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Opinion
Quand nous nous
portons volontaires pour trouver une solution
Munir Shafiq
Lundi 22 novembre 2010
Octobre 2010 – Mawazeen
Suite à l’impasse devant laquelle se trouve la « solution des
deux Etats » proposée par le président américain George W Bush
et adoptée par Barak Obama par la suite, impasse, échec,
situation desespérante ou absurdité de continuer à l’adopter,
certains proposent, à partir de différents courants politiques,
de renouer avec le projet ou d’adopter le projet de « la
solution d’un seul Etat ».
Parmi eux se trouvent des personnes ayant participé aux
négociations pour parvenir à la solution des deux Etats ou ayant
soutenu le processus politique après Oslo ou à partir d’Oslo.
Pour ces participants, le fait d’agiter la solution d’un seul
Etat a pour but d’ « alarmer » le négociateur israélien et le
convaincre de faciliter le processus amenant à la « solution des
deux Etats » pour qu’il n’ait pas à affronter « la solution d’un
seul Etat ».
Quant aux autres qui soutiennent le processus politique basé sur
l’accord d’Oslo ou la conférence de Madrid, ou la résolution 242
plus l’Etat palestinien (projet avant la conférence de Madrid,
au temps de la « guerre froide » - la ligne soviétique), la
plupart de ceux-là se rassemblent d’une manière ou d’une autre,
aujourd’hui pour adopter le projet d’un « seul Etat » après
avoir réalisé l’irréalisme d’une solution basée sur les bases
suivantes : la chute du processus politique commencé à partir de
la résolution 242, opérée par Bill Clinton, puis Bush – Obama
par le biais de Rice – Mitchell, jusqu’au niveau actuel. C’est
le chemin adopté par le processus politique, il n’y en avait pas
d’autres, mis à part des suppositions qui n’ont su être
concrétisées et qui se prétendaient réalistes ou étaient basées
sur cette prétention. Tout autre choix a été refusé, notamment
celui sur lequel a été fondé l’OLP, au cours de ses étapes en
1964 et 1968, ou sur lequel ont été fondées toutes ses
organisations.
En un mot, ceux-là se sont éloignés de la stratégie du processus
politique ayant visé la « solution de deux Etats », non pour
revenir aux constantes de la cause palestinienne, à la stratégie
du boycott, de la résistance et de la lutte, mais pour adopter
le projet d’un « seul Etat », sans cependant nous dire comment
le réaliser, ce qui veut dire que nous sommes devant un nouvel
objectif dépourvu de stratégie et de tactique précis pour le
réaliser, et sans définir l’identité de l’Etat visé ou même son
nom entier.
La proposition d’un « seul Etat » n’est pas nouvelle. Elle fut
discutée , au moins, au début des années trente du siècle
dernier jusqu’à la parution de la résolution 181 en 1947 du
partage de la Palestine. Même cette résolution avait maintenu en
son sein l’idée de la fondation d’un seul Etat, mais suite à
l’établissement des deux Etats qui seraient reliés par une unité
économique et des relations qui y mèneraient.
Depuis, le projet d’un seul Etat a été posé sur les étagères et
a pratiquement disparu, il ne fut plus mentionné entre 1948 et
1969, mais il fut de nouveau proposé dans un autre langage et
avec d’autres contenus, et différent du précédent, grâce au
mouvement Fateh avec le slogan de la fondation d’un seul Etat
démocratique palestinien basé sur la laïcité, où les chrétiens,
les musulmans et les juifs seraient égaux. Cependant le Fateh
avait rattaché son projet à la libération de la Palestine et de
la suppression de l’entité sioniste, avec toutes ses
institutions : l’Etat, l’armée et l’idéologie, et évidemment, au
retour de tous les réfugiés à leurs maisons, leurs villages et
villes (droit au retour).
Il faut remarquer la différence fondamentale entre le projet dde
l’Etat démocratique palestinien et le projet actuel d’un seul
Etat. Le premier a été défini à partir de l’objectif de la
libération basée sur la lutte armée et la suppression de
l’entité sioniste. Alors que le second n’a pas d’identité
définie, est-elle palestinienne ou israélienne ? quoi d’autre ?
Il ne définit pas comment y parvenir, est-ce par le biais des
négociations, un accord tacite, une résolution internationale
qui le revendiquerait et l’imposerait ou serait-il une solution
couronnant une série de solutions ? Est-ce qu’il viendrait suite
à des formes particulières de lutte ou suite à toutes ces
formes ? Est-ce qu’il serait une solution après la libération et
le retour des réfugiés et déplacés vers toute la Palestine ou
bien serait-il limité essentiellement aux habitants de la
Cisjordanie, de la bande de Gaza et d’autres ?
Le problème des adeptes du « seul état » est qu’ils sont
retournés vers cet ancien slogan par suite de l’échec de la
solution des deux Etats, ou parce qu’ils veulent s’adresser à
l’opinion publique en affichant une attitude humaniste éloignée
de l’accusation d’antisémitisme, de vouloir chasser les juifs de
la Palestine ou de vouloir la suppression de l’Etat
« d’Israël ». Ainsi, le projet d’un « seul Etat » est né
aujourd’hui pour ne pas affronter l’impasse d’une non-solution.
Mais il y a encore ceux qui l’ont proposé pour convaincre le
Hamas de la nécessité de s’adresser au monde en proposant une
solution humaniste, puisque les adeptes de «la solution des deux
Etats » ont perdu le terrain sur lequel il se tiennent, et que
l’alternative est réclamée à plus d’un niveau, palestinien,
arabe, islamique et mondial.
Dès la première étape, au début des années 30 jusqu’en 1947,
lorsque le mouvement national palestinien avait accepté
l’instauration d’un Etat palestinien qui intègre des centaines
de milliers d’émigrés juifs, tout en maintenant une majorité
arabe (musulmans et chrétiens), le slogan d’un seul Etat a joué
le rôle de tampon pour absorber la perte des droits fondamentaux
du peuple palestinien qui pourrait en découler, ou en d’autres
termes, accepter d’intégrer l’émigration illégale vers la
Palestine. Ce fut l’objetif par exemple du « livre blanc »
présenté par la Grande-Bretagne en guise de solution.
Puis la résolution d’un seul Etat fut utilisée pour faire
accepter la résolution de partage en 1947 en présentant le
partage de la Palestine comme solution provisoire, ou bien que
la fondation de l’Etat « d’Israël » serait provisoire avant que
ne soit instauré l’Etat palestinien, unifié et seul.
En d’autres termes, le projet d’un seul Etat fut un prélude pour
faire accepter aux Palestiniens, Arabes et musulmans les
émigrations juives qui menaçaient de spolier la Palestine avant
de leur faire avaler la résolution de partage.
Quant à la seconde étape, qui s’étale de 1948 à 1967 (guerre de
juin), elle consista à faire admettre la fondation de l’Etat de
l’entité sioniste, l’expulsion des 2/3 du peuple palestinien de
ses maisons, ses terres, ses villages et ses villes, et
l’installation de colons juifs à sa place, et cela, grâce à des
projets illusoires consistant à trouver des solutions à la
question des réfugiés palestiniens, allant de la revendication
d’appliquer les résolutions du conseil des Nations-Unies (la
résolution 181 du partage et la résolution 194 du retour)
jusqu’à des solutions proposant le retour partiel,
l’installation partielle dans les pays d’accueil et une
compensation générale.
La reprise du slogan d’un seul Etat, avec le projet d’Etat
démocratique proposé par le Fateh avait pour but de s’adresser à
l’opinion publique et de rejeter l’accusation de vouloir chasser
les juifs de la Palestine, en voulant proposer une solution
humaniste au service de la lutte armée et du but de la
libération totale.
Mais l’accueil de ce pas du Fateh par divers milieux sionistes,
de gauche, et des gouvernements occidentaux, malgré les buts
différents recherchés par chaque partie approuvante, a été
favorable parce qu’il comportait une reconnaissance des droits
égaux pour les juifs avec les musulmans et les chrétiens arabes
en Palestine, alors que le détenteur unique, légal et exclusif
du droit à l’autodétermination de la Palestine, selon le droit
international, est le peuple palestinien.
Le Fateh a ici fait une concession gratuite aux juifs, sans
contrepartie de leur côté, au sens où ils n’ont pas accepté, de
leur côté, l’égalité des droits avec les musulmans et les
chrétiens arabes de Palestine. Il a considéré, ce faisant, qu’il
allait influer sur l’opinion publique juive à l’intérieur de la
Palestine et sur l’opinion publique internationale (1).
A peine deux ans après cet important pas « positif » de la part
du Fateh, l’OLP en est également touché ainsi que l’opinion
publique arabe, mais pas du tout l’opinion internationale ou
israélienne, à l’exception d’un très faible nombre de la gauche
et des élites, mais commence l’attaque des « nouveaux amis » :
l’Union soviétique et son camp d’abord, puis les représentants
de l’opinion publique occidentale, ensuite, considérant que le
slogan de l’Etat démocratique n’est ni pratique ni réaliste, car
il vise la suppression de « l’Etat d’Israël », ce qui ne peut
être accepté sur le plan international. Il ne peut, par
conséquent, être une solution à la question palestinienne. Il
est donc réclamé de présenter un nouveau projet (de nouvelles
concessions).
Le Fateh devait alors faire une nouvelle concession gratuite
pour satisfaire Sadate, gagner l’Union soviétique et préparer le
terrain pour une solution réaliste dont le plafond serait la
résolution 242. Cela s’est traduit par le « projet en dix
points », soit la présentation d’un programme minimum qui
réclame la création d’une autorité nationale sur toute parcelle
libérée de terre de la Palestine, sans indiquer cependant
l’instauration d’un Etat palestinien pour éviter l’accusation de
vouloir reconnaître l’Etat de l’entité sioniste, ou la solution
des deux Etats, et sans mentionner l’approbation de la
résolution 242. Au contraire, pour se faire admettre, le
programme en dix points a inclus le refus de la résolution 242
ainsi que le refus de la réconciliation, de la reconnaissance,
des négociations ou l’abandon de la lutte armée en vue de la
libération.
Ainsi, l’objectif d’un seul Etat s’est estompé, en commençant
par un programme minimum, où l’objectif de la libération totale
et d’un seul Etat démocratique demeure comme « programme
maximum » (cela a été naturellement oublié par la suite).
Le programme en dix points fut le début et il a préparé le
terrain pour passer au projet de l’Etat indépendant de 1988,
sous le plafond de la résolution 242 ou dans les « frontières »
du 4 juin 1967, suivi par la conférence de Madrid, l’accord
d’Oslo, puis les ententes de la conférence d’Annapolis : la
solution des deux Etats par le biais des négociations qui
décideront de tout ce qui se rattache à ses conditions. Mais
depuis l’accord d’Oslo basé sur des négociations bilatérales
palestino-israéliennes secrètes, la colonisation et la
judaïsation d’al-Qods ainsi que la confiscation des terres de la
vallée du jourdain se sont amplifiées, dans le cadre des
négociations, contrairement à ce qui a été prétendu ou qui était
supposé, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien sur lequel fonder un
Etat palestinien. L’accentuation de la colonisation se poursuit
dans le cadre de la médiation de l’administration d’Obama,
entraînant, pour beaucoup, l’impasse de la « solution des deux
Etats ». C’est alors que le projet d’un seul Etat est repris
alors qu’il était mis de côté, aux côtés des résolutions de
mauvaise augure du conseil des Nations-Unies, ainsi qu’aux côtés
de l’accord d’Oslo et de la Feuille de route, même mauvais et au
plafond très bas.
Si le projet d’un seul Etat revêtu à l’ancienne est une
tragédie, son nouveau revêtement en fait une farce ou un
divertissement. C’est pourquoi les adeptes du nouveau projet le
proposent comme moyen de fuite ou à l’improviste, sans définir
le degré de son réalisme, ni son identité, ni sa stratégie ou
tactique, à l’exception de quelques fonctions qu’il pourrait
remplir, selon leurs conceptions. Loin d’être une solution, il
peut juste être considéré comme un slogan. Mais même ces
fonctions secondaires sont hors d’atteinte, s’il s’agit de viser
l’opinion publique internationale ou de mener la lutte sous sa
bannière.
La question demeure : si la solution des deux Etats a prouvé
être irréaliste et se trouve devant une impasse, hormis le fait
de proclamer un Etat palestinien ou d’accepter l’instauration
d’un Etat selon les dernières conditions ou propositions
israéliennes non encore proclamées, ce qui serait également hors
d’atteinte et même éloigné du plafond de Bush-Obama, comment
Mahmoud Abbas et ceux qui sont à son niveau, parmi les Etats
arabes (l’Egypte notamment) vont-ils agir ? Si la solution d’un
seul Etat est uniquement un slogan, sans identité ni terre ni
plafond ni murs, quelle est la solution ?
La réponse doit s’appuyer avant tout sur le droit, les
constantes, les principes et la justice et considérer que
l’émigration juive en vue de fonder une patrie nationale pour
les Juifs en Palestine, autorisée par le mandat britannique, les
résolutions internationales du
conseil des Nations à partir de la résolution de partage
181 en 1947, l’Etat d’Israël ayant été proclamé en s’y appuyant,
puis les résolutions qui ont suivi, y compris la résolution 242,
représentent une injustice évidente envers le peuple palestinien
et un détournement du
droit international, du traité du conseil des
Nations-Unies et une violation des Nations-Unies, et une
violation de son droit constant à l’autodétermination dès la fin
du mandat britannique tel que le mentionne le droit
international.
Concernant la référence au droit, aux constantes, aux principes
et à la justice, toutes les mesures prises pour fonder et
entériner l’Etat de l’entité sioniste, entraînant l’expulsion de
la majorité du peuple palestinien de ses maisons, ses villages
et ses villes, ainsi que les résolutions internationales qui ont
émané et les solutions qui ont été proposées à la question
représentent soit une violation, soit une opposition au droit,
aux constantes, aux principes et à la justice.
Ensuite, la seconde réponse, qui est non moins importante et
moins rigoureuse que la première, elle s’appuie sur l’expérience
concrète de toutes les résolutions internationales et des
projets « pratiques » pour trouver une solution à la question
palestinienne et au problème du peuple palestinien, à partir du
Livre blanc, les propositions avancées pour fonder un seul Etat
avant 1947, puis la résolution 181 du partage, la résolution 194
et les résolutions 242 et 338, pour finir avec la conférence de
Madrid et l’accord d’Oslo, les négociations de Camp David II,
puis les négociations ayant suivi la conférence d’Annapolis, qui
s’appuyaient sur la Feuille de route et les négociations
bilatérales directes pour trouver une solution sur la base des
deux Etats, toutes sont irréalistes et non pratiques,
puisqu’elles ont entraîné
un effritement supplémentaire des terres de la
Cisjordanie, la judaïsation encore plus poussée d’al-Qods, une
saignée d’exil encore plus vaste et continu des Palestiniens et
un durcissement américano-sioniste considérant que « l’Etat
d’Israël » est un Etat pour les Juifs seulement. Toutes ont
soufflé les principes de la cause palestinienne d’un côté et
constituent une menace d’exil pour les Palestiniens qui sont
restés dans l’Etat de l’entité sioniste après sa fondation
d’autre part. Cela a eu pour résultats de commencer à effacer
les traits des villes et des villages arabes et à les judaïser,
comme Yafa, Haïfa, Akka, Lid et Ramleh, et ne plus se contenter
de l’habiter et de l’exploiter en tant que « propriété des
absents », comme ce fut le cas depuis 1948 jusqu’à la période
récente. Aujourd’hui, dans le cadre du processus de règlement
actuel, la situation est passée à la judaïsation et à la
modification de la réalité en promulguant des lois permettant
aux juifs de se les approprier.
En résumé, le parcours de la recherche
de soi-disant solutions intermédiaires dans le cadre de
la fondation de l’Etat de l’entité sioniste a prouvé qu’il est
irréaliste, impratiquable
et impossible, plus que ne le sont ceux qui sont accusés
de s’accrocher aux principes de la question palestinienne, aux
constantes du droit du peuple palestinien à sa patrie et au
refus de tous les projets de règlement considérés d’une part,
comme une entérination de l’injustice, de la spoliation de la
terre, de l’expulsion de sa population autochtone, et d’autre
part, un encouragement à poursuivre la colonisation, la
judaïsation, le vol incessant des terres en Cisjordanie pour
qu’il n’y ait plus de Palestiniens ni aucune trace du peuple
palestinien en Cisjordanie. Sans l’évolution de la situation
dans la bande de Gaza qui a imposé le désengagement, le
démantèlement des colonies et la difficulté de l’occuper à
nouveau, elle aurait eu le même sort que la Cisjordanie du point
de vue de la colonisation, de la confiscation des terres et de
l’expulsion des Palestiniens.
C’est la conclusion réaliste de ce qui est connu comme étant le
processus de règlement, qui s’est construit sur le parcours des
concessions palestiniennes, arabes et internationales, qui se
poursuit depuis l’acceptation des émigrations juives coloniales
pendant le mandat britannique et sous la protection de ses
soldats, et par l’acceptation des résolutions du conseil des
Nations-Unies, jusqu’à arriver à la résolution 242, puis le
processus de règlement direct sous égide américano-européen,
soit le quartet.
Ce parcours fut accompagné d’incessantes concessions
internationales quant aux résolutions, recommandations et
positions antérieures, formulées par les grandes puissances
elles-mêmes en tant que politique officielle, dès la concession
vis-à-vis des résolutions 181 et 194 au profit des résolutions
242 et 338, puis l’abandon de ces deux dernières au profit de la
Feuille de route et des négociations directes en fonction de ce
que s’accordent les deux parties, et ainsi les résolutions
internationales sont devenues une référence formelle tant que la
solution a été remise aux négociations et à ce qui satisfait les
deux parties «négociatrices ».
C’est pourquoi il faut rejeter le respect de toute résolution
internationale ou politique annoncée adoptée par les grandes
puissances au conseil de sécurité, non pas seulement du point de
vue de l’injustice faite au droit palestinien mais aussi pour le
degré de constance et de respect des grandes puissances
elles-mêmes de leurs propres résolutions. L’expérience concrète
a prouvé qu’elles ne respectent aucune résolution qu’elles ont
elles-même formulées et ne maintiennent aucune position qu’elles
ont proclamées. Leur parcours consiste à
passer d’un pas à l’autre pour adopter ou couvrir le
projet sioniste dans son ensemble : faire dépendre la solution
des négociations ou de ce qui satisfait les deux parties
constitue en fait une complicité qui vise à entériner les
mesures de colonisation faites sur le terrain, l’expulsion des
Arabes et la judaïsation d’al-Qods. Récemment, ils ont encore
inventé une formule « la création d’un Etat palestinien dans les
frontières de juin 1967 avec un échange de territoires ».
L’échange de territoires conteste nécessairement la
« référence » aux frontières de juin 1967, car il entérine la
colonisation et la judaïsation et couvre et couvrira la
colonisation et la judaïsation dans le cadre des négociations.
Ainsi, nous pouvons dire, sans grande exagération, que le
processus de règlement n’a pas prouvé qu’il est le chemin du
réalisme et des solutions pratiques possibles, et qu’il peut
sauver ce qu’il est possible de sauver. Ce qui s’est passé à sa
suite ou dans son cadre est plus grave que ce qui s’est passé
avant lui, lors du boycott et du refus des négociations, de la
réconciliation et de la reconnaissance, entre 1948 et 1979, soit
jusqu’aux négociations directes et la proclamation de la
disposition à reconnaître et se réconcilier suite à la visite du
président Anouar Sadate à l’entité sioniste et la signature du
traité égypto-israélien.
Vient ensuite la
comparaison la plus mauvaise avec les étapes précédentes, après
la conférence de Madrid, l’accord d’Oslo et les négociations
palestino-israéliennes et les pas en direction de la
normalisation, et finalement la proclamation de l’initiative
arabe en vue de la paix, et les ententes de la conférence
d’Annapolis, la résolution du comité de suivi de l’initiative
arabe à la Ligue arabe qui s’est mise à couvrir les ententes
d’Obama-Netanyahu et les concessions de Mahmoud Abbas.
Ces résultats catastrophiques sont principalement dus au
parcours du règlement et des concessions, c’est-à-dire le
parcours de la recherche de solutions là où elles n’existent
pas. Ce parcours a encouragé le projet sioniste à modifier de
manière extrêmement rapide la situation présente sur le terrain,
non seulement en Cisjordanie, mais aussi dans les territoires
dont il s’est emparé au cours de la guerre de 1948 et qui
représentent 78% de la Palestine.
En résumé, le parcours du règlement est dénoncé non seulement du
point de vue des principes et des constantes, mais par le rejet
de ses prétentions à être réaliste et pratique, voulant sauver
ce qui peut être sauvé, ou gagner l’opinion publique
internationale, voulant spécifier en premier lieu les Etats
occidentaux. C’est pourquoi il a échoué et a perdu toute
légitimité ou justification. De même, les projets de solutions
sont arrivés à l’impasse pour imposer en fin de compte la thèse
selon laquelle qu’aucune solution n’est possible
avec le projet sioniste et son ambition illimitée à
s’étendre sur les terres palestiniennes et à les judaïser en
totalité. Il faut rappeler que l’échec jusqu’à présent des
processus de règlement est, concrètement, une chance pour ceux
qui l’ont soutenu, Palestiniens et arabes, car leur succès les
aurait placés dans une posture de trahison et de liquidation de
la cause palestinienne.
D’un point de vue pratique, rien ne peut expliquer l’échec du
processus de règlement sinon la non disposition de toutes les
directions sionistes israéliennes à accepter une quelconque
solution tant qu’elles convoitent de prendre ce qui reste entre
les mains des Palestiniens d’une part, comme l’a prouvé
l’expérience, les
Etats occidentaux, et en premier lieu les Etats-Unis, ne veulent
pas imposer une solution même sur les frontières minimum que
sont prêts à accepter les Palestiniens qui ont fait le plus de
concessions sur la terre, les droits et les constantes. Il a été
prouvé que les gouvernements occidentaux n’ont pas été sincères
ou sérieux avec leurs résolutions, et leurs dirigeants, depuis
l’administration Clinton, sont encore plus faibles devant la
domination juive sioniste dans leur pays, et plus en symbiose
avec le projet sioniste, de sorte qu’ils ont posé une condition
à toute solution, satisfaire les deux parties, soit la partie
israélienne dans les négociations.
Ces deux vérités doivent être évidentes depuis l’émergence de la
question palestinienne, que ce soit pour comprendre le projet
sioniste et la mentalité de ses dirigeants dans le cadre d’une
protection et d’un soutien international illimité et dans le
cadre d’une stratégie internationale occidentale. Il est
d’ailleurs lui-même l’auteur du projet, comme il faut le
comprendre dans le cadre d’un effritement arabe, de divisions
islamiques et une domination occidentale sur le rapport de
forces international.
Comprendre ces deux vérités peut empêcher de succomber à
l’illusion du règlement, et d’abandonner les politiques de
boycott et de l’objection, mais peut aussi encourager les
stratégies de la résistance et introduire fondamentalement des
changements dans la situation arabe.
Les politiques arabes officielles entre 1948 et 1979 ont été
marquées par le boycott, le refus des négociations, de la
normalisation et de la réconciliation. Malgré leur modestie et
l’absence de l’aspect positif consistant à posséder la force,
sur le plan arabe en général (à l’exception des rares cas des
mouvements de libération arabe qui furent encerclés, soumis à
l’agression et l’occupation, et en premier lieu l’Egypte de
Nasser), elles ont réussi à stopper l’activité de la judaïsation
même dans les territoires occupés en 1948, et à limiter la
colonisation en Cisjordanie et la bande de Gaza. Ce qui a imposé
aux gouvernements de l’Etat de l’entité sioniste la préservation
des quartiers arabes dans les villes et les villages, bien que
les colons s’y soient installés. Leurs colonies n’ont pas été
installées sur les ruines des villages détruits dont la
population a été entièrement expulsée, jusqu’aux négociations
d’Annapolis, où a commencé le processus d’appropriation des
terres et des maisons et la modification des traits des villes
historiques, par exemple à Akka et Yafa, et notamment dans la
ville d’al-Qods, sans parler de l’isolement international dont a
souffert l’entité.
Les processus de négociations et de reconnaissance menés par
Sadate ont permis la construction des autoroutes à l’intérieur
des régions occupées en 1948, qui s’ajoute à la carte de la
résolution du partage. Les autoroutes et les routes de
contournement n’ont été tracées en Cisjordanie qu’après les
accords d’Oslo. L’appropriation des « propriétés des absents »
n’a eu lieu qu’après les négociations à Annapolis, prouvant
qu’avant le processus des règlements, l’entité craignait que des
conditions interviennent et l’obligent à revenir et à reculer
jusqu’aux lignes de partage, sinon jusqu’aux lignes de la trêve
après 1967. Ce sont les concessions palestiniennes et arabes qui
ont conduit la situation en Palestine à la judaïsation actuelle
et au « principe » de l’échange des territoires en Cisjordanie,
et à réduire ce qui
reste de terres à un mini-Etat dont la superficie ne dépasse pas
les 10% de la Palestine historique. Et même ces 10% seront
disloqués et encerclés militairement de tous côtés, dépourvues
d’eaux souterraines et sans souveraineté de leur espace aérien
ni sur ses voies
d’accès.
Parmi les points les plus négatifs issus de l’accord d’Oslo du
point de vue du rapport de forces politique, ce fut
l’élargissement de la reconnaissance diplomatique internationale
de l’entité sioniste et l’encouragement à la normalisation arabe
et palestinienne.
C’est cette grave réalisation sur le terrain et dans le
processus du règlement qui a reposé la question de la solution
d’un seul Etat, comme elle a encouragé par ailleurs la
revendication de « la judéïté de l’Etat de l’entité sioniste ».
Quelles que soient les causes et les motivations de chaque
partie, elles se sont mises à répondre à l’appel à la « solution
d’un seul Etat », cet appel ne faisant que maintenir l’espoir
(l’illusion) de trouver une solution à la question palestinienne
à laquelle les efforts devraient porter. Cette solution doit
être commune et acceptée par les deux parties, les Palestiniens
et les Israéliens, et c’est ce que signifie nécessairement et de
quelque manière qu’on le définit, « un seul Etat ».
Ce qui signifie que nous sommes toujours dans le cadre des
solutions à la question palestinienne, et toute solution est
nécessairement une solution politique, d’autant plus que la
condition de la libération et de la concrétisation du retour ne
sont pas des préalables, d’une part, et d’autre part, elle offre
généreusement et gratuitement, et sans contrepartie, une
reconnaissance préalable du droit des émigrés colons en
Palestine, et une égalité nécessaire avec les ayant-droit
exclusifs, le peuple palestinien authentique et historique qui
fut occupé par le mandat britannique après la première guerre
mondiale. Ce droit incontestablement défini par le droit
international a été pratiqué par tous les peuples anciennement
colonisés, à l’exclusion du peuple palestinien qui en a été
privé de force et par l’expulsion, et du fait de la résolution
illégitime 181 du partage.
La question est : si l’expérience palestinienne dès les années
20 du XXème siècle jusqu’à présent a prouvé qu’il n’y a aucune
solution à la question palestinienne dans le cadre spécifique du
projet sioniste, de la stratégie occidentale et l’état de
morcellement et de dépendance arabe, mais aussi musulman,
pourquoi rechercher une solution hypothétique
nouvelle-ancienne ? Pourquoi ne pas nous comporter avec la
question palestinienne sur la base qu’aucune solution n’est
possible et si cela a lieu, cela signifie la liquidation de la
question. Il n’y a aucune autre issue que la lutte, rien que la
lutte.
Bien évidemment, nous devons admettre cette vérité criante qu’il
n’y a aucune autre solution que de mener la lutte. Il faut que
cela soit affirmé à l’entité sioniste, en lui disant qu’il n’a
aucune solution que de nous combattre, et que pour nous, il en
est de même, toutes autres paroles ne sont que des mensonges et
de la duperie, comme l’expérience l’a prouvé où la prédominance
s’est intensifiée à l’ombre de la reconnaissance, de la
normalisation, des négociations et de la proposition des
solutions politiques, et ses convoitises ont augmenté avec tout
recul palestinien, arabe et international.
Il faut que cette vérité soit affirmée face aux administrations
américaines, aux gouvernements occidentaux, et par la même
logique, leur disant qu’il n’y a pas d’autre solution que de
mener la lutte. Toutes les résolutions internationales et les
projets de solution furent des mensonges, une tromperie
et une anesthésie des Palestiniens, des Arabes, des
musulmans et du monde. En donnant l’illusion que vous avez une
solution intermédiaire qui veut éviter l’affrontement (2), vous
avez toujours soutenu le projet sioniste qui s’est érigé et
s’est emparé de la Palestine, sous votre protection, et il a
poursuivi l’expansion et la judaïsation grâce à votre soutien et
votre couverture. Vous n’envisagez en fait que la prédominance
qui s’est intensifiée en soutenant le projet sioniste dans le
cadre du processus de règlement, de négociations, de
normalisation et de réconciliation.
Tant qu’il en est ainsi, vous ne pouvez pas indéfiniment
prétendre, après cette longue expérience, que vous êtes pour une
solution politique par le biais des négociations, de vos
résolutions ou de vos projets. La pratique et le parcours de vos
positions changeantes ne mentent pas et disent que vous
n’envisagez que la prédominance… Mis à part cela, tout a été au
service de cette prédominance, remettre la Palestine en entier
au projet sioniste, mais en portions, par étapes, avec une
couverture de processus politiques qui donnent l’illusion d’une
solution proche.
C’est pourquoi il faut que le peuple palestinien et tous les
arabes et musulmans, ainsi que les êtres libres de ce monde
soient mis devant cette vérité, afin que leur seul discours avec
les sionistes soit l’affrontement et ses différentes stratégies
politiques, militaires et économiques : résistance, boycott,
refus de reconnaître et mobilisation des divers moyens de lutte.
Quant aux autres Etats, la Russie, la Chine, l’Inde et les pays
du tiers-monde, il faut qu’ils soient mis en face de la
véritable situation, à partir de la longue expérience avec
l’entité sioniste et les politiques occidentales, et qu’ils
définissent les attitudes qu’ils veulent adopter, mais il ne
pourront rejeter ce que la longue expérience avec l’entité
sioniste et les stratégies occidentales ont prouvé. Ils doivent
choisir entre les deux camps ou demeurer dans la neutralité.
Ce qui est cependant important et décisif, c’est la
confrontation du peuple palestinien, des Arabes et des musulmans
ainsi que des êtres libres du monde avec cette vérité, celle qui
dit que la prédominance par la force et la ruse politique
(l’anesthésie grâce aux solutions politiques) est le trait
dominant de l’occident et des gouvernements sionistes, tout au
long de la dure expérience de la question palestinienne. Il faut
dès lors mettre de côté toute illusion sur la possibilité de
trouver une solution politique ou de tourner en rond dans le
cadre d’un processus de règlement. C’est pourquoi nous devons
insister, plus particulièrement, auprès du peuple palestinien et
de la nation arabe car certains de leurs dirigeants furent à la
base du désastre, en déviant de la ligne de la lutte qui a
commencé par la résistance, le boycott, le refus de négocier, de
normaliser, de se réconcilier et de reconnaître, avec des
affrontements militaires limités en 1948, 1956, 1967, 1973, où
certaines armées arabes se sont levées avant que n’intervienne
le soutien à la résistance palestinienne de 1967 à 1974. Puis le
recul a commencé avec la résolution « l’OLP le seul représentant
légitime » pour finir, après la catastrophe du traité
égypto-israélien, puis l’accord d’Oslo, par le slogan « nous
acceptons ce que les Palestiniens acceptent », avec une
approbation arabe du processus de règlement, à partir de la
conférence de Madrid pour arriver à l’initiative de la paix
arabe, en 2002, et ensuite, mais pas finalement, le comité de
suivi de l’initiative arabe de la Ligue arabe assure une
couverture aux politiques de Mahmoud Abbas et du gouvernement
égyptien.
Concrètement, les choses ont été remises au processus de
règlement et des conséquences qu’il a imposées, donnant
naissance à un environnement où les collaborateurs agissent
librement, ainsi que ceux qui ont abandonné et les corrompus qui
veulent se débarrasser d’un mouvement de libération arabe ou des
exigences de l’indépendance et de la question palestinienne,
pour être en harmonie avec le projet américano-sioniste mondial,
tout comme il a instauré un climat de quiétude générale des
autres parties qui ont considéré que la paix règnera sur la
région, et que nul effort de refus ou de boycott n’est
nécessaire. Ils ont alors balancé la question palestinienne loin
derrière le dos ou sur les épaules de l’OLP, sous le prétexte de
se consacrer au développement de leurs pays, et certains sous le
prétexte du besoin de réforme et de démocratie, terminant avec
le slogan « aucune voix ne s’élève au-dessus de celle du
combat », ou considérant que le problème essentiel réside dans
la tyrannie et non dans les stratégies internationales, la
partition et les rapports de force.
Par ailleurs, il reste encore des forces qui refusent de
caresser ces illusions, avec ses conséquences et ces
orientations. Elles se sont accrochées aux constantes, aux
principes, à la résistance et ont pris en charge de creuser la
pierre face à la domination des climats trompeurs de « paix ».
Cela, quand ils n’affrontent pas la complicité et les insultes
de l’attaque politique et idéologique qui les considérent
comme ayant une « langue de bois » et vivant dans le
passé.
Quant à la population palestinienne et arabe, en général, elle
se répartit entre l’attente de ce que peut apporter le processus
de règlement et entre le sympathisant avec la résistance,
doutant cependant des politiques qui se fient aux les Etats-Unis
et affirmant sans hésitation que l’ennemi est l’entité sioniste
car ce dernier ne peut se transformer en une colombe de paix.
Mais même ceux qui attendent, leur attente n’est que préparation
pour retourner au soutien du refus et de la résistance lors de
toute agression américano-sioniste, et de tout acquis de la
résistance, qu’elle soit en Palestine ou au Liban, puis en Irak.
L’opinion publique palestinienne et arabe a été la plus rapide à
juger d’échec le processus de règlement, à s’aligner aux côtés
de la résistance et du refus et à isoler les dirigeants qui se
sont fiés aux Etats-Unis et suivi le chemin des concessions à
l’entité sioniste, par la normalisation, la reconnaissance ou en
étant disposé à le faire (initiative de paix arabe).
Ainsi le climat est prêt à affronter les réalités issues de
l’expérience, que ce soit en ce qui concerne la faillite de la
recherche des solutions à la question palestinienne, où il n’y a
pas de terrain pour une solution, comme l’a confirmé
l’expérience - et où aucun signe ne vient le contredire -
ou ce qui se rattache aux réalisations de la résistance,
notamment la libération du sud Liban en 2000, et la victoire
contre l’agression au cours de la guerre de juillet – août 2006
au Liban, ou pour imposer le désengagement, le démantèlement des
colonies dans la bande de Gaza, en 2005 puis la victoire sur
l’agression au cours de la guerre contre la bande de Gaza, en
2008-2009, puis l’échec de l’occupation militaire américaine
grâce à la résistance en Irak, et de même en Afghanistan.
Il faut ajouter à ces climats favorables le recul mondial de la
domination américaine, et régional chez nous et dans d’autres
régions, parallèlement à une grave crise financière
internationale qui a ébranlé les bases sur lesquelles a été
fondée la mondialisation dans les années 90 du siècle dernier,
donnant naissance à un ensemble de vides dans l’ordre mondial
(le désordre) mais aussi régional dans notre région, en Amérique
Latine, en Asie et en Afrique. Il suffit de remarquer
l’émergence du groupe des 20 Etats et le rôle du Brésil, de la
Turquie et de l’Iran, du Vénézuela, de la Syrie, de l’Afrique du
Sud, de la Malaisie et de l’Indonésie, ainsi que l’entrée à
nouveau de la Russie, de la Chine et de l’Inde au club des
grandes puissances.
Les conditions sont présentes pour faire une percée au sujet de
la question palestinienne, surtout en rejetant les illusions du
règlement et des solutions, et en redonnant vie aux stratégies
de l’intifada, du boycott, du
refus et de la résistance, en considérant l’entité
sioniste comme l’ennemi numéro un pour les Palestiniens, les
Arabes et les musulmans, peuples et régimes.
Il faut que les Palestiniens, les Arabes et les musulmans
reviennent aux constantes de la question palestinienne et à ses
premiers récits, à partir du refus de reconnaître la légitimité
de ce qui a été installé sur sa terre, des émigrations sionistes
et de l’instauration de l’Etat de l’entité sioniste et des
processus de colonisation et de judaïsation. Puis qu’ils
reviennent pour considérer à nouveau la question de la Palestine
en tant que question de la lutte arabe en premier lieu, une
question islamique, humaine et internationale. Il faudra faire
participer les Arabes comme les Palestiniens eux-mêmes, à sa
libération, à son autodétermination et en finir avec le slogan
de la représentativité légitime et unique. La question
palestinienne doit de nouveau être la question centrale dans les
coulisses de la Ligue arabe et pour chacun des régimes, tout
comme elle doit l’être pour tout mouvement politique dans tout
pays arabe. La relation avec l’entité sioniste doit revenir à la
non reconnaissance de sa légitimité, et en faire une relation de
guerre ou d’état de guerre et non une relation de paix ou de
marche vers la paix.
Pour les partis et les mouvements dans les pays arabes, la
question palestinienne doit se retrouver à la pointe de leur
programme interne et devenir leur première cause. Il ne s’agit
pas d’une relation de soutien, mais une relation spécifique et
directe, comme pour les Palestiniens eux-mêmes.
Poser les choses de cette manière et à ce niveau est la seule
manière susceptible d’introduire un profond changement dans le
rapport de force, comme c’est la seule manière de fonder un
ordre arabe ayant sa dignité et son indépendance, qui le ramène
à la solidarité, l’entraide, la complémentarité dans le cadre
d’un projet unitaire général. C’est la seule manière susceptible
de doter les mouvements arabes du changement d’un caractère
unitaire, révolutionnaire, basé sur les principes et qui se
traduit par l’unité de la nation dans un projet concret.
C’est pour cela que proposer la solution d’un seul Etat devance
la situation générale qui fait partie des mêmes climats générés
par le processus de règlement et la recherche de solutions,
alors qu’il faut percer ce cocon qui s’appelle « solution
politique de la question ».
Certains peuvent penser que le retour à la suprématie de
l’équation de l’affrontement-lutte sous ses différentes formes,
contre le projet impérialo-sioniste en Palestine, n’est qu’une
forme d’extrémisme et d’irréalisme alors qu’en réalité, il n’est
qu’une réponse à l’affrontement par le pareil. Mener la guerre
pour s’emparer de la Palestine a été le fait de la
Grande-Bretagne et du projet sioniste, et cela se poursuit
jusqu’à présent, et a été intensifié dans le cadre du processus
de règlement, comme nous l’avons vu plus haut. Sinon, comment la
colonisation et la judaïsation dans al-Qods, la Cisjordanie et
les régions de 48 sont-elles arrivées à ce stade ? Comment
expliquer leur poursuite et leur accentuation au point que ceux
qui accourent vers le règlement et les négociateurs en Palestine
ont déclaré que les choses sont arrivées à une impasse et que la
« solution des deux Etats » n’est plus possible ?
Ce que propose ce document est une stratégie de lutte : la
résistance, le boycott, la mobilisation des forces, au niveau
palestinien, arabe, islamique, mondial pour affronter une guerre
dont les buts sont la judaïsation de toute la Palestine, c’est
une guerre dévoilée parfois et cachée d’autres fois par le
processus du règlement, dont les piliers sont les gouvernements
occidentaux et notamment les administrations américaines,
l’armée sioniste et les appareils sécuritaires qui en dépendent.
Si nous allons vers la confrontation, nous sommes en état de
défense et nous ne tombons pas d’un parachute sur une réalité
par simple désir volontariste. Les raisons objectives et
subjectives israélo-américano-occidentales qui ont entraîné la
chute de « la solution des deux Etats » et, précédemment, la
solution d’un seul Etat sont les mêmes qui font de la solution
actuelle « d’un seul Etat » une autre grande illusion.
Certains parmi ceux qui défendent la solution d’un seul Etat
prétendent que nous devons présenter une solution raisonnable et
acceptée par l’opinion publique internationale, tout comme l’ont
proclamé ceux qui défendent l’idée de deux Etats. Mais qui nous
dit que nous devons présenter une solution, alors que nous
vivons dans l’exil, sous occupation ou victime du racisme de
l’Etat de l’entité sioniste, alors qu’il nous est demandé de
reconnaître que l’Etat d’Israël est juif dans le sens qu’il est
uniquement pour les Juifs, ou alors qu’il nous faudrait
proclamer être exemptés du racisme ou de l’antisémitisme ? Ceci
est non seulement ridicule et attristant mais représente une
situation à l’envers.
La question qui se pose est de savoir pourquoi devons-nous
prouver notre innocence vis-à-vis du racisme ou de
l’antisémitisme, et comment acceptons-nous d’être accusés, alors
que notre histoire en Palestine, dans les pays arabes et
musulmans en témoigne. Plus, comment acceptons-nous d’être
accusés alors que nous avons été chassés de notre pays, qu’il
nous a été pris, qu’il est en train d’être judaïsé et que cela
est en train d’être entériné et même légitimé ? Alors que nous
vivons une oppression raciste et un génocide et que des crimes
de guerre sont commis à notre encontre ?
Cette demande est un complot contre nous comme il fut un complot
contre le Fateh et l’OLP. L’expérience a été dite à haute voix
et il a été prouvé qu’y répondre conduit aux résultats
contraires, tout comme l’a prouvé l’expérience par l’adoption du
slogan Etat démocratique puis les dix points, puis la
proclamation de l’indépendance puis l’accord d’Oslo, pour
arriver à la proclamation de l’initiative arabe de la paix qui a
consisté à proclamer une innocence arabe globale.
Tout ceci a consisté à faire des concessions les unes après les
autres, non seulement vaines, mais ayant des conséquences
contraires sur l’avenir de la question palestinienne.
En résumé, nous ne sommes pas obligés de proclamer notre
innocence envers quiconque, ni de présenter des excuses à
quiconque, et nous ne voulons pas une sympathie envers notre
cause en contrepartie d’un prix à payer du crédit de cette
justice. Nous sommes à présent incapables de présenter une
solution car il n’y en a pas, celle-ci se trouve chez ceux qui
dominent la terre, qui imposent une situation juive et sioniste
et elle se trouve chez ceux qui peuvent faire pression sur eux
et qui ne le font pas, en couvrant leurs actes et en les
soutenant. Elle se trouve chez ceux qui possèdent des bombes
atomiques, des armées puissantes et des avions plus nombreux que
les nuages des cieux, ainsi que des fortunes et des capacités
économiques innombrables.
Tout ce que nous pouvons faire, c’est nous protéger et protéger
nos pays, nos droits et nos constantes, en demeurant fermes face
à notre expulsion
du pays, en empêchant la liquidation de la cause par
l’installation définitive dans les pays hôtes. Nous n’avons que
la confrontation, génération après génération, jusqu’à être
capables de proposer des solutions. Chaque chose en son temps,
la question sera placée entre les mains de ceux qui viennent
après nous, et qui porteront le mieux de ce qui se trouve dans
notre histoire et notre civilisation.
Mais aujourd’hui, il ne sert à rien de leur permettre de nous
arracher des concessions, celles-ci ne peuvent que se retourner
contre nous, comme le montre l’expérience palestinienne, mais
aussi l’occidentale.
Au final, quelques remarques et conclusions :
Premièrement : le projet de « deux Etats » sur lequel s’appuie
le règlement actuel, est un projet de liquidation de la question
palestinienne car il reconnaît l’Etat juif sur les terres
spoliées et d’où furent expulsés les réfugiés en 1948. Cela a
d’ailleurs constitué la base de la question palestinienne : la
spoliation de la terre en 1948 et l’expulsion des deux tiers du
peuple palestinien. La solution des deux Etats entérine la
spoliation et abandonne nécessairement le droit au retour, sinon
il n’y aurait pas eu de processus de règlement et il n’y aurait
pas eu de solution « de deux Etats ». Il s’agit d’un plan
liquidateur par excellence de la cause palestinienne.
De plus, cette solution a été dépassée par l’annexion aux terres
occupées en 48, qui représentent 78% de la terre de la
Palestine, ce qui se discute à propos de l’échange de
territoires d’al-Qods et de la Cisjordanie. C’est pourquoi la
délimitation des territoires sur lesquels sera fondé l’Etat
palestinien dans les frontières d’avant juin 1967 est associée
avec « l’échange de territoires ». Cette dernière mention est
pleinement adoptée par le négociateur palestinien, avec toute la
fierté et la détermination exigées. Cela est devenue une des
conditions des négociations supervisées par l’administration de
Barak Obama.
L’échange de territoires va inclure les territoires annexés par
le mur et ceux spoliés par les colonies, ainsi que la ville
d’al-Qods intra et extra-muros jusqu’aux limites de Ramallah,
Bethlehem, Ariha et la vallée du Jourdain. Il ne reste ainsi de
la Cisjordanie que des ilôts pour installer l’Etat promis, et ce
dernier n’aura ni souveraineté sur ses frontières, ni sur son
espace aérien, ni sur son territoire ni sur son Etat, il devra
passer par l’entité sioniste qui l’encerclera de tous côtés et
dominera son espace aérien et tout ce qui s’y déroule. C’est ce
que signifie garantir « la sécurité d’Israël ».
Cette figure n’a pas encore été délimitée puisque l’expansion et
la judaïsation d’al-Qods se poursuivent, ce qui a mis la
solution des deux Etats dans une impasse, ce que tous
reconnaissent.
Deuxièmement : qui peut garantir que les
Etats-Unis et l’Occident, après avoir exercé les pressions
nécessaires sur ceux qui, parmi les Palestiniens et les Arabes,
accepteraient les miettes qui deviendront « l’Etat
palestinien », n’agiraient pas pour considérer qu’il s’agit de
l’Etat et le reconnaîtraient ? Nous obtenons ainsi la « solution
des deux Etats ». C’est ce qui nous explique pourquoi le
principe de l’échange des territoires accompagne le slogan de
« l’Etat palestinien dans les frontières de 1967 », et c’est ce
qui nous explique pourquoi le slogan de la solution des deux
Etats est maintenu et que les efforts se poursuivent sur le
chemin du règlement pour y parvenir, sans tenir compte ni de la
superficie ni de la nature qu’il aura. La solution des deux
Etats ne sera pas écartée des discussions, du point de vue des
Etats-Unis et ceux qui s’alignent sur leurs positions, tout
comme elle ne sera pas écartée tant qu’il y a des gens comme
Salam Fayyad qui a proposé le projet de proclamer l’Etat sur
toute terre qu’il possède, dans le cadre du maintien de
l’occupation et la poursuite de la colonisation. Son projet de
construire les institutions de l’Etat en deux ans ne dépend pas
de la fin de l’occupation ou des conditions relatives au
territoire et la nature de l’Etat, mais il l’a rattaché
seulement à la construction des institutions, afin de pouvoir
proclamer l’Etat d’ici deux ans, dépassant même son partenaire
dans l’Autorité, Mahmoud Abbas, qui l’a nommé et entériné comme
premier ministre.
Troisièmement : Il est possible de dire que la solution des deux
Etats, sur la base de la résolution 242 a été totalement
écartée, mais le projet de cette solution, avec les conditions
qu’accepteraient les dirigeants de l’entité sioniste, du
gouvernement de Netanyahu, sera maintenu prêt à être exécuté,
alors que ce n’est pas le cas pour la solution d’un seul Etat,
sauf pour être utilisé en tant que slogan à l’adresse de
l’opinion publique ou pour se disculper de l’accusation
« d’extrémisme » ou d’antisémitisme, ou selon les termes du
regretté Edward Saïd, à cause de la nécessité pour le peuple
palestinien de présenter un projet humaniste qui serait
l’alternative au projet sioniste raciste (une fois encore, il
nous est demandé de prouver que nous sommes « humanistes » et
non « racistes », nous qui avons été chassés par la force de nos
terres, de nos maisons, de nos villages et nos villes, et qui
sommes les victimes de toutes formes de racisme et
d’extermination collective, de crimes de guerre et de nettoyage
ethnique).
Le problème ici n’est pas d’avoir une « solution humaniste »,
cela a été prouvé dans notre histoire avant que les
contemporains ne parlent de « solution humaniste ». Le problème
réside dans ce qu’inclut la proclamation de cette proposition,
une concession gratuite faite par un peuple dont la patrie a été
spoliée, et sans qu’en contrepartie il y ait reconnaissance
semblable. Au contraire, la reconnaissance palestinienne sera
considérée comme une confirmation du droit et une légitimité
d’expulser illégalement un peuple et de s’installer à sa place,
grâce à la guerre menée par l’impérialisme britannique. Par la
suite, ce serait cet Etat qui voudrait bien faire des
concessions pour reconnaître le droit du peuple palestinien à
instaurer son propre Etat, il lui définirait ses conditions,
puis il ferait la concesssion d’accepter que le peuple
palestinien vive avec lui dans un seul Etat.
Le problème ne réside pas dans le fait de proposer une
« solution humaniste » mais plutôt dans les conditions de la
situation palestinienne et des conséquences négatives d’une
telle proposition, comme cela a eu lieu depuis que le mouvement
Fateh, puis l’OLP, ont été entraînés à présenter un projet pour
une « solution humaniste », avant d’arriver à la situation
présente. Après que tout le droit palestinien ait été entre nos
mains, nous l’avons progressivement perdu jusqu’à accepter la
solution des deux Etats, dont 22% pour les Palestiniens.
Certains ont alors recouru à la solution d’un seul Etat, après
que l’Etat hébreu ait obtenu la plus large reconnaissance
internationale et que la libération de toute la Palestine et le
droit de retour aient été complètement abandonnés.
Quatrièmement : l’expérience concrète a prouvé, tout au long du
conflit avec le projet sioniste, qu’aucune solution n’a été
possible, malgré toutes les formes iniques portées par les
projets de solutions et les résolutions internationales à
l’encontre du droit du peuple palestinien et des constantes de
la question palestinienne.
L’expérience a prouvé que les projets de solution, notamment les
négociations basées sur l’accord d’Oslo et plus graves encore,
les ententes de la conférence d’Annapolis et les négociations
directes et leur poursuite avec Obama – Mitchell, n’ont été
qu’une couverture pour intensifier la colonisation et la
judaïsation, le grignotage des terres et l’expulsion d’un nombre
supplémentaire de Palestiniens.
La loi qui gouverne la question palestinienne et qui est imposée
par les stratégies impérialistes occidentales et le projet
sioniste s’appuie sur la confrontation basée sur la force
militaire, la guerre et l’expansion, tout comme elle s’appuie
sur la soumission autant que possible des gouvernements de la
dislocation arabe et la mainmise sur leur politique, et les
solutions et les processus de règlement proposés ne sont là que
pour servir cette confrontation.
C’est pourquoi il n’y a aucune voie sinon d’affronter cette
confrontation, l’empêcher de continuer à
réaliser le projet sioniste, c’est-à-dire par des
stratégies de confrontation palestinienne, arabe, islamique et
internationale (les libres dans le monde), qui adoptent la
résistance et la mobilisation des sociétés et Etats pour
affronter la guerre et suivre des politiques de boycott et
d’objection, en s’écartant de l’illusion des solutions
politiques, ce qui a été suffisamment expérimenté.
Pour qu’il y ait une stratégie de confrontation sur un terrain
solide, il est nécessaire de revenir aux constantes de la
question palestinienne, en considérant que tous les changements
introduits par le mandat britannique et par la suite, la
résolution du partage et la création de l’Etat de l’entité
sioniste, ont été instaurées sur une violation flagrante du
droit international ; elles sont illégales et ne doivent pas
être reconnues, ni se porter volontaire pour faire des
concessions (y compris de participer à ce qui s’appelle solution
pacifique ou solution humaniste), qui entraîne la perte des
droits et affaiblit les constantes, anesthésie les positions sur
les plans palestinien, arabe, islamique ou mondial, d’une part,
et encourage les stratégies internationales à faire passer le
projet sioniste dans son ensemble en Palestine.
Cinquièmement : montrer à soi-même (Palestiniens et arabes), et
aux Etats et peuples du monde la véritable expérience historique
palestinienne, y compris ce qui s’appelle le processus politique
ou les solutions pacifiques ou même la possibilité qu’il y ait
une solution, permet à chaque partie d’ordonner ses cartes à
partir de ces bases véritables.
Cette confrontation n’apporte rien de nouveau aux gouvernements
occidentaux, et notamment à l’administration américaine et le
gouvernement sioniste, car la solution sioniste imposée
concrètement par la confrontation (essentiellement militaire)
est déjà la stratégie adoptée par ces gouvernements, mais ce qui
est nouveau, c’est
de ne plus autoriser son camouflage par des solutions
pacifiques, et ce qui peut en découler au niveau des positions
officielles et populaires.
Le face-à-face de cette réalité au niveau palestinien, arabe,
islamique et mondial peut mettre fin aux stratégies qui
s’appuient sur les Etats-Unis et aux solutions pacifiques, et
empêcher d’entériner les concessions déjà faites. Il sera alors
nécessaire de clarifier les choses en mettant les points sur les
i, et de retourner au boycott et à l’objection, et refuser de
poignarder la résistance dans le dos.
Munir Shafiq,
Ecrivain et penseur – Jordanie.
(1)
L’auteur de cet article a participé à l’adoption de ce projet et
l’a défendu, puis fut convaincu après l’adoption du projet en
dix points que le fait de proposer des solutions de la part du
peuple palestinien consiste à faire des concessions gratuites et
inutiles.
(2) le
terme « mughalaba » signifie ici assurer la suprématie militaire
complète de l’entité sioniste, et couvrir ses guerres et son
expansion comme la couverture de sa colonisation, de la
violation de la terre, et de la judaïsation de la Palestine, en
expulsant les Palestiniens et les installant définitivement
ailleurs.
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