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Des bâtons
dans les roues
Rania Adel
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Palestine . L’Etat hébreu
est décidé à enrayer toute tentative palestinienne de
transcender les divergences politiques opposant le Fatah au Hamas.
« La situation dans les territoires occupés
n’a jamais été si sombre, si indigne et si en proie au
pessimisme ». C’est en ces termes que le politologue égyptien
du Centre des Etudes Politiques et Stratégiques d’Al-Ahram
(CEPS), Mohamad Al-Sayed Saïd, qualifie ce qui se passe
actuellement en Palestine. Un constat amer, mais qui s’avère
des plus vrais. Outre les raids et les incursions auxquels sont en
proie la bande de Gaza et ses habitants, l’armée israélienne
tente de redorer son blason au détriment du gouvernement
islamique du Hamas. S’il a subi un revers face au Hezbollah,
Israël s’efforce d’accentuer sa pression sur le Hamas par
volonté de rectifier son image, du moins aux yeux de ses
citoyens. Et si à aucun moment de sa lutte avec le Hezbollah l’Etat
hébreu n’a allégé sa pression sur le volet palestinien, ce
dernier souffre davantage notamment après le retour au calme
relatif au Sud-Liban. Ainsi, et dans le but d’infliger un
camouflet au Hamas, Israël a décidé d’arrêter non pas des
activistes mais des membres du gouvernement palestinien. Dimanche,
le secrétaire général du Parlement palestinien, Mahmoud
Al-Ramahi, a ainsi été arrêté par l’armée israélienne,
a-t-on appris auprès de responsables palestiniens de sécurité
et de sa famille. Les soldats ont encerclé son domicile en plein
jour et l’ont arrêté.
Al-Ramahi n’est pas le premier responsable du
Hamas à être arrêté, et apparemment il ne sera pas le dernier.
Un porte-parole de l’armée israélienne a indiqué que cette
arrestation relevait « de la lutte contre le mouvement radical
Hamas », qui refuse de reconnaître l’Etat hébreu et de
renoncer à la violence. Toutefois, ancien doyen de la faculté
islamique Al-Najah de Naplouse, ce père de six enfants, également
ministre de l’Education, fait figure de technocrate et de modéré
au sein du Hamas. N’oublions pas qu’une soixantaine de
responsables du Hamas, dont le président du Parlement et le numéro
deux de l’Autorité palestinienne, Aziz Doweik, huit ministres
et 26 députés, ont été arrêtés depuis le 29 juin par l’armée
israélienne. Quatre ministres et le vice-président du Parlement
ont entre-temps été libérés.
Ces arrestations ont commencé après l’enlèvement,
le 25 juin dernier, d’un soldat israélien par des groupes armés
palestiniens, dont la branche armée du Hamas. S’agit-il alors
pour Israël d’une volonté de récupérer ce soldat par ces
arrestations de dirigeants palestiniens ? Certes, non.
L’objectif va beaucoup plus loin. Si au Sud-Liban Israël a
cherché à détruire le Hezbollah, dans les territoires occupés,
il œuvre à se débarrasser du Hamas. Cette arrestation constitue
« la poursuite du feuilleton criminel auquel se livre le
gouvernement d’occupation » contre le gouvernement palestinien,
a dénoncé son porte-parole, Ghazi Hamad. « L’objectif d’Israël
n’est autre que la disparition d’un gouvernement ou d’une
Autorité palestinienne, ou leur affaiblissement », a-t-il ajouté.
Pour Saëb Eraqat, principal négociateur
palestinien, « cette arrestation sape les efforts déployés pour
former un gouvernement d’union nationale appliquant le programme
du président Abbass ».
Le ministre égyptien des Affaires étrangères,
Ahmad Aboul-Gheit, dont le pays est impliqué dans les efforts
pour la libération du soldat israélien, a condamné
l’arrestation, affirmant que Le Caire refusait les « tentatives
d’Israël d’imposer sa volonté au peuple palestinien ».
Le timing de ces arrestations traduit, en
effet, la véritable intention de l’entité sioniste.
N’intervient-il pas après l’accord des Palestiniens sur « le
document des prisonniers », stipulant la constitution d’un
gouvernement national, et au moment où des discussions entre le
président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbass, et le
premier ministre, Ismaïl Haniyeh, sont en cours en vue de former
un tel gouvernement regroupant le Hamas et le Fatah ? Mais avec
les arrestations israéliennes, la formation d’un tel
gouvernement risque d’être ajournée. Formation déjà reportée
à cause de l’embrasement dans le sud libanais.
Levée du « siège »
Au cours de cette semaine, le premier ministre
palestinien a posé les conditions de la formation de ce
gouvernement. M. Haniyeh a insisté sur la présence d’un représentant
de son parti à la tête de ce gouvernement : « Tout gouvernement
(d’union nationale) doit être fondé sur la base des résultats
des élections législatives palestiniennes » de janvier 2006,
remportées par le Hamas, et son dirigeant doit appartenir à ce
parti, a-t-il dit. Il a de même réclamé la libération préalable
de « tous les ministres et députés » du parti islamiste, arrêtés
par l’armée israélienne le 29 juin.
Il a également affirmé qu’un tel
gouvernement ne pourrait voir le jour avant la levée du « siège
» imposé par l’armée israélienne dans la bande de Gaza, où
elle poursuit des opérations militaires depuis le 28 juin. Cette
offensive a fait au moins 179 morts, côté palestinien, et un, côté
israélien.
Enfin, M. Haniyeh a posé vendredi dernier
comme dernière condition à la formation d’un gouvernement
d’union nationale le fait qu’aucun responsable ne soit impliqué
ou accusé de corruption. Le Fatah de M. Abbass avait perdu les élections
législatives de janvier, notamment en raison de la corruption.
Condition difficile à remplir ? Pour le Dr Saïd, non. « Seule
une minorité du Fatah est taxée de corruption », explique-t-il.
La formation d’un tel gouvernement devrait
mettre fin à la crise que traverse l’Autorité palestinienne
depuis l’arrivée au pouvoir du Hamas, en mars dernier. Cette
crise est notamment due au gel par les Etats-Unis et l’Union
Européenne (UE) d’une grande partie de leur aide aux
Palestiniens. Washington et l’UE boycottent le Hamas, qu’ils
considèrent comme une organisation « terroriste », et exigent
qu’il reconnaisse Israël, les accords signés avec lui et
renonce à la violence.
Mais avec l’intransigeance israélienne, les
Palestiniens parviendront-ils vraiment à unifier leurs rangs ?
Pour les observateurs et les analystes, ils n’ont pas d’autre
choix et doivent lutter pour y arriver. « Il faut que les Arabes
adoptent une position forte afin de permettre à l’Autorité
palestinienne d’exercer ses pouvoirs, de contrôler la situation
sécuritaire et de mettre un terme au chaos. Les Palestiniens ne
peuvent pas affronter seuls Israël. Si le statu quo persiste, les
affaires se détérioreront et le pessimisme pourra en décider
plusieurs à utiliser les armes pour régler leurs problèmes. Si
on perd la confiance en le gouvernement, il y aura plus
d’effritement », conclut le Dr Saïd.
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