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Ha'aretz
Pour une conférence de Madrid
II
Yossi Beilin *
[Yossi
Beilin, l'artisan israélien de l¹Initiative de Genève, réclame
une commission d¹enquête sur la guerre et appelle Olmert à
prendre l¹initiative d¹une conférence de paix internationale à
l¹image de la conférence de Madrid de 1991. Cette initiative,
pense Beilin, aurait de meilleures chances de succès que la précédente,
qui avait déjà changé en partie le cours de l¹histoire du
Moyen-Orient.]
http://www.haaretz.com/hasen/spages/749682.html
Ha'aretz, 13 août 2006
Trad. : Gérard pour La Paix Maintenant
Le "matin d¹après", une commission d¹enquête sera créée
pour examiner la manière dont cette guerre a été menée, et
peut-être aussi pour répondre à d¹autres questions, comme
celle de savoir s¹il n¹aurait pas été possible d¹empêcher l¹armement
du Hezbollah depuis six ans par des moyens politiques ou
militaires.
Ces dernières semaines, pendant lesquelles une grande partie du
pays a été exposée aux obus du Hezbollah, où l¹économie s¹est
arrêtée pour un tiers du pays, où le tourisme a stoppé net ; où
les conséquences sur le plan de la sécurité des énormes fossés
qui séparent les riches et les pauvres, les Juifs et les Arabes,
ont éclaté au grand jour ; et où des dizaines de milliers de réservistes
ont été mobilisés ; où le prix, militaire et civil, a été si
lourd : tous exigent une commission d¹enquête, et elle sera créée.
Au lieu de réagir aux exigences présentées par les médias ou
par des manifestants venus de sa coalition parlementaire ou de l¹opposition,
Ehoud Olmert doit lui-même et le plus tôt possible prendre l¹initiative
de cette commission d¹enquête. Il doit d¹ores et déjà se préparer
à la création de cette commission pour s¹assurer qu¹il n¹y
ait aucun soupçon à son encontre selon lequel il chercherait à
échapper aux questions gênantes.
Le gouvernement devra accomplir un gros effort pour que le budget
2007 soit conçu de telle sorte que les différences entre couches
économiques soient comblées, même s¹il n¹est pas possible de
couper dans le budget de la défense comme il s¹y était engagé.
Par ailleurs, Olmert devra mener une initiative politique qui
constitue une alternative à son plan de "convergence".
Le "matin d¹après", Olmert ne pourra pas conduire en
pilote automatique. Il est arrivé au pouvoir en promettant des négociations
politiques avec les Palestiniens. Si cela ne marchait pas, il évacuerait
de manière unilatérale certaines colonies de Cisjordanie et déménagerait
leurs habitants au sein des blocs de colonies. Or, ce plan
est devenu impossible à cause des événements à Gaza et au
Liban, qui ont convaincu l¹opinion que des mesures unilatérales
ne remplaçaient pas des accords. Par ailleurs, ce plan ne
disposerait plus d¹une majorité à la Knesset. La droite et les
partis religieux ne prêteraient pas la main au retrait et à l¹évacuation
de colons, et la gauche ne le laisserait pas renoncer aux négociations
et déménager des colons d¹un côté de la clôture de
Cisjordanie à l¹autre sans qu¹un accord intervienne.
Une initiative consistant à réunir une deuxième conférence de
Madrid serait un geste politique énorme, dramatique, qui serait
accepté, du moins au début, par une grande majorité de l¹opinion
et par la Knesset. La première conférence de Madrid, en octobre
1991, a changé la face du Moyen-Orient.
Pour la première fois dans l¹histoire, des négociations
directes ont eu lieu entre Israël, la Syrie, le Liban et une délégation
jordano-palestinienne autour d¹un accord de paix. Ces pourparlers
ont conduit, trois ans plus tard, au traité de paix israélo-jordanien
rendu possible par les accords d¹Oslo signés par Israël et l¹OLP.
Les discussions avec le Liban, qui dépendaient entièrement de
celles avec la Syrie, n¹ont donc mené nulle part.
Les discussions avec la Syrie, qui ont cessé en 1996 et repris en
1999, se sont de nouveau arrêtées alors que les parties étaient
parvenues à un accord quasi total sur tous les problèmes à l¹ordre
du jour, sauf celui qui concerne la côte nord-est du lac de Tibériade.
Il est vrai que depuis lors, des événements terribles se sont
produits : la deuxième Intifada, la victoire du Hamas, le 11
septembre, l¹extrémisme iranien, le conflit à Gaza après le désengagement
et une autre guerre au Liban. Mais il y a eu également des développements
positifs : la Syrie a quitté le Liban, le régime de Saddam
Hussein a été renversé, Fouad Siniora a été élu premier
ministre du Liban, Bachar Assad et Mahmoud Abbas ont exprimé leur
désir d¹entamer des négociations avec Israël, tous éléments
qui créent des circonstances pour une deuxième conférence de
Madrid bien plus favorables que celles qui prévalaient à la
veille de la première.
Il faut aussi ajouter que les fossés entre les parties concernant
un accord de paix définitif se sont considérablement rétrécis
depuis 15 ans. En Israël, en 2006, il existe un quasi-consensus
autour de l¹idée d¹un Etat palestinien, et le premier ministre
d¹Israël est prêt à renoncer à près de
90% de la Cisjordanie, unilatéralement. Les paramètres Clinton,
la "vision" de Bush, la Feuille de route, la décision
du sommet de la Ligue arabe en 2002 et l¹Initiative de Genève dépeignent
tous une image claire d¹un accord israélo-palestinien. Les
pourparlers, publics ou secrets, avec les Syriens depuis 1991
jettent eux aussi presque complètement les bases d¹un accord israélo-syrien.
En 1991, ce sont les Etats-Unis qui ont fait l¹effort de
convaincre Israël de participer à cette conférence. Cette fois,
ce sera le rôle d¹Olmert de convaincre le président Bush que
faire sortir la Syrie de l¹"Axe du Mal", la paix avec
le Liban et la fin du conflit israélo-palestinien constituent des
objectifs réalisables par des actes pratiques qui, s¹ils
marchent, peuvent sauver le Moyen-Orient et contribuer à mettre
en oeuvre la vision réformatrice en laquelle Bush croit tant.
* Yossi Beilin, ancien ministre, est président du parti
Meretz-Yakhad. Il est à l¹origine, avec Yasser Abed Rabbo, de l¹Initiative
de Genève.
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