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Venezuela
Mythes et
réalités de la lutte contre les drogues au Venezuela
Romain Migus
Saisie de drogues par les
Forces armées bolivariennes.
Caracas,
14 septembre 2009
Pour préparer l’opinion publique internationale à une action
militaire contre le Venezuela, la propagande US soutient que
l’administration Chavez facilite les cartels de la drogue. Cette
accusation est d’autant plus extravagante que le gouvernement
révolutionnaire considère de son devoir d’éduquer et d’émanciper
les toxicomanes et qu’il lutte durement contre les trafiquants.
Tel n’est pas le cas des États-Unis, à l’abri desquels la
production prospère en Colombie et en Afghanistan. Romain Migus
revient sur quelques chiffres éloquents. La fin des accords
qu’entretenait au Venezuela le Gouvernement bolivarien avec la
Drug Enforcement Administration (DEA) a été la pierre angulaire
d’une guerre médiatique et psychologique contre lui. Nombreuses
sont les déclarations du gouvernement des États-Unis qui
laissent croire que les mafias de la drogue règnent en paix sur
le Venezuela. Ces calomnies —pourtant contredites par de
nombreux rapports d’organismes internationaux— sont amplifiées
par les grandes entreprises transnationales de communication. Le
consommateur de ce type d’information a alors tendance à
dénigrer le gouvernement bolivarien. Or c’est bien là l’effet
recherché : faire passer la Révolution socialiste vénézuélienne
pour un complice du trafic de drogue international au yeux de
l’opinion publique mondiale, et ce, à fin de justifier n’importe
quelle action belliqueuse mené au nom de la légitime guerre
contre ce problème de santé public. Le récent accord que les
États-Unis viennent de conclure pour pouvoir utiliser sept bases
colombiennes afin de lutter contre le trafic de drogue et le
terrorisme concrétisent ces menaces guerrières. Mais plutôt que
de tirer à boulet rouge sur le gouvernement bolivarien, il
convient de se demander d’où vient notre information, et que
vaut la crédibilité des sources principales de cette campagne
continue de mensonges médiatiques, à savoir le gouvernement des
États-Unis et les multinationales qui voient dans la Révolution
bolivarienne un obstacle à leurs intérêts. Nous revenons
ci-dessous sur les cinq principaux mythes qui font du Venezuela
un allié du narcotrafic [1].
1er mythe : le Venezuela ne collabore
pas à la lutte internationale contre le trafic de drogue
Le 8 août 2005, le gouvernement vénézuélien mettait fin à la
collaboration qu’entretenaient, au Venezuela, ses services de
lutte contre la drogue avec leurs homologues états-uniens de la
Drug Enforcement Administration (DEA). La raison invoquée : les
agents nord-américains passaient le plus clair de leur temps à
des activités d’espionnage au lieu de la dite coopération. La
DEA possédait notamment des bureaux au sein même du Bureau
national antidrogue vénézuélien (ONA, en espagnol, Oficina
Nacional Antidrogas [2]),
auxquels le propre directeur de l’ONA n’avait même pas accès.
Or le renvoie des agents de la DEA installés à Caracas
n’isole pas le Venezuela dans la lutte anti-drogue puisque d’une
part, ce pays maintient 50 accords internationaux dans ce
domaine avec 37 pays, la plupart européens, et d’autre part, le
Venezuela continue d’établir un lien permanent avec les
autorités états-uniennes pour combattre ce fléau comme en
témoigne l’extradition de trafiquants de drogue vers les
États-Unis.
De même, afin d’honorer les accords de collaboration que les
autorités vénézuéliennes maintiennent avec de nombreux pays,
plusieurs trafiquants internationaux, quand ils ne sont pas
jugés au Venezuela, sont remis aux mains de la Justice des pays
qui en font la demande comme ce fut le cas en 2008 lors
d’extraditions vers la Colombie, l’Italie, les États-Unis, la
Belgique et la France.
En plus des accords bilatéraux, le Venezuela collabore
pleinement avec la Commission interaméricaine pour le Contrôle
de l’abus de drogues, instance rattachée à l’Organisation des
États américains (dans laquelle siège les États-Unis), avec la
Commission des stupéfiants de l’Organisation des Nations Unis
(ONU) ainsi qu’avec INTERPOL.
Durant l’année 2008, les ambassadeurs d’Espagne, d’Allemagne
et de France au Venezuela ont réalisé conjointement avec la ONA
plusieurs séminaires et réunions de travail durant lesquels fut
réaffirmé l’engagement commun dans la lutte contre la drogue.
En septembre 2009, le Venezuela accueillera la réunion
annuelle, pour Amérique Latine et les Caraïbes, des directeurs
des agences nationales chargées de combattre le trafic de drogue
(HONLEA par ses sigles en anglais ; Head of National Drug Law
Enforcement Agencies). Ces réunions placées sous lles auspices
de l’ONU ont pour but de renforcer la coopération entre les pays
et coordonner la répression du trafic de drogue à l’échelle
régionale. Les pays européens, asiatiques et africains
participent à cette réunion en qualité d’observateurs.
Dire que le Venezuela ne collabore pas à la lutte
internationale contre le trafic de drogue est une contrevérité
qui ne résiste pas un seul instant à l’examen objectif du
travail du Venezuela en la matière, et des accords que le pays
bolivarien honore avec de nombreux pays et organismes
internationaux.
2ème mythe : le président Chavez est
un facilitateur du trafic de drogue international
Le 20 janvier 2008, lors d’une visite en Colombie, l’ancien
directeur du Bureau de la politique de Contrôle des drogues de
la Maison-Blanche, John Walters, a déclaré « qu’Hugo Chavez est
en train de devenir un important facilitateur du trafic de
cocaïne vers l’Europe et d’autres régions de l’hémisphère »,
comprendre les États-Unis. Si aucune preuve ne viendra jamais
étayer l’affirmation du fonctionnaire états-unien, son intention
est facilement compréhensible. Il s’agit d’accuser Hugo Chavez
de collusion avec le trafic de drogue international. Cette
accusation fut la pierre angulaire médiatique qui avait légitimé
l’intervention des États-Unis au Panama en 1989, et dans une
moindre mesure l’invasion de l’Afghanistan en 2001 (en plus du
terrorisme). Ce fut aussi la raison invoquée pour la mise en
place du Plan Colombie et le renforcement de l’aide militaire au
gouvernement colombien dans sa guerre contre la guérilla [3].
En bref, c’est une puissante arme dans la propagande de guerre
préalable à toute intervention militaire.
Or, selon l’ONU, 50 % de la cocaïne présente sur le
territoire états-unien entrent par la côte Pacifique et 38 %
entrent en longeant le littoral des pays d’Amérique centrale.
Autrement dit, 88 % de la cocaïne présente aux États-Unis ne
transitent pas par le Venezuela.
Si Hugo Chavez et le Venezuela ne facilitent en rien le
trafic de drogue international (en 2008, le nombre de détenus
vénézuéliens en Europe pour trafic de drogue a même diminué
passant de 121 à 30 condamnations), en revanche on ne peut dire
la même chose pour les États-Unis.
Le rapport mondial sur les drogues de l’ONU pour 2008
rappelle quelques chiffres éclairants. Le plus grand producteur
de cocaïne est la Colombie avec 61 % de la production mondiale,
le plus grand producteur d’opium au monde est l’Afghanistan qui
concentre 92.5 % de la production. Ces deux pays comptent sur
une présence massive de l’armée des États-unis sur leur
territoire, par le Plan Colombie pour l’un et l’opération
« Liberté Immuable » pour l’autre. Malgré l’occupation militaire
états-unienne, le rapport de l’ONU nous enseigne que les
résultats en matière de lutte anti-drogue dans ces pays sont
catastrophiques. En ce qui concerne la Colombie, la production
de cocaïne n’a pratiquement pas baissé en 10 ans d’aide
technique et militaire des États-Unis à travers le Plan
Colombie. Dans le cas de l’Afghanistan, la production d’opium a,
selon l’ONU, augmenté de 141 % depuis la présence de troupes
militaires US et de la DEA dans ce pays. Qui est le
« facilitateur » ?
3ème mythe : le Venezuela héberge et
protège des trafiquants de drogue internationaux
Il ne fait pas bon être trafiquant de drogue au Venezuela
depuis que le gouvernement a décidé de renvoyer les
fonctionnaires de la DEA. Les chiffres parlent d’eux même. En
2004, avec l’aide des fonctionnaires états-unien, la justice
vénézuélienne a condamné 1 179 trafiquants (dont 273 étrangers).
Quatre années plus tard, et sans la présence de la DEA, le
Venezuela mis sous les verrous 9 133 trafiquants (dont 419
étrangers). Sans les fonctionnaires de la DEA, les condamnations
ont augmenté de 675 % pour l’année 2008 !
Si nous cumulons les résultats des quatre dernières années de
coopération avec la DEA et que nous les comparons aux quatre
premières années d’une politique vénézuélienne indépendante et
souveraine de lutte contre le trafic de drogue, les résultats
sont éloquent et encourageant pour l’État vénézuélien. Lors des
quatre dernières années de présence de la DEA, 8 823 personnes
ont été arrêtées. Lorsque le Venezuela assume seul sa politique
antidrogue, 15 174 délinquants ont été traduits en justice. Soit
une augmentation de 72 %. Pour la seule année 2007, 68
fonctionnaires de police accusés de collaborer avec le crime
organisé ont eux aussi été mis en détention.
En cours de l’année 2008, 14 parrains de la drogue qui
pensaient avoir trouvé refuge au Venezuela furent arrêtés et
extradés, principalement vers la Colombie et les États-Unis.
Parmi eux se trouvaient, entre autres, les Colombiens Marcos
Orozco Wilches, Aldo Alvarez Duran, Farid Dominguez, et Gustavo
Otero Borrero, recherchés pour trafic de drogue et blanchiment
d’argent. Mais surtout, le Venezuela peut être fier de
l’arrestation de Hermagoras Gonzalez Polanco alias « Le Gros »,
chef du cartel de La Guarija et principal dirigeant de
l’organisation paramilitaire colombienne Autodefensas Unidas de
Colombia (AUC) dans cette région. Quant au chef du cartel
colombien de l’Atlantique-Nord, Libardo de Jesus Parra Gonzalez,
il fut interpellé à Maracaibo. Ces criminels internationaux ont
tous été extradés en Colombie ou remis à INTERPOL.
De même, l’Italien Giovanni Civile, arrêté en septembre 2008
et sollicité par la France pour trafic de stupéfiant est en
attente d’extradition.
Malgré la fermeture des bureaux de la DEA à Caracas, les
autorités vénézuéliennes continuent de collaborer avec la
Justice des États-Unis. Les narco-trafiquants Daniel Ervin Davis
et le mexicain Luis Ramon Guerra en savent quelque chose : ils
ont été extradé vers le grand voisin du Nord.
Alors que, durant les années de collaboration avec la DEA,
l’organisme états-unien se réservait l’exclusivité du traitement
des sollicitudes d’extraditions sans en aviser leurs partenaires
vénézuéliens, depuis la rupture des accords avec cette
organisme, le Venezuela a expulsé ou extradé 23 barons
internationaux du trafic de drogue.
En récupérant sa souveraineté dans la lutte contre le
narco-trafic, le Venezuela est aujourd’hui plus un véritable
enfer qu’un havre de paix pour les trafiquants internationaux.
Le gouvernement révolutionnaire considère que c’est par
absence d’idéal que la jeunesse se tourne vers les drogues.
C’est pourquoi l’ONA multiplie les activités culturelles et
sportives pour offrir aux jeunes une perspective
d’accomplissement personnel.
4ème mythe : la consommation de
drogues a explosé au Venezuela depuis le renvoie des agents de
la DEA
Une des orientations de la ONA est de considérer que « les
saisies de drogue doivent se mesurer en gramme, et non en
tonne ». En effet, si les saisies record de drogue effectuées
par l’agence vénézuélienne sont des coups très durs portés au
narco-trafic, il n’en demeure pas moins qu’une attention
première doit être porté sur le consommateur, et pas seulement
en terme de répression sinon en insistant sur la prévention.
Dans ce domaine, la ONA a tissé des partenariats avec toutes
les organisations et les secteurs de la vie sociale
vénézuélienne afin de sensibiliser la population aux effets
dévastateurs de la consommation de drogue. Pour systématiser ses
différentes politiques de prévention, la ONA a lancé, en 2008,
le plan « Semons des valeurs pour la vie » dont le but est de
former des citoyens vénézuéliens pour qu’ils combattent la
racine du fléau de la drogue.
Ainsi, des ateliers de formation ont été réalisés au sein des
écoles de la République pour perfectionner le message
pédagogique que les enseignants délivrent à leurs élèves. Dans
les universités, des bureaux internes anti-drogues ont été crées
pour développer des projets de prévention au plus proche de la
communauté universitaire.
Dans le monde du travail, l’ONA collabore avec toutes les
entreprises publiques et privées de plus de 50 employés afin de
réduire l’absorption de drogues et d’alcool sur les lieux de
travail. De juillet à novembre 2008, une formation à la
prévention a été dispensée à des représentants du patronat
vénézuélien pour qu’ils la répercutent au sein de leurs
entreprises.
De nombreux événements sportifs, comme des tournois de
basket-ball, de football, de boxe ou d’échec, ont été organisé
par l’ONA dans les communautés populaires des grandes villes du
pays pour encourager les jeunes à s’investir dans une activité
sportive régulière et se détourner ainsi des drogues. Ces
rencontres sportives furent aussi le scénario idéal pour
propager le message de l’ONA en matière de prévention.
De plus, l’agence vénézuélienne s’est particulièrement
investie dans le travail auprès des populations les plus
exposées au problème des drogues pour des raisons
socio-culturelles : enfants et adolescents des rues, population
carcérale, Peuples Premiers, personnes soufrant de handicap
moteur ou physique, ou encore communautés vivant à la frontière
avec la Colombie, premier producteur de cocaïne au monde.
Comme agence gouvernementale, l’ONA a su s’adapter aux
changements structurels de l’appareil étatique vénézuélien en
donnant priorité à la collaboration avec les Conseils communaux.
En vertu des articles 8 et 9 de la Loi sur les Conseils
communaux, l’ONA participe à l’élaboration de Comités de
prévention communaux afin de déléguer aux organisations de base
la réalisation du travail local d’information sur les dangers
des drogues. De plus, pour renforcer son réseau social, l’ONA a
désigné avec l’aide des communautés institutionnelles, des
responsables anti-drogues à tous les niveaux de l’État
vénézuélien (régional, municipal et parroquial) incorporant
ainsi 11 296 citoyens au travail préventif de lutte contre les
drogues.
Ce travail quotidien de prévention s’est traduit par de bons
résultats. Selon les chiffres de l’ONU, le Venezuela a une
consommation de drogues par habitant nettement inférieure à
celle des pays européens et sans aucune comparaison possible
avec le second pays consommateur au monde : les États-Unis [4].
À titre d’exemple, la ville de New York a une consommation de
cocaïne par habitant prés de 12 fois supérieure à celle de la
ville de Paris, et l’emporte de très loin sur n’importe quelle
grande ville vénézuélienne.
5ème mythe : les résultats obtenus
par le Venezuela dans la lutte contre les drogues sont
déplorables
S’il y a bien des personnes qui ne croient plus à ce mensonge
médiatique, ce sont bien les trafiquants eux même. Les résultats
du gouvernement bolivarien en matière de lutte contre le
narcotrafic n’a eu de cesse de croître depuis le renvoi des
fonctionnaires de la DEA.
Alors que le gouvernement vénézuélien avait saisi 43 tonnes
de drogues en 2004, grâce à la collaboration de la DEA, ce
chiffre allait augmenter à 77.5 tonnes en 2005 lorsque les
fonctionnaires états-uniens étaient expulsés. Les bons résultats
de cette politique souveraine en matière de lutte contre le
narco-trafic se trouvent confirmés dés lors que l’on analyse les
saisies des quatre premières années sans la collaboration de la
DEA (250 298,19 kilos de drogues saisis) avec les quatre
dernières qui ont précédé (153 884,65 kilos de drogues saisis).
On constatera une augmentation de prés de 63 % des tonnes de
drogues saisies sur le territoire vénézuélien lorsque la DEA ne
pratique pas d’ingérence dans les affaires du pays.
Mais les bons résultats du Venezuela ne s’arrêtent pas là.
Lors de l’Opération Boquete, qui a eu lieu au cours de l’année
2008, 223 pistes d’atterrissage clandestines utilisées par les
trafiquants de drogues ont été détruites. Cette Opération a été
menée conjointement par 600 fonctionnaires provenant de l’ONA,
des Forces armées nationales bolivariennes et de la Garde
nationale bolivarienne, appuyés en cela par des hélicoptères
MI-17, par des avions de chasse F-16 ainsi que par dix nouveaux
radars chinois récemment acquis pour lutter contre le
narco-trafic.
De même, la destruction de laboratoires clandestins,
généralement installés le long de la frontière avec la Colombie,
est une priorité du gouvernement vénézuélien. Pour la seule
année 2007, le Venezuela a démantelé 12 laboratoires clandestins
qui produisaient jusqu’à une tonne de cocaïne par mois.
En règle générale, les bons résultats du Venezuela en matière
de lutte contre le trafic des drogues sont fréquemment salués
autant par des organismes internationaux comme l’ONU ou
l’Organisation des États américains (OEA) à travers son
mécanisme d’évaluation multilatéral, que par les nombreux pays
qui maintiennent des accords bilatéraux avec le Venezuela dans
ce domaine.
[1]
Les chiffres que nous utilisons sont extraits du Rapport mondial
sur les drogues réalisés par l’ONU en 2007, et 2008 ainsi que
sur les résultats du Bureau national antidrogue vénézuélien.
[2]
Site officiel de l’ONA.
[3]
« Le Plan Colombie : Cocaïne, pétrole et mercenaires », par Paul
Labarique, Réseau Voltaire, 25 février 2004. « L’extension
régionale du Plan Colombie », par Diego Mince Jara (Altercom/Réseau
Voltaire), 25 février 2005. « El Plan Colombia utiliza armas
biológicas », par Amparo Sigcha et « Plan
Colombia : un peligro latente », par Edison Solís Vargas (Opcion/Red
Voltaire), 1er septembre 2005, 29 mai 2009. « El
Plan Colombia, una política de (in)seguridad », par Henry
Salgado Ruiz (Actualidad colombiana/Red Voltaire), 15 avril
2004. « En
las fronteras del Plan Colombia », par Hernando Calvo Ospina
(Question/Red Voltaire), 28 février 2005.
[4]
Le premier pays consommateur au monde est l’Arabie saoudite.
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