Iran
Nucléaire iranien:
de l'intransigeance à l'accord,
la drôle d'attitude française
Pierre Barbancey
Le
ministre des Affaires étrangères iranien
jubile.
Son homologue français Laurent Fabius
donne le change.
Lundi 25 novembre 2013
L'analyse de
Pierre Barbancey après la signature d'un
accord transitoire sur le nucléaire
iranien dimanche matin.
Le 9 novembre dernier, alors qu’un
accord était déjà possible, la France
jouait l’intransigeance. Laurent Fabius,
dur parmi les durs, mélange de Kissinger
et de Rumsfeld, repartait alors de
Genève persuadé d’avoir sauvé le monde
d’une prochaine guerre nucléaire. Ce
dimanche matin, pourtant, à l’issue de
l’accord sur le nucléaire iranien
finalement passé, le même Laurent Fabius
a voulu faire bonne figure, posant
devant les caméras en levant le pouce de
la victoire. À le voir on pourrait donc
penser que son attitude a permis de
dégager une nouvelle entente dans
laquelle ses exigences étaient prises en
compte. Sinon, pourquoi toute cette
agitation? Eh bien, non!
Pratiquement aucune, si ce n’est aucune,
des demandes françaises n’a été prise en
compte. Soutenues par Israël et
l’Arabie saoudite, elles visaient à
empêcher voire à interdire tout
enrichissement de l’uranium par l’Iran
et insistaient sur le démantèlement de
l’usine d’eau lourde d’Arak. Des lignes
rouges pour l’Iran, qui a toujours clamé
son droit à l’enrichissement. Le lui
refuser c’est empêcher tout accord et
préparer la guerre.
Deux semaines après, un accord est
signé. Les demandes françaises sont
balayées et la France, pourtant,
accepte. Pis, Fabius et Hollande font
comme si c’était une victoire obtenue
grâce à leur intransigeance. Exactement
comme cela s’est passé lors du vote de
la résolution de l’ONU consacrée à la
Syrie, fin septembre. Ce qui tend à
montrer les limites de la diplomatie
française et de la stratégie
internationale de l’Élysée. Que la
France joue une carte originale à
l’échelle mondiale, tant mieux. Mais en
l’occurrence, bien ancrée au sein de
l’Otan, Paris cherche surtout à
passer pour le meilleur allié de
Washington (au détriment de
Londres) et tenter ainsi de jouer sa
propre partition sur certains terrains,
comme en Afrique de l’Ouest ou au
Moyen-Orient. Et quand on veut jouer
dans la cour américaine, l’un des
instruments brandis n’est autre que le
recours à la force. Ce qui est le cas:
Libye, Mali, Syrie, Centrafrique… La
solution a visiblement toujours la
couleur kaki.
Cet accord ouvre la voie à une
nouvelle attitude française, d’autant
que tous les dossiers régionaux sont
liés. Il convient donc d’œuvrer
pour un Proche-Orient exempt d’armes
nucléaires, d’aider à la tenue
de la conférence de Genève 2 sur la
Syrie et, enfin, de réactiver de
véritables négociations de paix entre
Israéliens et Palestiniens, en forçant
Tel-Aviv à stopper la colonisation.
© Journal
L'Humanité
Publié le 25 novembre 2013 avec l'aimable
autorisation de
L'Humanité
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