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Hontes
Jacques Sapir
© Jacques
Sapir
Vendredi 8 mai 2015
François Hollande a finalement décidé
de ne pas se rendre à Moscou mais d’y
envoyer Laurent Fabius, son Ministre des
affaires étrangères. On pourrait croire
que ce n’est qu’un demi-mal. Mais ce
geste signe la déliquescence morale du
personnage qui ne veut pas choisir et
n’ose affronter les conséquences de son
inaction. Soit nous sommes dans un
conflit ouvert avec la Russie, mais
alors il faut nous expliquer pourquoi,
et ce que l’on reproche à ce pays et à
ses dirigeants quand on s’acoquine avec
des dictatures féroces et rétrogrades
comme l’Arabie Saoudite ou la Qatar.
Soit, les points qui nous séparent de la
Russie ne sont pas de l’ordre du
conflit. Ils ne peuvent alors servir de
prétexte à faire cet affront au peuple
Russe et à son Président, Vladimir
Poutine. L’histoire jugera sévèrement
cette attitude qui confond la politique
internationale avec une motion de
synthèse dans un congrès du parti dit
socialiste depuis des lustres en voie de
transformation en un parti
radical-socialiste.
François Hollande a, aujourd’hui 8
mai, décide de commémorer le 70ème
anniversaire de la victoire en compagnie
du Secrétaire d’Etat américain. Soit ;
mais il en a profité pour aller déposer
une gerbe avec John Kerry à la statue du
Général de Gaulle. Ici encore, ce geste
témoigne d’une méconnaissance des faits
historiques les mieux établis. Personne
n’ignore le conflit qui opposa la France
Libre avec le Président Roosevelt, et
les embuches multiples que mirent les
Etats-Unis sur la route de la
reconnaissance de la France Libre et de
son chef. Faut-il donc rappeler à
François Hollande, qui entretient
semble-il avec l’Histoire ce rapport
instrumental qu’il souhaiterait
institutionnaliser par la réforme des
programmes d’Histoire et de Géographie,
que Roosevelt soutint d’abord l’Amiral
Darlan, homme de Vichy contre de Gaulle,
puis chercha à imposer le Général
Giraud. Ce geste est une insulte à la
France libre, à la Résistance, et en fin
de compte à la France toute entière.
François Hollande se croit ridicule
quand il endosse les habits que lui
offre le Président du Kazakhstan. Mais
il ne se rend pas compte qu’il est cent
fois plus ridicule, et cent fois plus
insultant pour la France, avec ses
petits calculs d’apothicaire, mégotant
sur la reconnaissance que nous devons à
la Russie et en associant un
représentant du gouvernement américain à
un hommage au général de Gaulle en ce
jour. Faut-il donc qu’il soit aveugle
sur ce qu’est la politique
internationale, et oublieux de ce que la
souveraineté commande à un pays en ces
circonstances.
Mais, les français n’oublient pas, et
n’oublierons pas, ce qu’ils doivent aux
peuples de l’Union soviétique, et donc
au peuple russe en ces jours. Ils
n’oublieront pas que le débarquement du
6 juin 1944 ne fut possible que grâce
aux grandes victoires remportées par les
forces soviétiques qui ont affronté le
poids principal de la guerre. Ils
n’oublieront pas non plus l’homme qui,
sous le couvert de sa fonction, a bradé
la souveraineté et insulté par son
comportement et ses atermoiements
indignes la France.
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