Syrie
Syrie : Entre échec de la trêve et
début de la fin ?
Antoine Charpentier
Distribution d’aides alimentaires russes
aux habitants de la ville d’Alep
Photo: Sana
Dimanche 2 octobre 2016
Les frappes
américaines contre l’armée syrienne à
Deir El-Zor ont révélé encore une fois
au monde qui est contre et qui est pour
la guerre en Syrie; qui exploite le
terrorisme international pour des
intérêts particuliers, et qui lui fait
barrage pour endiguer sa propagation.
Les preuves sont irréfutables.
Sept jours
étaient nécessaires pour que l’accord
russo-américain soit effectif en Syrie.
Après plusieurs violations de la trêve
par les groupes armés à Alep, ce sont
les Etats-Unis qui ont volontairement
bombardé l’armée syrienne à Deir El-Zor
permettant à Daech d’avancer sur ce
terrain. Une erreur, prétendent les
Américains. Quel naïf peut croire une
chose pareille ?
Qui peut
croire qu’une des plus puissantes
aviations au monde, une des mieux
équipées se trompe de cible en
bombardant avec quatre avions de chasse
et pendant une heure les positions de
l’armée arabe syrienne au lieu de celle
de Daech ? Si bombarder les positions de
Daech était la volonté des Américains,
pourquoi ces derniers n’ont-ils pas
attendu tout simplement le septième
jour ? C’est-à-dire le lendemain de
cette agression cruelle contre l’armée
syrienne ? Pour la porte-parole de la
présidence syrienne Bouthaina Chaaban : « Si
c’était vrai que les Américains ont fait
une erreur, ils ne sont pas pour autant
retournés pour bombarder les mêmes
positions lorsque Daech les a reprises à
l’armée syrienne. »1
Il convient
de préciser qu’au moment même où
l’aviation américaine bombardait les
positions de l’armée syrienne à Deir
El-Zor au profit de Daech, Israël
bombardait le sud de la Syrie au profit
d’Al-Nosra et la Turquie opérait au nord
syrien au profit de l’armée syrienne
libre. Trois acteurs pour le même projet
en Syrie. La création de plusieurs zones
isolées amputant la Syrie de ses
territoires.
Les
Etats-Unis s’opposent encore et toujours
aux révélations du contenu de leur
accord avec la Russie. De telles
divulgations nuisent gravement à la
réputation des Etats-Unis notamment
auprès de ses alliés au Moyen-Orient,
montrant leur double jeu. Les
Américains et leurs alliés ont tenté,
par l’opération contre l’armée syrienne,
de rebattre les cartes au profit des
terroristes, mettant fin à la trêve.
Toutefois, les Américains préfèrent
perdre la guerre en Syrie en essayant de
la prolonger le plus possible à travers
leurs mercenaires, plutôt que de la
perdre en appliquant l’accord conclu
avec les Russes, ce qui signifie pour
eux un abaissement pur et simple face à
la Russie.
De ce fait,
nous comprenons à travers les
agissements des Américains que la guerre
en Syrie n’est pas encore terminée.
L’irresponsabilité et les manœuvres des
Américains vis-à-vis des Syriens et des
Russes ainsi que de leurs alliés
risquent de transformer la guerre
syrienne en conflit régional, voire
mondial.
L’idée d’une
erreur est toujours répandue par la
diplomatie américaine à chaque fois
qu’il faut justifier une bavure. Ce fut
à titre d’exemple le cas en Irak en
2003.
Les
Américains ont offert l’opportunité aux
Syriens et aux Russes d’en finir avec la
situation à Alep remportant enfin la
victoire. Ce qui mettra en grande
difficulté les Etats-Unis et leurs
alliés, qui risqueront de quitter pour
de bon, le champ de bataille en vaincus.
Enfin, les
temps semblent durs pour l’axe que
représentent les Etats-Unis en Syrie.
Alep va probablement être reprise, les
réconciliations dans différentes
localités syriennes fonctionnent
correctement et les combattants quittent
les lieux sans conditions en
direction d’Idlib. Israël ne peut pas
aller plus loin dans le sud de la Syrie
puisqu’elle risque de se frotter à un
adversaire de taille, le Hezbollah.
Quant aux Turcs, ils reviendront à la
raison scellant de nouveau une alliance
d’intérêt avec Damas pour faire face aux
Kurdes et aux Américains.
Que nous le
voulions ou non, l’armée arabe syrienne
était la seule à respecter la trêve. La
Russie est la seule à chercher depuis
six ans une solution politique à la
guerre syrienne, respectant la
souveraineté de la Syrie ainsi que la
volonté de son peuple. Il est certain
que la Russie a des intérêts en Syrie et
au Moyen-Orient. Croire le contraire
relève d’une naïveté injustifiable.
Néanmoins, les intérêts russes
n’empiètent pas, au moins en apparence,
sur l’indépendance d’une nation, sur la
souveraineté d’un territoire, sur la
volonté d’un peuple, bafouant tous les
droits légaux pour importer une
démocratie à coup d’obus, à l’instar de
ceux qui importent une interprétation
religieuse par l’épée. La seule
différence est uniquement l’arme
utilisée.
Par leur
soi-disant erreur, les Etats-Unis ont en
quelque sorte libéré l’armée syrienne et
ses alliés d’un certain nombre
d’obligations, au profit d’une victoire
à venir à Alep. Cela va permettre
l’accélération des opérations au
détriment d’une solution politique que
les Etats-Unis seront tôt ou tard
contraints d’accepter, de signer et de
mettre en application.
Antoine
Charpentier | 29
septembre 2016
1 Bouthaina
Chaaban « Le bombardement américain de
la Syrie n’est pas une erreur et il faut
qu’ils comprennent », www.smn.sy
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