Opinion
Le Royaume-Uni
menace d'entrer dans l'ambassade
d'Équateur pour s'emparer d'Assange
Robert Stevens
La police
devant l'ambassade équatorienne
Jeudi 23 août 2012
La menace faite par
le gouvernement anglais alliant
conservateurs et libéraux, de pénétrer
dans l'ambassade équatorienne pour
arrêter le fondateur de WikiLeaks Julian
Assange montre son mépris du droit
international et son mépris digne de
l'époque coloniale pour la souveraineté
équatorienne.
Cela marque une nouvelle étape de la
descente de la classe dirigeante
britannique dans la criminalité, pour
faire taire un homme qui a contribué à
révéler une grande partie des
innombrables crimes de la classe
dirigeante, ainsi que ceux des
États-Unis et d'autres puissances
impérialistes.
Jeudi, l'Equateur a fait part de
l'annonce très attendue qu'il accordait
l'asile diplomatique à Assange, en
s'appuyant sur la probabilité que son
extradition vers la Suède serait suivie
de son transfert vers les États-Unis et
d'un procès pour trahison. Un
porte-parole du gouvernement a déclaré
que l'Équateur avait cherché à obtenir
la garantie de la part de la Suède qu'Assange
ne serait pas transféré aux États-Unis,
mais que les autorités suédoises avaient
refusé de la donner.
Les poursuites exercées contre
Assange sont une mise en scène évidente
à but politique, s'appuyant sur des
accusations d'atteintes sexuelles en
Suède montées de toutes pièces.
L'Équateur a proposé aux procureurs
suédois de les autoriser à interroger
Assange à l'ambassade, en personne ou
par vidéoconférence. Mais cela a été
refusé.
Mercredi soir, des
officiers de police ont commencé à
encercler l'ambassade, se préparant à
l'annonce faite par l'Equateur. Assange
est entré à l'ambassade le 19 juin,
demandant à bénéficier d'un sanctuaire
diplomatique et de l'asile politique en
application de la Déclaration des droits
de l'Homme des Nations unies. Cela
venait après la décision de la Cour
suprême du Royaume-Uni rejetant le
dernier recours d'Assange contre son
extradition vers la Suède.
Dans sa lettre
envoyée ce jour-là au gouvernement
équatorien, le gouvernement britannique
déclare que l'ambassade aura droit à une
semaine de préavis avant une descente de
la police, s'il accorde l'asile
politique. Jeudi matin, des camions de
la police ont été stationnés le long des
rues à proximité du bâtiment. Un certain
nombre de manifestants en faveur de la
libération d'Assange ont été déplacés de
force de l'entrée de l'ambassade vers un
enclos établi de l'autre côté de la rue.
Certains ont été arrêtés, y compris une
personne qui filmait en direct pour le
réseau d'Occupy News.
Les manifestants
ont scandé « ne touchez pas à Assange »,
« ne touchez pas à l'Equateur, » et «
Une seule décision – pas d'extradition.
»
Mercredi, le
ministre équatorien des Affaires
étrangères, Ricardo Patino, a annoncé au
cours d'une conférence de presse la
réception de la lettre du gouvernement
britannique envoyée par l'intermédiaire
de l'ambassade anglaise en Equateur.
« L'Equateur
rejette dans les termes les plus
emphatiques la menace explicite contenue
dans la communication officielle
britannique, » a-t-il dit, dénonçant
cette menace comme « indigne d'un pays
démocratique, civilisé et respectueux du
droit. »
« Si la mesure
annoncée par la communication officielle
britannique est appliquée, elle sera
interprétée par l'Équateur comme un acte
inacceptable, déloyal et hostile, ainsi
que comme une atteinte à notre
souveraineté, » a-t-il prévenu. « Cela
nous contraindrait à réagir. Nous ne
sommes pas une colonie britannique. »
La lettre envoyée
par le ministère des Affaires étrangères
anglais était rédigée en des termes
adaptés au rôle d'agresseur impérialiste
de la Grande-Bretagne. Affirmant que la
loi Consular Premises Act de 1987
autorise les actions décidées « pour
arrêter M. Assange dans les locaux
actuels de l'ambassade, » la lettre
poursuit : « Il est nécessaire de
réitérer que nous considérons que
l'utilisation maintenue des locaux
diplomatiques de cette manière est
incompatible avec la convention de
Vienne et ne peut se pérenniser et nous
avons dit clairement les conséquences
sérieuses que cela entraîne pour nos
relations diplomatiques. »
Jeudi, un
porte-parole du gouvernement britannique
a publié une déclaration disant qu'une
éventuelle décision du gouvernement
équatorien d'accorder à Assange le droit
à l'asile politique serait ignorée. «
Accorder l'asile ne change
fondamentalement rien, » a déclaré ce
porte-parole.
Il n'y a pas de
limite à l'hypocrisie et au cynisme du
gouvernement britannique lorsqu'il
déclare que l'équateur agit en
méconnaissance de la Convention de
Vienne.
Ce sont eux qui
piétinent les principes fondamentaux du
droit international, y compris de la
Convention de Vienne, en cherchant à
envoyer Assange devant un tribunal. Le
droit international définit les
ambassades étrangères comme des espaces
souverains et considère que les locaux
diplomatiques doivent être traités comme
s'ils appartenaient au territoire de
l'Etat.
Commentant les
conséquences sévères des menaces contre
Assange, Geoffrey Robertson, avocat
internationalement reconnu, spécialisé
dans les droits de l'Homme, a déclaré :
« Il ressort clairement de la Convention
de Vienne et en fait de notre propre Loi
sur les privilèges diplomatiques de
1964, que les locaux diplomatiques et
consulaires sont ce que l'on appelle
inviolables.
« Et la police du
pays d'accueil ne peut y pénétrer
qu'avec l'accord du chef de la mission.
»
Le gouvernement
britannique a cité la loi sur la locaux
diplomatiques et consulaires de 1987
comme une base légale pour retirer
l'accréditation de l'ambassade
d'Equateur. Cependant, cette loi dispose
précisément que, « Le ministre des
affaires étrangères n'accorde ou ne
retire son agrément que s'il est certain
que cela est permis par le droit
international. »
Si la police
britannique était envoyée dans
l'ambassade sans l'accord de
l'ambassadeur pour arrêter Assange, ce
serait une violation claire du droit
international, spécifiquement de
l'article 22 de la Convention de Vienne
de 1961 sur les relations diplomatiques.
S'opposant à la
demande équatorienne de permettre à
Assange de quitter la Grande-Bretagne,
le ministre des Affaires étrangères
britannique, William Hague, a déclaré
publiquement : « Nous n'allons pas
accorder à Monsieur Assange le droit de
sortir du Royaume-Uni, et il n'y a
aucune base légale pour le faire. Le
Royaume-Uni ne reconnaît pas le principe
de l'asile diplomatique. »
Dans une
déclaration, Assange a remercié le
gouvernement équatorien de lui avoir
accordé l'asile, ajoutant, « Si
aujourd'hui est une victoire historique,
nos luttes ne font que commencer.
L'enquête sans précédent des Etats-Unis,
menée contre WikiLeaks doit être
arrêtée. »
« Si, aujourd'hui,
l'attention se concentre surtout sur la
décision du gouvernement équatorien, il
est tout aussi important de nous
souvenir que Bradley Manning [le soldat
américain accusé d'avoir fourni des
informations à WikiLeaks] est détenu
sans procès depuis plus de 800 jours.
« La tâche de
protéger WikiLeaks, son équipe et ses
partisans, et ses sources anonymes
continue. »
Le fait que la
diplomatie britannique en vienne à des
menaces et à la brutalité policière
contre une autre nation souveraine
corresponds à la criminalité éhontée
qu'elle cherche à défendre. La classe
dirigeante et ses représentants
politiques, y compris les anciens
gouvernements travaillistes de Tony
Blair et de Gordon Brown ont au cours de
la dernière décennie planifié et mené
des guerres d'agression illégales en
Irak et en Afghanistan. Ils soutiennent
maintenant la guerre secrète organisée
par les États-Unis contre la Syrie,
visant à remplacer le gouvernement de
Bashar el-Assad et à ouvrir la voie à
une guerre contre l'Iran.
Les actions visant
Assange sont également menées en
collusion avec le gouvernement Obama aux
États-Unis, le complice de la
Grande-Bretagne.
(Article original
paru le 17 août 2012)
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Publié le 23 août 2012 avec l'aimable
autorisation du WSWS
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