Chronique
« Paradis artificiels »
Chérif Abdedaïm

© Chérif
Abdedaïm
Mercredi 9 avril 2014
Des combattants en état de transe. Quel
beau spectacle ! Selon les médias
occidentaux et leurs serfs du Golfe, les
« djihadistes » se nourrissent
principalement de la lecture du Coran.
Pour les mystiques, la lecture du Saint
Coran est un moyen de méditation et de
transcendance, quoi de plus saint ? Mais
pour un « djihadiste » loin de toute
piété, perpétrant les pires atrocités,
ce n’est pas cette transcendance
mystique qui le caractérise mais une
indifférence émotionnelle chronique ;
loin de toute méditation et de toute
transcendance pieuse, elle est surtout
due aux drogues qu’il ingurgite avant de
passer à l’acte ignoble. Voilà donc la
différence.
Selon de récentes informations, l’armée
arabe syrienne a saisi en deux jours une
voiture pleine de comprimés de Captagon
et un camion citerne en contenant une
tonne.
Le Captagon (Fénétylline chlorhydrate)
est une amphétamine qui suscite une
certaine euphorie et insensibilise à la
douleur. Mêlé à d’autres drogues, comme
du haschich, il constitue la ration
alimentaire de base des djihadistes. Les
combattants ne ressentent plus ni leurs
souffrances, ni celles qu’ils infligent
aux autres. Dès lors, ils peuvent
commettre toutes sortes d’atrocités en
riant.
Contrairement à une idée répandue, les
djihadistes ne sont pas motivés par des
préoccupations religieuses, mais par la
recherche de plaisirs immédiats. Ils
sont principalement recrutés parmi les
voyous et dans les prisons.
Fabriqués en 2011 par l’Otan dans un
laboratoire en Bulgarie, le Captagon est
maintenant produit dans tout le
Proche-Orient, y compris sur le
territoire syrien.
Pendant ce temps, le Congrès des
États-Unis a voté secrètement (le 27
janvier dernier) le financement d’une
aide militaire aux « rebelles syriens »
jusqu’à la fin de l’année fiscale
(c’est-à-dire jusqu’au 30 septembre
2014).
Il ne semble pas qu’il s’agisse d’une
session secrète du Congrès, mais plutôt
d’une séance secrète au cours de la
session normale. A ce sujet l’agence
Reuter précise que cette aide comprend
des armes légères, ainsi que des
roquettes anti-tanks, mais pas de
matériel anti-aérien.
Lors de son discours 2014 sur l’état de
la nation, le président Barack Obama,
avait tenté de minimiser les
contradictions états-uniennes. Il a
déclaré, dans un passage consacré à la
lutte contre Al-Qaïda : « En Syrie, nous
soutiendrons l’opposition qui rejette le
programme des réseaux terroristes » sans
toutefois préciser quelle était cette
opposition « qui rejette le programme
des réseaux terroristes », ni qui la
représente.
Selon un conseiller du président, Bruce
Riedel, ces armes ne sont pas
susceptibles de modifier le sort de la
guerre, mais au contraire de la faire
durer. Selon lui : « La guerre syrienne
est une impasse. Les rebelles n’ont pas
l’organisation et les armes pour vaincre
Assad, tandis que le régime n’a pas la
main-d’œuvre fidèle pour réprimer la
rébellion ».
Outre l’aide américaine pour faire
perdurer le massacre en Syrie, le «
frère » Erdogan continue de manigancer
ses plans d’aide aux terroristes en
Syrie ? Dans un récent article le
journaliste belge d’origine turque,
Bahar Kimyongür, rapporte que des « Des
enregistrements fuités par les hommes de
la Confrérie de Fethullah Gülen, nouveau
frère ennemi d'Erdogan, établissent la
responsabilité flagrante du régime
d'Ankara dans la guerre et le terrorisme
en Syrie. Ces « AKP-Leaks » impliquent
directement le ministre turc des
affaires étrangères Ahmet Davutoglu, le
directeur des services secrets de la MIT
Hakan Fidan, le conseiller du ministère
des Affaires étrangères Feridun
Sinirlioglu et le chef-adjoint de
l'état-major turc Yasar Güler…
L'une de ces conversations
compromettantes porte sur l'enclave
turque en territoire syrien, appelée
Suleyman Shah, où se trouve le mausolée
éponyme du grand-père du fondateur de
l'Empire ottoman Osman 1er (près de
Membij et de l'Euphrate, au nord du lac
Assad, au nord-est d'Alep ). Les
quatre conspirateurs invoquent la menace
que fait peser le réseau terroriste
Daech (EIIL) sur l'enclave comme
prétexte à un assaut contre la Syrie. Le
chef adjoint de l'état-major Yasar Güler
évoque l'option de l'armement de 1.000
djihadistes pour mener une opération en
territoire syrien. »
Dans un autre enregistrement, le même
Yasar Güler martèle : « Nous avons
besoin d'un casus belli. » Mais le
directeur du renseignement Hakan Fidan
s'inquiète du risque de représailles,
avouant que la frontière turco-syrienne
échappe à tout contrôle. Cela ne
l'empêche pas de proposer une opération
sous fausse bannière en territoire
syrien : « S'il le faut, je peux envoyer
quatre hommes en Syrie. Ces hommes
pourraient lancer huit missiles en
direction [(un terrain vague en
territoire turc. J'aurais ainsi suscité
un casus belli. Nous pourrions même
attaquer le mausolée de Suleyman Shah. »
L'assaut des djihadistes contre le
village arménien de Kassab dans le nord
de la Syrie à partir du territoire turc
n'est donc pas tombé pas du ciel.
L'auteur signale aussi que les
terroristes « syriens » portent des
treillis de la gendarmerie turque, et
que l'agent turc Selami Aynur, président
de l'association fasciste des Loups Gris
à Giresun (nord-est de la Turquie, sur
la mer Noire), a été abattu par l'armée
syrienne.
Suite aux révélations de Gülen, Erdogan,
pris de panique, a fait bloquer YouTube
en Turquie. (Habituellement, c'est
YouTube qui bloque les contenus «
gênants ».)
Enfin, faut-il également signaler que
selon le journal libanais Al-Akhbar : «
Un pont aérien a été mis en place pour
transporter les terroristes étrangers de
leurs camps d'entraînement de Jordanie
vers Antakya (Antioche) dans le sud de
la Turquie, d'où ils sont envoyés dans
la région de Lattaquié en Syrie, le tout
étant supervisé par les services
américains. Il est possible qu'il
s'agisse là d'une alternative à
l'invasion depuis le sud dont il est
question depuis longtemps. La plupart
des combattants islamistes sont des
Tchétchènes. Le Captagon fait bien des
miracles…Une créativité sans peine.
Chérif Abdedaïm
Article publié sur
La Nouvelle République
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de l'auteur pour publication
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