Monde
Après l'attentat de Jérusalem,
Droite, PS et FN à l'unisson !
Bruno Guigue
Mercredi 11 janvier 2017
Le 8 janvier 2017, une opération de la
résistance palestinienne a coûté la vie
à quatre soldats de l'armée d'occupation
israélienne, dont trois jeunes femmes.
Quatre morts de trop dans ce terrible
conflit, bien sûr. Mais cette action
n'est pas la première que mènent des
Palestiniens réduits à se battre contre
l'occupant avec leurs faibles moyens.
Utilisant un camion-bélier, cette
opération meurtrière, à la différence
des actions précédentes, n'a frappé que
des militaires. Et elle s'est déroulée
sur la promenade de Talpiot, un nouveau
quartier juif de Jérusalem érigé sur des
terres arrachées aux Palestiniens durant
la guerre de juin 1967.
Ni le
mode d'action, ni le lieu choisi
n'étaient donc indifférents. A
Jérusalem-Est annexée, plus qu'ailleurs,
le peuple palestinien est soumis, sur
son propre sol, à une occupation et à
une colonisation condamnées par le droit
international. Dans l'indifférence
générale, il subit les humiliations
infligées par un occupant surarmé qui
bénéficie de la complicité des
puissances occidentales et de la
passivité des régimes arabes.
L'opération du 8 janvier, par
conséquent, est le fruit amer de cette
cruelle dépossession du peuple
palestinien, de la négation de ses
droits les plus élémentaires. C'est bien
la violence de l'occupation qui génère
celle de la résistance, et cette
résistance est légitime.
Les
forces politiques françaises ont-elles
pris la mesure d'un tel événement et de
ce qu'il signifie ? Après cet attentat,
considéré par de nombreux observateurs
comme le plus grave depuis le
déclenchement de « l'Intifada des
couteaux », ont-elles médité la phrase
célèbre du général de Gaulle accusant
Israël, le 27 novembre 1967, d'organiser
« sur les territoires qu'il a pris une
occupation qui ne peut aller sans
oppression, répression et expulsions »
et prophétisant la naissance d'une «
résistance qu'Israël, à son tour,
qualifiera de terrorisme » ?
Loin
de là. Au lieu de susciter une analyse
objective, l'événement a provoqué une
épidémie de mauvaise foi. Championne
hors catégorie du soutien à Tel Aviv,
Anne Hidalgo a organisé un rassemblement
silencieux et illuminé l'Hôtel de Ville
de Paris aux couleurs d'Israël. « Ce
soir nous sommes face à l'Hôtel de Ville
de Paris illuminé en mémoire des
victimes de l'attentat de Jérusalem
#TousUnisContreLeTerrorisme », a
tweeté de son côté le Conseil
représentatif des institutions juives de
France. Chef de la diplomatie française,
Jean-Marc Ayrault ne pouvait demeurer en
reste. Il a dénoncé un « acte ignoble »
et exprimé la « solidarité de la France
avec Israël ».
A
cette belle harmonie entre le PS et le
CRIF, la droite n'a pas manqué
d'apporter sa contribution. Son chef de
file, François Fillon, a immédiatement
réagi : « Solidarité avec le peuple
israélien après l'attentat de Jérusalem.
Soyons unis contre le terrorisme ».
Visiblement frappé d'amnésie gaulliste,
le candidat des Républicains à
l'élection présidentielle a perdu de vue
la distinction entre le terrorisme et la
résistance à une occupation illégale.
Celui que l'on créditait un peu vite
d'un certain courage sur les questions
internationales vient aussi de déclarer,
sur Bfm/Tv, que « Bachar Al-Assad est un
dictateur et un manipulateur ». Pour
peu, on aurait presque oublié qu'il fut
le premier ministre de Nicolas Sarkozy,
passé à la postérité comme le fossoyeur
de l'héritage gaulliste.
Au
Front national, enfin, même son de
cloche. « Soutien au peuple israélien
après le terrible attentat islamiste de
Jérusalem », a twitté le 9 janvier la
présidente du Front national. Une fois
de plus, l'opération du 8 janvier est
qualifiée dans des termes qui en
interdisent toute intelligibilité.
L'islamisme supposé de cette action
armée agit comme un mot-écran, qui
dispense de toute analyse politique sur
l'oppression coloniale en Palestine. Il
est vrai que la famille Le Pen n'a
jamais été très ardente dans la lutte
contre le colonialisme. Et si l'on est,
en principe, pour l'indépendance de la
France, on sait aussi faire des
exceptions. Tous ceux qui s'imaginent
que la présidente du FN s'affranchit de
tous les communautarismes, et pas
seulement de celui qu'elle prête aux
musulmans, en seront pour leurs frais.
Bruno
Guigue (11/01/2017)
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