Monde
Erdogan est le véritable Daech !
Ghaleb Kandil
Photo:
D.R.
Dimanche 5 octobre 2014
Le président turc, Recep Erdogan, est le
chef des « Frères Musulmans » dans une
région qui l’a submergé de déceptions.
Incapable de vaincre la Syrie et son
commandant en chef, il a vu se dissiper
ses rêves de gloire à la tête d’un
néo-empire ottoman. Incapable de gagner
son pari consistant à imposer sa tutelle
coloniale aux peuples du Levant et de
l’Égypte, il a déchaîné sa haine
seldjoukide profonde en conspirant
contre la Syrie, l'Égypte, l'Irak, et en
s’ingérant dans les moindres affaires du
Monde arabe.
Tous les chemins qui
profitent à Daech, en finance, en armes
et en effectifs, passent par Istanbul,
où se concrétisent les transactions de
vente du pétrole volé, en Irak et en
Syrie, par l’intermédiaire d’entreprises
turques qui se chargent de sa livraison
à leurs clients étatsuniens et sionistes
puis virent des sommes colossales, se
chiffrant en millions par jour, dans les
caisses d’Al-Baghdadi.
C’est sous les
auspices des agences du renseignement
turc que des milliers de turcs ont été
recrutés dans les rangs de Daech, que
des camps ont été dressés pour les
entraîner et que des « maisons de
convalescence » les ont accueillis.
Nombre d’entre eux ont été filmés dans
ces « lieux de repos d’après les
massacres ». Leurs photos ainsi que de
nombreuses enquêtes relatant leurs
périples ont même été publiées par la
presse turque ! Et c’est toujours sous
ces mêmes auspices qu’ont afflué des
milliers de combattants étrangers qui
ont fait dire à Obama que « l’Occident
craignait leur retour vers leurs pays
d'origine ».
Quant aux armes
financées par l'Arabie saoudite et par
le Qatar, une grande partie a été
acheminée vers la Turquie pour être
remise à Daech, mais aussi à des
factions d’agents du renseignement turc
qui ont massacré à leur tour, ont pillé
les usines syriennes, et ont ravagé le
nord et l'est de la Syrie ; quoique la
part la plus importante du butin soit
néanmoins revenue aux « Dawaech »
[pluriel du terme : membre de Daech]
pour règlement de la facture des
attaques visant les Kurdes en Irak et en
Syrie.
La Turquie est l’état
agresseur où se sont regroupées « les
salles d'opération pour destruction de
la Syrie » dirigées par le général US
David Petraeus. C’est l’état qui s’est
chargé d’organiser « les conférences des
mercenaires » selon leurs éditions
successives, mais toujours sous la
bannière d’une prétendue opposition
syrienne. Une opposition dont
l’apparence, l’appellation et les chefs,
ont varié au gré des patrons US,
mais dont la constante est demeurée
dépendante de l’illusion d’une
gouvernance ottomane des plus
déterminées du fait de sa haine de la
Syrie et de son peuple, et de son
hostilité à tout ce qui est arabe.
Erdogan
vise
l’Égypte arabe, peuple
et dirigeants, depuis
sa révolte contre l’Organisation
des Frères Musulmans, « mère du
terrorisme et servante du colonialisme
en Orient », parce que les Égyptiens
qui ont cru à leur
propagande ont vite découvert
l’hypocrite transaction signée dans les
locaux de l’Ambassade US, à la veille de
l’arrivée de Mohamed Morsi au pouvoir,
sous l’égide du calife de l’illusion
ottomane, fabricant de Daech et
protecteur des groupes takfiri sévissant
en Syrie.
Erdogan veut
disloquer l'Irak et ambitionne d’occuper
Kirkouk, et le voici qui se prépare à
attaquer la Syrie pour parfaire le
« plan Daech », sous prétexte d’une
prétendue « zone de sécurité » qu’il
cherche à imposer sur le terrain.
Mais la moindre
avancée de la Turquie en territoire
syrien sera considérée comme une
agression contre la Syrie, sa
souveraineté et son indépendance. Elle
déclenchera une réponse ferme et
adaptée, l’État syrien étant fin prêt
pour repousser les agresseurs.
Les autorités
syriennes se sont comportées avec
sagesse en acceptant la « coordination
non déclarée » avec l'administration US
pour lui permettre de sauver la face et
lui épargner le coût d’un échec moral et
politique, alors que les frappes
aériennes US sont bel et bien
coordonnées à l'avance avec Damas ;
ceci, sans que la Syrie ne les légitime
tant qu’elles se déroulent « en
dehors du cadre du Conseil de
sécurité et donc en dehors de la
légitimité internationale ».
Les autorités
syriennes sont parfaitement conscientes
de tous les risques potentiels d’une
telle situation et détiennent des atouts
majeurs ; mais à Damas, les règlements
de comptes se font toujours au moment
opportun et c’est avec ses alliés que la
Syrie trace les lignes rouges et les
règles relatives aux frappes aériennes
US dans le cadre actuel de « la
lutte contre Daech ».
La Syrie a déclaré,
par la voix de son ministre des Affaires
étrangères à New York, que toute
invasion terrestre de ses territoires,
sous n’importe quel prétexte, sera
considérée comme une agression contre la
souveraineté nationale syrienne. Par
conséquent, il faudra qu’ils s’attendent
à une défense et à une résistance usant
de toutes les capacités disponibles,
d’autant plus que les agresseurs font
partie de l’alliance odieuse qui a lancé
une « guerre mondiale » pour détruire la
Syrie, et que la Turquie d’Erdogan est
le quartier général de cette alliance et
l’un de ses États membres les plus
haineux, vicieux et hypocrite.
Ghaleb Kandil
Directeur de New orient news
أردوغان داعش الأصلي
http://www.neworientnews.com/news/fullnews.php?news_id=145210
Voilà ce qu’écrivait
M. Ghaleb Kandil à la veille du 2
Octobre, jour de l’adoption par le
parlement turc du texte, présenté par le
désormais Premier ministre Ahmet
Davutoğlu, autorisant l’engagement de la
Turquie dans une intervention militaire
« contre Daech » en Irak et en Syrie.
Nous passerons sur
tout ce que nous avons pu entendre sur
nos médias, ravis que la Turquie
démontre enfin qu’elle est vraiment
l’alliée de l’OTAN, mais qu’il lui a
d’abord fallu libérer ses otages retenus
à Mossoul par la simple force dissuasive
de sa diplomatie face à l’infâme Daech.
En effet, nous avons vu ces otages s’en
sortir tirés à quatre épingles [1]
là ou d’autres ont été décapités !
Nous passerons aussi
sur la prétendue abnégation du
gouvernement turc qui justifie une
éventuelle invasion terrestre de la
Syrie par son intention de créer des
camps de réfugiés ou, plus exactement,
une « zone de sécurité » pour les
millions de réfugiés syriens qu’il a si
humainement accueillis avant même qu’ils
n’en éprouvent le besoin, sans oublier
les centaines de Kurdes irakiens à qui
il a ouvert ses frontières après avoir
hésité… le temps que son allié US cède à
ses exigences.
Nous ne
retiendrons que les déclarations du
porte parole du ministère français des
Affaires étrangères [2],
au lendemain de cette excellente
nouvelle :
« 8
– Turquie / Syrie / Daech
Q - En quoi consistent les consultations
franco-turques ?
R - Cette réunion des
ministres des Affaires étrangères
portera à la fois sur la relation
bilatérale et sur les questions
régionales. Le format en a été décidé
après la visite d'État du président de
la République en Turquie les 27 et 28
janvier 2014. Ce sont des consultations
annuelles. C'est la première fois
qu'elles se tiennent à Paris.
Q - Quel regard porte la France sur le
projet maintenant approuvé par
l'Assemblée turque de créer une zone
autour de Kobané, dont les Turcs
assureraient la couverture aérienne ?
R - Nous saluons la
décision du Parlement turc, qui permet
au gouvernement d'intervenir
militairement s'il l'estime nécessaire.
Pour nous, la Turquie est un pays allié
et un partenaire incontournable au sein
de la coalition et dans la lutte contre
le terrorisme. Les consultations
bilatérales du 10 octobre seront
l'occasion de revenir sur l'ensemble de
ces questions. Sur les projets précis
des autorités turques, je vous renvoie
vers elles.
Q - Cela implique-t-il de mettre un pied
en Syrie et de déployer des troupes en
territoire syrien, avec l'argument qu'il
faut protéger Kobané ?
R - C'est une
décision qui relève des autorités et du
parlement turcs. Comme le ministre l'a
dit, il y a une répartition des tâches
entre les pays membres de la coalition
contre l'organisation terroriste Daech.
Q - Mais il y a malgré tout urgence. On
dirait que personne ne s'occupe de la
situation à Kobané et que l'on va
accepter que cette ville tombe et que
des massacres aient lieu. Personne ne
semble vouloir armer les Kurdes syriens
?
R - Nous soutenons ce
que font en Syrie les Américains et des
pays arabes, mais il doit y avoir une
répartition des tâches. Nous intervenons
militairement en Irak. En Syrie nous
appuyons l'opposition modérée. Le
ministre l'a clairement rappelé la
semaine dernière à l'occasion de
l'Assemblée générale des Nations unies.
Q - Dans ce partage des tâches qui
s'occupe d'aider les Kurdes à Kobané ?
R - Pour nous,
l'interlocuteur qui peut lutter sur le
terrain le plus efficacement contre
Daech comme contre Bachar Al-Assad,
c'est la coalition nationale syrienne.
Q - Pourquoi aider les peshmergas kurdes
en Irak et non les Kurdes de Syrie à
Kobané ?
R - En Irak, nous le
faisons à la demande des autorités
locales en liaison avec les autorités
irakiennes. »
Rien de
neuf, mis à part une question pertinente
et inattendue par les temps qui courent,
dans ce type de document. Kobané [3]
étant une ville syrienne à majorité
kurde,
pourquoi aider les kurdes en Irak et non
les Kurdes de Syrie ? Mais question à
laquelle Monsieur le porte parole répond
par une pirouette.
Or, il
semble que là est « la question », le
problème kurde étant la bombe qui risque
d’exploser au visage de « l’allié
Erdogan », maintenant que Massoud
Barzani, président de la région autonome
du Kurdistan en Irak, a compris qu’il ne
pouvait pas compter sur lui, et que
Abdullah Öcalan, toujours
prisonnier en
Turquie et chef du PKK [Parti des
travailleurs du Kurdistan],
a menacé de rompre le dialogue avec
Ankara si la population de Kobané était
massacrée [4].
Une bombe qui sera autrement plus
explosive que celle lancée, ce même 3
octobre, par le vice-président des USA,
Joe Biden [5] :
« Nos alliés dans la région sont notre
plus grand problème en Syrie… les Turcs
sont de grands amis et j’ai
d’excellentes relations avec Erdogan,
avec lequel j’ai passé beaucoup de
temps… les Saoudiens… les Émiratis…
Qu’ont-ils fait ? Ils étaient si
déterminés à renverser Assad qu’ils ont
mené une guerre par procuration entre
sunnites et chiites… ».
Bref, les USA
sont blancs comme neige. Ce sont leurs
alliés qui ont armé et financé Daech,
mais ces alliés « ont fini par prendre
conscience de leurs erreurs » !!! Vu
cette conclusion, cela ne veut pas dire
grand-chose pour la suite de l’agression
sur la Syrie.
Reste à savoir si
ce n’est pas la réponse des USA à
Erdogan, et à d’autres alliés, pour leur
rappeler qui est le maître du jeu et
quel est le but définitif du « plan
Daech » : servir d’abord et avant tout
les intérêts US ! Ils avaient une marge
de manœuvre, ils l’ont dépassée en se
servant d’abord.
Reste à
savoir aussi si ce coup de semonce de
Joe Biden peut expliquer le fait que le
paragraphe 8 ci-dessus [tiré des
Déclarations officielles de politique
étrangère du 03 octobre 2014]
a disparu, alors que nous avons procédé
par un copier/coller il y a à peine
quelques heures.
La Turquie
ne serait-elle plus le partenaire
« incontournable » digne de la France ?
Ou bien, une fois de plus, les USA
refusent d’accorder les violons et la
France joue faux ?
Traduction et
commentaire par Mouna Alno-Nakhal
04/10/2014
Notes :
[1] Libération des otages turcs : "c'est
un jour de fête pour la nation"
http://www.youtube.com/watch?v=kFNP7_hGew4
[2] Déclarations
officielles de politique étrangère du 03
octobre 2014
http://basedoc.diplomatie.gouv.fr/vues/Kiosque/FranceDiplomatie/kiosque.php?type=bafr
[3]
Les Kurdes de Kobané sont «massacrés»
par les djihadistes
http://www.tdg.ch/monde/Les-Kurdes-de-Kobane-sont-massacres-par-les-djihadistes/story/10408492
[4]
Abdullah Öcalan menace de rompre le
dialogue avec Ankara
http://www.lopinion.fr/2-octobre-2014/abdullah-ocalan-menace-rompre-dialogue-ankara-16967
[5]
Anyone but
US ! Biden blames allies for ISIS rise
http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=11l8nLZNPSY
http://rt.com/news/192880-biden-isis-us-allies/
Le sommaire de Mouna Alna-Nakhal
Le
dossier Syrie
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