Escalade militaire : Phase II de
la guerre en Libye Michel Chossudovsky
Mercredi 15 juin
2011
Une nouvelle phase de la guerre se met
en branle, conduisant à un processus
d’escalade militaire ainsi qu’au
débarquement de commandos de l’OTAN et
des États-Unis sur les côtes libyenne. Un déploiement sans précédent de
puissance navale est en cours dans la
Méditerranée. Le 1er juin, les États
membres de l’Alliance nord-atlantique
(OTAN) ont décidé au cours d’une
rencontre à Bruxelles de « renouveler la
mission », c'est-à-dire poursuivre la
guerre contre la Lybie « pour un autre
90 jours, jusqu’à la fin septembre ». Depuis le début de la guerre le 19 mars,
plus de 10 000 sorties ont été menées.
L’OTAN reconnaît un total de 9036
sorties, incluant 3443 sorties de
frappes sur une période de deux mois, du
31 mars au 31 mai.
Les opérations militaires ne sont plus
limitées aux campagnes de bombardements
à haute altitude, dans lesquelles les
cibles de frappes sont
« pré-approuvées » et planifiées à
l’avance. Le déploiement d’hélicoptères
et d’opérations aériennes à basse
altitude est envisagé. Ces dernières
pour supporter le déploiement de
commandos de l’OTAN et des forces
rebelles au sol.
Ce qui se dessine est une escalade des
opérations militaires, qui mène
simultanément à une guerre prolongée.
Le super-porte-avion USS George HW Bush,
le navire le plus avancé dans l’arsenal
naval américain, accompagné de son
groupe d’assaut, est entré dans la
Méditerranée pour se joindre à la
Sixième flotte à Naples.
Le USS George HW Bush (CVN77) est le
plus gros navire au monde : avec « 4,5
acres d’espace sur sa piste d’aviation,
le rendant capable d’accueillir 90 jets
et hélicoptères. Il héberge un équipage
de 5500 personnes ». Équipé avec des
systèmes guerriers électroniques
sophistiqués, il est la plus grande
« base militaire mobile » au monde.
(Manlio Dinucci,
Sarkozy et Cameron préparent le
débarquement en Libye,
Mondialisation.ca, le 28 mai 2011).
Le USS George HW Bush et son groupe ont
été envoyés en « voyage de noce » jusqu’à
la zone d’opérations de la Sixième
flotte, c'est-à-dire la Méditerranée Il
a été « certifié prêt aux opérations de
combat » un mois avant le début de la
guerre contre la Lybie ( USS
George H.W. Bush Strike Group Certified
Combat Ready, 21 février
2011).
Réduire l’ennemi à la soumission totale
« La liberté en marche » (Freedom at
Work) est le « logo humanitaire » du USS
George HW Bush.
La taille du super-porte-avion, ses
systèmes d’armement avancés, ses
capacités destructives, sans mentionner
son coût, son l’expression même des
folles ambitions impériales américaines.
Selon la doctrine « choc et stupeur »,
le USS George HW Bush est destiné à
soumettre l’ennemi à la totale
domination.
Escalade militaire
Depuis le début de la guerre le 19 mars,
plus de 10 000 sorties ont été menées.
L’OTAN reconnaît un total de 9036
sorties, incluant 3443 sorties de
frappes sur une période de deux mois, du
31 mars au 31 mai.
Les opérations militaires ne sont plus
limitées aux campagnes de bombardements
à haute altitude, dans lesquelles les
cibles de frappes sont
« pré-approuvées » et planifiées à
l’avance. Le déploiement d’hélicoptères
et d’opérations aériennes à basse
altitude est envisagé. Ces dernières
pour supporter le déploiement de
commandos de l’OTAN et des forces
rebelles au sol.
Avec le déploiement du USS George HW
Bush et de son groupe, de pair avec les
navires de guerre des autres pays
alliés, une nouvelle étape de la guerre
s’amorce.
Les opérations militaires ne sont plus
limitées aux campagnes de bombardements
à haute altitude, dans lesquelles les
cibles de frappes sont
« pré-approuvées » et planifiées à
l’avance. Le déploiement d’hélicoptères
et d’opérations aériennes à basse
altitude est envisagé. Ces dernières
pour supporter le déploiement de
commandos de l’OTAN et des forces
rebelles au sol.
Le navire britannique HMS Ocean, déployé
à partir de Chypre, est équipé comme
porte-hélicoptères, pour des
hélicoptères Apache.
Les Apaches seraient déployées à partir
du HMS Ocean, le plus gros navire de
guerre britannique. À la mi-mai, des
exercices en mer ont été tenus au large
de Chypre, impliquant des bateaux de
guerre britanniques et néerlandais, avec
le HMS Ocean jouant un rôle central
comme porte-hélicoptère. « L’exercice
incluait des répétitions de défense
anti-aérienne et du tir à munitions
réelles en mer, avec des exercices
amphibies en zone côtière. »
En échange, la France a confirmé qu’elle
déploierait ses hélicoptères d’attaque
Tigres.
Nous pouvons ainsi nous attendre à un
changement majeur dans la nature des
opérations militaires au cours des
semaines à venir, à l’envoi de commandos
en appui à des opérations terrestres,
avec des hélicoptères et des
déploiements aériens à basse altitude
jouant un rôle important. (Ces vols à
basse altitude ne seraient pas limités
aux drones Predators).
La nature des opérations aériennes
deviendra, par conséquent, plus ciblée.
L’objectif avoué est « emmener la
campagne aérienne au sol ». Le
super-porte-avion USS George HW Bush et
son groupe de combat joueront un rôle
clé dans l’implantation de la prochaine
phase de la guerre.
Video: « USS H. W. Bush (CVN77) together
with its Carrier Strike Group 2
» (Source US Navy)
Simuler le théâtre de guerre
méditerranéen : « Saxon Warrior »
Dans les semaines précédent son « voyage
de noces » en Méditerranée, le USS
George HW Bush, avec son groupe de
combat, a pris part à un grand jeu de
simulation de guerre au large de la côte
de Cornwall, au Royaume-Uni, sous les
auspices de la Royal Navy, du 19 au 26
mai.
Nommé « Exercice
Saxon Warrior », cette simulation s’est
tenue dans un environnement maritime,
avec la participation de navires de
guerre britanniques, américains,
français, allemands, suédois et
espagnols. En tout, l’exercice
impliquait la participation de 26 unités
navales ( EGFE
Movements » Exercise Saxon Warrior).
Il est significatif que « Saxon Warrior »
soit une des plus grande simulation de
guerre tenues par la Royal Navy, en lien
étroit avec la marine américaine, l’OTAN
et le Pentagone.
« (Ils sont) destinés à améliorer les
habiletés du groupe d’assaut du
porte-avion Bush…pour qu’il puisse
fonctionner rondement avec les forces
européenes pendant son déploiement [dans
la Méditerranée contre la Lybie (M.C.)].
Le groupe d’assaut du George HW Bush est
bien préparé pour ce déploiement », a
dit le vice-amiral Nora Tyson,
commandant du groupe, et première femme
à diriger le groupe d’un porte-avion
américain.
« Nous sommes très heureux d’être
participants à Saxon Warrior. (Cet
exercice) procure une opportunité pour
tous les navires dans le groupe pour
améliorer notre capacité à opérer sans
heurt et efficacement avec les autres
unités de l’OTAN. » (( George
Bush bound for Portsmouth after war
games with Royal Navy
navynews.co.uk )
Les exercices de simulation sont
directement reliés à la « vraie
guerre ». Saxon Warrior simulait tant la
structure de commandement multinationale
que la configuration de la guerre
dirigée par l’OTAN dans la Méditerranée
en terme de déploiement naval, aérien et
d’hélicoptères, ainsi que les possible
opérations de forces au sol. Les 5500
marins à bord du USS George HW Bush sont
destinés à être utilisés en cas de
débarquement de commandos en territoire
ennemi.
« [Saxon Warrior est] un exercice conçu
pour développer des habilités de combat
spécifique à un théâtre d’opérations
ainsi qu’à améliorer la coopération à
plusieurs niveaux entre des forces et
agences gouvernementales de plusieurs
pays. (…) Saxon Warrior présente une
myriade de défis à la force
multi-nationale et multi-plateforme en
créant un environnement de guerre
diversifié et imprévisible basé sur des
scénarios géo-politiques et militaires
fictifs. » (George H.W. Bush
Strike Group Participates in Saxon
Warrior, http://www.navy.mil/search/display.asp?storyid=60543,
emphasis added)
Bien que l’exercice ait eu lieu sous la
direction de la marine britannique, des
exercices de vols à basse altitude
d’avions et hélicoptères ont aussi été
entreprises dans le Sud-Ouest de
l’Angleterre et une partie du Pays de
Galles, simulant les conditions d’un
pays ennemi fictif. L’attention portée
aux opérations d’hélicoptères et de
missions aériennes à basse altitude est
entièrement conséquente avec la
prochaine étape de la guerre contre la
Lybie, tel qu’expliquée plus haut.
Le jeu de guerre « Saxon Warrior » est
vu par l’appareil militaire américain
comme procurant « une opportunité, comme
force déployée, d’intégrer des
partenaires de la coalition dans notre
structure de commandement et cela se
produit pour la première fois. »
(Capt. Patrick. O. Shea, USS Gettysburg
commanding officer, .Military
News: Gettysburg Participates in Saxon
Warrior,
le 24 mai 2011)
Si la Royal Navy coordonnait le jeu de
guerre, la force navale américaine, en
terme de deployment militaire et de
« structure de commandement fictive »,
était de loin le joueur clé.
L’exercice de huit jours impliquant des
scénarios de mission unique « englobant
des combats sous-marins, aériens et de
surface ». Le 26 mai, la dernière
journée a culminé avec « une guerre
simulée » dans un environnement
maritime.
Alors que Saxon Warrior était basé sur
des scénarios géopolitiques et
militaires « fictifs », les
participants, eux, savaient fort bien
qu’ils s’entraînaient pour la guerre
contre la Lybie.
« Nous nous
entraînons dans une opération en
déploiement, pour améliorer notre
préparation au cas où nous
devenions impliqués dans une opération
dans la vraie vie. »
(Ibid, emphase ajoutée)
« Saxon Warrior
nous donne un environnement
plein de défis dans lequel utiliser nos
habiletés guerrières ».
« Nous devons
penser rapidement hors des chemins
battus. Le plus agiles nous sommes,
le plus préparés
nous serons pour toute mission qui
surgit pendant le déploiement.
C’est la beauté de Saxon Warrior. »
« La beauté
d’opérer avec des partenaires de
coalition est que nous pratiquons avec
eux, apprenons leur forces et ensuite
incorporons ces
forces les unes aux autres pour créer la
meilleure force de coalition possible. »
George H.W. Bush Strike Group
participates in Saxon Warrior 11 .norfolknavyflagship.com,
26 mai, 2011, emphase ajoutée).
L’axe militaire anglo-américain
Ces jeux de guerre font partie du cadre
d’une coopération militaire avancée
entre Londres et Washington, impliquant
l’intégration de facto des structures de
commandement britanniques et
américaines. Les jeux de guerre ont été
prévus pour coincider avec la visite
officielle du président Barack Obama au
Royaume-Uni, soulignée comme une
« relation spéciale » entre les
États-Unis et le Royaume-Uni.
Significativement, les rencontres de
haut niveau entre le président Barack
Obama et le premier ministre David
Cameron ont mené à l’établissement d’un
conseil conjoint de sécurité nationale,
avec le mandat de coordonner la prise de
décisions militaires ainsi que la
politique étrangère. Dirigé par les
conseillers à la sécurité nationale
américains et britanniques, ce conseil
vise à consolider encore d’avantage
l’axe militaire anglo-américain.
La prochaine phase de la guerre contre
la Lybie
Ce qui s’annonce est une escalade des
opérations militaires, qui mène
simultanément à une guerre prolongée.
Ce changement dans la direction des
opérations militaires vers un support de
l’aviation et des hélicoptères aux
commandos au sol ne mènera pas
nécessairement à une invasion en bonne
et due forme, du moins pour le futur
proche.
Le USS HW Bush et son groupe de combat
joueront un rôle clé dans le support aux
opérations au sol grâce aux sorties des
avions et hélicoptères.
« Le porte-avion George HW Bush est
flanqué d’un groupe de combat consistant
des destroyers à missiles guidés Truxtun
et Mitscher, des croiseurs à missiles
Gettysburg et Anzio et de huit escadrons
d’avions. Il va renforcer la Sixième
flotte, dont le commandement est à
Naples, aux côtés d’autres unités,
incluant les sous-marins nucléaires
Providence, Florida et Scranton. Aussi
ajouté à la Sixième flotte est une des
groupe d’attaque amphibie les plus
puissants, dirigé par le USS Bataan, qui
à lui seul peut débarquer plus de 2000
marines, équipés avec des hélicoptères
et des avions à décollage vertical, de
l’artillerie et des tanks. Il est
flanqué de deux autres vaisseaux
d’attaque amphibie, le Mesa Verde et le
Whidbey Island, qui du 13 au 18 mai ont
visité Taranto en Italie. Le Whidbey
Island possède quatre gigantesque
véhicule de débarquement à coussin
gonflable qui, dans un rayon de 300
miles, peut emmener 200 hommes à la fois
très rapidement sur la côte d’un pays
sans être visible de la terre ferme. »
(Manlio Dinucci,
Sarkozy et Cameron
préparent le débarquement en Libye,
Mondialisation.ca, le 28 mai 2011).
Les forces spéciales ont été sur le sol
libyen dès l’aube de la campagne
aérienne. Les forces de mercenaires sous
contrat avec l’OTAN sont aussi
déployées.
(Voir
Manlio Dinucci, Naissance aux
Emirats de l’armée secrète pour le Moyen
Orient et l’Afrique,
Mondialisation.ca, le 18 mai 2011).
Choc et stupeur
Dans le cadre de la stratégie “choc et
stupeur”, les bombes anti-bunker BLU-109
de 2000 livres doivent être larguées sur
la Lybie en utilisant des chasseurs
Tornado de la Royal Air Force
britannique. « Choc et stupeur » fait
partie de la doctrine de « dominance
rapide » ou « force décisive », utilisée
pour intimider l’adversaire jusqu’à la
soumission, ainsi qu’à terrifier la
population civile.
Armes nucléaires contre la Lybie
Il vaut la peine de noter que l’usage
d’armes nucléaires tactiques contre la
Lybie a été envisagé dans le cadre de la
« guerre humanitaire ». En 1996, la
Lybie était le pays choisi dans le
Moyen-Orient et l’Afrique du Nord pour
être la cible d’une arme nucléaire
tactique B61-11, une bombe perceuse de
bunker équipée d’une ogive nucléaire.
Le plan pour nucléariser la Lybie n’a
jamais été effacé. Peu après le début de
la campagne de bombardement le 19 mars,
le Pentagone a ordonné des tests de
fonctionnalité de la bombe nucléaire
B61-11. Ces tests ont été conduits en
utilisant les même bombardiers furtifs
B2, de la même base militaire au
Missouri, qui a été utilisée pour
coordonner les raids des B2 sur la Lybie
au début de la guerre le 19 mars (Voir
Michel Chossudovsky,Dangerous
Crossroads: Is America Considering the
Use of Nuclear Weapons against Libya?Global
Research, 7 avril 2011).
Tous ces développements pointent vers un
dangereux processus d’escalade
militaire, qui pourrait potentiellement
s’étendre au-delà des frontières
libyennes. Les implications économiques
et géo-stratégiques de cette guerre vont
beaucoup plus loin.
Les avis reproduits dans les textes
contenus sur le site n'engagent que leurs auteurs.
Si un passage hors la loi à échappé à la vigilance
du webmaster merci de le lui signaler.
webmaster@palestine-solidarite.org