Opinion
Les racines occidentales du
« terrorisme moyen-oriental » :
Exposé d’un point de vue politiquement
incorrect
Amir Nour
Mardi 7 février 2017
Source :
Mondialisation.ca
Convaincus que le terrorisme, sous
toutes ses formes et dans toutes ses
manifestations, quels qu’en soient les
auteurs, le lieu et les buts, est
inacceptable et injustifiable, les Etats
membres de l’ONU avaient finalement pu
adopter, le 8 septembre 2006, une
démarche commune prévoyant des mesures
globales, coordonnées et cohérentes
visant à prévenir et combattre le
terrorisme, dans le cadre d’une
« Stratégie antiterroriste mondiale des
Nations Unies ». Mais, dix années plus
tard, la « communauté internationale »
n’est toujours pas parvenue à s’entendre
sur une définition consensuelle de
l’objet à combattre en commun. Or,
celui-ci ne cesse de s’amplifier et de
s’étendre en infligeant une dévastation
et des souffrances indicibles,
principalement aux Etats et aux
peuples du monde arabo-musulman.
Paradoxalement, c’est à ces mêmes
victimes et à leur religion majoritaire
-l’Islam- que certains, au mépris des
vérités historiques les plus établies,
imputent la paternité du terrorisme
transnational et, partant, la mise en
péril de la paix et de la sécurité
internationales.
Qu’en
est-il au juste de la responsabilité des
uns et des autres dans la naissance et
l’expansion du phénomène de la violence
dans les temps modernes ; une violence
et ses conséquences contre lesquelles
des penseurs visionnaires comme Malek
Bennabi et Eric E. Hobsbawm[1]
avaient pourtant mis en garde le monde,
au siècle passé déjà ?
Les
avis ici exposés sur cette thématique
brûlante ne sont pas ceux exprimés par
des officiels ou des penseurs
arabo-musulmans ; ni par des victimes
civiles innocentes ne trouvant personne
pour leur donner justice concernant les
bombardements aveugles et meurtriers
d’avions et de drones occidentaux qu’ils
subissent épisodiquement[2] ;
ni même par des Occidentaux, femmes et
hommes de tous milieux, se convertissant
à l’Islam nonobstant la diabolisation
systématique dont celui-ci est l’objet
de manière constante[3].
Ils sont exprimés par des Occidentaux,
situés à différents niveaux d’autorité
et de responsabilité politique et
morale, représentant l’avers et l’envers
de la médaille du «terrorisme» et
pointant du doigt la responsabilité
historique de certains gouvernements de
pays occidentaux dans les tragédies qui
accablent les peuples du Moyen-Orient et
d’Afrique du Nord et dont le terrorisme
barbare n’est que la partie émergée de
l’iceberg des méfaits d’une minorité
d’acteurs hyperpuissants et sans
scrupules. A l’évidence, pour une partie
de cette minorité[4],
celle notamment appartenant au complexe
militaro-industriel, la vie humaine et
l’avenir de la civilisation universelle
ne représentent, au mieux, que de la
menue monnaie.
Ces
avis sont représentatifs d’une voix
«politiquement incorrecte» dont l’écho
peine à se frayer un passage au milieu
du tumulte médiatique des discours
démagogiques des «nouveaux
bien-pensants». Ce qui sera analysé dans
cette étude c’est précisément ce que
l’«érudition» de ces derniers ne dit pas
ou ne veut pas dire concernant la face
cachée du «terrorisme», tout entier et
indûment collé à la peau de l’Islam et
des musulmans, et qui explique dans une
large mesure les tenants et les
aboutissants du dérèglement de notre
monde désormais irréversiblement
globalisé.
A la recherche de l’introuvable
définition commune du «terrorisme»
Il y a
peu, le magistrat Vincent Sizaire,
auteur d’un livre sur l’«imposture
sécuritaire»[5],
expliquait dans un article du MONDE
diplomatique[6]
les difficultés qui s’attachent de nos
jours à la qualification, sans risque de
tomber dans le piège de la manipulation,
de la notion de «terrorisme». Voilà plus
de trente ans, dit-il, que «la même
scène se rejoue. A chaque attentat
présenté comme terroriste, les partisans
d’un supposé réalisme sortent du bois et
nous pressent d’adopter (enfin) des
mesures qui, censées répondre à la
gravité du péril, exigent la mise entre
parenthèses plus ou moins durable de
l’Etat de droit». Pour ce magistrat, la
qualification de terrorisme relève
davantage du rapport de forces politique
que de l’herméneutique juridique
puisqu’elle résulte nécessairement d’un
rapport de forces et d’une appréciation
politiques, au terme desquels les
pouvoirs en place l’appliquent de façon
plus ou moins discrétionnaire à tel
phénomène délictueux plutôt qu’à tel
autre. Il souligne à quel point il est
problématique d’utiliser, aujourd’hui
encore, le même terme pour désigner les
activités de groupuscules fanatiques et
obscurantistes et l’action d’opposants
politiques à des régimes autoritaires.
Car en fait, ajoute-t-il, qualifier un
acte de terroriste contribue, au moins
autant que les revendications de ses
auteurs, à transformer ces derniers en
«hérauts d’une philosophie, d’une
religion, d’une doctrine politique ou,
pis encore, d’une civilisation». Ce qui
pourrait avoir pour effet indésirable de
contribuer à rehausser la cause dont ces
groupes se réclament et de nourrir leur
pouvoir de séduction vis-à-vis d’une
jeunesse en déshérence. Pour espérer
désamorcer ce pouvoir, Sizaire est
d’avis que le plus simple serait de
refuser à ces groupes l’onction
terroriste, pour ne les regarder que
comme de vulgaires organisations
criminelles ; autrement dit, de cesser
de leur donner «fût-ce indirectement,
crédit de leur prétention à représenter
autre chose que leur appétit de pouvoir
ou leur pulsion de mort».
Dès
lors, il ne saurait être question pour
nous, à travers ces lignes, de nourrir
une quelconque prétention d’avancer une
nouvelle définition de cette notion de
terrorisme, qui soit moins équivoque que
ce qui existe déjà. Il faut savoir en
effet qu’il n’existe pas encore de
définition consensuelle au niveau
international à ce sujet. Alex Schmid et
Albert Jongman recensent 109 définitions
différentes dans leur livre[7].
L’ONU n’arrive toujours pas à s’entendre
sur une définition agréée de tous ses
Etats membres depuis le 17 décembre
1996, date de l’adoption par l’Assemblée
générale de la résolution 51/210 par
laquelle il fut décidé de créer un
Comité spécial chargé d’élaborer une
convention générale sur le terrorisme
international. Même les Etats-Unis
d’Amérique d’où fut lancée la «guerre
globale contre le terrorisme» (GWOT) en
2001, «personne n’est tout à fait sûr de
ce qu’est au juste le terrorisme», à en
croire Oliver Libaw d’ABC News[8].
Ceci inclut les agences gouvernementales
qui utilisent différentes définitions de
cette notion. Libaw précise qu’en dépit
de la pression exercée par les attaques
du 11 Septembre sur le gouvernement pour
s’accorder sur une définition unique,
aucun résultat notable n’a pu être
obtenu. Selon Richard Betts, Directeur
de l’Institute of War and Peace
Studies de l’Université de Columbia,
cela est dû principalement au fait que
«tout le monde peut trouver une
exception à toute définition abstraite».
De
beaux jours semblent ainsi promis à la
fameuse expression «le terroriste de
l’un, c’est le combattant de la liberté
de l’autre»[9],
si souvent citée depuis qu’elle a été
utilisée, pour la première fois en 1975,
par Gerald Seymour dans son livre «Harry’s
Game» dont la trame se déroule en
Irlande du Nord autour d’une histoire de
«terrorisme» de l’IRA.
Terrorisme, barbarie et… Islam !
Pour
une certaine pensée en Occident, le
terrorisme, la barbarie et l’intolérance
sont consubstantiels à l’Islam en tant
que religion ; ils ne constituent pas,
comme l’affirment «certains
intellectuels rendus aveugles par leur
pacifisme», une déviation par rapport au
«vrai Islam». Par conséquent, face aux
«fous de Dieu» musulmans qui
«considèrent le progrès comme un mal, la
tolérance comme une faiblesse et le
pacifisme comme un pêché» et sont
«porteurs d’un appel au meurtre et à la
destruction», il faut opposer une
résistance et une lutte implacables dans
le cadre d’une «longue Quatrième Guerre
mondiale»[10] ;
à l’instar de celles livrées par le
«monde libre» contre le fascisme et le
nazisme durant les Première et Seconde
Guerres mondiales et contre le
communisme durant la «Troisième Guerre
mondiale» qui se serait achevée avec la
fin de la Guerre froide en 1989.
Rien
ne semble ébranler les certitudes des
tenants de cette «pensée dominante»
souvent qualifiée de néoconservatrice,
véhiculée principalement par des think
tanks occidentaux et israéliens et
relayée par nombre de leurs redoutables
médias de masse. Et il serait vain de
leur rappeler, par exemple, qu’en
l’absence d’une convention générale
internationale sur le terrorisme (en
raison notamment des divergences avec
les pays occidentaux sur la définition
du terrorisme, qu’il faudrait distinguer
de la lutte légitime des peuples pour
l’autodétermination et dans laquelle il
faudrait inclure le «terrorisme
d’État»), les Etats arabo-musulmans ont
élaboré leurs propres instruments
juridiques contre le terrorisme dans le
cadre des ensembles régionaux auxquels
ils appartiennent ; que dans les années
1990, un pays comme l’Algérie avait
lutté seul contre le terrorisme, durant
une décennie et devant un mutisme
international douteux; un terrorisme qui
lui a coûté plus de 200.000 morts et des
pertes économiques estimées à plus de 30
milliards de dollars[11] ;
que les victimes de la «barbarie
terroriste» continuent d’être à 95%
musulmanes, vivant dans le monde
arabo-musulman[12] ;
que les plus hautes autorités
officielles et les grands savants de
l’Islam ont condamné sans appel tant
l’idéologie que les actions des groupes
terroristes et que l’écrasante majorité
des populations du monde arabo-musulman
rejette le terrorisme sous toutes ses
formes et manifestations, comme le
confirment les statistiques fournies par
des agences et des instituts de sondage
occidentaux eux-mêmes[13].
En son
temps, Julien Benda dénonçait la
“trahison des clercs” dans son livre le
plus célèbre. Plus près de nous, Pascal
Boniface épingle les “intellectuels
faussaires” qui portent une lourde
responsabilité dans “la place occupée
par le mensonge dans le débat public”.
Il vise en particulier ceux qui,
recourant à l’amalgame, font référence
au “fascislamisme” et s’inscrivent ainsi
dans une démarche néoconservatrice qui
prospère en Occident depuis les
attentats du 11 septembre 2001.
Nous
avons déjà abordé cette problématique de
l’Islam comme épouvantail mobilisateur
et rassembleur en Occident dans un
travail précédent[14].
Nous y avions notamment signalé «un
dangereux glissement sémantique que nous
ne cessons d’observer depuis la chute du
Mur de Berlin: de la “lutte
antiterroriste”, l’on est passé à la
guerre contre le “terrorisme islamiste”
puis à celle contre l’ “extrémisme
islamique”. Et nous nous étions alors
interrogés: «Assistera-t-on bientôt à
l’abandon des qualificatifs superflus et
des euphémismes hypocrites pour
revendiquer ouvertement la guerre contre
l’Islam tout court ?». Le temps semble
nous avoir donné raison à ce sujet,
comme nous le verrons à travers quelques
exemples d’écrits récents.
Ainsi,
Alexandre Del Valle, l’auteur du livre
“Le complexe occidental: Petit traité de
déculpabilisation”, est convaincu que
“l’Occident se trompe systématiquement
d’ennemis depuis la fin de la Guerre
froide en désignant comme tel la Russie,
qui est pourtant un allié naturel
géopolitique et énergétique face aux
pôles totalitaires de l’islamisme, donc
face à nos vrais ennemis”. Explicitant
davantage sa pensée, il soutient que “la
pire menace pour nos sociétés gangrenées
de l’intérieur par des Etats et
institutions islamiques ayant pour
horizon la charia et qui ambitionnent de
conquérir/islamiser l’Europe, n’est pas
le djihadisme de Daech ou Al-Qaïda” dès
lors que, pour lui, la source
idéologique et théologique du djihadisme
réside dans la charia, et que celle-ci
n’est ni remise en question ni réformée
par les pôles soi-disant “modérés”[15].
Le
même discours guerrier est adopté par
l’historien Gabriel Martinez-Gros[16]
qui estime que l’Occident est tellement
soucieux de préserver paix et prospérité
qu’il ne veut pas se donner les moyens
de lutter contre la violence, et s’en
trouve ainsi handicapé face aux
terroristes. Instrumentalisant les
thèses du grand penseur musulman Ibn
Khaldoun, il pense que l’Islam “est une
religion née armée, aux marges d’empires
par définition pacifiés, Byzance et
l’Empire sassanide, dont les tribus
arabes formaient la contrepartie
violente” et que les djihadistes
d’aujourd’hui “ne font que prendre
exemple sur Mahomet et les premiers
califes”. Que faire alors ?
Martinez-Gros affirme que face à ce
qu’il appelle l’ “impérialisme de la
culpabilité, un néocolonialisme de la
repentance” et aux djihadistes, “la
seule chose que peuvent opposer les
démocraties, c’est l’action solidaire.
Les producteurs de l’empire doivent
faire face ensemble à la violence des
confins”.
Pis
encore, des intellectuels comme Del
Valle et Martinez-Gros réussissent à
entraîner dans leur sillage une nouvelle
génération de chroniqueurs de service
zélés, originaires du Sud. En effet,
dans une singulière entreprise
d’incrimination d’un “certain discours
colonial qui absout les islamistes” et
au mépris des faits historiques les plus
avérés, ces chroniqueurs n’hésitent
guère à s’en prendre publiquement et
violemment à tous ceux qui vilipendent
l’islamophobie rampante et qui se
rendent “coupables” de ce fait d’une
“dangereuse dérive qui, au nom de la
dénonciation du crime colonial ou
‘impérialiste’, s’allie avec le discours
islamiste” ! Ils enchaînent dans
l’amalgame et l’auto-flagellation en
affirmant que “l’Islam n’est plus la
forme d’une foi, mais d’un refus de
vivre et de laisser vivre (…) si
aujourd’hui l’Islam est islamisme, c’est
aussi par ce que les gens de sa foi se
taisent, laissent faire et s’accommodent
de la prise en otage de leur parole et
de leur statut de victime pour geindre
et confondre droits et abus”[17].
Devant
une aussi grossière confusion des
genres, comment s’empêcher de rappeler
le mot retentissant d’Arundati Roy
“désormais, la guerre est appelée paix
et le noir est appelé blanc”? Et comment
ne pas compatir avec ceux qui,
vaillamment, tentent de faire entendre
sur cette thématique du terrorisme
“islamiste”, voire “islamique”, un
discours plus constructif, différent de
celui omniprésent d’aujourd’hui, à un
moment où s’exacerbent partout les
plaies de l’extrémisme, de
l’islamophobie, du racisme, de la
xénophobie et, au bout du compte, de
l’affrontement de tous contre tous !
Dans
le contexte français, qui est de nos
jours le plus marqué par ces
plaies, un débat d’opinion houleux sur
le thème de l’identité -que les
politiciens de toutes obédiences ne
manquent pas d’exploiter en prévision de
la prochaine élection présidentielle-
s’est solidement installé. Mais des voix
nouvelles commencent à émerger, comme le
résume bien Nicolas Truong dans une
tribune[18]
: “En philosophie comme en économie, une
fronde intellectuelle conteste cette
hégémonie. Une réfutation de la notion,
un rejet de son obsession, un ras-le-bol
vis-à-vis d’un débat qui tourne en
rond”. Ces frondeurs se sont fixé pour
objectif premier de ne plus devoir
choisir entre les deux discours les plus
saillants dans ce débat : “celui des
‘républicains fervents et martiaux’ qui
rejouent ad nauseam la patrie en
danger (…) et celui des ‘amis des
musulmans’ qui font de la lutte contre
l’islamophobie le refuge de l’esprit
frondeur et le point de ralliement
contre le capitalisme (…) Ces deux
positions sont aussi incomplètes et de
mauvaise foi l’une que l’autre”[19].
Pour Guy Sorman, “face à cette
déferlante de l’intolérance, se taire
serait une nouvelle trahison des clercs”[20].
Pour
les “intellectuels faussaires”, adeptes
de la thèse du “choc des civilisations”
de Bernard Lewis et de Samuel
Huntington et autres thuriféraires de
l’extrême droite triomphante
spécialement, et pour les faiseurs
d’opinion en général, la lecture du
dictionnaire des “barbares”[21]
de l’historien Bruno Dumézil ne serait
sans doute pas inutile. Fort
opportunément, l’auteur y explique
comment et pourquoi les Grecs ont
inventé le mot “barbare”. Avant d’être
une notion, dit-t-il, ce mot désignait
“celui qui parle bizarrement”. A
l’origine donc, les Grecs avaient un
besoin anthropologique du “barbare” pour
pouvoir se définir eux-mêmes: “Pour
qu’il y ait des Grecs, il faut qu’il y
ait des Barbares et, avant qu’il y en
eût, il n’y avait pas vraiment de
Grecs”. Ce mot devient ensuite synonyme
d’ “un être menaçant (…) l’autre total,
un autre militaire, politique,
religieux, humain”. Une définition que
l’on retrouvera plus tard, en
permanence, chez d’autres civilisations.
Il en sera ainsi pour la caractérisation
de l’Islam et des musulmans, selon
Dumézil : “l’Islam de ce point de vue, a
subi des variations ondulatoires. Le
musulman est barbare à l’époque de ‘La
chanson de Roland’, où il est décrit
comme le païen absolu[22].
Mais du temps des croisades, l’Occident
découvre vraiment le musulman et son
monothéisme. Il lui livre combat, mais
passe son temps aussi à négocier avec
lui. Il cesse d’être le ‘barbare’ qu’il
redevient au XVIe siècle, au moment des
grands affrontements avec les Turcs. Au
XVIIIe siècle, la civilisation de
l’Islam est idéalisée par les Lumières.
Au siècle suivant, avec la colonisation,
le musulman redevient barbare, ce qu’il
cesse d’être avec la décolonisation”.
Dumézil ajoute une judicieuse précision
selon laquelle on parle aujourd’hui plus
de barbarie que de barbare, car la
dimension ethnique n’est plus
acceptable. Mais, “dans ces termes
devenus très vagues, on peut réinjecter
tous les stéréotypes: le barbare est
l’autre qui n’est pas comme nous”. C’est
précisément à cela que Del Valle fait
référence en parlant d’ “Etats et
organisations étrangers qui n’adhèrent
ni à nos coutumes et lois occidentales
ni à la démocratie et au pluralisme
religieux totalement bafoués chez eux”[23].
La responsabilité de l’Occident dans la
naissance et l’évolution du terrorisme
transnational
D’aucuns estiment que l’islamisme
radical et le djihadisme ne sont pas une
“création” exclusive de l’Occident.
Soutenir le contraire, argumentent-ils,
équivaudrait à surestimer l’influence
occidentale dans des régions comme le
Moyen-Orient et le Sud-est asiatique où
de nombreux autres facteurs, aussi bien
locaux qu’internationaux, ont contribué
à leur développement sur une longue
période de temps. Ceci est vrai. Mais,
il est un fait toutefois -dont se
convainc un nombre croissant de
penseurs, d’analystes politiques et de
citoyens ordinaires de par le monde- que
les politiques poursuivies par les
puissances occidentales, anglo-saxonnes
surtout, ont grandement favorisé
l’émergence et l’expansion de ces
phénomènes, notamment depuis les
événements emblématiques du 11 septembre
2001 et leurs «sous-produits» guerriers
afghan et irakien.
Le rôle de la Grande-Bretagne
Ce
point de vue est partagé par Mark Curtis
qui a documenté la collusion du
Royaume-Uni avec l’Islam radical depuis
le siècle dernier dans un livre[24]
qui a fait couler beaucoup d’encre
depuis sa parution en 2010. S’appuyant
sur une documentation fiable[25],
il décortique un aspect de la politique
étrangère britannique qui a été,
longtemps, curieusement ignoré ou
délibérément occulté par les grands
médias. Cette connivence a “une longue
histoire qui a contribué non seulement à
la montée de l’Islam radical lui-même,
mais aussi à celle du terrorisme
international que la nouvelle Stratégie
de Sécurité Nationale du gouvernement
britannique désigne comme la plus grosse
menace pour le pays” et que le plus haut
gradé des militaires du Royaume a
identifiée comme “le combat de notre
génération, peut-être notre Guerre de
Trente Ans”.
Curtis
note que les raisons ayant conduit aux
attentats de Londres du 7 juillet 2005,
considérés par les Britanniques comme
leur “11 septembre”, ont fait l’objet
d’âpres discussions, notamment entre les
commentateurs de droite qui blâmèrent la
culture libérale ambiante et ceux de
gauche qui considérèrent que ces
événements sont imputables aux
interventions militaires britanniques en
Afghanistan et en Irak ainsi qu’au
soutien apporté par Londres à Israël
dans son conflit en Palestine occupée.
Ce dernier point de vue était renforcé
par les conclusions de deux rapports
secrets précédant lesdits événements et
ayant ultérieurement fait l’objet de
fuites. Dans le premier rapport, datant
d’avril 2005, la Commission Conjointe
sur la Sécurité indique que “le conflit
en Irak a exacerbé la menace provenant
du terrorisme international et
continuera d’avoir un impact sur le long
terme. Il a renforcé la détermination de
terroristes déjà engagés à attaquer
l’Occident et motivé d’autres qui ne
l’étaient pas encore”. Dans le second,
intitulé “Jeunes musulmans et
extrémisme”, rédigé consécutivement à
une réunion conjointe Ministère de
l’Intérieur/Foreign Office, il était
indiqué qu’il prévalait une perception
de “duplicité” parmi nombre de musulmans
en Grande-Bretagne qui pensent que la
politique étrangère britannique, dans
des endroits tels que l’Irak,
l’Afghanistan, le Cachemire et la
Tchétchénie, est “hostile à l’Islam”.
Curtis
précise toutefois qu’il existe un
maillon manquant dans cette chaîne
narrative dans la mesure où la
contribution du Royaume-Uni à
l’émergence de la menace terroriste va
bien au-delà de l’impact que ses guerres
en Afghanistan et en Irak ont pu avoir
sur quelques individus. Le plus
important dans cette histoire est, selon
lui, que les gouvernements britanniques,
aussi bien travaillistes que
conservateurs, ont, des décennies
durant, connivé avec des forces
radicales islamiques, y compris des
organisations terroristes. Ils ont
connivé avec elles, travaillé à leurs
côtés et les ont, parfois, entraînées et
financées, souligne-t-il, dans le but de
promouvoir des objectifs spécifiques de
politique étrangère et plus
particulièrement ceux visant à préserver
désespérément ce qui restait de
puissance et d’influence britanniques au
niveau international et surtout dans des
régions considérées comme névralgiques
mais où ils n’était plus possible
d’imposer leur volonté et leurs intérêts
de manière unilatérale ou en s’appuyant
sur d’autres alliés locaux.
Dans
une fiche de lecture de ce livre,
publiée dans le quotidien The
Independent, Kim Sengupta, écrit :
“pendant des années, des groupes
islamistes violents ont été autorisés à
s’installer au Royaume-Uni, utilisant ce
pays comme base de lancement d’attaques
à l’étranger”[26].
Ce fait était toléré dans la croyance
que ces groupes ne commettraient pas
d’attentats dans le pays où ils sont
établis et qu’aussi longtemps qu’ils y
demeureraient, les services de sécurité
seraient en mesure de les infiltrer.
Sengupta dit qu’il y avait même un nom
pour cette “accommodation immorale:
engagement de sécurité”, et que “nous
savons maintenant que les djihadistes
feront sauter leur pays de résidence et
que les agences de sécurité n’ont pas
réussi à infiltrer les cellules
terroristes lorsqu’elles en avaient la
possibilité. Le prix en est payé
aujourd’hui tant à l’intérieur qu’à
l’extérieur” du Royaume-Uni.
Dans
une autre fiche de lecture du même
livre, Adam Brown[27],
écrit : “Cinquante ans durant,
l’Occident, principalement la
Grande-Bretagne et les Etats-Unis, ont
secrètement utilisé des individus et des
groupes islamiques radicaux pour servir
des objectifs de politique étrangère».
Brown rappelle à cet effet que le
Royaume-Uni a appuyé secrètement les
services secrets pakistanais (ISI) qui
sont “responsables de l’entraînement de
milliers de terroristes, dont trois se
sont trouvés impliqués dans les attaques
du 7 juillet” et qu’en 1994 “Ben Laden a
ouvert un bureau à Wembley, au nord de
Londres, sous le nom de Advice and
Reformation Committee. A partir de
ce bureau il lança son djihad mondial”.
Eu égard à cette histoire secrète qui se
perpétue depuis cinquante ans, dit-il,
le 11 Septembre et le 7 juillet peuvent
être vus comme le résultat d’une
politique étrangère occidentale
connaissant un spectaculaire retour de
bâton.
Il
n’est pas inutile ici d’apporter un
«éclairage français» sur ces racines
britanniques du terrorisme, à travers le
point de vue de Jacques Cheminade,
candidat à l’élection présidentielle
française 2017, exposé dans un entretien[28]
accordé lors d’un colloque organisé par
l’Académie géopolitique de Paris à
l’Assemblée nationale en 2014. Cheminade
y indique qu’ «il est aujourd’hui
fondamental de comprendre que les
racines du terrorisme international (la
violence infligée par principe à l’autre
pour ce qu’il est) sont britanniques,
pour éviter de commettre des erreurs
d’évaluation désastreuses au sein des
tempêtes politiques et stratégiques de
notre temps». Il ne s’agit pas «de la
responsabilité du Royaume-Uni proprement
dite mais de la matrice impériale
britannique qui a pris différentes
formes dans son histoire», laquelle
repose sur «une combinaison d’influence
économique, de guerre irrégulière, de
désorganisation des structures étatiques
et de guerre globale, le terrorisme
étant le levier permettant à la
combinaison de fonctionner au plus haut
niveau d’efficacité destructrice. Le
terrorisme n’est donc pas un accident ou
une arme isolée, mais une pièce
maîtresse sur un échiquier complet. Il
ne faut pas le penser d’abord comme un
terrorisme d’Etat, bien qu’il puisse
prendre cette forme, mais comme arme
d’un Empire qui hier était maritime et
colonial et qui est devenu aujourd’hui
offshore ou hors sol, à partir de
la City de Londres, de Wall Street et de
leurs paradis fiscaux. Cet Empire
récupère toutes les arriérations, tous
les fondamentalismes religieux
soi-disant régénérateurs et tous les
archaïsmes, y compris l’outrage fait aux
femmes, et en joue systématiquement».
Le rôle des Etats-Unis d’Amérique
En
promouvant sa stratégie détaillée plus
haut, La Grande-Bretagne a régulièrement
collaboré avec les Etats-Unis qui ont
une histoire similaire de collusion avec
l’Islam radical, nous dit Mark Curtis:
«En raison de la puissance britannique
déclinante, les opérations
anglo-américaines ont changé de nature à
travers le temps, passant d’entreprises
véritablement conjointes au lendemain de
la Seconde Guerre mondiale à des actions
où Londres prit l’habitude de jouer le
rôle du partenaire mineur, souvent
pourvoyeur de forces spéciales
participant à des opérations dirigées
par Washington. Occasionnellement, le
Royaume-Uni a agi de facto comme le bras
armé clandestin du gouvernement
américain, faisant la “sale besogne” que
Washington ne pouvait pas, ou ne voulait
pas, faire».
Dans
son livre paru en 2005, Robert Dreyfuss
analyse de manière plus détaillée le
rôle américain dans ce «jeu diabolique»[29].
Présenté comme étant la première enquête
approfondie sur un soutien américain au
“fondamentalisme islamique” qualifié
de ”plus dangereuse erreur de
jugement” en matière de politique
étrangère des Etats-Unis, ce livre est
un témoignage essentiel. Basé sur des
archives peu exploitées auparavant et
sur de nombreuses interviews avec des
décideurs politiques et des responsables
issus de la CIA, du Pentagone et du
Département d’Etat, il analyse les
conséquences de “soixante ans d’efforts
malavisés” des États-Unis dans le but de
dominer la région économiquement et
stratégiquement vitale du Moyen-Orient. Dreyfuss
soutient que c’est cette alliance
historique de Washington avec la droite
islamique qui est à blâmer en ce qui
concerne l’émergence du terrorisme
islamiste dans les années 1990. Parmi
les histoires cachées de cette collusion
avec l’Islam radical révélées dans ce
livre, figurent la rencontre, en
1953, entre le Président Dwight
Eisenhower et un leader des Frères
musulmans dans le bureau ovale de la
Maison Blanche et l’alliance secrète
scellée ultérieurement avec ce groupe
“et ses mentors saoudiens contre le
Président égyptien Nasser”. L’auteur y
documente aussi “le financement par la
CIA des Ayatollahs iraniens dans le
cadre du coup d’Etat ayant remis au
pouvoir le Chah d’Iran, l’appui des
Etats-Unis aux efforts de l’Arabie
Saoudite pour créer un bloc islamique
mondial servant d’antidote au
nationalisme arabe, ainsi que les liens
anciens entre les fondamentalistes
islamiques et les grandes banques
occidentales”. Il raconte par ailleurs
comment, dans les années 1970, “une
clique de stratèges américains a
exploité l’Islam politique afin de mener
une guerre par procuration contre
l’Union soviétique en Afghanistan,
conduisant à la montée des Talibans”.
Dreyfuss met ainsi en lumière une
“histoire faite de duplicité et
d’exploitation cynique qui se poursuit à
ce jour, comme c’est le cas en Irak où
les États-Unis appuient des radicaux
islamistes alliés avec le clergé
iranien”. Il en conclut que “loin de
promouvoir la démocratie et la
sécurité”, cette politique produira, à
coup sûr, d’autres “bévues et retours de
manivelle” à l’avenir.
Pour
sa part, Noam Chomsky -considéré par
beaucoup comme le plus grand penseur
vivant- réitéra dans une interview
accordée en octobre 2014 au média
américain TruthOut, à l’occasion de la
parution de son livre sur “Les maîtres
de l’humanité”[30],
sa conviction maintes fois exprimée que
les États-Unis, comme le Royaume-Uni
avant eux, ont eu tendance à soutenir
l’Islam radical et à s’opposer au
nationalisme laïc que les deux États
impériaux ont toujours vu comme plus
dangereux pour leurs objectifs de
domination et de contrôle. Quand les
options séculières sont brimées, dit-il,
l’extrémisme religieux remplit souvent
le vide ainsi laissé. L’émergence de
l’EIIL (Daech, pour l’acronyme arabe) et
plus généralement la propagation du
djihadisme «sont une conséquence somme
toute naturelle du coup de massue de
Washington contre la fragile société
d’Irak qui arrivait à peine à maintenir
sa cohésion consécutivement à une
décennie de sanctions
américano-britanniques tellement
onéreuses et implacables qu’elles
poussèrent les respectables diplomates
internationaux chargés de leur mise en
œuvre à travers les Nations Unies à
présenter leur démission en signe de
protestation tout en qualifiant ces
sanctions de génocidaires”. Pour
Chomsky, « une des sinistres
conséquences de l’agression
américano-britannique fut qu’elle
enflamma les conflits sectaires qui
déchirent à présent l’Irak en lambeaux
et s’étendent à toute la région avec les
conséquences désastreuses” que l’on
sait. Dans cette même interview, Chomsky
se déclara en accord avec Graham Fuller,
l’ex-agent de la CIA devenu professeur
d’université au Canada, qui affirmait à
la même période que “Les Américains
n’ont pas planifié la formation de
l’EIIL, mais leurs interventions
destructrices au Moyen-Orient et la
guerre en Irak étaient les causes
principales de la naissance de l’EIIL”[31].
Robert
F. Kennedy Jr., neveu du Président
américain assassiné, J.F. Kennedy, a lui
aussi examiné la longue histoire des
interventions violentes de son pays dans
la région du Moyen-Orient depuis la fin
de la Seconde Guerre mondiale. Il
explique dans un long article du
magazine américain «Politico»[32]
pourquoi il faut «aller au-delà des
explications commodes de la religion et
de l’idéologie». Nous devons examiner,
dit-il, les raisons plus complexes de
l’histoire et du pétrole et comment
elles font souvent pointer un doigt
accusateur en direction des rivages
américains. Selon lui, le registre peu
reluisant de ces interventions peu
connues du peuple américain «a constitué
un terrain fertile pour le djihadisme
islamique qui rend aujourd’hui
compliquée toute réponse efficace par
notre gouvernement au défi posé par
l’EIIL». Afin de comprendre la dynamique
destructrice à l’œuvre au Moyen-Orient,
il faut garder à l’esprit, ajoute-t-il,
que «la CIA avait nourri le djihadisme
violent en tant qu’arme de la Guerre
froide». Il faut également être
conscient du fait qu’ «au cours des sept
dernières décennies, les frères Dulles,
le gang Cheney, les néoconservateurs et
consorts ont détourné ce principe
fondamental de l’idéalisme américain et
déployé notre appareil militaire et de
renseignement au service des intérêts
mercantiles des grandes entreprises et,
en particulier, les compagnies
pétrolières et les entrepreneurs
militaires qui se sont littéralement
enrichis de ces conflits».
Co-auteur avec N. Chomsky d’un livre[33]
qui a fait date, André Vltchek a publié
une tribune[34]
où il dénonce la responsabilité de
l’establishment américain et de ses
principaux alliés dans le monde en
matière de terrorisme transnational.
D’emblée, il y donne le ton en affirmant
que “si l’Occident en général, et les
États-Unis en particulier, pliaient
bagages et laissaient le monde
arabo-musulman tranquille, nous ne
verrions probablement plus jamais toutes
ces attaques terroristes qui secouent
aujourd’hui le monde, de l’Indonésie à
la France”. Il soutient que “l’Islam a
été usé et abusé, manipulé et
pratiquement dépouillé de son essence”.
Vltchek ajoute que “tel un enfant
méchant, gâté et sans cœur, l’Occident,
après avoir détruit l’Union soviétique,
a soigneusement construit son nouvel
ennemi -l’Islam militant- afin de
pouvoir continuer à se livrer à son
activité préférée qui est le conflit
perpétuel, les guerres et les pillages
sans fin”. Et que dire de la “guerre
contre le terrorisme” ? Se demande-t-il:
“Oui, une telle guerre existe bel et
bien, mais ce n’est pas l’Occident qui
la mène. Au moment d’écriture de ces
lignes, la guerre contre le terrorisme
est livrée par la Russie, l’Iran, la
Chine, la Syrie, le Hezbollah et leurs
alliés !”, tandis que l’Occident
“continue de collaborer étroitement avec
les terroristes. Comme par miracle, il
‘évite de les cibler’ lorsqu’il ‘est en
guerre contre eux’; il finance les uns
et entraîne les autres. Il critique et
s’oppose à ceux qui sont réellement en
train de combattre les groupes militants
extrémistes”. Ceux-ci, dit-il, “ont été
fabriqués à Washington, Riyad, Londres,
Doha (et très probablement même à Tel
Aviv) pour plusieurs raisons concrètes,
toutes absolument immondes”. Et de
conclure sa tribune en affirmant qu’ “il
y a eu trop d’ ‘épisodes’[35],
trop de sang…il est temps de dire ce qui
paraît désormais évident:
l’establishment américain n’est pas en
train de lutter contre le ‘terrorisme
musulman’, ou même l’ ‘extrémisme’; il
est en train de les fabriquer et de les
injecter partout”.
Par
ailleurs, un article[36]
du magazine électronique américain
Foreign Policy Journal datant d’août
2015, nous apprend que la Maison Blanche
avait pris la décision d’aider les
rebelles armés en Syrie malgré les
avertissements des services secrets qui
prévoyaient l’avènement du groupe État
islamique. Cette information stupéfiante
a été confirmée par l’ancien chef de la
Defense Intelligence Agency
(DIA), le Lieutenant Général Michael
Flynn, lors du dernier épisode de
l’émission “Head to Head” de la chaîne
satellitaire qatarie Al Jazeera. Ce très
haut fonctionnaire des renseignements du
Pentagone (démissionnaire de son poste
en avril 2014, à la surprise générale)
fut auparavant le Directeur des
renseignements pour le Centre de
commande des opérations spéciales et, en
cette qualité, avait pour principale
mission de traquer Oussama Ben Laden et
de démanteler Al-Qaïda. Durant
l’émission, Flynn affirma que non
seulement il avait bien étudié le
rapport secret de sept pages de la DIA
lorsqu’il lui fut soumis en 2012, mais
aussi que le sponsoring de groupes
djihadistes radicaux (qui deviendront EI
et Al Nosra) par la Maison Blanche et le
transfert d’armes vers ces groupes dans
le but de contrer le régime d’Al Assad
furent “une décision délibérée”. Le
rapport, déclassifié en 2015 par
décision de justice, disait à ce sujet:
“Il existe une possibilité d’établir une
principauté salafiste en Syrie orientale
et c’est exactement ce que veulent les
puissances soutenant l’opposition
syrienne, afin d’isoler le régime
syrien”.
Une
autre information troublante concernant
le rôle des Etats-Unis dans
l’exacerbation de la menace terroriste
dans le monde a été avancée dans une
interview accordée par Nada Bakos[37],
une ancienne analyste de la CIA ayant
fait partie de l’équipe de la Navy Seal
qui a traqué et retrouvé Ben Laden à
Abottabad au Pakistan en mai 2011. Selon
elle, les Etats-Unis ont commis une
erreur monumentale en n’éliminant pas au
plus vite Abou Mousaab Al-Zarqawi, le
leader d’Al-Qaïda en Irak, l’ancêtre de
l’EI, alors qu’ils en avaient la
possibilité, avant même l’invasion de
l’Irak en 2003. Elle affirme que c’est
le Président George W. Bush qui avait
refusé d’autoriser le tir, car celui-ci
risquait de perturber les plans
d’invasion et que si Al-Zarqawi avait
été éliminé à ce moment-là, l’EI
“n’aurait certainement pas le pouvoir
qu’il a aujourd’hui”.
Ces
informations et d’autres ont été
rappelées dans un film documentaire de
52 minutes diffusé par la chaîne de
télévision ARTE[38]
qui explique “comment, de Bush à Obama,
l’Amérique a laissé prospérer la terreur
aveugle dont Daech a repris le flambeau.
D’anciens membres du renseignement, des
représentants des forces américaines en
Irak, l’ancien Secrétaire d’Etat Colin
Powell et des experts du terrorisme
retracent, archives à l’appui, les
treize ans de guerre perdue contre la
terreur”.
Enfin,
et ce n’est pas le moins important, lors
de la campagne présidentielle américaine
de 2016, le candidat républicain, Donald
Trump, a déclaré qu’il maintenait les
propos qu’ils avait tenus auparavant en
Floride, selon lesquels le Président
Barack Obama “est le fondateur de
l’EIIL”. Et quand l’animateur
conservateur de l’émission de radio,
Hugh Hewitt, tenta de clarifier la
position de D. Trump en disant qu’il
l’avait comprise comme signifiant “qu’il
(Obama) a créé un vide, qu’il a perdu la
paix”, le candidat Trump objecta en
affirmant “Non ! Je voulais dire qu’il
est le fondateur de l’EIIL. Je le pense
vraiment. Il a été l’acteur le plus
utile. Je lui attribue le titre de
meilleur acteur, tout autant d’ailleurs
qu’à Hillary Clinton”.
Le rôle de la France
Réagissant aux attentats terroristes qui
ont frappé la France en dernier lieu,
deux auteurs français aux convictions
politiques différentes font une lecture
très similaire des origines du
“terrorisme islamiste” qu’ils lient
étroitement aux interventions militaires
occidentales dans le monde musulman.
Ainsi,
dans son dernier livre[39],
le philosophe Michel Onfray estime que
“nous nommons barbarie ce que nous ne
voulons pas comprendre”. Pour lui,
“l’Islam terroriste” a été partiellement
créé par l’Occident belliqueux.
Dénonçant ce qu’il appelle “les guerres
coloniales contemporaines” menées par
certains pays occidentaux dont la
France, il considère que les régimes
islamiques ne menacent l’Occident que
depuis que celui-ci les menace et que
“nous ne les menaçons que depuis que ces
régimes aux sous-sols intéressants pour
le consumérisme occidental ou aux
territoires stratégiquement utiles pour
le contrôle de la planète manifestent
leur volonté d’être souverains chez
eux”. Onfray se demande: “Si les droits
de l’homme étaient la véritable raison
des attaques françaises aux côtés, comme
par hasard, des États-Unis, pourquoi
n’attaquerions-nous pas les pays qui
violent les droits de l’homme et le
droit international?” Et, allant
jusqu’au bout de cette logique, il
lâche: “Pourquoi ne pas bombarder la
Chine ? Cuba ? L’Arabie Saoudite ?
L’Iran ? Le Pakistan ? Le Qatar ? Ou
même les États-Unis qui exécutent à tour
de bras, sinon Israël que les
résolutions de l’ONU condamnent depuis
si longtemps pour sa politique de
colonisation dans les territoires
palestiniens ?”. La conséquence qu’il
tire de cet état de fait est que les
droits de l’homme ne sont qu’un alibi
pour continuer le colonialisme sous le
prétexte politiquement correct de
l’humanitaire, ou celui, politiquement
rentable, d’apaiser les peurs des
citoyens occidentaux, avant de
conclure : “Nous devrions réserver nos
guerres au strict cas défensif avéré.
Attaquer en disant que l’on agit de
manière préventive est une sophisterie
qui n’abuse que les victimes de
l’idéologie dominante”.
De son
côté, Pierre Conesa, ancien haut
fonctionnaire au ministère de la défense
français, affirme dans un entretien
accordé à un quotidien suisse[40]
que la France “est en train de payer au
prix fort une guerre qui n’est pas la
sienne”. Tout comme Onfray, il ne croit
pas aux prétextes mis en avant pour
justifier les interventions militaires
occidentales dans le monde musulman. Il
estime plutôt que “nous défendons nos
intérêts commerciaux, économiques,
pétroliers, énergétiques dans les pays
du Golfe”. S’agissant du pourquoi de
l’engagement de la France en Syrie,
après la prudence qu’elle a affichée il
y a quelques années en Irak, il dit: “Ce
retournement s’explique par l’arrivée
d’une série de néoconservateurs au Quai
d’Orsay, avec Nicolas Sarkozy d’abord
puis avec François Hollande. Des
néoconservateurs qui se sont donné pour
but de renouer des liens étroits avec
Washington. La décision prise par
Jacques Chirac de ne pas intervenir aux
côtés des Etats-Unis en Irak en 2003 a
créé un traumatisme considérable dans le
système diplomatique du Quai d’Orsay, au
point de provoquer un violent retour de
balancier”. Conesa cite à cet égard
l’exemple de l’intervention française en
Libye. La France, dit-il, a “fait à son
échelle ce que Bush avait fait en Irak,
c’est-à-dire détruire un régime et
laisser derrière elle un chaos qu’elle
n’a aucune capacité à gérer”. Pour lui
comme pour d’autres intellectuels et
analystes politiques occidentaux,
l’idéologie salafiste est un problème
interne à l’Islam. La cible principale
des salafistes, fait-il remarquer, «ne
sont d’ailleurs pas les Occidentaux, ce
sont les chiites, puis les soufis, puis
les ‘mauvais musulmans’. Qu’avons-nous à
monter en première ligne pour la
combattre ?”.
En Syrie, en particulier durant la
période où Laurent Fabius était à la
tête du Quai d’Orsay, cette politique
interventionniste hasardeuse s’est
traduite par un soutien total aux
rebelles luttant contre le régime d’Al-Assad.
Estimant que le départ de ce dernier
“n’est qu’une question de semaines”,
Fabius affirmait en août 2012, lors d’un
déplacement à la frontière
turco-syrienne, que “Bachar Al-Assad ne
mériterait pas d’être sur terre”. Et, en
décembre de la même année, réagissant à
la décision de Washington de placer
Jabhat Al-Nosra, une branche d’Al-Qaïda,
sur sa liste des organisations
terroristes, il déclarait : “tous les
Arabes étaient vent debout” contre la
position américaine “par ce que, sur le
terrain, ils (les éléments d’Al-Nosra)
font un bon boulot”[41]
. Le quotidien parisien Le Figaro
rapporte à ce propos que “des Syriens,
dont des proches ont été victimes de
rebelles, ont demandé au tribunal
administratif de Paris une réparation
symbolique d’un euro, ‘pour les fautes
personnelles commises par le ministre
des Affaires étrangères, Laurent Fabius,
dans ses fonctions’ “[42].
Cet
état délétère de l’environnement
géopolitique international ajouté à la
polarisation idéologique et sociale due
au débat sur le “terrorisme islamiste”
en France ont été jugés suffisamment
sérieux par un ministre de la défense
occidental pour leur consacrer un livre.
Il s’agit d’un opuscule, digne
d’intérêt, intitulé “Qui est l’ennemi ?
“[43],
dans lequel Jean-Yves Le Drian répond
non seulement à la question de savoir si
la France est en guerre depuis les
attentats terroristes de 2015, mais
aussi et surtout à celle de la
désignation de l’”ennemi” de l’Occident,
aujourd’hui et demain. Il y explique que
la France est bel et bien en guerre,
mais une guerre inédite représentant
“une rupture grave et sans nul doute
durable de la situation d’insularité
stratégique dans laquelle semblait nous
placer la fin de la Guerre froide”. Si
ses affirmations concernant la
désignation de l’ennemi d’aujourd’hui,
Daech en l’occurrence, et la nécessité
de le vaincre par tous les moyens, n’ont
rien d’une révélation, il en est
autrement concernant le plus large
spectre de menaces liées aux “ennemis en
devenir”. Dans cette catégorie de
“nouveaux ennemis” sont rangés les
acteurs étatiques et non étatiques
répondant à trois types de profil. Le
premier, concerne ceux qui récusent “la
suprématie technico-militaire
occidentale”. Le second, est représenté
par ceux qui partagent la vision,
exposée dans un livre de stratégie
militaire[44]
devenu célèbre depuis sa publication en
1999, écrit par deux colonels de l’armée
chinoise. Dans cette vision, il est
expliqué comment une nation comme la
Chine peut défaire un adversaire qui lui
est supérieur sur le plan technologique
(comme les Etats-Unis) en utilisant une
variété de moyens incluant le droit
international et différents outils
économiques susceptibles de placer
l’adversaire dans une mauvaise posture,
sans avoir à recourir à une action
militaire directe. Le troisième,
concerne l’ “ennemi hors limites”, qui
serait ainsi le corollaire de ladite
“guerre hors limites” et pour qui la
population civile “est bien devenue un
objectif militaire majeur, qu’il
s’agisse de la menacer, de l’atteindre
ou de l’influencer”. Car comme
l’écrivent dans un livre[45]
deux colonels français, “les guerres
actuelles et futures sont des guerres du
découragement” et les populations
civiles occidentales se retrouvent de ce
fait aux prises directes avec une menace
qu’elles pouvaient tenir à distance
jusque-là, dans le confort de
l’observation.
Il
serait équitable ici -comme nous l’avons
fait précédemment pour le Royaume-Uni-
de donner un éclairage britannique sur
ce rôle de la France. En effet, dans son
rapport[46]
rendu public le 14 septembre 2016, le
Parlement britannique accable à la fois
le Premier Ministre de l’époque, David
Cameron, et le Président français
Nicolas Sarkozy pour leur mésaventure
militaire commune, avec l’appui des
Etats-Unis, en Libye en février/mars
2011. Jugeant que la soi-disant menace
contre la population de Benghazi était
“nettement exagérée”, le rapport accuse
Nicolas Sarkozy d’avoir favorisé cette
intervention, notamment pour “accroître
l’influence française en Afrique du
Nord” mais aussi pour “améliorer sa
situation politique en France”. Il
conclut également que le résultat de
l’intervention est “un effondrement
politique et économique, des
affrontements entre milices et tribus,
des crises humanitaires et migratoires,
des violations des droits de l’homme à
grande échelle, la dissémination des
armes du régime de Kadhafi dans toute la
région et l’expansion de l’Etat
islamique en Afrique du Nord”.
Conclusion
Dans
son livre précité, Michel Onfray fait
remarquer, très justement, que sur la
thématique que nous avons abordée dans
cette étude, “les choses ne sont pas
aussi simples que ce que, de part et
d’autre, on voudrait nous faire croire,
d’où la nécessité de se remettre à
penser. Sur ce sujet comme sur
d’autres”. Parmi ceux-ci, nous voudrions
inviter le grand public à méditer la
sagesse d’un penseur qui disait
qu’autrefois on fabriquait des armes
pour livrer des guerres, mais
aujourd’hui on fabrique des guerres pour
livrer des armes.
Force
est malheureusement de constater que la
rhétorique sur le “choc des
civilisations”, ressassée à l’envi
depuis la fin de la Guerre froide et la
disparition subséquente de l’”ennemi
nécessaire”, semble avoir atteint
l’objectif qui lui a été assigné,
notamment par ceux qui profitent et
tirent les ficelles de la perpétuation
des conflits dans le monde. Elle a ainsi
produit un redoutable “choc des
fondamentalismes”[47]
qui a remis au goût du jour les notions
de “revanche de Dieu”, de “croisades” et
de “djihad” et en a ajouté de nouvelles
comme celle d’”islamofascisme”. La
conséquence de cette tournure dramatique
des événements s’exprime, sur le terrain
de l’affrontement recherché et obtenu,
par un “choc des barbaries”[48]
que les plénipotentiaires des nations
réunies à San Francisco résolurent
pourtant de bannir, au sortir des
dévastations de la Seconde Guerre
mondiale.
Or, le
grand danger associé à cette évolution
est que depuis cette dernière guerre
marquée par les bombardements de
Hiroshima et Nagasaki, le monde est
entré dans l’âge de l’ “arme suprême”
-l’arme atomique-, mais aussi des autres
armes de destruction massive, et que la
guerre que nous promettent et promeuvent
activement les extrémistes de tous bords
est une “guerre cosmique” pour “le
triomphe du Bien contre le Mal”. Pour
certains parmi ceux-ci, il s’agit là
d’une guerre religieuse, l’ultime
guerre, celle précédant l’Apocalypse ou
la fin du monde, et dont le théâtre
d’opérations nous est fixé, par les uns,
à “Armageddon“[49],
et par les autres, à “Dabiq“[50],
endroits tous deux situés au Levant, qui
englobe la Syrie aujourd’hui à feu et à
sang…
Est-ce
à cette seule “fatalité” terrifiante que
le monde civilisé doit désormais se
résigner et se préparer ?
Amir Nour
*
*
*
[1] Consulter en
particulier son livre paru en 1984 sous
le titre «L’Age des extrêmes,
histoire du court XXe siècle».
[2] Comme par
exemple les dizaines de civils dont des
enfants et des femmes qui ont péri à la
suite des raids menés par la coalition
occidentale les 19 et 20 juillet 2016
près de la ville de Manbij dans le nord
de la Syrie, en représailles à
l’attentat terroriste du 14 juillet à
Nice en France. Ces frappes, passées
sous silence dans un premier temps, ont
été qualifiées par Le Monde et
Libération de «plus grosse bavure» de la
coalition depuis son entrée en action en
septembre 2014.
[3] Lire à ce
sujet: Le rapport de Pew Research Center
publié en avril 2015 sous le titre “The
Future of World Religions: Population
Growth Projections, 2010-2050”.
[4] Lire à ce sujet les livres de
Joseph Stiglitz: «The Price of
Inequality: How Today’s Divided Society
Endangers Our Future», W.W. Norton &
Company, 2012 et «The Great Divide:
Unequal Societies and What We Can Do
About Them», W.W. Norton &
Company, 2015, où il aborde les effets
néfastes sur la société dans son
ensemble de l’élargissement continu du
fossé entre les «très riches» et les
«autres», les premiers représentant
seulement 1 pour cent de la population,
mais détenant l’essentiel de la richesse
nationale et mondiale !
[5] Vincent Sizaire,
«Sortir de l’imposture sécuritaire»,
éditions La Dispute, Paris, 2016.
[6] Intitulé «Une
notion piégée: Quand parler de
“terrorisme” ?», Le MONDE
diplomatique, août 2016.
[7] Alex Schmid &
Albert Jongman, «Political Terrorism:
A New Guide To Actors, Authors,
Concepts, Data Bases», Transaction
Publishers, 1988.
[8] Oliver Libaw, «How
Do You Define Terrorism ?», ABC News
Network, 11 octobre 2015.
[9] Lire également
l’article de Conor Friedersdorf, «Is
One Man’s Terrorist Another Man’s
Freedom Fighter ?», magazine The
Atlantic du 16 mai 2012.
[10] Norman
Podhoretz, «World War IV: The Long
Struggle Against Islamofascism»,
Doubleday, 2007.
[11] Lire l’article
«L’Algérie plaide pour une nouvelle
stratégie mondiale de prévention du
terrorisme», Algérie Presse Service,
24 janvier 2016.
[12] Le
rapport 2015 de Global Terrorism
Index, publié en novembre 2015,
indique que l’année 2014 a été la plus
meurtrière du XXIe siècle en matière de
terrorisme avec 32.658 morts contre
18.000 enregistrés en 2013 (80%
d’augmentation) ; que les attaques
terroristes sont concentrées dans cinq
pays à majorité musulmane :
Afghanistan, Irak, Nigeria, Pakistan et
Syrie, totalisant à eux seuls 78% des
morts et 57% du total des attaques,
l’Irak enregistrant trois fois plus de
morts en 2014 que l’ensemble des morts
recensés dans le monde entier en 2000 ;
que l’Occident est remarquablement
protégé du terrorisme, sauf pour ce qui
concerne les «loups solitaires» dont le
nombre est en augmentation : 2,6%
«seulement» des décès intervenus dans
des attaques terroristes depuis le début
du 21è siècle ont eu lieu en Occident
(en excluant les 3000 morts du 11
septembre 2001, cette proportion tombe à
0,5%).
[13] Selon un
sondage réalisé par Pew Research Center
en novembre 2015 dans 11 pays à majorité
musulmane (dont le Nigeria, la Jordanie
et l’Indonésie), de très larges
majorités, atteignant 99% au
Liban, ont une vue très négative de
l’EIIL (Lire l’article : «In nations
with significant Muslim populations,
much disdain for ISIS»).
[14] Dans notre
livre “L’Orient et l’Occident…”,
op. cit.
[15] Lire son
article paru sur le site “Atlantico”
sous le titre “Le Koweït, plus grand
financier des djihadistes
anti-occidentaux…“, le 29 août
2016.
[16] Auteur du
livre “Fascination du djihad: fureurs
islamistes et défaite de la paix“,
éditions P.U.F, septembre 2016. Lire à
ce sujet l’entretien paru dans le no.
2295 du magazine Le Point du 1er
septembre 2016, sous le titre “Gabriel
Martinez-Gros: Il faut sortir du
discours victimaire“.
[17] Lire la
chronique intitulée “L’Islamophobie,
fille de l’islamisme“, Le Point, op.
cit.
[18] Nicolas
Truong, “Ces intellectuels qui
veulent sortir du piège identitaire“,
Le Monde, 2-3 octobre 2016.
[19] Matthieu
Amiech, “Contre l’islamisme, ni
‘Causeur” ni ‘Crieur’“, Le Monde,
ibid.
[20] Guy Sorman, “Finissons-en
avec l’horreur identitaire !“, Le
Monde, ibidem.
[21] Bruno Dumézil,
sous la direction de, “Les Barbares“,
éditions P.U.F, septembre 2016.
[22] Dans son livre
“La Chanson de Roland“,
Flammarion, 1993, Jean Dufournet décrit
comment étaient dépeints
les Sarrasins (mot issu de l’arabe
Charqiyyin signifiant “Orientaux”) du
temps de cette chanson.
[23]
Alexandre Del valle, op. cit.
[24]Mark Curtis, “Secret
Affairs: Britain’s Collusion With
Radical Islam“, Serpent’s Tail,
Londres, mai 2011.
[25] Selon
l’auteur, le livre résulte partiellement
de plusieurs mois de recherche auprès de
la «National Archives» de Londres.
[26] Kim Sengupta,
“Secret Affairs, by Mark Curtis“,
The Independent du 30 Juillet 2010.
[27] Adam Brown, “Secret
affairs with radical Islam: why
Britain’s covert foreign policy needs to
change“, blogs.lse.ac.uk, 8 novembre
2010.
[28] Jacques
Cheminade, “Les racines britanniques
du terrorisme international”, site
de Solidarité et Progrès, 16 décembre
2014.
[29] Robert
Dreyfuss, “Devil’s Game: How The
United States Helped Unleash
Fundamentalist Islam“, Metropolitan
Books, New York, 2005.
[30] Noam Chomsky,
“Masters of Mankind: Essays and
Lectures, 1969-2013“, Haymarket
Books, Chicago, septembre 2014.
[31] Citation tirée
d’une interview accordée par G. Fuller
au quotidien turc “Radikal” le
1er septembre 2014, reprise par le site
“Al-Monitor” dans un article daté
du 14 septembre intitulé “Former CIA
officer says US policies helped create
IS“.
[32] Paru sous le
titre «Why the Arabs Don’t Want Us in
Syria» dans l’édition du 22 février
2016 dont nous avons réalisé la
traduction française suivante :
http://lechodalgerie-dz.com/pour-mieux-comprendre-les-tenants-et-les-aboutissants-du-chaos-qui-dechire-le-monde-arabe-pourquoi-les-arabes-ne-veulent-pas-de-nous-en-syrie-1er-partie/
http://lechodalgerie-dz.com/pour-mieux-comprendre-les-tenants-et-les-aboutissants-du-chaos-qui-dechire-le-monde-arabe-pourquoi-les-arabes-ne-veulent-pas-de-nous-en-syrie-2eme-partie/
[33] Intitulé «L’Occident
terroriste, d’Hiroshima à la guerre des
drones», éditions Ecosociété, mai
2015.
[34] Andre Vltchek,
“Hillary Clinton is Spreading
Islamist Extremism“,
Informationclearinghouse.info, 26 août
2016.
[35] Allusion faite
probablement aux “bavures” de certains
raids aériens américains ayant coûté la
vie à des soldats des armées irakienne
et syrienne ou aux largages “par erreur”
d’armes à Daech.
[36] Brad Hoff, “Rise
of Islamic State was a ‘Willful decision’:
Former DIA Chief Michael Flynn“,
Foreign Policy Journal, 7 août 2015.
[37] Lire l’article
de Jason M. Breslow intitulé: “The
Secret History of ISIS. Nada Bakos: How
Zarqawi Went From ‘Thug’ To ISIS Founder“,
Frontline, 17 mai 2016.
[38] Intitulé “Du
11 septembre au Califat: l’histoire
secrète de Daesh“, 30 août 2016.
[39] Michel Onfray,
“Penser l’Islam“, éditions
Bernard Grasset, Paris, mars 2016.
[40] Paru sous le
titre “Les attentats sont la suite
logique des bombardements” dans le
journal “Le Temps” du 16 juillet
2016.
[41] Lire à cet
effet l’enquête menée par Benoît
Collombat et Jacques Monin, publiée sur
le site de la radio “France Inter” sous
le titre “Daesh: autopsie d’un monstre”,
le 20 novembre 2015:
https://www.franceinter.fr/emissions/l-enquete/l-enquete-20-novembre-2015
[42] Le Figaro “Des
Syriens demandent réparation à Fabius”,
10 décembre 2014.
[43] Jean-Yves Le
Drian, “Qui est l’ennemi ?“, Les
éditions du Cerf, mai 2016.
[44] Qiao Liang et
Wang Xiangsui, “Unrestricted Warfare”
(dans sa version anglaise) et “La
guerre hors limites” (dans sa
traduction française).
[45] Pierre-Joseph
Givre et Nicolas Le Nen, “Enjeux de
guerre“, éditions Economica, Paris,
2012.
[46] Intitulé “Libya:
Examination of intervention and collapse
and the UK’s future policy options“,
Third Report of session 2016-17.
[47] Lire, entre
autres, à cet effet, le livre de Tariq
Ali «The clash of fundamentalisms :
Crusades, Jihads and Modernity »,
Verso books, avril 2002.
[48] Lire à ce
propos le livre de Gilbert Achkar, «Le
choc des barbaries : terrorismes et
désordre mondial», éditions 10/18,
Paris, 2004. La réalité humaine
écœurante décrite dans ce livre
transparaît également dans l’effarante
interview publiée dans le magazine
allemand «Der Spiegel», le
28 octobre 2014, sous le titre «Democracy
Is For Infidels». A la question
posée à son interlocuteur (un recruteur
de Daech opérant en Turquie):
«Croyez-vous que ceux qui décapitent des
personnes sont de bons musulmans ?», la
réponse est cinglante : «Laissez-moi
vous demander ceci : croyez-vous que
ceux qui lancent des raids aériens
contre des personnes célébrant des
mariages en Afghanistan, ou qui
envahissent des pays comme l’Irak en
invoquant des arguments fallacieux sont
de bons chrétiens ? Et les responsables
de Guantanamo et d’Abu Ghraïb sont-ils
de bon chrétiens ?».
[49] Le pasteur
protestant américain John Charles Hagee,
connu pour ses prêches apocalyptiques,
consacre un chapitre entier («Inching
Toward Armageddon») à cette vision
dans son livre «From Daniel To
Doomsday : The Countdown Has Begun»,
Thomas Nelson Publishers, Nashville,
1999.
[50] Pour plus
d’informations sur cette vision, lire
l’article intitulé «Syrie: Dabiq ou la
cité de l’Apocalypse pour l’EI», AFP, 16
octobre 2016.
Amir Nour : Chercheur algérien en
relations internationales, auteur
notamment du livre «L’Orient et
l’Occident à l’heure d’un nouveau
‘Sykes-Picot’», paru en septembre 2014
aux éditions Alem El Afkar, Alger.
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