Opinion
Les 25 vérités de
Raúl Castro sur Cuba
Salim Lamrani
Photo:
Opera Mundi
Jeudi 25 juillet 2013
Opera Mundi
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Comme
à son habitude, le président cubain
s’est montré très critique lors de son
intervention le 7 juillet 2013 devant le
Parlement cubain. Il s’affirme, une fois
de plus, dans son rôle de premier
dissident du pays.
1.
Avec la
légalisation du dollar en 1993 suite à
la grave crise économique qui a frappé
le pays après l’effondrement du bloc
soviétique, un système de dualité
monétaire a été établi à Cuba. En 2002,
en plus du peso cubain et du dollar, le
peso convertible (CUC) a été introduit
dans l’île. De 2002 à 2004, il y eut
ainsi trois monnaies en circulation à
Cuba, jusqu’à la disparition du dollar
en 2004. Désormais, le peso cubain
côtoie le peso convertible avec une
différence de valeur allant de 1 à 24.
Cette double monnaie est source
d’inégalité au sein de la nation dans la
mesure où la plupart des Cubains
reçoivent leur salaire en peso cubain et
non en CUC, réservé au secteur
touristique. Raúl Castro est conscient
de cette réalité. Selon lui, « le
phénomène de la dualité monétaire
constitue l’un des obstacles les plus
importants au progrès de la nation ».
2.
Le Président
cubain est un farouche détracteur de
l’indolence et l’incompétence qui
caractérisent parfois les Cubains et
souligne « la nécessité d’une lutte
énergique contre les mauvaises habitudes
et les erreurs qui sont commises
quotidiennement dans les sphères les
plus diverses par beaucoup de citoyens,
y compris les militants ».
3.
La crise
économique engendrée par la Période
spéciale débutée en 1991 a eu un impact
extrêmement négatif sur les valeurs de
la société cubaine, devenue moins
solidaire et plus égoïste. « Nous avons
perçu avec douleur […] la détérioration
continue de valeurs morales et civiques,
comme l’honnêteté, la décence,
l’honneur, l’honorabilité et la
sensibilité face aux problèmes des
autres », note avec amertume le chef
d’Etat.
4.
Raúl Castro
fustige les vols récurrents commis à
l’encontre de l’Etat, qui sont devenus
la norme : « Une partie de la société
considère comme normal de voler
l’Etat ».
5.
Le Président
dénonce également « les constructions
illégales, dans des endroits interdits
de surcroit », ainsi que « l’occupation
illégale de logements ».
6.
Le règne de
« l’impunité » favorise « la
commercialisation illicite de biens et
de services » à Cuba et affecte
grandement l’économie nationale et les
ressources de l’Etat.
7.
Un nombre
important de fonctionnaires cubains
n’effectuent pas l’intégralité de leur
service pour lequel ils sont rétribués,
ce qui a un impact négatif sur la
productivité nationale et affecte le bon
fonctionnement des services publics.
8.
« Le vol et le
sacrifice illégal de bétail » est un
phénomène en pleine expansion, tout
comme « la capture d’espèces marines en
voie d’extinction », « la coupe de
ressources forestières, y compris dans
le magnifique Jardin botanique de La
Havane ».
9.
« L’accaparement
de produits déficitaires et leur revente
à des prix supérieurs » est devenue une
activité lucrative à Cuba où des
personnes peu scrupuleuses profitent des
vicissitudes et difficultés quotidiennes
de la population pour s’adonner à la
spéculation.
10.
Le développement
de jeux illégaux est en plein essor dans
l’île et implique des sommes
conséquentes.
11.
La corruption
est une réalité endémique à Cuba et de
nombreux fonctionnaires acceptent « des
pots-de-vin et des prébendes ».
12.
Une certaine
catégorie de la population s’adonne au
« harcèlement des touristes », ce qui
est susceptible de représenter un grave
danger pour l’économie du pays,
dépendante de ce secteur, lequel
représente la troisième source de
revenus de la nation.
13.
Raúl Castro
regrette les manquements au « devoir
citoyen » et les atteintes portées à la
vie en communauté. Il fustige le tapage
diurne et nocturne, les tags sur les
murs, le fait de jeter des déchets sur
la voie publique, la consommation
d’alcool sur la voie publique et la
conduite en état d’ivresse, la
dégradation de biens publics, faits de
plus en plus répandus au sein de la
société.
14.
Les manquements
aux règles élémentaires d’hygiène, tel
que l’élevage de porcs en pleine ville,
mettent en danger la santé de la
population.
15.
La fraude dans
les transports en commun est également
un phénomène préoccupant, à quoi
s’ajoute le vol des recettes de vente de
tickets par les employés eux-mêmes.
16.
Malgré un
demi-siècle de Révolution et la mise en
place d’un système social basé sur la
solidarité et l’aide aux plus
vulnérables, le président cubain
constate que « l’on ignore les normes
les plus élémentaires d’éducation et de
respect vis-à-vis des personnes âgées,
des femmes enceintes, des mères
accompagnées d’enfants en bas âge et des
personnes souffrant d’un handicap ».
17.
Le plus grave
selon lui est que « tout cela se déroule
sous notre nez, sans susciter le rejet
et l’affrontement citoyens ».
18.
L’éducation est
l’une des grandes réussites du processus
révolutionnaire cubain et l’un des
piliers de la cohésion sociale.
Néanmoins, ce secteur n’est pas exempt
de critiques. Raúl Castro dénonce
l’implication de certains enseignants et
de parents d’élèves dans des cas de
fraude académique, avec des conséquences
néfastes pour la société. « On sait que
le foyer et l’école conforment le binôme
sacré de la formation de l’individu en
fonction de la société et ces actes
représentent non seulement un préjudice
social, mais également une grave fissure
de caractère familial et scolaire […].
La famille et l’école doivent inculquer
aux enfants le respects des règles de la
société ».
19.
Raúl Castro
admet que même si la prévention et le
travail politique ont été privilégiés
pour résoudre les problèmes plutôt que
la force coercitive de la loi, il
convient de « reconnaitre que cela n’a
pas toujours été suffisant ».
20.
Le président
cubain reconnait que le fléau de la
« corruption administrative » touche les
cadres et parfois même certains hauts
dirigeants.
21.
« Nous avons
reculé en terme de culture et de civisme
citoyens », souligne Raúl Castro.
22.
« J’ai la
sensation amère que nous sommes une
société de plus en plus instruite, mais
pas nécessairement plus cultivée ».
23.
Le Président
cubain fustige « le manque d’exigence,
d’ordre et de discipline », « l’absence
de systématicité dans le travail dans
les différents niveaux de direction » et
« le manque de respect de part des
entités de l’Etat de l’institutionnalité
en vigueur ».
24.
Comment est-il
possible d’exiger alors de la population
de respecter les règles en vigueur, si
l’Etat lui-même ne respecte pas la loi,
questionne Raúl Castro ?
25.
A son habitude,
Raúl Castro s’est montré direct, incisif
et implacable à l’égard des membres de
son propre gouvernement : « Les
dirigeants, des instances nationales
jusqu’à la base, doivent abandonner la
passivité et l’inertie dans leur
conduite. Ils doivent cesser de regarder
ailleurs, alors que le problème se
trouve sous leurs yeux ».
Docteur ès Etudes Ibériques et
Latino-américaines de l’Université Paris
IV-Sorbonne, Salim Lamrani est Maître de
conférences à l’Université de La
Réunion, et
journaliste, spécialiste des relations
entre Cuba et les Etats-Unis.
Son dernier ouvrage s’intitule
État de siège. Les sanctions économiques
des Etats-Unis contre Cuba, Paris,
Éditions Estrella, 2011 (prologue de
Wayne S. Smith et préface de Paul
Estrade).
Contact :
lamranisalim@yahoo.fr ;
Salim.Lamrani@univ-reunion.fr
Page Facebook :
https://www.facebook.com/SalimLamraniOfficiel
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