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Liban
«Fath
al-islam» ou les mensonges du gouvernement libanais illégal
Rim al-Khatib
21 mai 2007
Dimanche matin, des hommes de la sécurité intérieure
libanaise se sont dirigés vers un immeuble dans Tripoli pour
arrêter des hommes impliqués dans une affaire de vol de
banque. Il semblerait que des miliciens du Fateh al-islam aient
été encerclés dans l'immeuble. D'un coup, tout se déclenche.
Les miliciens du Fateh al-islam et les forces de la sécurité
se tirent dessus. Peu après, des postes de l'armée libanaise,
situés autour du camp, sont pris d'assaut par Fateh al-islam,
et une vingtaine de soldats sont tués.
L'armée libanaise entre alors dans les combats et tire sur le
camp. Les victimes sont nombreuses : des civils palestiniens du
camp, 8 tués et une vingtaine de blessés dénombrés sans
parler des membres du Fateh al-islam. Du côté de l'armée
libanaise, ce sont 31 soldats qui sont tombés au cours des deux
jours d'affrontements.
Plusieurs questions se posent, entre autres celles posées
au conseil des ministres élargi du lundi, à Beyrouth : le chef
de l'armée a questionné le responsable de la sécurité intérieure
pourquoi l'armée n'a pas été mise au courant de l'opération
sécuritaire en cours à Tripoli. L'armée a été prise au dépourvu,
ce qui a multiplié ses pertes. Comment une opération sécuritaire
relative à un vol de banque peut dégénérer en un
bombardement d'un camp palestinien ?
Le gouvernement libanais et ses portes-parole se sont empressés
d'accuser la Syrie, considérant que Fateh al-islam est une
organisation formée par les appareils sécuritaires syriens,
l'objectif de la Syrie serait, d'après eux, de contrer le
tribunal international relatif à l'assassinat de l'ancien
premier ministre Hariri. Depuis plus d'un an, ce groupe n'a
aucune autre explication sur ce qui se passe dans le pays. Une
langue de bois aussi stérile peut lasser le monde entier mais
n'a pas l'air de lasser les responsables et défenseurs du
gouvernement illégal libanais.
Mais ceux qui connaissent la situation dans les camps
palestiniens du nord et celui précisément de Nahr al-Bared
savent très bien que le gouvernement libanais ment : il
ment à propos de Fateh al-islam, il ment à propos de l'opération
qu'il a déclenché, il ment à propos des vraies causes de ces
affrontements.
Fateh al-islam n'est pas une organisation palestinienne. S'il a
été formé au départ par une scission d'une scission
pro-syrienne du Fateh, il n'en demeure pas moins que les
Palestiniens de Nahr al-Bared savent de qui est formé ce groupe
: essentiellement de libanais, et aussi de plusieurs nationalités
arabes : saoudiens, algériens, marocains, jordaniens, yéménites,
égyptiens.
Pour le financement du groupe, Palestiniens du Liban et libanais
savent que ce groupe a été financé jusqu'à une date très récente
par le fils Hariri lui-même ou ses conseillers haineux à
partir de deux considérations : limiter l'audience du Hizbullah
dans les camps palestiniens, audience relayée par les
organisations palestiniennes diverses, en suscitant un groupe
"sunnite", avec un discours religieux pour faire également
concurrence au Hamas et au Jihad islamique, et d'autre part,
former un groupe sunnite, fer de lance d'une guerre fratricide
sunnite-shiite. Fateh al-islam a été financé pendant
plusieurs mois, depuis son apparition à la fin de 2006,
pur s'installer dans le camp.
Si le gouvernement libanais a décidé de déclencher cette opération,
en faisant intervenir l'armée, qui a été prise au dépourvu,
c'est d'abord pour masquer les véritables assassins qui sévissent
au Liban et qui, depuis plusieurs mois, commettent des
attentats, le dernier étant l'attentat meurtrier de 'Ayn 'Alaq.
D'un coup, tous les crimes sont mis sur le compte de Fateh
al-islam, groupe que personne ne peut défendre, ni au niveau
palestinien ni au niveau libanais. Fateh al-islam est devenu
d'un coup le groupe qui devrait être responsable de tous les
maux libanais. Allant dans ce sens, les responsables du
gouvernement illégal du Liban accusent Fateh al-islam d'être
responsable des deux derniers attentats de Beyrouth, sans
apporter aucune preuve. Mais cette accusation arrange tout le
monde.
Aujourd'hui, les groupes libanais du gouvernement parlent et réclament
l'escalade, mais l'escalade contre qui ? Ils parlent de Fateh
al-islam, mais en même temps posent
la question de l'armement dans les camps palestiniens. C'est là
où intervient le rôle de l'américain Welsh.
Le gouvernement libanais et les groupes qui le soutiennent
exigent des organisations palestiniennes une position claire
vis-à-vis de Fateh al-islam, alors qu'il ne s'agit pas d'un
groupe palestinien. Le gouvernement libanais exige que les
organisations palestiniennes affrontent elles-mêmes ce groupe,
avant de faire cesser les bombardements, soit en quelque sorte,
faire que les affrontements se déroulent à l'intérieur du
camp et non plus entre l'armée et le groupe Fateh al-islam.
En impliquant l'armée libanaise dans cet affrontement qui n'est
pas de son ressort, le gouvernement libanais vise aussi le rôle
de l'armée, lui faire reprendre un rôle de répression intérieure
au lieu d'un rôle voulu par la résistance nationale, et
notamment du Hizbullah, celui d'une résistance contre Israël.
En affrontant Fateh al-islam, le gouvernement et les forces
politiques qui le soutiennent, pensent-ils lutter contre la
Syrie, comme ils le prétendent, alors que ce pays n'a rien à
voir avec Fateh al-islam ? Ils affrontent en réalité la présence
palestinienne organisée dans les camps, car au-delà de la présence
de Fateh al-islam dans le camp, ce sont les organisations
palestiniennes qui sont visées, la présence autonome
palestinienne, armée et civile.
Le plan américain exécuté par les forces politiques du
gouvernement illégal libanais consiste à susciter des troubles
sécuritaires afin de justifier la mise en place d'une tutelle
internationale sur le Liban, visant en premier lieu la présence
de la résistance nationale armée. N'ayant pu faire intervenir
le Hizbullah dans les affrontements armés internes, c'est par
la présence palestinienne que les forces du gouvernement
comptent mettre en place le plan américain.
Encore une fois, les Palestiniens du Liban sont victimes d'un
plan criminel, exécuté par le gouvernement illégal du Liban
qui a impliqué l'armée libanaise. En réalité, le groupe
Fateh al-islam, entièrement isolé des Palestiniens de Nahr
al-Bared, a été utilisé et manipulé par des services
libanais pour régler des comptes libanais-libanais.
Les organisations palestiniennes présentes au Liban, bien
qu'ayant clairement dénoncé Fateh al-islam et ses actions,
bien qu'elles aient clairement dénoncé les assassinats des
soldats de l'armée libanaise, ne peuvent continuer à soutenir
les agissements de cette armée ni de ce gouvernement, car il ne
s'agit plus d'une auto-défense, mais l'exécution d'un plan
visant à liquider leur présence et la cause palestinienne au
Liban.
La guerre menée actuellement contre le camp de Nahr al-Bared
prend des allures de guerre civile : d'un côté, un soutien
populiste à une armée qui n'assume pas un rôle de défense
nationale, et de l'autre, les Palestiniens, les organisations
palestiniennes et les forces de la résistance libanaise, qui
essaient coûte que coûte d'arrêter ce massacre et de régler
la présence de Fath al-islam sans faire payer le prix à la
population des camps.
Le Hizbullah et les partis de l'opposition ont dénoncé, dès
le début, l'implication de l'armée dans cet affrontement. Ils
essaient, avec les organisations palestiniennes, de mettre fin
à cette guerre honteuse. Bahiyya al-Hariri, soeur du feu Rafik
Hariri et éloignée du clan Hariri à cause de ses positions
nationales, a longuement parlementé avec son neveu pour
permettre l'intervention des secours aux Palestiniens encerclés
dans le camp de Nahr-al-Bared. Les partis de l'opposition
essaient de séparer entre Fateh al-islam, que le pouvoir a
d'ailleurs aidé à mettre en place, et les camps palestiniens,
ce que refuse actuellement Sanioura, Joumblatt, Hariri et
consorts, exigeant des organisations palestiniennes qu'elles se
chargent elles-mêmes de l'affrontement, avec les conséquences
désastreuses pour les Palestiniens que cela pourrait entraîner.
C'est cette position, hautement nationale et sage, des
partis de l'opposition que les responsables du gouvernement illégal
essaient de remettre en cause en voulant prouver qu'elle est une
reconnaissance implicite du rôle de la Syrie. On revient à la
langue de bois.
Rim al-Khatib
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