Opinion
Voeux 2013, We
Shall Never Surrender
René Naba
Vendredi 28
décembre 2012
Responsabilité et traçabilité
Le phénomène a pris une ampleur telle
qu’une mise au point s’impose afin d’y
mettre fin, à tout le moins à prévenir
de plus graves dérives.
La fonction d’un journaliste n’est
pas de détruire une personne, mais de
corriger ses erreurs. De déconstruire le
processus de construction d’un
intellectuel médiatique et la
légitimation de sa fonction
déclamatoire. De faire acte de salubrité
publique en ce qu’un faiseur d’opinion
est tenu à des obligations de
responsabilité et de traçabilité, un
système de sauvegarde instauré depuis
l’épizootie de la maladie de
Creutzfeld-Jacob, la maladie dite de la
«vache folle».
Un pilote qui fait une erreur de
pilotage paie de sa vie son erreur. Un
chirurgien qui commet une faute
professionnel en répond devant le
conseil de l’ordre. Un spécialiste qui
se trompe lourdement sur l’objet même de
sa spécialité cesse de l’être. Pourquoi
donc le journalisme serait-il soustrait
à la critique et à la sanction? En vertu
de quelle légitimité surnaturelle, les
membres de cette corporation
feraient-ils exception?
L’auteur de cet texte n’a pas pour
habitude de piétiner un homme à terre,
ni de tirer sur une ambulance, mais
d’exercer sa fonction critique à l’égard
des détenteurs d’un pouvoir qu’il soit
politique ou médiatique, convaincu des
vertus du débat contradictoire, tant il
est vrai qu’un faiseur d’opinion ne
saurait se permettre de jeter des
anathèmes du haut d’une tribune
médiatique, sans s’exposer à la critique
aussi bien de ses idées que de son
comportement que de son parcours. Une
fonction critique et non vindicative.
La déontologie le commande. Le libre
exercice de l’esprit critique est un des
fondements de la démocratie et le
principe de l’égalité des armes dans un
débat, un impératif de survie de la
démocratie.
Dans cet ordre d’idées, la fonction
d’un bi national n’est pas d’être le
porte-voix de son pays d’accueil, ni son
porte-serviette, mais d’assumer avec
vigueur la fonction d’interface exigeant
et critique, un garde-fou à des
débordements préjudiciables du pays
d’origine et du pays d’accueil.
Dans l’intérêt bien compris des deux
camps, le partenariat binational se doit
de se faire, sur un pied d’égalité et
non sur un rapport de subordination de
l’ancien colonisé, le faisant apparaître
comme le supplétif de son ancien
colonisateur. De la même manière, le
devoir d’un intellectuel progressiste
est de faire conjuguer Islam et
progressisme et non de provoquer
l’abdication intellectuelle des
progressistes devant un islamisme
basique, invariablement placé sous les
fourches caudines israélo-américaines.
Cela vaut pour Bourhane Ghalioune
(Syrie), comme pour Mohamad Sifaoui
(Algérie). Pour le tandem irakien Fouad
Ajami et Ahmad Chalabi, les deux
paravents médiatico-politiques de
l’invasion américaine de l’Irak (2003),
comme pour Walid Pharès, l’ancien
milicien chrétien libanais commentateur
de CNN et de France 24 ou Mouaffak Harb,
transfuge chiite libanais vers les
chaines satellitaires américaines.
Par extension pour Fareed Zakaria
(indo américain), suspendu un moment
pour plagiat par CNN, comme pour Boualem
Sansal (Algérie) comme pour Hassan
Chalghoumi (Tunisie). Pour Mathieu
Guidère, comme pour Tahar Ben Jelloun.
Pour les duettistes de l’excentricité
kabyle, Ferhat Mehenni et Lyazid Abid
(Algérie) comme pour la féministe Nadia
El Fanni (Tunisie) et, naturellement,
pour la cohorte de supplétifs syriens de
l’administration française et les
célèbres pieds-nickelés franco libanais
de l’expertise moyen-orientale.
«Libérer l’Islam»!! Soit Boualem,
mais pas par reddition à l’ennemi, mais
par le ménage dans son propre camp, tant
il est vrai que se conformer au moule de
son cerbère n’est pas la meilleure
marque de liberté. Soixante-dix ans
après la proclamation de l’indépendance
des pays arabes, la décolonisation des
esprits s’impose.
Songeons au sort inique de Colin Powell,
dont la prestigieuse carrière militaire
a été à jamais souillée par sa pitoyable
prestation au Conseil de Sécurité des
Nations Unies lors du débat sur
l’invasion de l’Irak, en 2003, et sa
présentation d’une éprouvette de la
poudre de Perlin pinpin en guise de
matériaux nucléaire irakien. Une
«souillure», confessera-t-il.
Au syndrome Ahmad Chalabi, rejeté par
ses employeurs américains après avoir
servi d’alibi à l’invasion de l‘Irak. A
la démission retentissante d’Abdel
Rahmane Dahmane, en charge des affaires
musulmanes à l’Elysée, en guise de
protestation contre son
instrumentalisation par Nicolas Sarkozy.
A tous ces intermédiaires de Ziad
Takieddine (rétro commissions
sous-marins pakistanais), à Imad Lahoud
(Clearstream), auparavant à Samir
Traboulsi (Pechiney-Can), Ousmane Al
Laidi (Royal Monceau), Alexandre Safa
(otages du Liban) et Robert Bourgi
(mallettes et djembés), sacrifiés sur
l’autel de la survie d’une classe
politique vénale et affairiste.
Comparaison n’est pas raison. Mais
a-t-on jamais vu un binational franco
israélien ameuter la France pour une
action contre Israël? Ou plutôt se
déployer dans le schéma inverse,
s’acharner à faire plier la France aux
fourches caudines israéliennes y compris
dans sa politique la plus hideuse, la
destruction et le blocus de Gaza, la
phagocytose de la Palestine, la
destruction de Beyrouth? Que les
opposants syriens de France prennent
exemple sur Arnold Klarsfeld, réserviste
de l’armée israélienne, et, dans un
registre sensiblement voisin, du
philosophe BHL, leur idole absolue,
plutôt que de se pâmer de son soutien
nullement désintéressé.
Purger le passif colonial sans en
occulter les aspects les plus
nauséabonds dans le respect mutuel et
non dans une flexibilité du naturalisé
conspirant avec son pays d’accueil
contre son pays d’origine pour son
démembrement, comme en a donné l’exemple
dans la bataille de Syrie, le tandem
franco syrien démissionnaire de
l’opposition off-shore, l’universitaire
Bourhane Ghalioune et sa porte-parole
Basma Kodmani.
Sauf à s’exposer au risque d’être
perçu comme un «supplétif», le devoir
d’un opposant syrien ou arabe est de
porter le combat dans son pays contre
ses dirigeants, sans l’hypothéquer par
le soutien des anciennes puissances
coloniales, les Palestiniens du Royaume
uni, promoteur de la déclaration
Balfour, à l’origine de leur plus grand
malheur, les Syriens de la France,
équarisseur de leur pays (Alexandrette),
de même que les Algériens pour Sétif et
son rôle positif dans l’instauration du
code ségrégationniste de l’Indigénat
dans leur pays.
L’exemple du Vietnam est à méditer,
qui a octroyé aux Etats Unis, sans la
moindre concession de sa part, la faveur
de déminer son territoire, en guise de
repentance et sèchement opposé une fin
de non-recevoir à la requête du Général
Jean Marie Bigeard d’être enterré à Dien
Bien Phu, sur le lieu de sa cuisante
défaite.
Rien, ni la morale, ni l’intérêt
supérieur de la nation, encore moins son
bilan post colonial, rien ne justifie
l’état de prosternation permanente des
intellectuels de cour arabes en France
en ce que l’objet de leur idolâtrie se
trouve en perte de vitesse du fait d’une
politique erratique.
En ces
temps-là, le patriotisme se vivait dans
la ferveur
L’honneur le commande, l’intérêt
supérieur de la Nation aussi, d’exiger
des comptes à tous ceux qui ont dévoyé
l’Islam, les wahhabites, bailleurs de
fonds des Taliban destructeurs des
Bouddhas de Bamyan, qui ont aliéné
gratuitement 1,5 milliards d’hindous,
les salafistes atlantistes du Qatar,
parrains des Touaregs destructeurs des
sanctuaires de Tombouctou, qui ont
aliéné de leur côté près d’un milliards
de croyants d’Afrique noire, développant
une incroyable islamophobie à travers le
Monde.
Il fut un temps où Moudjahidines et
Fedayines, sans distinction de race ou
de religion, forgeaient le destin sur le
champ de bataille. Le combat se menait
alors au péril de la vie sur le champ
d’honneur, non en costume cravate, dans
les salons feutrés des chancelleries
occidentales, à grands renforts de
golden cartes de crédit, alimentées par
des dollars pétro monarchiques.
Le général Moustapha Tlass, ministre
syrien de la Défense, et son fils Manaf,
co-pilote de la Syrie et co-prédateur de
son économie pendant un demi- siècle se
laisseront exfiltrés par les services de
renseignements d’un pays artisan du
démembrement du leur, quand Larbi Ben M’Hidi
et Ali La pointe se laissaient exécutés
sur place plutôt que de se livrer à
leurs ennemis, mus par le sens de
l‘honneur et du devoir, et non propulsés
par l’appât de pubères syriennes
sinistrées par la monstruosité
libidineuse de dignitaires en mal de
rapine.
En ces temps-là, le patriotisme se
vivait dans la ferveur comme une ardente
obligation.
Pour le lecteur arabophone: De centaines
de dignitaires religieux arabes
divorcent pour épouser de mineures
syriennes:
http://www.elaph.com/Web/NewsPapers/2012/9/760241.html?entry=editorchoice
Parure de
diamants versus peanuts
Entre Shirine Ebadi, Prix Nobel de la
Paix, militante des Droits de l’Homme en
Iran même, sur le territoire de son
propre pays, et la triplette mondaine de
l’opposition cathodique syrienne Basma
Kodmani-Darina Al Joundi-Lama Al Atassi,
«y ‘ a pas photo». C’est parure de
diamants contre peanuts.
Pas photo, non plus, entre Georges
Ibrahim Abdallah, Doyen des prisonniers
politiques à travers le Monde, Samir
Kantar, ancien Doyen des prisonniers
politiques arabes en Israël et la
version moderne de l’opposition arabe,
désormais invariablement off-shore,
invariablement dans les rets de l’ancien
pouvoir colonial.
La génération politique de la «gauche
mutante», inconcevable à l’époque des
guerres d’indépendance, devient ainsi la
voie naturelle vers la consécration
médiatique, phénomène marquant de
l‘époque contemporaine, le plus
important vivier de transfuges du
militantisme révolutionnaire vers le
conservatisme contemporain le plus
rigide. Ce phénomène frappe aussi bien
le Monde arabe que le Monde occidental
et s’accompagne de la permanence de la
stigmatisation de la figure du
croquemitaine dans la construction de
l’imaginaire occidental.
Tragique retournement des choses.
Dramatique inversement des valeurs.
Funeste conséquence pour le relèvement
du Monde arabe et musulman.
Pour la constitution d’un front
démocratique à l’échelle du Monde arabe
Au seuil d’une année cruciale marquée
par une possible guerre Iran-Israël, des
élections législatives en Israël et au
Liban, le lancement du procès Hariri, en
mars 2013, à trois mois des élections
législatives libanaises, sans doute
l’effet d’un pur hasard, ne nous
laissons pas détourner de nos objectifs,
ni gagner par le découragement par la
déferlante «Néo-Jahilyah», l’ère
antéislamique de la mentalité
prélogique.
Saluons, dans cet esprit, le sursaut
salutaire représenté par la constitution
d’un front progressiste en Egypte, sous
la houlette d’Abdel Hakim Gamal Abdel
Nasser, en souhaitant que l’exemple soit
suivi en Tunisie et en Syrie, en Irak et
en Libye, au Bahreïn et en Jordanie,
prélude à la constitution d’un large
front démocratique pan arabe.
Prolongeons cette initiative par
l’aménagement d‘une plateforme d’un
«Front de la gauche démocratique arabe
en Europe» afin d’y mener, en synergie,
un même combat pour former une
génération de citoyens et de citoyennes,
patriotes et compétents à l’effet
d’assurer la relève du combat la
restauration de la dignité du monde
arabe et la sécurisation de son espace
national.
De Gamal Abdel Nasser (Égypte) à
Mohammad Mossadegh, à l’Ayatollah
Ruoholahti Khomeiny et Mahmoud
Ahmadinijad (Iran) en passant par Yasser
Arafat et Cheikh Ahmad Yassine
(Palestine), à Moqtada Sadr (Irak) et
Hassan Nasrallah (Liban), tous ont eu
l’honneur d’assumer la fonction de
croquemitaine sans que jamais personne
n’ait songé à établir un lien entre
l’arrogance occidentale et la
radicalisation des contestataires de sa
suprématie.
En un demi-siècle, la carte
géostratégique du monde a connu une
modification radicale, mais le lexique
diplomatique international demeure
inchangé sur un seul fait «l’Arabe
israélien», une expression forgée pour
désigner un Palestinien porteur de la
nationalité israélienne, mais
l’occultation du fait national
palestinien, fait majeur de la
diplomatie internationale de la seconde
moitié du XX me siècle, a conduit les
stratèges de la communication à forger
cet être hybride par excellence, comme
si l’Arabe israélien n’était pas un
Palestinien, comme si le Palestinien et
la Palestine ne se situaient pas au cœur
du Monde arabe et au cœur des conflits
du XX me siècle et du XXI me siècle.
Relevons la tête, retroussons les
manches, concilions foi et citoyenneté,
religion et esprit critique. Combattons
sans répit les forces obscurantistes de
la répression et de la régression pour
qu’un soleil arabe succède enfin à la
glaciation salafiste et que la Palestine
ne demeure la grande oubliée de la cause
nationale arabe.
Engageons-nous vaillamment dans la
bataille pour la liberté d’opinion et de
conscience dans le monde arabe, gage de
vitalité et de créativité, prélude à
l’avènement d’une société démocratique.
Redonnons au combat politique ses
lettres de noblesse…. Sans jamais
courber l’échine, sans jamais perdre de
vue les faussaires et les
falsificateurs, leurs protecteurs et
leurs complices, notre point de mire
permanent, dans une détermination soit
sans faille: «We Shall Never Surrender».
Avec tous nos vœux pour 2013.
Tous droits réservés
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