Opinion
L'hypocrisie des États-Unis sur
le référendum d'indépendance de la
Crimée
Chris Marsden
Photo: RIA
Novosti
Vendredi 21 mars 2014
Il y a peu de choses qui donnent plus
envie de vomir que cet air outragé pris
par le gouvernement Obama et ses alliés
européens à propos de la Crimée,
lorsqu'ils se targuent de défendre le «
droit international. »
Dans son discours devant l'Assemblée
fédérale russe, le président Vladimir
Poutine a déclaré que le référendum en
Crimée respecte la « Charte des Nations
unies, qui parle du droit des nations à
l'auto-détermination. »
Il a poursuivi : « Au passage, je
voudrais vous rappeler que lorsque
l'Ukraine a fait sécession de l'URSS,
elle a fait exactement la même chose,
presque mot pour mot […] De plus, les
autorités de Crimée ont fait référence
au précédent bien connu du Kosovo, un
précédent que nos collègues occidentaux
ont créé de leurs propres mains, dans
une situation très similaire, où ils
étaient d'accord pour dire que la
séparation unilatérale du Kosovo de la
Serbie, exactement ce que la Crimée est
en train de faire maintenant, était
légitime et n'exigeait aucune permission
de la part des autorités centrales du
pays.
« En se conformant à l'article 2,
chapitre 1, de la Charte des Nations
unies, la Cour internationale de justice
de l'ONU a admis cette approche et a
fait les commentaires suivants dans sa
décision du 22 juillet 2010, je cite :
''Aucune interdiction générale ne peut
être déduite de la pratique du Conseil
de sécurité en ce qui concerne les
déclarations d'indépendance,'' et ''le
droit international commun ne comporte
aucune interdiction concernant les
déclarations d'indépendance. »
Poutine, qui souhaite plus que tout
parvenir avec les États-Unis et les
puissances européennes à un accord qui
respecterait les intérêts de la
bourgeoisie russe, ne peut rien faire de
plus que marquer un point dans la
polémique contre ses accusateurs.
Néanmoins, l'expérience qu'il cite, un
chapitre sanglant de la destruction de
l'ex-République fédérale de Yougoslavie
(RFY), est une leçon que devraient
retenir tous ceux qui cherchent à
comprendre les choses au-delà des
mensonges et de l'hypocrisie des
politiciens et des médias qui
soutiennent les agressions économiques,
politiques et militaires.
En 1991, la Croatie et la Slovénie
avaient organisé des référendums
illégaux pour faire sécession de la
Yougoslavie. Ceux-ci n'avaient pas été
organisés sur une base regroupant toute
la nation, critère que les États-Unis
brandissent maintenant comme nécessaire
pour qu'un référendum sur la Crimée soit
valable en Ukraine. Néanmoins, dès
janvier 1992, l'Union européenne avait
reconnue les deux pays comme
indépendants. Les États-Unis avaient
suivi cet exemple en avril 1992.
En 1990, le Kosovo organisa un
référendum sur l'indépendance qui fut
boycotté par les Serbes vivant dans la
région et ne fut reconnu par aucun pays,
hormis l'Albanie, les Albanais
représentant une grande partie de la
population du Kosovo.
En février 1992, la Bosnie
Herzégovine organisa un référendum sur
l'indépendance en violation de sa propre
constitution et de celle de la
République fédérale de Yougoslavie
(RFY). En avril, les États-Unis avaient
pourtant reconnu la Bosnie. Une guerre
civile entre les musulmans bosniaques,
les Croates et les Serbes s'ensuivit et
qui dura jusqu'en 1995.
La guerre du Kosovo commença le 28
février 1999 et dura jusqu'au 11 juin
1999. Lors des négociations de
Rambouillet, qui précédèrent la guerre
aérienne des États-Unis et de l'OTAN,
l'OTAN avait demandé qu'un référendum
sur l'indépendance ait lieu au Kosovo.
La guerre sur le terrain fut menée par
les forces de souche serbe de la RFY et
par l'Armée de libération du Kosovo
(ALK), un groupe terroriste de souche
albanaise soutenu par Washington. Les
États-Unis et l'OTAN menèrent une
campagne de bombardements qui a tua des
milliers de gens, avec pour objectif
ultime de renverser le gouvernement de
la RFY de Slobodan Milosevic.
En 2008, le Kosovo, qui était sous
administration des Nations unies, se
déclara unilatéralement indépendant de
la Serbie. Il le fit sans en demander
l'autorisation au gouvernement central
de Belgrade. Les grandes puissances
européennes et les États-Unis eurent tôt
fait de reconnaître cette province qui
était serbe depuis des siècles comme un
état indépendant.
Dans la situation actuelle, il faut
noter que toutes les invocations de la
souveraineté ukrainienne font référence
à un gouvernement qui a été installé au
pouvoir par un coup d'Etat mis au point
et financé par les puissances
occidentales. A cet égard, un rapport
commandé par le régime ukrainien et
affiché sur le site Web EuroMaidan est
significatif.
Ce rapport affirme que la destitution
du président Viktor Ianoukovitch était
légale. Mais on y trouve des admissions
qui montrent tout à fait clairement le
contraire. Cela commence par, « Bien
qu'il n'y ait eu aucune base
constitutionnelle pour raccourcir le
mandat présidentiel, le nouveau
gouvernement a été établi en accord avec
le droit ukrainien […] »
Plus loin, le rapport admet : «
l'article 108 de la Constitution […]
créé quatre cas pour la fin anticipée de
l'autorité du président : la démission,
la destitution, la mort, et l'incapacité
à poursuivre pour raisons de santé. » Il
affirme ensuite : « aucun de ces cas ne
s'est produit. »
Mais alors pourquoi la destitution de
Ianoukovitch était-elle légale ? Parce
qu'il avait fui l'Ukraine (par crainte
d'être tué par les fascistes soutenu par
l'occident à la tête des manifestations
de l'opposition).
Ce rapport déclare : « Un accord pour
résoudre la crise a été signé le 21
février 2014 entre le président en
exercice Ianoukovitch et les ''trois
ténors'' de Maidan : Arseniy Yatseniouk,
Vitaliy Klitschko, et Oleh Tiahnybok.
Cet accord exige que, sous 48 heures,
une loi spéciale soit adoptée, signée et
appliquée pour autoriser le retour à la
constitution ukrainienne de 2004 […] »
Cependant, « Peu après, Ianoukovitch
a disparu » et « n'a pas signé la
décision adoptée par le Parlement. » Une
résolution « concernant
''l'auto-retrait'' du président a été
adoptée, » déclarant que « le Président
de l'Ukraine Viktor Ianoukovitch s'est
retiré de lui-même d'une manière
inconstitutionnelle de l'exercice des
pouvoirs constitutionnels et par
conséquence n'exerce plus aucune
fonction. »
Par conséquent, « en dépit des
limites indubitables de la résolution
sur le retrait de Ianoukovitch du
pouvoir, » sa destitution est déclarée
légale et une expression du « principe
constitutionnel de souveraineté de la
nation ukrainienne. »
Ainsi parle le Ministère de la
Vérité.
(Article original paru le 19 mars
2014)
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Publié le 21 mars 2014 avec l'aimable
autorisation du WSWS
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