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Les Marocains dans la rue
Manifestations importantes dans les villes du Royaume
Merzak Tigrine
Lundi 21 février 2011
Des milliers de
Marocains, vingt mille à Marrakech, quatorze mille à Rabat, près
de dix mille à Casablanca et Fès, selon les organisateurs, ont
exprimé, hier, en l’absence de toute répression, leurs
revendications consistant en des réformes politiques et une
limitation des pouvoirs du roi.
Répondant à
l’appel lancé par les groupes des “Jeunes du 20
février”, initiés dès le début du mois par le Mouvement
liberté et démocratie, maintenant sur le réseau social
Facebook, des milliers de Marocains ont exprimé, hier,
en toute liberté, dans la majeure partie des villes du
royaume, leurs revendications pour un “Maroc
démocratique”.
C’est à Marrakech que les manifestants étaient les plus
nombreux, où l’on comptait plus de vingt mille, selon
les organisateurs. À Rabat, quatorze mille manifestants
se sont dirigés vers le siège du Parlement, scandant des
mots d'ordre “Echaab yourid doustour djadid” et “Echaab
yourid taghyir”. En effet, le sit-in, organisé
initialement à la place Bab El Had, s'est transformé en
marche en direction du Parlement. Les manifestants
réclamaient “la démocratie, la justice”, “une limitation
du pouvoir du roi”, ainsi que “le départ du
gouvernement”, “une nouvelle Constitution” et “la fin de
la corruption”. À Casablanca, la capitale économique du
royaume, le nombre de manifestants ne cessait
d’augmenter. Il avoisinait les dix mille, selon les
organisateurs.
Ils exigent, comme seuil minimum de revendications, une
nouvelle Constitution, la dissolution du Parlement et
des partis qui ont contribué à “l’ancrage de la
prévarication”, la formation d’un gouvernement
provisoire, une justice indépendante, la fin de la
corruption, la libération de tous les détenus
politiques, du travail pour les Marocains et
l’augmentation du salaire minimum garanti. Contrairement
à hier, où les rassemblements, marches et manifestations
se sont déroulées dans le calme et sans répression, la
veille, vendredi soir, des manifestants avaient lancé
des pierres contre un commissariat de police et
endommagé une agence de distribution d'eau et
d'électricité à Tanger pour protester contre des tarifs
jugés excessifs. Un sit-in organisé par une branche
locale du groupe altermondialiste Attac a “dégénéré”, a
déclaré à l'AFP une source à la wilaya de Tanger,
précisant que cette association organisait de tels
rassemblements pratiquement chaque semaine. Les
manifestants ont jeté des pierres contre un commissariat
et un véhicule de la société Amendis, une filiale du
groupe français Veolia, chargée de la distribution d'eau
et d'électricité à Tanger, a-t-on indiqué de même
source. Une agence d'Amendis a aussi été la cible de
jets de pierres de la part des manifestants, a pour sa
part indiqué un habitant joint par téléphone.
La manifestation avait pour but de réclamer l'annulation
de la concession accordée à Amendis par les services
municipaux, l'organisation altermondialiste jugeant ses
tarifs excessifs. Pour en revenir aux manifestations
d’hier, les organisateurs ont demandé, lors d'une
conférence de presse, à ce que l'expression des
revendications soit respectée et que les attaques
personnelles à leur encontre cessent.
Tahani Madmad, étudiante de 19 ans, et l’une des
organisatrices du mouvement “des jeunes du 20 février”,
a énuméré à cette occasion les principales
revendications du mouvement. Première revendication,
l'élaboration et le vote d'une nouvelle Constitution.
Sans demander expressément une diminution des
prérogatives royales ou l'instauration d'une monarchie
parlementaire, Tahani Madmad explique que dans cette
Constitution, “chaque article doit correspondre au
principe démocratique”. Le mouvement appelle, par
ailleurs, à une dissolution du gouvernement, du
Parlement et à la mise en place d'un gouvernement
transitoire. Une justice indépendante, des procès pour
dilapidation de biens publics, la reconnaissance de
l'amazigh comme langue officielle au Maroc, la
libération des détenus politiques, l'intégration des
diplômés chômeurs dans la Fonction publique et
l'augmentation du SMIG, sont les autres
revendications-clés du mouvement.
Le mouvement, qui se structure d'ailleurs en dehors du
réseau Facebook et a mis en place différentes
commissions sur le contenu et les aspects pratiques de
l'organisation de la manifestation, a obtenu le soutien
de plusieurs associations des droits humains au Maroc.
En dehors des signataires de la déclaration commune,
d'autres associations soutiennent individuellement
l'appel à la manifestation, comme, par exemple, Attac
Maroc.
Certains partis politiques ont également lancé l'appel à
soutenir le mouvement ou à manifester le 20 février
prochain, comme le PSU et La Voix démocratique (Annahj
Addimocrati).
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Publié le 21 février 2011 avec l'aimable autorisation de
Liberté.
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