BDS
Je suis la première Juive interdite
en Israël
pour soutien au BDS
Alissa Wise
Alissa
Wise DR
Samedi 29 juillet 2017
Par Alissa Wise (Jewish
Voice For Peace) le 26 juillet 2017 Bien que j’ai été
en Israël/Palestine près d’une douzaine
de fois auparavant — j’ai grandi en me
rendant en Israël avec ma famille, j’ai
passé un été en Israël lors de mon camp
d’été juif, j’ai fait des études
universitaires à l’Université Hébraïque
à Jérusalem-Est occupée, et j’ai passé
trois étés en Cisjordanie en vivant et
en travaillant dans des villages
palestiniens — je suis devenue beaucoup
plus mal à l’aise à propos de ces
voyages. Depuis l’université, époque à
laquelle j’ai découvert le déplacement
forcé des Palestiniens qui a commencé en
1948 et qui se poursuit à ce jour, j’ai
été profondément perturbée à l’idée que
j’ai le « droit » de me rendre dans la
terre ancestrale de chers amis et
collègues palestiniens qui eux-mêmes ne
peuvent pas se rendre dans ce qu’ils
estiment être leur patrie.
Bien avant que j’ai
été empêchée d’embarquer sur un vol vers
Israël en raison de mes opinions
politiques, j’éprouvais des sentiments
partagés au sujet de ma décision de me
pointer dimanche dernier à l’Aéroport
International Dulles. J’étais en
partance pour Israël et la Palestine en
tant que membre d’une délégation
inter-religieuse co-parrainée par mon
organisation, la Voix Juive pour la
Paix, ainsi que par les Musulmans
Américains pour la Palestine et par
l’Association Presbytérienne pour la
Paix.
Malgré ce malaise,
je suis devenue rabbin pour une raison
fondamentale : construire les bases de
la justice et de la libération pour tout
le monde en structurant les Juifs dans
un partenariat approfondi avec des
villages directement affectés, par delà
les frontières et les religions. Notre
délégation projetait de passer 12 jours
en Israël et dans les Territoires
Palestiniens Occupés, en rencontrant des
militants de terrain palestiniens et
israéliens et des dirigeants religieux,
et en visitant nos lieux saints
respectifs.
Au lieu de cela,
cinq d’entre nous ont été empêchés même
d’embarquer sur le vol prévu. Quand je
suis arrivée au comptoir
d’enregistrement à l’aéroport, à mon
grand scandale, un employé de la
compagnie aérienne Lufthansa a informé
cinq d’entre nous — trois Juifs, un
Chrétien et un Musulman — que le
gouvernement israélien avait dit à la
compagnie aérienne de ne pas nous
embarquer.
Il ne s’agit pas
seulement de moi, ou de dirigeants juifs
ou d’autres religions ne pouvant pas
aller en Israël. L’interdiction,
l’établissement de profils, la détention
et l’expulsion de Palestiniens et de
Musulmans dans des aéroports israéliens
font partie depuis longtemps des
pratiques israéliennes. Des
renseignements ont été recueillis sur
ces dispositions non seulement par les
organisations de défense des droits de
l’homme mais aussi par le gouvernement
fédéral des USA, et ont été
explicitement reconnus — et excusés -
par la Haute Cour d’Israël. En fait, le
même jour où nous avons été retenus à
Dulles, un militant palestino-américain
s’est vu interdire au poste-frontière
d’Allenby le passage de Jordanie.
Mais ce qui nous
est arrivé dimanche était quelque chose
de nouveau. On était en train de nous
bloquer en raison de nos convictions,
nous allions l’apprendre. Dans une
déclaration, des fonctionnaires
israéliens ont confirmé que l’entrée
nous était interdite en raison de notre
soutien au boycott, au désinvestissement
et aux sanctions à l’encontre d’Israël,
connus aussi sous le nom de BDS. Ils ont
aussi donné une liste de critères de
blocage futur de militants appartenant à
des “organisations ciblées,” lesquels
critères font partie de la mise en œuvre
de “l’interdiction du BDS” que la
Knesset israélienne a adopté en mars. Le
Ministère des Affaires Stratégiques,
Gilad Erdan, a déclaré à Haaretz, “Nous
ne laisserons pas des militants
emblématiques du boycott venir ici pour
nous nuire.”
En même temps que
l’interdiction du BDS, Israël a promis
l’interdiction des ressortissants
étrangers qui demandent publiquement des
sanctions contre lui. Mes compagnons de
voyage et moi sommes les premières
victimes de celle-ci, largement
critiquée en tant qu’énorme violation
des libertés civiques fondamentales,
telles que la liberté d’expression et de
résistance non-violente. En
criminalisant par cette interdiction de
voyage le militantisme en faveur des
droits des Palestiniens, Israël est en
train de briser le mythe le présentant
comme une démocratie juive. Un pays qui
interdit ceux qui critiquent ses
violations des droits de l’homme est
fondamentalement anti-démocratique. Me
refuser l’entrée parce que je m’oppose
publiquement et sans remords à
l’oppression des Palestiniens est un
geste de désespoir de la part d’un
gouvernement qui sait que sa domination
par la force est insoutenable.
Mais l’interdiction
révèle aussi qu’Israël a très peur de la
puissance des mouvements populaires, de
la résistance non-violente et des liens
humains d’un côté à l’autre des
frontières. Historiquement, les
mouvements ayant recours aux boycotts et
aux campagnes de désinvestissement ont
bâti la pression essentielle à la base,
en exigeant des changements de la part
des gouvernements et des institutions
renforçant des politiques d’oppression.
Je pense que ces tactiques sont les plus
morales et la voie la plus prometteuse à
terme pour assurer, que, un jour, les
familles palestiniennes puissent prier,
vivre et se déplacer librement dans leur
patrie.
J’ai finalement
décidé de me joindre à cette délégation,
parce que s’associer à des militants
pacifistes israéliens et palestiniens
sur le terrain dans le cadre d’un groupe
multiracial et multi-religieux allait me
donner une occasion de construire les
sortes de résistance fiables dont nous
avons besoin sur le chemin de la justice
pour tous.
Israël sait que ces
relations entres les gens et les
mouvements sont assez puissantes pour
mettre en cause ses presque 70 années de
dépossession et ses 50 années
d’occupation. C’est pourquoi le BDS fait
tant peur à Israël. La bonne nouvelle
c’est que les stratégies répressives
d’Israël ne sont pas assez fortes pour
empêcher les gens d’établir des
relations entre leurs luttes pour la
justice.
Nous continuerons à
les établir jusqu’à ce que les
Palestiniens puissent embarquer sur le
prochain vol de la Lufthansa pour
rentrer chez eux.
Le Rabbin Alissa
Wise est la directrice adjointe de
Jewish Voice for Peace (Voix Juive
pour la Paix)
Traduit de
l’anglais par Yves Jardin
Voir en ligne :
l’article originel en anglais sur le
site de Forward
Le
dossier BDS
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