Opinion
Bachar elAssad à
ses visiteurs :
Pour ces raisons je suis optimiste
Lundi 18 mars 2013
Alors que les opposants au régime syrien
s’attendaient à une révolution populaire
qui assure la mise en place d’un régime
démocratique, ceux-ci expriment
aujourd’hui leur désarroi face au chaos
qui règne dans leur pays et qui provoque
des malheurs sans égal au peuple syrien.
C’est ainsi que l’opposant Haytham
Mannaa a réclamé de la communauté
internationale de « stopper les
batailles militaires absurdes »,
qualifiant ce qui se passe en Syrie de «
guerre » et non pas de « révolution ».
Il y a déjà deux ans, ce même opposant
vivant à l’extérieur de son pays
assurait que la seule solution à la
crise syrienne est de négocier
pacifiquement avec le régime. Le temps
des négociations est-il venu ?
Bachar elAssad : « La coopération avec
les alliés se fait au niveau des
expertises et non des combattants »
« La chute de la région de Raqqa dans
les mains de l’opposition n’a pas sapé
le moral du régime ». S’exprimant devant
ses visiteurs, le président Bachar
elAssad assure que « la bataille est de
longue durée parce qu’il s’agit d’une
lutte contre le terrorisme dans laquelle
ont échoué toutes les forces du monde ».
« Mais les choses vont bon train sur les
plans politique et militaire : l’armée
est désormais plus expérimentée au
niveau des déplacements des miliciens,
de plus, c’est l’armée qui choisit le
lieu et le temps de la bataille au lieu
d’y être entrainé. Ceci a empêché la
dispersion des forces militaires,
contribué à contenir certaines zones en
guerre, limité considérablement le
mouvement des miliciens dans des lieux
où ils avaient l'intention de planifier
des attaques de grande envergure. De
même, le système de brouillage des
communications a changé et les
dispositifs de surveillance ont évolué,
permettant ainsi des opérations
«ciblées» et plus douloureuses pour les
insurgés, explique le président Assad.
Selon lui, « des changements
importants sont survenus au niveau de
l'infrastructure de l’armée et des
renseignements. La coordination s’est
accrue avec certains de nos alliés qui
ont présenté beaucoup d'expériences dans
les différents domaines. Les comités
populaires qui deviennent jour après
jour en tant qu’armée alternative ont
joué un rôle majeur dans la protection
des zones évacuées par l'armée. La
Russie est par exemple prête à combler
toute pénurie de matériel militaire. Le
Hezbollah et l'Iran ont présenté toutes
leurs compétences pour protéger les
sites religieux, tels que le mausolée de
Sayeda Zeinab, et les villages qui
faisaient l’objet de plusieurs attaques.
A Damas, la coopération se fait au
niveau des expertises et non des
combattants.
Dans le domaine militaire aussi, des
changements radicaux se font sur les
frontières. La Jordanie est toujours
engagée dans la coopération sécuritaire
avec la Syrie. Pour le roi Abdallah de
Jordanie, la guerre contre alQaida ou le
front annosra est une bataille
jordanienne. La coopération récente sur
le plan militaire a permis de tuer des
commandants et des éléments d’alQaida et
du front annosra, dont Abou ali
elJoulani tué à Homs ».
Plusieurs avertissements au Liban
Le président Assad, cité par ses
visiteurs, dit au sujet du Liban : « La
situation avec le Liban est plus
compliquée. Plusieurs mesures ont été
prises dernièrement pour limiter
l’infiltration des miliciens. Certaines
mesures ont été efficaces alors que
d’autres ont échoué. Il s’est avéré que
des parties politiques et sécuritaires
libanaises sont impliquées dans ces
infiltrations. Des informations
parvenues à Damas révèlent qu’un
incident sécuritaire dangereux pourrait
avoir lieu aux frontières. Damas a ainsi
établi un lien entre ces informations et
des visites récentes effectuées par
certains responsables libanais en Arabie
Saoudite et au Qatar. Les responsables
syriens détiennent des informations
précises sur la teneur de certaines
rencontres qui ont eu lieu dans le
Golfe, notamment entre le président
Walid Joumblatt et le prince Bandar ben
Sultan, une rencontre qui a duré six
heures. Ils connaissent aussi la teneur
des discussions entre des responsables
qataris et l’ancien premier ministre
libanais Fouad Siniora. Les dirigeants
libanais ont reçu le mot d’ordre de
provoquer une escalade des violences aux
frontières avec la Syrie ».
Tous ces éléments ont poussé les
dirigeants syriens à révéler au grand
jour la teneur de la lettre
d’avertissement diplomatique adressée
par l’ambassadeur syrien au Liban Ali
Abdel Karim Ali au ministère libanais
des Affaires étrangères, et à avertir
encore le Liban de frapper les positions
des miliciens ou des jihadistes qui
puissent menacer la sécurité des
territoires syriens depuis la Békaa ou
le Nord Liban passant encore par
d’autres régions.
La situation avec l’Irak est meilleure
« La coopération sécuritaire avec
l’Irak est dans ses meilleurs états.
Tout a changé après l’accentuation des
attaques contre le Premier ministre
irakien Nouri elMaliki. Celui-ci a senti
que la guerre des axes l’a placé dans le
même rang que la Syrie, l’Iran et le
Hezbollah. Au début de la crise
syrienne, certaines voix irakiennes
disaient que la Syrie méritait ce qui se
passe sur son territoire parce qu’elle
facilitait le passage des éléments d’alQaida
vers l’Irak. Aujourd’hui, l’étau se
resserre autour des miliciens. Les
patrouilles se multiplient, la
coopération sur le plan des
renseignements a atteint son apogée
entre les deux pays, favorisée par un
certain climat international. La raison
en est que la crainte du front annosra
plane sur tout le monde, surtout qu’alQaida
a repris ses attaques au cœur de l’Irak.
La grande bataille
Selon des informations de
renseignements, l’armée syrienne a
préparé des plans précis pour mener des
batailles d’envergure. Damas est
désormais plus protégée que jamais. Des
explosions ou des voitures piégées
pourraient avoir lieu à tout moment. Des
kamikazes peuvent attaquer des sites
sécuritaires ou gouvernementaux, malgré
les blocs de béton. Mais la grande
bataille à Damas est devenue
presqu’impossible. Des plans précis ont
été mis en place pour la protection de
la ville et la confrontation des
miliciens. Quant à Homs, elle est sur le
point de tomber entièrement dans les
mains de l’armée, parce qu’une décision
politique a été prise à cet égard. Pour
le régime, Homs est une ville centrale
dans la stratégie militaire. Il n’est
pas permis qu’un pouce de son territoire
reste dans les mains des groupes armés.
Quant à Alep, on attend la grande
bataille. Mais tout dépend des
discussions politiques entre Américains
et Russes. Cette bataille pourrait
couter cher, mais la direction syrienne
reprend ce qu’elle a déjà dit concernant
Bab Amr ou autres villes : « Nous
entrerons là où nous voulons, mais cette
question nécessite une décision
politique. Nous ne voulons pas entrer
puis permettre ensuite le retour des
miliciens. La nature de la bataille a
changé ».
Des rumeurs circulent sur de
surprises sécuritaires. Les visiteurs du
président Assad rapportent : « Nous
menons une bataille acharnée contre le
terrorisme et contre ceux qui
soutiennent les miliciens. Nous
réalisons que la fin de cette guerre
n’est pas pour bientôt, mais nous sommes
décidés à aller de l’avant pour
éradiquer ce phénomène étrange à notre
société ».
Le dialogue politique est important,
mais…
Citant toujours Assad, ses visiteurs
rapportent au sujet du dialogue avec
l’opposition: « Nous n’avons jamais
fermé la porte au dialogue, et nous
n’allons pas le faire. Mais nous devons
savoir avec qui dialoguer ? Qu’est-ce
qu’on nous propose ? Quelle partie
allons-nous négocier ? Chaque jour
l’opposition se divise de plus en plus,
ses divergences grandissent, chaque
partie avance des propositions
contraires aux autres. Qu’ils se mettent
d’accord avant tout et nous verrons
quelle position adopter. Nous avons déjà
entamé un dialogue avec des parties de
l’opposition de l’intérieur du pays et
ceci a eu des résultats positifs. Nous
avons proposé un projet complet pour les
réformes et nous sommes prêts à en
débattre. Les portes de la Syrie sont
ouvertes à tout le monde, à l’exception
des terroristes que nous allons
combattre jusqu’à la fin ».
Et alAssad d’ajouter : « Nous
dialoguons avec tout le monde à
l’exception des terroristes, mais à
partir de nos constantes, nous n’allons
pas accepter qu’on nous impose des
conditions. C’est ce que nous l’avons
dit dès le début de la crise. Il s’avère
que nous avions raison et les autres ont
réalisé que nous étions sérieux ».
Assad : « L’ouverture au dialogue n’est
pas due à la faiblesse du régime »
Dans
ses rencontres avec des personnalités
politiques arabes, le président syrien
assure que l’ouverture de Damas au
dialogue n’est pas due à la faiblesse du
régime. « L’Etat est plus fort, l’armée
est plus solide, et malgré toute cette
guerre, la situation de la Syrie est la
meilleure sur le plan régional. Regardez
l’Egypte qui se trouve dans l’impasse,
la Tunisie qui est noyée dans ses
différends, les pays du Golfe qui ne
savent comment agir face aux Frères
musulmans, l’Arabie Saoudite dont le
sort demeure inconnu, le Qatar déchiré
sur le sujet de la succession du pouvoir
et qui fait face à une opposition
grandissante de plus en plus après que
ses liens avec des djihadistes au Mali,
en Libye, en Syrie… eurent été dévoilés.
Quant à la Turquie qui cherche à sauver
la face après son implication dans les
affaires syriennes, est prête à faire
toutes les concessions possibles, même
avec le parti des travailleurs du
Kurdistan et son chef Abdallah Ocalan !
Poutine est un allié solide
Pour le président syrien, l’alliance
avec la Russie est dans ses meilleurs
états. « Tout le monde soutient le rôle
russe, et Moscou n’a pas changé sa
position depuis le début de la crise. La
Russie a dès le premier jour appelé les
pays du Golfe, la Turquie et certains
pays occidentaux à cesser
d’approvisionner les miliciens en armes
et a appelé à un dialogue politique. De
même. Moscou a dit qu’Assad ne sera pas
renversé, et deux ans après, tout le
monde a réalisé ce constat. Le président
russe Vladimir Poutine est décidé à
jouer un rôle international et à
restituer l’équilibre à ce monde
unipolaire. Actuellement, l’envoi des
navires militaires se multiplie. Pour
les Russes, toute action militaire
directe pour renverser Assad sera suivie
d’une riposte militaire.
Le rapprochement USA-Russie
Assad n’a aucune confiance dans le
rôle américain. Il sait bien que les
plans américains et occidentaux dans la
région visent à affaiblir l’axe de la
résistance et à assurer la protection
d’Israël. Par ailleurs, le président
syrien est convaincu que les Américains
ont déduit après deux ans à la crise que
l’armée syrienne est devenue plus forte
que jamais et qu’ils n’ont pas réussi à
convaincre un diplomate syrien de
quatrième degré de faire défection.
Selon le président syrien, la
position américaine du terrorisme doit
être claire. « Il est possible de se
mettre d’accord sur une étape
transitoire et sur un gouvernement
élargi, mais la politique de ce
gouvernement doit être claire au sujet
du conflit avec Israël et de la laïcité
de l’Etat. Le peuple syrien peut se
décider s’il veut ou pas Assad mais à
travers un processus électoral. Mais
ceci ne peut avoir lieu qu’au dernier
jour du mandat d’Assad et c’est une
ligne rouge pour la direction syrienne
».
« Il faut donc former une équipe de
l’opposition avec une politique claire
ensuite nous pouvons dialoguer. Haytham
Manna joue un excellent rôle dans ce
contexte. Les Russes sont en train de
collaborer avec les Américains pour
cette fin. L'Arabie saoudite peut avoir
un rôle en ce sens mais jusqu'à présent,
elle est toujours impliquée avec le
Qatar dans l’envoi des armes aux
miliciens ». Certaines informations
indiquent que le prince Muqrin pourrait
devenir le prochain roi saoudien. Cet
homme entretient des relations avec
Damas.
Pour le président syrien, le Qatar
est le vrai ennemi de la Syrie, et il
fait partie d’un jeu plus grand. Quant
au Hezbollah et l’Iran, « ils sont des
alliés fidèles », et Téhéran inclut le
dossier syrien dans ses pourparlers avec
l’Occident. L’Iran sait bien comme
Moscou que la guerre contre elle a lieu
à Damas. Bref, cet axe s’étendant de
Beyrouth aux pays de BRICS (regroupant
le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine
et l'Afrique du Sud) est désormais un
acteur principal dans les équations
internationales.
source: assafir
Le
dossier Syrie
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