Opinion
La France et
l'Allemagne n'ont rien compris du tout
Rim
al-Khatib
Lundi 20 juin 2011
Ces deux pays européens viennent de
réclamer la libération du soldat
sioniste kidnappé par la résistance
palestinienne, contre non pas la
libération de milliers de prisonniers
palestiniens, mais contre la
reconnaissance par l’Europe du prochain
gouvernement palestinien « d’union
nationale » ou du Hamas.
Un dirigeant du Hamas, Isma’il Radwan, a
répondu à cette étrange réclamation :
« ces propos sont un alignement sur la
politique israélienne et ignorent la
présence de plus de 8 mille prisonniers
palestiniens dans les prisons de
l’occupation sioniste. » ; il a ajouté :
« toutes les propositions offertes par
l’Allemagne et la France pour
reconnaître le gouvernement de Hamas à
Gaza n’ont aucune valeur. C’est par la
mauvaise porte que ces Etats sont entrés
pour parler avec le Hamas et le peuple
palestinien. Nous réclamons que ces
Etats fassent pression sur l’Etat de
l’occupation sioniste pour libérer nos
prisonniers des geôles nazies et
sionistes ».
Ce n’est un secret pour personne que la
France et l’Allemagne ont délibérément
choisi de soutenir l’occupation sioniste
de la Palestine, que ces Etats européens
ferment les yeux ou même participent
souvent à la judaïsation de la ville
sainte d’al-Quds et qu’ils cherchent à
accorder du temps à l’Etat sioniste pour
qu’il parachève son entreprise de
judaïsation de toute la Palestine, au
détriment du peuple palestinien.
Concernant le soldat sioniste capturé
par la résistance, ces deux Etats
européens n’ont cessé de réclamer sa
libération, alors qu’il a activement
participé à la guerre contre la bande de
Gaza. Ils n’ont jamais pris en
considération les milliers de
prisonniers palestiniens, dont Salah
Hammouri qui porte également la
nationalité française, qui ne font que
leur devoir de citoyens, en participant
à la lutte contre l’occupation.
Les Etats européens, pour ne pas citer
les Etats-Unis, approuvent les
arrestations et les rafles menées par
l’occupation sioniste, et en se taisant
sur les conditions de détentions dans
les prisons qui sont les « antichambres
de la mort », ils participent tacitement
aux crimes de guerre de l’occupant.
C’est un parti-pris, ce n’est pas du
tout un manque d’informations. Pour ces
Etats, et les exemples deviennent de
plus en plus évidents, la question de la
dignité humaine, des droits des peuples
à vivre libres, et même les « droits de
l’homme », sont des marchandises agitées
en cas de besoin, mais nullement des
droits fondamentaux à respecter.
Les prisonniers palestiniens et arabes,
détenus dans les geôles sionistes, sont
des prisonniers de guerre. L’Etat
colonial leur refuse ce statut parce
qu’il ne se considère pas occupant. De
même, les organisations internationales,
y compris l’ONU et ses officines, malgré
les résolutions adoptées dans les
assemblées générales, approuvent
implicitement cette vision sioniste.
C’est pourquoi l’UNESCO ne proteste pas
contre la judaïsation d’al-Quds, ni
contre la destruction du cimetière
historique de Ma’manullah pour
construire un musée financé par les
sionistes américains. L’UNESCO,
répondant à une demande des familles
maqdisies lui réclamant d’intervenir
pour arrêter ce massacre civilisationnel,
prétend qu’elle n’intervient que pour
protéger « la vieille ville »,
considérée comme patrimoine de
l’humanité. Mais la vieille ville est
depuis plusieurs années, la cible d’une
judaïsation et d’un nettoyage ethnique
forcenés, et la majeure partie des plans
de la colonisation sioniste visent
précisément cette partie de la ville
d’al-Quds. L’UNESCO laisse faire.
Les prisonniers palestiniens détenus
dans les geôles sionistes représentent
la conscience du peuple palestinien. Ce
sont des combattants et des militants
pour la liberté de tout le peuple. Ils
appartiennent à la plupart des
organisations. Plusieurs centaines sont
condamnés par les tribunaux militaires
de l’occupant à des peines de plusieurs
centaines d’années de prison, et parmi
eux, trois femmes. Des dizaines sont
détenus depuis plus de trente ans. Des
centaines de prisonniers souffrent de
maladies et de blessures graves, mais
l’occupant refuse de leur donner les
soins appropriés. Des dizaines de
prisonniers se trouvent dans des
cellules isolées, mesure que les
sionistes adoptent pour empêcher les
dirigeants de la résistance de
communiquer avec leur peuple. Plusieurs
grèves ont été menées le mois dernier
pour protester contre le durcissement
des conditions de détention, cause du
martyre de plusieurs d’entre eux, ces
derniers temps.
Ce sont ces milliers d’hommes, de femmes
et d’enfants que la proposition
franco-allemande ignore sciemment. Elle
s’imagine que le Hamas, ou plus
globalement la résistance, est plus
intéressée par une reconnaissance qui
aura vite fait de s’évaporer, lorsque le
sioniste sera libéré, que par le sort de
ses propres combattants ou militants. Et
admettons, mais juste admettons, que le
Hamas ou n’importe quelle autre
organisation, ose toucher à cette
équation « shalit = plus d’un millier de
prisonniers, dont tous les condamnés à
perpétuité, tous les anciens détenus,
tous les malades, toutes les femmes et
tous les enfants), le peuple palestinien
les fera chuter, automatiquement.
Si les Etats occidentaux considèrent que
les valeurs telle que la dignité humaine
ou le droit des peuples à la liberté
sont des marchandises, nous, par contre,
nous considérons que nos prisonniers et
nos martyrs sont le prix de notre
liberté et de notre libération.
Et dans tous les cas, que vous le
veuillez ou pas, vous serez bien obligés
de reconnaître et la résistance, et tout
gouvernement de la résistance, que ce
soit en Palestine, au Liban ou ailleurs.
Rim al-Khatib
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