France :
installation d'un état policier (partie
1)
Procédure d’exception sans état
d’urgence
Jean-Claude Paye
Samedi 26 mars 2016
Dans le contexte des attentats
revendiqués par Daesh, le gouvernement
français procède à une série de réformes
visant à accroître considérablement les
pouvoirs de la police et de
l’administration au détriment de la
Justice. Étant entendu que ces réformes
sont sans lien avec la prévention de ce
type d’attentat qui nécessite d’abord
des mesures politiques, la France se
dirige vers un régime d’arbitraire.
À une large majorité et
quasiment sans débat, l’Assemblée
nationale vient d’adopter le 9 mars
2016, le nouveau projet de loi de
réforme pénale « renforçant la lutte
contre le terrorisme et le crime
organisé » [1].
Ce texte doit encore passer au Sénat et,
étant en procédure accélérée, il ne doit
faire l’objet que d’une seule lecture
par chambre.
Le projet fait entrer dans le droit
commun, des dispositions considérées
comme relevant d’un droit d’exception.
Ainsi, dans le texte transmis pour avis
au Conseil d’État, le gouvernement
confirme sa volonté de « renforcer de
façon pérenne les outils et moyens mis à
disposition des autorités
administratives et judiciaires, en
dehors du cadre juridique temporaire,
mis en œuvre dans le cadre de l’état
d’urgence » [2].
Un état d’urgence
sans état d’urgence
Bien que les deux textes soient en
étroite relation, ce projet de loi ne
doit pas être confondu avec la loi du 20
novembre 2015 qui prolonge l’état
d’urgence pour une nouvelle période de
trois mois, tout en renforçant les
restrictions aux libertés privées et
publiques, contenues dans la loi de
1955 [3],
la nouvelle loi ne s’attaquant plus
seulement à des actes, mais également à
des intentions. Bien que les
dispositions d’exception aient été, de
nouveau, prolongées, le gouvernement n’a
pas renoncé à réformer la procédure
pénale. Il s’agit d’y inscrire des
mesures liberticides autorisées par
l’état d’urgence, sans que celui-ci soit
déclaré. Ce dernier a pour objet de
s’affranchir du principe de séparation
des pouvoirs, de liquider le pouvoir
judiciaire et de concentrer l’ensemble
des prérogatives aux mains de l’Exécutif
et de la police. Le projet de réforme de
la procédure pénale s’inscrit également
dans cet objectif.
Le texte donne un débouché pénal aux
dispositifs légaux d’espionnage des
ressortissants français. Comme l’exprime
l’exposé des motifs du projet de loi,
« l’arsenal de prévention », mis en
place par la loi relative au
Renseignement [4],
« doit être complété par un volet
judiciaire » [5].
Grâce à celui-ci, les renseignements
obtenus par les fausses antennes
Imsi-catchers, par la surveillance
vidéo, la captation d’image et la
sonorisation d’un domicile pourront
servir de base à des poursuites pénales.
Renforcement formel
du procureur
Le projet de loi renforce les
prérogatives du procureur, un magistrat
dépendant du pouvoir exécutif. Il
s’inscrit ainsi dans une constante de
l’action des gouvernements, toutes
majorités confondues, celle de réduire
le rôle du juge d’instruction, une
fonction jugée trop indépendante par
rapport à l’exécutif. Il s’agit de le
déposséder de l’exclusivité de certains
de ses pouvoirs, tel le contrôle des
procédures d’enquêtes intrusives, afin
de le confier également au procureur de
la République.
Dans le texte voté par l’Assemblée
nationale, le procureur devient aussi un
« directeur d’enquête ». Il conduit les
« enquêtes préliminaires », dans le
cadre desquelles il a la faculté de
renvoyer le suspect devant un tribunal.
Ensuite, il porte l’accusation lors d’un
procès qu’il a initié. Au four et au
moulin, il lui reviendra également de
vérifier si les « enquêtes effectuées
par la police judiciaire sont bien
menées à charge et à décharge ».
Dans les enquêtes placées sous la
direction du procureur, l’accès au
dossier est reporté à la fin des
investigations. Ainsi, la personne
incriminée, au moment de sa mise en
cause, n’a pas les moyens de contester
la légalité ou la nécessité d’une
technique d’enquête. Au contraire de la
procédure liée au juge d’instruction,
l’accès au dossier reste non
systématique. Afin de « donner de
nouveaux droits » au suspect et surtout
de pérenniser l’emprise du procureur sur
la procédure pénale, le projet de loi
introduit une réforme permettant au
justiciable d’intervenir dans le
processus d’enquête. Ce qui semble aller
dans le bon sens se révèle en fait être
une perversion du système judiciaire et
des droits de la défense.
Une perversion du
système pénal
Ainsi, le projet de loi introduit une
modification majeure du système pénal,
le passage d’une procédure inquisitoire,
centrée autour du juge d’instruction, à
un système qui se rapproche de la
démarche accusatoire en vogue dans les
pays anglo-saxons. Le texte prévoit
d’introduire, dès le stade de l’enquête
préliminaire, d’investigations de plus
d’un an, un débat contradictoire avec
les suspects et leurs avocats [6].
Ces derniers auraient la possibilité de
demander au procureur des actes
déterminés, tels que des auditions ou
des expertises. L’introduction de ces
nouvelles procédures fait que, comme aux
États-Unis, seules les personnes
fortunées seront en mesure de se
défendre. D’ailleurs, pour les autres,
le projet de loi a déjà prévu de
simplifier les modalités de passage
devant le juge des libertés et de la
détention, afin de pouvoir les juger
encore plus rapidement dans le cadre de
la comparution immédiate.
Aujourd’hui, le procureur, en
l’absence de tout comportement suspect
et d’infraction, a la faculté
d’autoriser préventivement le contrôle
d’identité et la fouille de véhicules se
trouvant dans un lieu précis et pour une
période déterminée. Le projet de loi
étend cette procédure à la fouille des
bagages, alors que actuellement,
celle-ci ne peut être autorisée que dans
le cadre d’une perquisition. Rappelons
que ces inspections ne visent pas
nécessairement des personnes suspectes,
mais aussi celles qui se trouvent dans
un lieu déterminé. L’extension prévue
par le projet augmente surtout le
pouvoir des forces de l’ordre. Les
fouilles auront lieu, non pas parce que
les policiers ont l’indice d’un délit,
mais simplement parce qu’ils ont le
droit de les faire au prétexte qu’ils
sont là pour éviter ou rechercher des
infractions.
Éviction du juge
d’instruction
Le procureur de la République dispose
ainsi de plus en plus des prérogatives
jusqu’à présent réservées au juge
d’instruction. Celui-ci est de nouveau
écarté par le projet de loi, alors que,
en France, il est déjà cantonné dans une
petite fraction des affaires.
Le juge d’instruction est
inamovible : il ne peut pas être déplacé
par le ministre de la Justice et ne peut
se voir retirer un dossier par sa
hiérarchie. En ce qui concerne sa
nomination, l’avis du Conseil supérieur
de la magistrature s’impose, ce qui
garantit également son autonomie. Ce
magistrat, dont l’indépendance est
statutaire, se voit enlever la
spécificité de son action : décider du
renvoi du prévenu devant un tribunal et
enquêter à charge et à décharge et cela
au profit du procureur et de la police
judiciaire qui, rappelons le, dépend non
du ministère de la Justice, mais bien de
l’Intérieur, indiquant bien, par là, la
primauté de sa fonction de maintien de
l’ordre.
La surveillance vidéo, la captation
d’image et la sonorisation d’un lieu ou
d’un domicile étaient aussi, jusqu’ici,
réservées aux informations judiciaires
confiées à un juge d’instruction. Elles
pourront désormais être décidées dès
l’enquête préliminaire, après une simple
autorisation du juge des libertés et de
la détention.
Remarquons que l’augmentation des
pouvoirs du procureur se fait sans une
modification du statut du parquet, lui
accordant un minimum d’autonomie
vis-à-vis de l’Exécutif. Même la
réforme, prévue précédemment par
François Hollande, garantissant que le
gouvernement nomme les procureurs, après
avis conforme du Conseil supérieur de la
magistrature, n’est pas réalisée [7].
Une police
incontrôlable
Dans les faits, le renforcement de la
fonction du procureur n’existe que par
rapport à celle du juge d’instruction.
En ce qui concerne la police judiciaire,
le contrôle de ce magistrat reste
purement formel. En Belgique, devant la
commission parlementaire relative à la
mise en place, en 1999, de la police
unique, dite « structurée à deux
niveaux » [8],
les procureurs ont déjà fait savoir que,
une fois l’autorisation de l’enquête
donnée, ils n’avaient plus le contrôle
effectif de son déroulement. Cette
réalité est encore plus criante en
France. Le Parquet est particulièrement
débordé, puisque, peu nombreux, les
procureurs ont un pouvoir de
quasi-juridiction et traitent la grande
majorité des dossiers judiciaires. Les
nouvelles prérogatives que lui donnent
ce projet de loi ne pourront
qu’accentuer leur surcroît de travail et
rendre impossible toute surveillance du
travail de la police. Cette dernière est
en fait la grande gagnante de ces
réformes, confirmant ainsi son rôle
central dans l’exercice actuel du
pouvoir d’État.
Une police toute
puissante
L’accroissement des pouvoirs de la
police est confirmé par l’extension du
cadre de la légitime défense pour les
forces de l’ordre. Les policiers seront
reconnus pénalement « irresponsables »
s’ils font feu, en cas « d’absolue
nécessité », sur « une personne ayant
tué ou tenté de tuer et sur le point de
recommencer ». Quant on sait qu’il
existe déjà une jurisprudence leur
reconnaissant la légitime défense pour
avoir abattu dans dos une personne en
fuite [9],
on comprend que l’objet de cet article
est moins de protéger les policiers de
poursuites pénales que de signifier aux
citoyens qu’ils peuvent être traités
comme des ennemis. Un exemple extrême
illustre bien cette perspective. La
France a été condamnée par la Cour
européenne des Droits de l’homme, dans
une affaire où la justice avait prononcé
une ordonnance de non lieu vis-à-vis
d’un gendarme qui avait abattu de dos
une personne menottée s’enfuyant d’une
garde à vue [10].
Les forces de l’ordre pourront aussi
retenir une personne, même mineure, et
hors la présence d’un avocat, même si
celle-ci a une pièce d’identité et cela
à la condition floue et hypothétique,
qu’il y ait « des raisons sérieuses » de
penser qu’elle a un « lien » avec une
activité terroriste.
Une précédente mouture du projet
allait encore plus loin, en créant un
délit « d’obstruction à la
perquisition ». Si cet article a été
abandonné, il montre bien la volonté du
gouvernement de criminaliser toute
résistance à l’arbitraire de la police.
Cette disposition devait faire taire les
protestations, suite aux exactions lors
de la vague de perquisitions autorisées
par l’état d’urgence. En outre, cette
ancienne version du texte indiquait que
les policiers pourraient saisir tout
objet ou document, sans en référer au
procureur [11].
Ainsi, la police aurait été libérée du
dernier élément du contrôle judiciaire,
celui du procureur, d’un magistrat
pourtant directement soumis au pouvoir
exécutif.
Le juge des
libertés et de la détention : un
alibi
Le pouvoir exécutif ne peut
contrôler le travail de la police
grâce au procureur. Le pouvoir
judiciaire en est totalement
incapable à travers l’autre figure,
valorisée par le projet de loi,
celle du juge des libertés et de la
détention. C’est pourtant sur lui
que repose la plupart des
autorisations de mise en œuvre des
dispositions de la loi. Le contrôle
de la légalité et de la
proportionnalité des mesures ne peut
qu’être formel, car ce juge ne
connaît pas le fond du dossier. Il
n’a accès à celui-ci qu’au moment où
il lui est remis et quand il doit
prendre sa décision. Une fois
l’autorisation accordée, il ne
dispose d’aucun moyen lui permettant
de contrôler l’action du procureur
et de la police. Statutairement, le juge de la
liberté et de la détention est
fragilisé. Il ne présente pas le
degré d’indépendance d’un juge
d’instruction, puisqu’il n’est pas
nommé par décret, mais par le
président de juridiction qui peut,
du jour au lendemain, le décharger
de ses fonction, si par exemple il
refuse d’autoriser des écoutes [12].
En matière de terrorisme et avec
l’autorisation préalable du juge des
libertés et de la détention, les
perquisitions de nuit seront
autorisées dans les habitations et
cela dès l’enquête préliminaire.
Cette procédure se substitue à
l’autorisation donnée par le juge
d’instruction dans la phase de
l’enquête proprement dite. (Dans le
cadre de l’état d’urgence, elles
peuvent être ordonnées par le
préfet). Désormais, les
perquisitions pourront aussi avoir
lieu de manière préventive, sur base
de l’éventualité d’un danger,
lorsqu’il s’agira « de prévenir un
risque d’atteinte à la vie ou à
l’intégrité physique » [13].
Les perquisitions de nuit dans
les habitations sont banalisées. Le
texte parle « d’un risque
d’atteinte », sans le qualifier ni
d’actuel, ni d’imminent. Il porte
sur des situations très nombreuses,
sur les atteintes à la vie, mais
aussi à l’intégrité physique. De
vagues suspicions pourront conduire
à ces intrusions domiciliaires.
Celles-ci deviendront généralisées,
si la limitation aux seules
infractions terroristes n’est que
temporaire.
Perquisition
informatique sans garantie
judiciaire
Le texte prévoit aussi
l’élargissement des possibilités de
surveillance dans les lieux publics
et le recours aux IMSI-catchers, ces
fausses antenne-relais qui
espionnent les téléphones et les
ordinateurs à l’insu de leur
utilisateur. Elles captent aussi
tous les portables situés dans leur
rayon d’action. Il s’agit d’un
dispositif massif et indifférencié
de capture des données. Son usage ne
sera pas limité aux seules enquêtes
antiterroristes et sera
renouvelable, de mois en mois, pour
des périodes très larges, ouvrant la
voie à une captation massive
d’informations sur les
ressortissants français. Il sera
autorisé par le juge de la liberté
et de la détention ou, « en
urgence », par le procureur de la
République, sachant que c’est
généralement la police elle-même qui
nomme le caractère urgent de la
situation.
Jusqu’à présent, les IMSI-catchers
pouvaient seulement être autorisées
dans le cadre d’informations
judiciaires, mais ont été peu
utilisées par les juges
d’instruction, vu le flou juridique
du dispositif. La loi sur le
Renseignement a légalisé leur
utilisation par les services
secrets.
L’article 3 du projet de loi
relative à la procédure pénale
prévoit aussi d’étendre la captation
des données informatiques aux
données archivées. Pourront être
aspirées, l’ensemble des données
contenues dans les appareils
informatiques. Ce dispositif ne
s’apparente plus à des écoutes
ciblées, visant les conversations en
cours et à venir, mais à une
perquisition pouvant s’étendre à des
données très anciennes. Cette
dernière procédure présente
normalement quelques garanties,
telle que la présence de la personne
suspectée ou celle de deux témoins,
ainsi que la réalisation d’une copie
sécurisée qui limite le risque de
modification ou d’intervention
extérieure sur les informations
recueillies. Ce n’est évidemment pas
le cas en ce qui concerne la
captation de données [14].
Le Préfet : un
agent de l’état d’exception
permanent
Comme dans l’état d’urgence, le
préfet voit son action renforcée. Le
projet de réforme relatif à la
procédure pénale est en étroite
correspondance avec la loi du 20
novembre 2015 prolongeant l’état
d’urgence qui criminalise des
intentions, en lieu et place d’actes
concrets. L’intentionnalité
terroriste attribuée aux personnes,
revenant de Syrie, est aussi au
centre du dispositif de
« surveillance » autorisé par le
préfet.
Aujourd’hui, les « retours de
Syrie », sont judiciarisés. Les
suspects sont mis en examen, écroués
ou placés sous contrôle judiciaire.
Désormais, les préfets pourront,
pendant un mois, les assigner à
résidence et leur demander, pendant
trois mois, les codes de leurs
téléphones et ordinateurs, les
obliger à signaler leurs
déplacements et leur interdire de
parler à certaines personnes. Ces
dispositions présentent bien les
attributs d’une procédure
judiciaire, mais il s’agit d’un pur
acte administratif, un contrôle sans
juge. Elle laisse toute la place à
l’arbitraire et ne donne, à la
personne suspectée, aucune
possibilité de confronter les
allégations portées contre elle.
C’est l’intention attribuée à la
personne qui est attaquée, sans que
celle-ci puisse se défendre. Ainsi,
comme dans l’état d’urgence, le
ministre de l’Intérieur, par
l’intermédiaire du préfet, se
substitue au juge d’instruction. Ce
projet de loi lui donne un pouvoir
de privation de liberté, en dehors
de toute infraction pénale.
La criminalisation des « retours
de Syrie » s’inscrit dans une
procédure de double discours du
pouvoir. L’ancien ministre Laurent
Fabius avait publiquement déclaré,
en août 2012, que « Bachar el-Assad
ne mériterait pas d’être sur
terre ». Il a remis le couvert
devant les médias en décembre 2012,
en affirmant, sans être poursuivi
pour « apologie du terroriste » [15],
que « Le Front al-Nosra fait du bon
boulot ». Cette organisation
djihadiste venait d’être classée
comme terroriste par les
États-Unis [16].
En même temps que l’affirmation de
son soutient aux groupes
terroristes, le gouvernement
diabolise et poursuit les personnes
qui auraient pu être influencées par
son discours.
Le juge
administratif : un contrôle en
trompe l’œil
Le projet de loi donne au juge
administratif un pouvoir de contrôle
des dispositions relatives aux
« retours de Syrie ». Il lui
« appartient de contrôler
l’exactitude des motifs donnés par
l’administration, comme étant ceux
de sa décision et de prononcer
l’annulation de celle-ci, lorsque le
motif invoqué repose sur des faits
matériellement inexacts ». Ainsi, en
opposition avec le principe de
séparation des pouvoirs,
l’administration se contrôle elle
même. De plus, la surveillance est
purement formelle. Le juge
administratif, au contraire du juge
d’instruction et du juge de la
liberté et de la détention,
intervient après coup et son
contrôle est aléatoire. Il
n’intervient que si la personne
arrêtée le saisit. Surtout, il ne
dispose pas d’éléments concrets pour
fonder sa décision. Il ne peut se
baser que sur des documents imprécis
et non sourcés : les notes blanches
produites par les services de
Renseignement, des documents non
signés, non datés et sans en-tête de
service.
Sur autorisation du préfet et
dans un cadre purement administratif
de « prévention du terrorisme », la
police pourra aussi procéder à
l’inspection visuelle, à la fouille
des bagages et à la visite des
véhicules. Elle est ainsi libérée de
l’autorisation préalable du
procureur, s’il s’agit
d’installations ou d’établissements
déclarés « sensibles » par le
préfet, dans les faits nommées comme
tel par la police.
Ainsi, le texte de loi consacre
« l’entrée du préfet dans le code de
procédure pénale ». Mais, il s’agit
d’un retour, puisque, avant que la
réforme de 1993 [17]
ne les lui enlève, le préfet
disposait déjà de pouvoirs de police
judiciaire. L’ancien article 10 du
code de procédure pénale lui
permettait, en cas d’atteinte à la
sécurité intérieure ou d’espionnage,
de jouer le rôle d’officier de
police judiciaire, c’est-à-dire de
faire procéder à des arrestations et
à des contrôles. Cette concentration
récurrente de prérogatives
judiciaires aux mains du préfet
indique que, au pays de Montesquieu,
la séparation des pouvoirs,
revendiquée comme un patrimoine
national, a toujours été, pour le
moins, erratique.
[1]
« Projet
de loi renforçant la lutte contre le
crime organisé et son fonctionnement,
l’efficacité et les garanties de la
procédure pénale », Assemblée
nationale, 3 février 2016.
[2]
Jean-Baptiste Jacquin, « Les
pouvoirs de police renforcés pour se
passer de l’état d’urgence », Le
Monde, le 6 janvier 2016.
[3]
« Loi
n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à
l’état d’urgence, version consolidée au
15 mars 2016 ».
[4]
« Loi
française sur le Renseignement, Société
de surveillance ou société surmoïque »,
Jean-Claude Paye, Réseau Voltaire,
le 28 novembre 2015.
[5]
« Projet de loi renforçant la lutte
contre le crime organisé, le terrorisme
et leur financement, et améliorant
l’efficacité et les garanties de la
procédure pénale » (JUSD1532276L),
Conseil des ministres du 3 février 2016
[6]
Jean-Baptiste Jacquin, « Réforme
pénale : les procureurs prennent la main
sur les enquêtes », Le Monde,
4 mars 2016.
[7]
Jean-Baptiste Jacquin, « comment la
réforme pénale renforce les pouvoirs des
procureurs », Le Monde, le 4 mars 2016,
http://www.lemonde.fr/societe/artic...
[8]
Lire : Jean-Claude Paye, « Vers un État
policier en Belgique ? », Le Monde
diplomatique, novembre 1999,
https://www.monde-diplomatique.fr/1...
et
Vers un État policier en Belgique,
EPO, Bruxelles 2000, 159 p.
[9]
« Acquittement
du policier qui avait tué un braqueur et
colère des parties civiles »,
L’express.fr, 15 janvier 2016.
[10]
« Le
gendarme tue le gardé à vue : la France
condamnée par la CEDH »,
Net-iris.fr, 18 avril 2014.
[11]
Sylvain Rolland, « Sécurité :
l’inquiétante dérive vers la
surveillance de masse », La
Tribune.fr, 4 décembre 2015, l
[12]
Questions/réponses critiques du Syndicat
de la magistrature sur le projet de loi
criminalité organisée/terrorisme,
Syndicat de la Magistrature, 14 mars
2016, p. 9.
[13]
Jean-Baptisque Jacquin, « Les
pouvoirs de la police renforcés pour
pouvoir se passer de l’état d’urgence »,
Le Monde, 6 janvier 2016.
[14]
Op. Cit. p. 8.
[15]
L’incrimination d’apologie du terrorisme
a été créée par la Loi renforçant les
dispositions relatives à la lutte contre
le terrorisme du 14 novembre 2014.
Lire : Jean-Claude Paye, « La
criminalisation du Net en France »,
Réseau Voltaire, 13 septembre
2015.
[16]
« Des
Syriens demandent réparation à Fabius »,
Le Figaro avec AFP, 10 décembre
2014 ; et « Des
Syriens attaquent l’État en appel »,
Le Figaro avec AFP, 7 septembre
2015.
[17]
« Loi
n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant
réforme de la procédure pénale, Version
consolidée au 13 mars 2016 »,
Légifrance.
Le dossier politique française
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