Politique
Pourquoi votre gauche n'est pas la nôtre
Bruno Guigue

© Bruno
Guigue
Mardi 24 janvier 2017
Vous pourrez faire toutes les primaires
que vous voudrez, votre gauche ne nous
inspirera que du mépris. Charlatans au
sourire enjôleur ou matamores au style
mussolinien, vous êtes des progressistes
de pacotille. Vous voulez un monde plus
solidaire, paraît-il, mais vous n'avez
cessé d'approuver l'ingérence
occidentale dans les affaires des
autres. Honte à vous, héritiers de Guy
Mollet ! Votre humanisme se métamorphose
toujours en arrogance néo-coloniale. La
lutte contre la pauvreté, à vos yeux,
c'est lorsque les pays riches commandent
aux pays pauvres.
Socialistes, ou
gauchistes, vous avez jeté Jaurès aux
orties depuis belle lurette. La guerre,
vous en redemandez ! Pour répandre la «
démocratie », vous comptez sur les
vertus pédagogiques des B 52. En guise
de publicité pour les « droits de
l'homme », vous exigez le bombardement
de pays qui ne nous ont rien fait.
Ignobles jusqu'au bout, vous réclamez
l'embargo, cette arme des riches contre
les pauvres. Que vaut votre compassion
pour les réfugiés, quand vous privez les
Syriens de médicaments pour les punir
d'avoir soutenu leur gouvernement ?
Faux-derches de
première, vous livrez des armes, en
Syrie, à ces allumés de la charia que
vous prétendez combattre en France.
Affreux terroristes au Bataclan,
rebelles modérés à Idleb, quel tour de
passe-passe, vous êtes experts en
transformation chimique ! Vous dites que
vous détestez ces criminels, et pourtant
vous les aimez chez les autres. Vous y
tenez, à votre lune de miel avec les
coupeurs de têtes ! Votre égérie
n'est-elle pas Elisabeth Badinter,
féministe milliardaire qui clame son
islamophobie tout en assurant à la tête
d'Havas la promotion publicitaire du
royaume saoudien ?
Vous êtes très
forts pour prononcer des incantations à
la gloire de la laïcité, mais vous allez
quand même vous aplatir devant le CRIF,
cette officine confessionnelle qui sert
d'ambassade officieuse à un Etat-voyou.
Avec M. Valls, vous roulez des
mécaniques face aux musulmans, mais face
aux sionistes, vous vous livrez à un
concours de lèche-bottes. Le
communautarisme vous répugne, paraît-il
? Oui, sauf lorsqu'il est au service
d'une puissance étrangère qui spolie les
Palestiniens et bombarde la résistance
arabe en Syrie avec votre complicité.
Reniements,
trahisons, la liste est longue. Vous
prétendez défendre les intérêts du
peuple, mais vous lui refusez l'exercice
de la souveraineté. Au lieu de lui
restituer le pouvoir usurpé par les
riches, vous lui imposez le carcan d'une
Union européenne qui tue la délibération
démocratique, sanctuarise le dogme
monétariste et asservit les travailleurs
à la loi d'airain du capital. Au nom
d'un internationalisme dévoyé, vous êtes
les fourriers des multinationales qui
ont colonisé l'Europe, vous avez bradé
la souveraineté, discrédité l'idée
nationale, abandonnée par votre faute
aux imposteurs de l'extrême-droite.
Vous dites, la main
sur le cœur, que vous êtes pour la
réduction des inégalités, mais vous vous
interdisez de toucher aux structures qui
les nourrissent. Vous condamnez
verbalement les effets sans chercher le
moins du monde à agir sur les causes.
Vous voulez mieux répartir les
richesses, mais sans préjudice pour ceux
qui les détiennent. Vous vous proclamez
socialistes, mais vous ménagez le
capital, vous cajolez la finance, vous
montrez patte blanche à ceux qui
possèdent l'argent et l'influence.
Où sont les
propositions de gauche, dans vos
programmes ? Où est la sortie de l'OTAN
et de l'Union européenne ? Où sont la
nationalisation des banques, la taxation
des activités spéculatives, le
plafonnement des revenus, la
relocalisation des industries, le
développement des services publics, le
protectionnisme raisonné, le contrôle
des mouvements de capitaux, la refonte
de la fiscalité et l'éradication de la
fraude, où sont, en un mot, l'abolition
des privilèges de l'oligarchie
financière et le rétablissement de la
souveraineté populaire ?
Notre gauche n'est
pas la vôtre. Pour nous, la gauche,
c'est Sahra Wagenknecht, qui réclame au
Bundestag la sortie de l'OTAN et le
dialogue avec la Russie. C'est Tulsi
Gabbard, élue hawaïenne du parti
démocrate américain, qui exige la fin de
la stratégie du chaos au Moyen-Orient.
C'est le parti communiste syrien qui
combat, au côté des baasistes, les
mercenaires wahhabites. C'est le Front
populaire tunisien, qui défend le
progrès social et l'égalité entre les
hommes et les femmes. C'est cette gauche
française qui se réveille, dans « La
France insoumise », au PRCF ou ailleurs,
pour tirer un trait sur des décennies
d'imposture socialiste.
Cette gauche, moins
connue, c'est aussi celle des
communistes indiens du Kérala, qui ont
donné à cet Etat de 33 millions
d'habitants le meilleur indice de
développement humain du sous-continent.
C'est celle des communistes cubains qui
ont obtenu, dans un pays isolé par le
blocus impérialiste, un taux de
mortalité infantile inférieur à celui
des USA et élu 48% de femmes à
l'Assemblée nationale du pouvoir
populaire. Ce sont tous ceux, en Bolivie
et au Vénézuéla, qui ont fait reculer la
pauvreté de masse et redonné leur fierté
aux peuples sud-américains.
Cette gauche, la
vraie, contrairement à cette contrefaçon
qui se donne en spectacle à la
télévision, prend au sérieux le droit
des nations à disposer d'elles-mêmes.
Elle sait que, sans l'indépendance
nationale, la souveraineté populaire
n'est qu'un leurre. Son patriotisme ne
l'éloigne pas de son internationalisme,
car elle revendique pour chaque pays le
droit de suivre sa voie dans le respect
des autres. Elle ose s'attaquer aux
structures de la domination capitaliste,
elle en prend le risque, au lieu de fuir
lâchement devant l'obstacle, faisant
allégeance aux puissants et jouant le
rôle de supplétifs dont leurs maîtres se
débarrasseront à la première occasion.
Bruno Guigue
(24/01/2017)
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