Opinion
BHL, L'homme des
Ides de Mars
René
Naba
René Naba
Mardi 5 mars
2012
Ce papier est
co-publié dans le N°2 de la revue
trimestrielle «Les Zindignés», la revue
des résistances et des alternatives
dirigée par le philosophe Paul Ariès.
Bernard Henry
Lévy a emporté haut la main la palme de
«l’Homme des Ides de Mars» pour sa
participation active à la promotion de
la charia en Libye, avec l’aide de
l’Otan, une distinction qui lui est
décernée à l’occasion du premier
anniversaire de l’invasion occidentale
de la Libye. Ci-joint l’état de service
du récipiendaire.
Bernard Henri
Lévy : Homme de son temps ou Homme de
l’Otan?
«Il y a un précédent d’un écrivain
français déclenchant une guerre, c’est
celui de Chateaubriand. Chateaubriand ou
Malraux». Bernard Henry Lévy, in «La
guerre sans l’aimer», Edition Grasset-
Novembre 2011, récit de l’exposition
médiatique du philosophe au printemps
2011 en Libye.
André Malraux côtoyait De Gaulle et
murmurait à l’oreille du cheval. Il
tonnait le verbe, commandait l’action,
catapultait l’enthousiasme. Bernard
Henry Lévy, son De Gaulle à lui,…. C’est
Moustapha Abdel Jalil, le ministre
tortionnaire de la Justice de Kadhafi,
l’ordonnateur des exécutions des
activistes libyens et de l’incarcération
des infirmières libyennes. Il tutoie
Nicolas Sarkozy, se contorsionne sur les
plateaux de télévisons et verrouille de
son promontoire éditorial le réseau de
ses laudateurs.
Chacun son style. Chacun conforme à
sa dimension, conforme l’auditoire à ses
ambitions.
Entre l’homme d’action et le rhéteur
mondain, il existe une différence
d’échelle, celle qui distingue un homme
de légende d’un successeur présomptueux,
celle qui démarque un personnage
historique, d’un nouveau philosophe en
quête septuagénaire d’une gloire
narcissique (1).
Commandant de l’escadrille España en
1936-1937, commandant de la brigade
Alsace-Lorraine en 1944-1945, engagé
volontaire au sein des brigades
internationales, Malraux, légendaire
colonel Berger, vivra au quotidien sa
«condition humaine». Avec panache, face
aux Spitfire allemands dans le ciel de
la guerre d’Espagne, pour la défense de
la République face au fascisme, pour la
mémoire du philosophe Miguel De Unamuno,
Recteur de l’université de Salamanque
assassiné par les franquistes (2). Pour
«l’Espoir» (3). Dans les Vosges, en
Alsace en soutien à la première armée
française pour la prise de Dannemarie,
de Strasbourg et de Colmar. Dans les
rangs des partisans, sur le plateau des
Glières face à l’une des premières
divisions cuirassées de l’empire
hitlérien, la division Das Reich.
Sa règle de vie, le philosophe du
botulisme l’a officialisée dans son
œuvre majeure, «La Règle du Je».
Egotique et prémonitoire règle -«du jeu»
?- qui déploie mensuellement la fatuité
vaniteuse du plus en vue des
chroniqueurs plagiaires germanopratins
(4).
I- La Libye,
point d’évacuation du contentieux para
matrimonial entre Nicolas Sarkozy et
Bernard Henri Lévy
La Libye, sa 4eme tentative pour
forcer les portes du Panthéon
médiatique, aura été la bonne. En
Afghanistan, sa rencontre imaginaire
avec le Commandant Massoud Shah l’avait
couvert de ridicule. En Bosnie, son
œuvre cinématographique a sombré dans la
platitude. En Géorgie, sa couverture des
hostilités, loin du champ de bataille,
débusqué aux arrières des lignes,
achèvera de le discréditer en même temps
que ses papiers d’un genre nouveau sur
le plan journalistique, le tourisme de
guerre.
La Libye fut sa bouée de sauvetage,
sa planche de salut. 42 ans d’un règne
calamiteux et abusif, un soulèvement
populaire arabe prenant de revers
l’ensemble de la doxa officielle
occidentale, la volonté de revanche d’un
orgueil bafoué par les plus récents
hôtes obséquieux d’un dictateur
erratique, le rêve de grandeur d’un
président calamiteux à la recherche d’un
trophée compensatoire à la brillante
prestation diplomatique onusienne lors
de la guerre d’Irak de son preux
contestataire qu’il promettait de pendre
aux «crocs d’un boucher», les appétits
aiguisés par l’or noir d’Européens en
période de crise endémique de
l’endettement occidental…. La cause
était entendue, la proie facile.
La Libye fut son Austerlitz, sans son
soleil. Sous le regard amusé des
téléspectateurs de la planète, L’homme
sera publiquement écarté à deux reprises
de la tribune d’honneur célébrant les
festivités de la victoire, lors de la
visite à Benghazi, du tandem franco
anglais David Cameron-Nicolas Sarkozy.
La Libye sera aussi L’Austerlitz de
son interlocuteur: Nicolas Sarkozy. La
Libye sera, de fait, le point
d’évacuation du contentieux para
matrimonial entre Nicolas Sarkozy et
Bernard Henri Lévy, entre l’époux de la
«chipeuse» et le père de la victime (5).
Sur les malheurs du peuple libyen,
Nicolas Sarkozy a en effet scellé sa
réconciliation avec le théoricien de la
guerre humanitaire, purgeant un
contentieux souterrain para matrimonial,
à la faveur d’un indécent ballet
diplomatique, couvrant de ridicule la
France, en contournant le nouveau
ministre des Affaires étrangères, le
gaulliste Alain Juppé, supposé restaurer
le prestige terni de la diplomatique
française.
«Juppé… On se souvient de la façon
dont il s’est conduit au moment de la
Bosnie, puis du Rwanda, il sera
forcément contre cette histoire
libyenne. Il ne serait pas Juppé s’il
n’était pas contre. Si je peux me
permettre un conseil: tout faire depuis
ici, à travers la cellule diplomatique,
et ne rien dire à personne -garder le
secret, même pour Juppé», chuchotera
l’intrigant à l’oreille présidentielle
complaisante, ravie de jouer un mauvais
tour au «meilleur des compagnons
chiraquiens».
Instrumentalisant l’opposition
libyenne sur fond de gesticulation
médiatique, au risque de la délégitimer,
au risque de replacer le peuple libyen
sous la tutelle de pays occidentaux qui
se sont forts peu préoccupés de sa
liberté sous la mandature Kadhafi, le
tandem Sarkozy BHL a fait du théâtre
libyen une kermesse, distribuant des
satisfactions d’amour propre aux
principautés pétrolières en compensation
de gracieusetés dont elle a bénéficié de
sa part.
L’implication d’un des chefs de file
majeur de la stratégie médiatique
israélo-américaine sur le théâtre
européen dans le changement démocratique
en Libye a bridé l’adhésion populaire
arabe à l’opposition anti Kadhafi et
quelque peu obéré sa crédibilité.
Sautant d’avion en avion du Caire à
Benghazi, monopolisant les plateaux de
télévision pour glaner les lauriers de
sa diplomatie volante, usant pour ce
faire d’audaces verbales, Bernard Henry
Lévy, échevelé, livide au milieu des
tempêtes, se démasquera sur le point
focal de sa pensée médiatique: le
problème palestinien.
La réconciliation inter
palestinienne, sous l’égide de l’Egypte
post Moubarak, fera l’effet d’une
catharsis sur le personnage, le
plongeant dans une rage folle en ce
qu’elle constituait une menace pour
Israël. Une charge véhémente de haine
recuite, laissant s’échapper, sous des
dehors policé, sa grossièreté
légendaire: «Ah ! Les cons» (sur un
Munich palestinien) Mais comment peut-on
être aussi «con»?, s’exclamera-t-il dans
les colonnes de sa revue «La Règle du
jeu», dont l’écho dupliqué sera repris
par l’hebdomadaire «Le Point».
Quant à son nouveau compère
présidentiel, il usera de l’esbroufe
pour récupérer, à tout le moins
médiatiquement, les révolutions arabes
dans une honteuse tentative de son
entourage visant à accréditer l’idée
d’une France en symbiose avec les
meneurs de la révolution arabe, alors
qu’elle révélera la confusion mentale
des dirigeants français.
Détail piquant, l’opération a été
menée par Valérie Hoffenberg, proche
collaboratrice du chef de l’état
français et dirigeant de l’«American
Jewish Committee», en somme la personne
la moins indiquée pour une telle
tentative en ce qu’elle symbolisait
mieux que tout la connivence de Nicolas
Sarkozy avec le lobby pro-israélien.
Dans une démarche d’une prétentieux
invraisemblable, la responsable tentera
d’inviter les jeunes meneurs de la
révolution égyptienne pour une session
de formation aux rouages de la
démocratie française, se faisant
vertement rabrouer, comme auparavant
avant elle Hilary Clinton, en personne,
la secrétaire d’état américain.
Le récit de cette pitoyable aventure
a été publié dans la revue «Inrokuptibles»
vendredi 13 Mai 2011, sous le titre
«Comment les héros de la révolution
égyptienne ont jeté l’UMP».
Le projet de «former les Egyptiens à
la démocratie», alors que les Egyptiens
venaient de mener l’une des premières
révolutions pacifiques du XXI me siècle,
par des moyens les plus démocratiques,
révèle à tout le moins la désinvolture
française, sinon la morgue de ses
dirigeants, si préjudiciable au bon
renom de la France, qui explique une
part de son collapsus.
II- Le
Darfour, un contre feu médiatique à
Gaza-Palestine
La souffrance, pour cet ancien
conseiller de la candidate socialiste
aux élections présidentielles
françaises, Ségolène Royal, relève d’une
construction intellectuelle et constitue
la marque d’un tropisme sélectif
occidental à l’égard de l’Islam, la
tendance dominante de l’intelligentsia
parisienne.
Un tropisme qui conduira en France
chaque notabilité intellectuelle à
disposer de sa minorité protégée, comme
la marque de la bonne conscience
chronique de la mauvaise conscience,
comme une sorte de compensation à son
trop grand désintérêt pour les
Palestiniens, compensant son hostilité
aux revendications du noyau central de
l’Islam, la Palestine et le Monde arabe,
par un soutien à l’Islam périphérique.
Il en est ainsi du philosophe André
Glucksmann pour les Tchétchènes, quand
bien même son nouvel ami le président
Nicolas Sarkozy, est devenu le meilleur
ami occidental du président russe
Vladimir Poutine. Ill en est aussi de
Bernard Kouchner, pour les Kurdes, ces
supplétifs des Américains dans
l’invasion de l’Irak, pour le Darfour,
le Biafra et la Birmanie.
Au point qu’un journaliste anglais
Christopher Caldwell en déduira dans la
prestigieuse revue London Review of
Books que cette prédilection pour les
zones pétrolifères stratégiques de
«l’humanitarisme transfrontière asservit
les intérêts de la politique étrangère
française à ceux des Etats-Unis et que
l’humanitarisme militarisé du transfuge
néo sarkozyste n’est qu’une forme de néo
conservatisme larvé».
Il en est enfin de même de Bernard Henry
Lévy, pour le Darfour, quand bien même
son entreprise familiale est mentionnée
dans la déforestation de la forêt
africaine. Le fait de privilégier le
Darfour et non l’enclave palestinienne
de Gaza, -un cas de figure en tout point
transposable à la province
sécessionniste du sud Soudan-,
trouverait sa justification médiatique
et non morale par le fait que le Darfour
a fait office de contre feu médiatique
au prurit belligène d’Israël contre le
Liban et la Palestine.
Nullement le fait du hasard le fait
qu’une conférence sur le Darfour ait été
convoquée en toute hâte, en juillet
20O6, à Paris, par Bernard Henry Lévy et
Jacky Mamou, ancien dirigeant de
«Médecins sans frontières», trois jours
après le déclenchement de la guerre de
destruction israélienne contre le Liban
dans une tentative de détournement de
l’opinion publique européenne sur les
agissements israéliens à Beyrouth.
Contrairement à Gaza, sous blocus
israélien depuis cinq ans, le Darfour a
bénéficié d’une sur médiatisation sans
rapport avec la réalité du drame humain
qui s’y joue en raison vraisemblablement
de sa conformité avec la stratégie de
balkanisation de l’Afrique et du Moyen
Orient et des liens de proximité entre
Israël et M. Abdel Wahed Nur, chef de la
Sudan Liberation Army (SLA), un proche
de Bernard Kouchner.
Parangon du droit d’ingérence
humanitaire, le tandem Kouchner Lévy a
toujours prôné les interventions au
Kurdistan, en Tchétchénie au Darfour,
mais jamais en Palestine,
particulièrement à Gaza où aucune aide
gouvernementale française, humanitaire,
médicale voire même alimentaire, n’y a
été dépêchée après sa destruction par
Israël, en janvier 2009, illustration
caricaturale de l’instrumentalisation du
Droit et de la Justice au service des
visées hégémoniques du camp
israélo-occidental.
Au-delà de la Palestine, le Darfour sous
tend la lutte d’influence que se livrent
Chinois et Occidentaux pour la maitrise
des sources d’énergie. S’éclairent dans
cette optique les engagements successifs
de BHL tant au Soudan qu’en Libye ou
ailleurs (6).
III- Un
atlantisme au service de son engament
sioniste
L’homme qui menaçait de ses foudres
le général Omar Al Bachir du Soudan, en
mars 2007, promettant la victoire aux
Darfouris, aura été mutique à un moment
charnière de l’ingérence humanitaire,
l’assaut naval israélien contre une
flottille de pacifistes européens, en
pleine zone maritime internationale, le
31 mai 2010, illustration symptomatique
de ses dérives et de sa démagogie. En un
mot de sa mystification.
Que n’a-t-il exigé, en ce moment-là,
la levée du Blocus de Gaza comme celui
du Darfour? Exigé le percement d’un
corridor reliant l’enclave soudanaise à
l’enclave palestinienne? Réclamé la
comparution en justice des criminels
israéliens avec la même vigueur qu’il
réclamait celle des criminels soudanais?
Sceller, en somme, dans l’ordre
symbolique, et la communauté de destin
des suppliciés de l’humanité, et la
cohérence de son combat. Imprecator tout
au long de sa carrière, l’homme s’est
dévoilé Matamore en fin de carrière.
Mutique en Palestine comme auparavant
à propos des pétromonarchies arabes du
Golfe, actif néanmoins contre l’Iran et
la Syrie, signant par la même et son
alignement atlantiste et son engagement
sioniste.
Sur les sentiers de la liberté
Malraux a atteint les chemins de la
gloire. Revendiquant une postérité
historique, BHL, sur les traces d’Alexis
de Tocqueville, déroulera, en guise de
récit, un diaporama de clichés éculés.
«En plus de 300 pages, BHL écrit comme
un étudiant qui fait du remplissage,
avec une tendance à l’abus de questions
rhétoriques (..), symbole des écrivains
français, généralement «courts sur les
faits et longs sur les conclusions»,
l’exécutera sans ménagement le New York
Times (7).
La Libye, son Austerlitz, sera aussi
son Waterloo, au vu des piètres
résultats de son exposition médiatique
du printemps. Ah le résultat calamiteux:
Mobiliser l’OTAN, le Charles de Gaulle,
les Rafales, pour instaurer la Chariah.
Démembrer le Soudan et mettre la main
sur la Libye afin de couper le
ravitaillement énergétique de la Chine
pour finir par mendier à cette même
Chine cinquante milliards de dollars
pour renflouer l’Euro….Point n’était
besoin de faire normal sup pour
déboucher sur de tels piètres résultats.
De plein fouet l’effet boomerang aura
atteint ce stratège en chambre.
«Islam des lumières versus Islam des
ténèbres» dans ses diverses variantes
est sa ritournelle favorite pour masquer
son engagement impérialiste. «La culture
de la vie versus la culture de la mort»,
«l’axe de la modération contre l’axe de
l’intolérance», dans la même veine, se
révéleront, en fin de compte, comme
autant de déclinaisons d’une même face,
celle qui exalte la logique de la
vassalité à l’ordre israélo américain,
face à la contestation de la logique de
la soumission. Un enfumage conceptuel.
Un bobard. Un truc de roman-enquêteur en
somme.
«Seigneur et maître des faussaires»,
dont le «moralisme se mue en
Maccarthysme», redoutable dans l’art
d’exercer le «terrorisme intellectuel»,
alors même que ses fiascos retentissants
disqualifieraient sur-le-champ bien
moins omnipotent que lui» (8), BHL est
fort de la faiblesse de ses partenaires.
Son gigantisme est le fruit du nanisme
de ses compagnons de route et de leur
indigence mentale, pitoyables arabes
afghans de Bosnie et d’Afghanistan,
déplorables arabes de Libye, oublieux de
la sentence du révolutionnaire Mirabeau,
à savoir qu’«Il existe quelqu’un de pire
qu’un bourreau son valet (9).
Inoubliable, Malraux, en contrepoint,
s’inclinant devant la mémoire de Jean
Moulin, «chef d’un peuple de la nuit»,
que nulle contorsion médiatique, nulle
enflure langagière ou nulle boursouflure
phraséologique ne sauraient égaler, ni
occulter de la mémoire des hommes, des
mots à jamais graver dans la mémoire des
peuples résistants: «Comme Leclerc entra
aux Invalides, avec son cortège
d’exaltation dans le soleil d’Afrique,
entre ici, Jean Moulin, avec ton
terrible cortège. Entre avec le peuple
né de l’ombre et disparu avec elle, nos
frères dans l’ordre de la nuit» (10).
Malraux, en défenseur des faibles, était
un homme de son temps. BHL, dans le camp
des puissants, un homme de l’Otan. En
Afghanistan, en Bosnie, en Libye. En
Israël avec les colons contre les
Palestiniens spoliés.
Immarcescible ministre de la Culture
du général de Gaulle, Malraux c’était le
verbe et l’action, un verbe magnifié par
l’action, l’action sublimée par le
verbe. BHL, le verbiage, la posture et
l’imposture.
Malraux, un homme de guerre et de
Paix. BHL… un guère épais.
Références
1- Dans «La guerre sans l’aimer»
(Grasset), BHL narre ainsi le récit de
son exposition du printemps 2011: «Il y
a un précédent d’un écrivain français
déclenchant une guerre, c’est celui de
Chateaubriand. Chateaubriand ou
Malraux….BHL évince Juppé pour se donner
le beau rôle: «On se souvient de la
façon dont il s’est conduit au moment de
la Bosnie, puis du Rwanda, il sera
forcément contre cette histoire
libyenne. Il ne serait pas Juppé s’il
n’était pas contre. Si je peux me
permettre un conseil: tout faire depuis
ici, à travers la cellule diplomatique,
et ne rien dire à personne -garder le
secret, même pour Juppé». Et voilà le
ministre des Affaires étrangères sorti
du jeu à la demande de BHL. Il apprendra
par la presse la reconnaissance du CNT
par la France. Ce qui occasionnera une
menace de démission.
2– Dans un discours passé à la
postérité, prononcé à l’université de
Salamanque le 12 octobre 1936, en
présence de l’épouse du Caudillo, le
général Franco, entourée de généraux et
de ministres, l’auteur du «Sentiment
tragique de la vie» était sommé en sa
qualité de Recteur de l’Université de
Salamanque de prendre la parole à la
cérémonie en l’honneur de la Vierge du
Pilar. Au général Milay Astray, le
commandant de la légion, qui venait de
vociférer un discours haineux ponctué
par des cris «Viva la muerte» , « Mueran
los intelectuales (Vive la mort. A mort
les intellectuels), Unamuno répondit en
ces termes: «Vive la mort….Je viens
d’entendre un cri morbide … Cette
université est le temple de
l’intelligence. Et je suis son grand
prêtre. C’est vous qui profanez son
enceinte sacrée. Vous vaincrez parce que
vous disposez de la force brutale; vous
ne convaincrez pas car il vous manque la
raison. Je considère comme inutile de
vous exhorter à penser à l’Espagne. J’ai
terminé ». Et il quitta l’estrade dans
un silence de mort avant d’être
prestement évacué sous les insultes des
phalangistes. Assigné à résidence,
Miguel de Unamuno mourut peu après de
dégoût.
3 «La condition humaine » et
«l’Espoir» sont deux titres d’ouvrage
d’André Malraux.
4- Plagiat et Bidonnage: Thierry
Ardisson, Eric Zemmour, Calixte Belaya,
Alain Minc… Tous ont défrayé la
chronique pour des soupçons de plagiat.
Certains d’entre eux ont même été
condamnés.
Selon Hélène Maurel-Indart, auteur de «
Plagiats, les coulisses de l’écriture »,
le cas de la biographie est
particulièrement délicat, «un genre
sensible, une cible privilégiée pour les
candidats aux plagiats et les écrivains
pressés ». Les rares auteurs condamnés
pour des faits de contrefaçon partielle
sont pour beaucoup des auteurs de
biographies. Henri Troyat, Alain Minc et
PPDA. Autre constat: les écrivains
connus, notamment dans d’autres sphères
que la littérature, sont très appréciés
par les maisons d’éditions. Mais, faute
de temps, ces mêmes auteurs ont souvent
recours à des collaborateurs, autrement
dit, « des nègres ». « Pour des raisons
commerciales, les maisons d’édition ont
besoin que leurs auteurs vendeurs
produisent régulièrement des best
sellers. Or les auteurs concernés, pour
certains d’entre eux, n’ont pas le temps
ou l’inspiration. Certaines maisons
proposent donc des ‘collaborateurs’. Ce
système existe et entraîne des dérapages
quand le signataire n’est plus l’auteur
à part entière de son ouvrage ; et qu’il
ne fait que relire et retoucher. Donc,
la notion d’auteur est diluée », analyse
Hélène Maurel-Indart.
Voici quelques exemples de
personnalités soupçonnées de plagiat.
Alain Minc, « Spinoza, un roman juif
»: Le conseiller politique de Nicolas
Sarkozy et ancien Président du Comité de
surveillance du journal Le Monde, a été
condamné en 2001 à verser 15.250 euros
de dommages et intérêts à Patrick Rödel,
l’auteur de « Spinoza, le masque de la
sagesse ».
Jacques Attali: plagier un livre qui
n’est pas sorti ! Coup de maître. Dans
les années 1990, Jacques Attali a pompé
des entretiens de François Mitterrand
réalisés par le prix Nobel de la Paix,
Elie Wiesel. L’économiste assistait aux
entrevues. Jacques Attali a inséré 43
extraits de ces audiences dans son
ouvrage Verbatim, en modifiant les dates
et les lieux. Les éditions Odile Jacob
ont assigné Attali devant les tribunaux
pour concurrence déloyale, elles ont été
déboutées de leur demande.
Eric Zemmour, « Le premier sexe »,
est soupçonné d’avoir plagié Alain Soral
dans son essai sur la féminisation de la
société, paru en 2006. En effet, sept
ans avant, Alain Soral avait écrit «
Vers la féminisation ». Le journaliste
Eric Zemmour a toujours nié ces
accusations et assure : « Je ne l’avais
pas lu son livre ».
Thierry Ardisson, « Pondichéry », a
reconnu avoir fait du plagiat dans son
ouvrage paru en 1994. « C’est une
connerie, c’est vrai. J’ai piqué 70
lignes sur un bouquin de 300 pages ».
Mais en 2005, une enquête de Jean Robin,
révèle que l’animateur aurait plagié
plusieurs ouvrages, soit au total près
de 60 pages. Son ouvrage a été retiré de
la vente par Albin Michel.
Calixte Beal, multirécidiviste, s’est
fait épingler à plusieurs reprises pour
des affaires de plagiat. Dans son
ouvrage « Le petit prince de Belleville
», publié en 1992 par Albin Michel, elle
reprend une quarantaine de passages du
livre d’Howard Butent, « Quand j’avais
cinq ans, je m’ai tué » (Seuil, en
1981). En mai 1996, le tribunal de
grande instance de Paris la condamne
pour « contrefaçon partielle ».
Après l’affaire de plagiat qui a
ébranlé Patrick Poivre d’Arvor, c’est au
tour de Michel Drucker d’être pris dans
la tourmente d’une affaire similaire.
Les faits remontent à 2005. L’animateur
télé demande à son ex-compagne,
l’écrivaine Calixte Beyala, d’écrire un
livre à sa place. Un livre d’entretien
où Michel Drucker devait répondre aux
questions de Régis Debray. Finalement,
c’est Calixte Beal qui aurait rédigé les
12 réponses, mais sans n’avoir jamais
reçu les 200.000 euros qui lui avaient
été promis. En cause ? L’ouvrage
commandé par les éditions Albin Michel à
Michel Drucker n’a jamais été publié.
L’animateur de télévision a été condamné
par la cour d’appel de Paris à verser
40.000 euros à son ex-compagne. Michel
Houellebecq: « La Carte et le territoire
»Plusieurs passages du dernier
Houellebecq sont empruntés à
l’encyclopédie en ligne Wikipédia, comme
le révèle Slate.fr. Interrogé par
BibliObs.com, l’écrivain s’était défendu
de tout copiés-collés préférant parler
d’un « genre de patchwork ».
Bidonnage à TF1 : non, ce n’est pas
la première fois !Chacun sait désormais
que le reportage diffusé pendant le
journal télévisé (JT) de 13 heures de
TF1, le 23 juin, au sujet du Contrat de
responsabilité parentale mis en place
par le Conseil général de Nice, était un
bidonnage. En y revenant de nouveau
aujourd’hui, on ne voudrait pas donner
l’impression de s’acharner sur qui que
ce soit. Telle n’est pas l’intention et
nous avons mieux à faire. Seulement
voilà : dans son édition du 27 juin, le
présentateur-vedette du JT de 13 heures
– Jean-Pierre Pernaut – est revenu que
cette affaire. Présentant les excuses de
la chaîne de télévision, il a dit ceci:
«Nous sommes sincèrement désolés de ce
manquement inadmissible au sérieux, à
l’éthique et à la déontologie de
l’information. C’est la première fois
dans l’histoire de nos journaux». Tous
les mensonges ont beau être
insupportables, ils ne méritent pas tous
d’être relevés. Mais le poids de la
télévision est tel dans la société
française contemporaine (le JT de 13
heures de TF1 serait regardé par 7
millions de téléspectateurs dans ses
meilleurs jours), qu’on ne saurait
laisser passer celui-là sans réagir. De
fait, ce n’est absolument pas la
première fois que TF1 diffuse des
reportages bidonnés. Au contraire, la
liste est longue. C’est ce que rappelle
avec humour le «décrypteur d’images
télé» Christophe Del Debbio.
De la fausse interview de Fidel
Castro par Patrick Poivre D’Arvor en
décembre 1991 au pseudo «reportage
exclusif» sur le Pape présenté par
Laurence Ferrari en avril 2011, en
passant notamment par les multiples
séquences où l’on a fait jouer le film
de leurs propres exploits à des
policiers ou des gendarmes, la liste est
vraiment longue et elle vaut le détour.
Non pas pour dénigrer une chaîne de
télévision en particulier (TF1 n’a pas
le monopole du bidonnage), mais par
simple goût de la vérité.
http://insecurite.blog.lemonde.fr/2011/06/30/bidonnage-a-tf1-non-ce-nest-pas-la-premiere-fois/
5- Carla Bruni, épouse du président
Nicolas Sarkozy, avait été auparavant,
la compagne du philosophe Jean Paul
Enthoven, ami de BHL. Lors d’un séjour
de vacances à Marrakech, dans la
propriété de BHL, Carla est tombée
amoureuse du propre fils de son
compagnon, Raphaël Enthoven, à l’époque
marié avec la propre fille de Bernard
Henry Lévy, Justine Lévy, qui narrera
ses déboires conjugaux dans un ouvrage
intitulé «Rien de grave». (Editions
Stock 2004). Carla Bruni et Raphael
Enthoven ont eu un enfant, Aurélien,
Bernard Henry Lévy, quant à lui, avait
soutenu Ségolène Royal, la rivale
socialiste de Nicolas Sarkozy, lors des
dernières élections présidentielles
françaises, en 2007.
6 – Via l’Iran, le Soudan et l’Arabie
saoudite, la Chine vise à sécuriser son
ravitaillement énergétique de l’ordre de
dix millions de barils/jour en 2010, en
vue de soutenir sa croissance et de
réussir l’enjeu majeur de sa diplomatie
attractive, le développement sud-sud. La
croissance exponentielle des besoins de
la Chine pourrait exacerber la tension
sur les cours du brut et les marchés
pétroliers fragilisant davantage les
économies occidentales déjà
déstabilisées par l’effondrement du
système bancaire et la crise de
l’endettement européen.
Le commerce bilatéral Chine Afrique a
été multiplié par 50 entre 1980 et 2005,
quintuplant entre 2000 et 2006. Avec
1.995 milliards de dollars de réserve de
change, une main d’œuvre bon marché
exportable, une absence de passif
colonial, la Chine, qui a déjà supplanté
la France en Afrique, se pose en
puissance mondiale. Premier détenteur de
bons de trésor américain, de l’ordre de
727 milliards de dollars, devant le
Japon (626 milliards de dollars), la
Chine y a déjà adopté le ton, invitant,
le 13 mars, les Etats-Unis à «honorer
ses engagements, à se comporter en une
nation en qui on peut avoir confiance et
à garantir la sécurité des liquidités
chinoises », dans une admonestation
jamais subie par la puissance américaine
(7). Dans cette perspective, des
stratèges occidentaux n’hésitent pas à
prédire un affrontement majeur entre la
Chine et les Etats-Unis pour le
leadership mondial, à l’horizon de l’an
2030.
7 – « American vertigo»Quand la
presse américaine croise le fer avec
Bernard-Henri Lévy Article paru dans
l’édition du 10.02.06 «American
Vertigo», récit du séjour de l’écrivain
sur les traces de Tocqueville, cible de
nombreux chroniqueurs américains. Le New
York Times s’y est pris à deux fois pour
exécuter Bernard-Henri Lévy et son
vertige américain. La première salve a
été tirée avec verve et cruauté, en
«une» de son supplément littéraire, le
29 janvier 2006, par une figure très
populaire aux Etats-Unis, Garrison
Keillor, un romancier, humoriste et
animateur de «Home Prairie Companion»
sur la radio publique.
Pour lui, American Vertigo (Grasset
éd.), le récit du voyage de BHL sur les
traces de Tocqueville, publié en langue
anglaise avant de l’être en français,
est une succession de lieux communs, qui
«n’a aucune raison d’exister en
anglais». Il enfonce le clou: «En plus
de 300 pages, personne ne raconte une
blague. Personne ne travaille vraiment.
Personne ne s’assoit pour manger et
apprécier sa nourriture? Vous avez vécu
toute votre vie en Amérique, sans jamais
aller dans une méga Church ou un bordel,
vous n’avez pas d’armes, n’êtes pas
amish, et il vous apparaît qu’en fait ce
livre est au sujet des Français».
Bernard-Henri Lévy «écrit comme un
étudiant qui fait du remplissage», avec
une tendance à l’abus de questions
rhétoriques: «Est-ce comme ça que les
Français parlent, ou réservent-ils ça
aux livres sur l’Amérique?» En tant que
symbole des écrivains français qui «sont
courts sur les faits et longs sur les
conclusions», BHL est habillé pour
l’hiver. Mais le costard est taillé à la
«une» du supplément, très rarement
réservée à un intellectuel français. Une
semaine plus tard, le quotidien a remis
le couvert dans le cahier Arts, sous la
plume de William Grimes, ancien
chroniqueur culinaire du quotidien. Le
critique reconnaît que Bernard-Henri
Lévy a du cran, et «de temps en temps»
une pensée éclairante et un regard
acéré. Mais «il y a de nombreux moments,
voyageant en voiture avec lui, où vous
avez envie de lui dire de la fermer cinq
minutes et de mieux regarder le
paysage». Au final, il juge l’auteur «
paresseux » et les chaussures de
Tocqueville trop grandes pour BHL. Le
Los Angeles Times, USA Today ou le
Seattle Times sont également très
réservés.
Pour aller plus loin, Cf.
http://www.monde-diplomatique.fr/2006/03/MORGAN/13270
8- Pascal Boniface in «Les
Intellectuels faussaires» de Pascal
Boniface. Editions JC Gausewitch, Mai
2011, page 247. Le manuscrit a été
refusé par 14 éditeurs.
9 – Honoré Gabriel Riquetti, comte de
Mirabeau, a été un révolutionnaire
français. Surnommé l’Orateur du peuple,
il reste le premier symbole de
l’éloquence. Auteur, en 1776, d’un «
Essai sur le despotisme », il y dénonce
l’arbitraire du pouvoir royal: «le
despotisme n’est pas une forme de
gouvernement, s’il en était ainsi, ce
serait un brigandage criminel et contre
lequel tous les hommes doivent se
liguer». Condamné à mort par contumace,
puis extradé et emprisonné au château de
Vincennes de 1777 à 1780, Il y écrivit
des lettres, publiées après sa mort sous
le titre de Lettres à Sophie, chef
d’œuvre de la littérature passionnée
ainsi qu’un virulent libelle contre
l’arbitraire de la justice de son temps,
« Des Lettres de cachet et des prisons
d’État.
10 – Discours d’André Malraux lors du
transfert des cendres de Jean Moulin au
Panthéon le 19 décembre 1964
http://www.culture.gouv.fr/culture/actualites/dossiers/malraux2006/discours/a.m-moulin.htm
© René Naba
Reçu de René Naba pour publication
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