Qu'est-ce que philosopher? et Regards
sur le Proche et le Moyen Orient
L'Iran et la
nouvelle pesée de l'humain (suite)
Manuel de Diéguez
Manuel de
Diéguez
Dimanche 22 juillet
2012
"Interroger les
grands philosophes, c'est transformer
les questions qu'on leur pose en
instruments d'approfondissement de la
connaissance du genre humain."
Jaspers
Il est difficile de
rendre la géopolitique intelligible sans
descendre de plusieurs marches
au-dessous du rez-de-chaussée ; mais
comme la visite des caves prend beaucoup
de temps et allonge le récit, j'ai
imaginé de faciliter le voyage aux
lecteurs pressés. J'ai donc indiqué par
des écriteaux les séjours dans les
souterrains et les lieux de promenade au
grand jour.
1 - Un
anthropologue de la conditions animale.
Jean de la Fontaine
Au grand jour de
l'histoire
Une mise en parallèle
irréfléchie des piétés qui
caractérisent de naissance le
simianthrope et le chimpanzé
face à leurs gibiers respectifs
laisserait échapper l'objet même
d'un décryptage de l'évolution
cérébrale de notre espèce. Jean
de la Fontaine ne s'y est pas
trompé ; jamais le génie de ce
simianthropologue du XVIIe
siècle n'observe une autre
bestiole que nous-mêmes. Plus de
deux siècles avant Darwin, il a
mis en évidence la denture du
simianthrope et les crocs d'une
foule d'animaux imaginaires -
mais toujours à seule fin de
rendre plus aisément observables
et plus évidents les
comportements proprement
simiohumains qui mettent les
muscles et les mâchoires de
notre espèce en mouvement.
Passage par
les souterrains
Observez la spécificité
cérébrale et éthique
qu'affiche une espèce
demeurée semi animale,
mais en route vers le
regard sur elle-même
qui, au terme du chemin,
surprendra ses neurones.
Certes, un tel examen
n'est pas une entreprise
de tout repos: il ne
suffira pas de mettre
cul par-dessus tête les
interprétations pseudo
rationnelles - mais
fossilisées par la
tradition - de
l'évolutionnisme
darwinien. On sait que
les interprétations
théoriques de cette
Ecole se sont si peu
modernisées qu'elles
persistent à valoriser
les jugements que la
simiohumanité actuelle
porte sur elle-même, et
cela au point de perdre
de vue l'animal qui
tente de légitimer les
méthodes d'observation
de sa propre nature
auxquelles elle
s'exerce.
Et pourtant, l'étude de
la nudité et du mutisme
des catéchètes de
l'atome s'étend à tout
le champ de la
connaissance de Monsieur
le simianthrope
biblique, mais à la
condition qu'on veuille
bien le considérer dans
sa spécificité
religieuse, donc pour
autant qu'on observe
dans son devenir mental
spécifique l'étrange
théoricien de la foudre
céleste qu'il brandit
contre lui-même. Qu'en
est-il du dédoublement
cérébral qui caractérise
un animal dont le destin
se veut apocalyptique et
séraphique à ses propres
yeux? Vous me direz que
la dérobade, la
forfanterie, la
gesticulation,
l'esbroufe sont communes
à tous les théologiens
des idéalités
gesticulatoires que
manie la démocratie
nucléarisée; mais
d'autres carnassiers
répondent également à ce
modèle de la pantomime
politique, d'autres
bêtes recourent
"pieusement" à des
simulacres et à des
faux-fuyants de
guerriers et de
chasseurs, d'autres
animaux confondent
sincèrement leurs proies
avec leurs dévotions!
2 - Le compteur
Geiger de "Dieu"
Au grand jour de
l'histoire
Prenons
l'exemple paradigmatique des
feintes négociations
diplomatiques auxquelles se
livrent les éléphants de la
démocratie atomique et qui
semblent appeler leur future
victime à fuir l'assassinat dont
ils la menacent pourtant. Nous
avons observé (L'anthropologie
de la folie et la science
politique,
8 juillet
2012)
qu'il s'agit de faire plier
l'Iran sous un habillage
évangélico-politique
autosanctifié à son de trompe.
La meilleure illustration de ces
barrissements en est celle que
le radiographe des animaux en a
fournie dans la fable intitulée
Les animaux malades de la
peste: le péril imminent
que l'arme nucléaire est censée
faire courir à tous les
quadrupèdes de l'univers n'est
pas celui dont le lion lui-même
encourrait la responsabilité
auto-sacrificielle , mais
seulement la menace d'un
holocauste généralisé que
présenterait pour tout le monde
un animal beaucoup plus petit et
qu'il convient d'exposer sur
l'autel du suicide universel,
parce qu'il sera plus facile à
immoler au dieu Atome - ses
crocs et ses griffes minuscules
placeraient le genre simiohumain
tout entier sous l'épée de
Damoclès d'une apocalypse
planétaire.
La Fontaine nous démontre au
burin de sa plume qu'en toute
justice terrestre ou religieuse,
"la raison du plus fort est
toujours la meilleure", que
le droit temporel ou divin obéit
en tous lieux à la bête la plus
musclée au ciel ou sur nos
arpents et que, de tous temps, "selon
que vous serez puissant ou
misérable, la justice de cour
vous rendra blanc ou noir".
Mais le simianthrope des nues et
le simianthrope des champs
ressemblent au rat des villes et
au rat des champs du fabuliste
en ce qu'ils prennent garde de
ne pas se tromper de lions - car
il se trouve que les lions
nucléaires se sont logés dans la
plus haute atmosphère et qu'à ce
titre, ils méritent une
considération particulière des
futurs narrateurs des aventures
de la religion de la Liberté
dans le vide du cosmos. Car le
carnassier suprême n'est autre
que le créateur du monde. Depuis
des siècles, ce despote de
l'immensité ne dispose-t-il pas
à sa guise d'un infini
tonitruant? Sa foudre n'est-elle
pas intersidérale et ses
châtiments d'autant plus saints
que les anges et les séraphins
glorifient leur sauvagerie et
leur fureur?
Passage par les
souterrains
Comment le simianthrope
de l'éternité se
rendrait-il
reconnaissable en son
animalité spécifique si
le fabuliste de
l'histoire théologique
du monde détournait son
regard de l'encrier du
créateur en personne et
comment le "Connais-toi"
du roi des animaux de
l'apocalypse aurait-il
encore un avenir
philosophique si le
sacrilège le plus
prometteur ne redevenait
celui de loger Caïn dans
la postérité démiurgique
de Voltaire? Car, au
plus profond de
l'inconscient religieux
des animaux malades de
la peste, l'âge de
l'atome impérial remet
en scène rien de moins
que le génocidaire
impérieux du Déluge et
le saint tortionnaire de
notre éternité infernale
sous la terre. C'est
cela qui place "Dieu" et
Téhéran au cœur de la
réflexion sur l'avenir
anthropologique de ce
couple maudit au sein de
l'humanisme luciférien
de demain. Car si le
simianthrope nucléarisé
s'est donné depuis belle
lurette une divinité
explosive à souhait et
si la bombe de
l'artificier suprême se
révèle vengeresse et
pateline, cruelle et
doucereuse, hypocrite et
retorse, comment
l'avenir d'un socratisme
redevenu abyssal se
cacherait-il ailleurs
que dans l'exploration
des pièges dont le ciel
simiohumain est peuplé?
Je vous convie à vous
promener dans l'Eden de
l'atome le compteur
Geiger du divin à la
main.
3 - La
simianthropologie fondamentale
Au grand jour de
l'histoire
Tout regard de l'extérieur sur
les offertoires du créateur
mythique du simianthrope et sur
les adorateurs des cosmologies
trucidatoires demeurera infirme
aussi longtemps que le fabuliste
des entrailles théologiques du
meurtre simiohumain se gardera
bien d'observer l'animalité
spécifique des propitiatoires
dont les trois principales
religions monothéistes
présentent des témoins cérébraux
et éthiques éloquemment
idéalisés et saintement
assassinés. Observons leur
boucherie partagée, donc leurs
crimes surdimensionnés et
subrepticement auto-glorifiés.
Car, à l'instar du lion
terrestre de La Fontaine, dont
l'innocence paisible résultait
de ce qu'il s'appelait lion, le
fauve du ciel des démocraties
nucléaires d'aujourd'hui promène
sa crinière et ses Saintes
Ecritures parmi les rôtissoires
de son apocalypse.
Jean de la Fontaine est déjà un
peintre sacrilège des relations
semi-animales que la politique
simiohumaine entretient avec le
trône céleste; mais il ne
l'était pas encore au sens où la
politologie moderne observe les
effigies théologiques de
l'histoire du cerveau
simiohumain, parce que sa plume
demeurait cantonnée au
territoire de l'observation
d'une espèce au sein de laquelle
l'homme et la bête étaient
censés avoir définitivement
séparé leurs armures et leurs
gènes. Aussi la crudité et la
vivacité du trait du poète ne
sont-elles encore qu'une pâle
introduction à la
simianthropologie fondamentale
du sacré, celle dont la
dramaturgie voudrait élever
Téhéran au rang du pelé et du
galeux de l'univers. La
théologie sacrificielle et
"séraphique" des démocraties
satisfactoires prépare les
précipités et les émulsions du
fabuleux et du sanglant
infernaux de demain.
Passage par les
souterrains
Observons de plus
près la
diversification
accélérée des
cervelles à laquelle
l'évolution
démultipliée de
notre espèce s'est
exercée depuis le
XVIIIe siècle. Une
difficulté nouvelle
en est résultée,
celle de fabriquer
une balance qui
pèserait le volume
crânien des
spécimens devenus
super performants
sur des lopins
microscopiques. La
connaissance
rationnelle s'est
mondialisée, mais
l'observation de la
boîte osseuse des
chimpanzés révèle
que leur masse
cérébrale répondait
déjà à un étiage et
à une
hiérarchisation
relativement
uniformisés et
constants de leurs
capacités
intellectuelles, et
cela en raison même
du caractère
embryonnaire et
tribal de leur
développement
mental. Les
spécimens de
quadrumanes à
fourrure dont le
regard se révélait
capable de prendre
un léger recul
politique à l'égard
de la horde, donc de
commencer de la
capter dans la
globalité de sa
gestuelle, étaient
également les
premiers esprits
dominateurs, parce
qu'aucun animal ne
saurait briguer le
rôle d'un chef
respecté, donc
craint sur ses
arpents sans
recourir à une
stratégie persuasive
de conquête du
pouvoir, ce qui
exige une perception
minimale de l'art de
convaincre et de
faire consentir la
collectivité à la
discipline qui lui
sera demandée.
Mais, dans leur
immense majorité,
les chimpanzés
qualifiables
d'"intelligents"
disposent seulement
d'une raison
mécanicienne et qui
n'exige aucune
perception du groupe
en tant que sujet de
conscience collectif
- donc maniable en
tant que tel: si
vous déposez des
bananes dans un
caisson dont
l'ouverture demande
un décodeur malin,
le chimpanzé
ingénieux en
découvrira
rapidement l'astuce
serrurière. Quelques
millions d'années
plus tard, le
simianthrope futé
dispose d'un
outillage immense,
donc insaisissable
dans sa totalité;
mais la raison
seulement pratique
qui distancie
l'homme des autres
animaux ne lui
permet nullement de
vaincre son
immersion native
dans son espèce et
de porter un regard
de haut et de loin
sur le genre
simiohumain. De nos
jours encore,
l'abîme demeure
infranchissable
entre l'intelligence
combinatoire du
mécanicien originel
et l'intelligence
panoramique dont
disposent désormais
quelques rares
spécimens de cette
espèce.
C'est à ce titre que
les premières idoles
ont été dotées d'un
regard politique
relativement
perçant, impérieux
et de nature à
inspirer la crainte
et la vénération;
mais leur œil est
toujours étroitement
calqué sur le globe
oculaire
hypertrophié d'un
simianthrope
imaginaire et
cérébralisé dans les
nues. "Dieu" est
omniscient,
omniprésent,
omnipotent, alors
que sa connaissance
permanente et
détaillée du passé,
du présent et de
l'avenir le réduit à
l'impuissance morale
et politique, parce
que l'intelligence
simiohumaine et sa
copie dans le sacré
se heurtent à des
contradictions
radicales:
impossible de se
faire obéir par cet
animal sans lui
inspirer en retour
de "saines
épouvantes " face à
la majesté de son
maître, impossible
de le châtier sans
recourir à la
sauvagerie des
justiciers
simiohumains. Bien
plus, le maître du
ciel est condamné à
caricaturer sa
propre créature,
puisque celle-ci
magnifie à l'extrême
sa sauvagerie et sa
cruauté naturelles à
les hypertrophier
dans le ciel - mais,
à ce titre, la
monstruosité même de
ce duo sanglant
devient un cadran
révélateur: au fur
et à mesure que le
simianthrope
découvre la sottise,
l'ignorance et la
barbarie de son lion
céleste, il découvre
également qu'une
vraie divinité se
"situerait" hors de
l'espace et du temps
furieux auxquels
nous demeurons
ligotés .
4 - Le cerveau
simiohumain et la politique
Au grand jour de
l'histoire
C'est pourquoi le spectacle de
la vassalisation cérébrale
accélérée des marionnettes de
l'Europe par un lion dont la
crinière et les griffes se
rendent de plus en plus
observables, ce spectacle,
dis-je, ne rencontre encore que
de rares témoins parmi les
encéphales pris dans les rets du
ciel contrefait de la démocratie
mondiale. L'immense majorité des
simianthropes d'aujourd'hui
n'ouvre pas encore un œil averti
sur le dieu massif dont les
crocs et les mâchoires se
cachent sous les simagrées de
ses idéalités séraphiques. Le
roi des animaux a fait crisser
sa denture jusqu'aux frontières
de la Russie; mais les malades
de la peste n'en savent pas
davantage que la masse du peuple
romain du premier siècle de
notre ère ne voyait les barbares
piétiner aux portes de l'empire.
Depuis deux millénaires, notre
espèce n'a nullement appris à
porter un regard sur la fatalité
politique qui conduisait Rome à
l'effondrement sous Tibère,
Claude et Néron. De même, les
quelques cerveaux qui se
réjouissent, ici ou là, de
l'échec militaire de
l'envahisseur de l' Afghanistan
et de l'Irak n'y voient qu'un
coup chanceux de la France: M.
Chirac serait un bimane plus
rusé que la majorité de ses
congénères; et si ce joueur
heureux a évité de justesse de
tomber dans un guêpier caché à
la vue de tout le monde, c'est
seulement parce que son flair
politique aurait permis à son
pif de passer au large du mufle
de l'histoire. Personne ne voit
qu'il s'agissait d'un coup
d'arrêt mûrement réfléchi à
l'expansion d'un empire aussi
ambitieux que celui de la
République romaine du temps des
guerres puniques.
5 - Les limites
de la physique mathématique
Passage par les
souterrains
Les deux types de boîtes
osseuses dont dispose le
simianthrope actuel et
dont l'un sert de
rechange à l'autre ont
été observés et
minutieusement décrits
par Platon dans le
Gorgias et le
Théétète, puis par
Descartes dans le
Discours de la méthode
de 1636, traduit en
français l'année
suivante, par Hume dans
son Essai sur
l'entendement humain
de 1689 et par Kant dans
sa Critique de la
raison pure de 1787.
Ces quatre mousquetaires
ont tous remarqué, mais
chacun à sa manière, que
les jugements
synthétiques et les
jugements analytiques
n'obéissent pas à la
même construction. Alors
que les seconds se
contentent de constater,
d'enregistrer et
d'exploiter des
successions régulières
d'évènements naturels,
les premiers observent
des tissus serrés de
causes, qu'ils
qualifient un peu vite,
d'expliquantes, mais
sans encore oser se
demander à quelle
profondeur de la
psychobiologie commune
aux animaux, au
simianthrope et à leurs
lions célestes l'esprit
humain devient un
plongeur en eau profonde
et descend dans l'abîme
des "causes" ; et bien
que personne n'ait
jamais attrapé une cause
en tant que telle, le
chimpanzé actuel ne cite
pas encore les verbes
savoir et
comprendre à
comparaître devant le
tribunal d'une raison en
devenir.
Certes, trois siècles
après Hume et Kant, on a
vu surgir une poignée
d'encéphales décidés à
quitter un instant
l'enceinte de leur
enfermement dans le
scaphandre de leurs
"lumières naturelles" ou
dans le ballon du
surnaturel ; et ces
gens-là ont commencé
d'examiner les rouages
et les ressorts de leur
"sens commun", donc de
soupeser les relations
profitables qui se
tissent entre l'esprit
utilitaire et les
signifiants intéressés
qui se greffent sur
l'entendement - celles
que les magiciens
chevronnés de leur
langage projettent
ensuite en toute hâte
sur la matière errante
dans le cosmos.
Voici quelques étapes de
ce cheminement: le 3
juillet 2012, une
machine gigantesque a
réussi à détecter la
trace d'une particule
élémentaire, le boson de
Higgs, qui donne sa
masse à l'univers; mais
cette machine exigera la
construction d'une autre
mécanique encore, qui
tentera de mesurer ce
que la première a
découvert. Ensuite, il
faudra fabriquer, dix
ans, durant une
machinerie de plus, qui
coûtera dix milliards
d'euros et qui
découvrira peut-être des
sillages de l'anti-matière
et de l'anti-énergie.
Puis un quatrième
cyclope d'acier essaiera
de préciser les
mensurations du néant
substantifié. Pour
l'instant, le
simianthrope se contente
de jouer aux quilles
avec les atomes
visibles; mais, après
demain, il faudra qu'il
rassemble les pièces
d'une machine à
comprendre l'univers; et
quand il aura emprisonné
le temps et l'espace
dans les flacons du
temporel et du vide, il
tombera des nues au
spectacle des ressorts
et des écrous que le
singe vocalisé se sera
forgés dans les ateliers
appelés à rendre
parlantes la matière, le
ciel, le vide et la
nuit. Comment le
cyclotron du futur
enregistrerait-il des
signifiants errants dans
l'étendue, comment
radiographierait-il un
mythe concrétisé, lequel
placerait sur orbite des
motivations et des
finalités en voyage?
On voit que la conquête
d'un regard de
l'extérieur sur le lion
narcissique qu'on
appelait Dieu et dont
l'effigie se
réfléchissait dans le
rétroviseur d'un langage
attribué au cosmos,
cette conquête, dis-je,
exigera une métamorphose
de l'univers de la
matière en un
gigantesque écriteau,
sur lequel on affichera
l'histoire d'un prétendu
sens simiohumain
du monde. Et comme la
pulsion imageante et
récitative dont cet
animal se trouve habité
ne tardera pas à se
nourrir du picotin sans
cesse renouvelé de
l'ambition de chacun de
régner sur la masse
confuse de ses
congénères, cette espèce
se scindera de nouveau,
dans le cyclotron à
remonter le temps, entre
deux comportements de
son encéphale. Quand une
querelle surviendra dans
la horde, le mâle
dominant s'approchera
derechef de l'endroit
d'où monteront les
criailleries; et la
seule arrivée sur les
lieux de sa puissante
carrure paraîtra
tellement dissuasive
qu'elle se révèlera
pacifiante et mettra
provisoirement fin aux
tapages. Puis, un
nouveau gorille du
Déluge et des tortures
infernales prendra une
fois de plus la relève
du mâle dominant des
origines.
A moins qu'à force de
passer par les
souterrains, les animaux
de La Fontainre
n'apprennent à
reconnaître leur
silhouette gravée sur la
rétine du fabuliste.
.
6 - Des
survivances de la diplomatie du mâle
dominant
Au grand jour de
l'histoire
M. Lavrov écrit: "La Syrie
est un Etat pluriconfessionnel:
y vivent, outre de nombreux
musulmans - tant sunnites que
shiites - un grand nombre
d'alaouites, de chrétiens de
confessions diverses, de Druzes
et de Kurdes. […] En Russie,
diverses confessions vivent côte
à côte depuis des siècles.
(C'est moi qui souligne)
[…] Le respect des droits de
l'homme et des libertés
fondamentales soulève un
problème majeur au sein des
Etats du Proche Orient et cette
difficulté [anthropologique]
demeure l'une des principales
causes des 'révolutions arabes'."
Vous remarquerez que les
démocraties messianiques
pratiquent une forme de la
politique encore tellement
originelle que toute
radiographie de leur rétine
précède encore de nos jours et
nécessairement l'interrogation
de nos simianthropologues
d'avant-garde concernant la
nature de la pellicule et le
sens du scénario. Il y a trois
mille ans seulement, les
premières idoles filmiques se
sont vaporisées; et il a fallu
décorporer celles qui
s'identifiaient trop obstinément
et de la tête aux pieds au bois
têtu, à la pierre muette ou à
l'airain stupide de leurs
statues. Puis nos guerres de
religion toutes fraîches et bien
rincées du XVIe siècle ont fait
débarquer la question du lavage
de l'encéphale d'une espèce tout
juste sortie du bain et sur le
point de retomber dans les
chamailleries des théologies -
et nous avons vu le lion des
Animaux malades de la peste
du fabuliste dédoubler à nouveau
son trône terrestre et s'en
fournir un modèle perfectionné
dans le vide du ciel.
Aussi cette question de
crinière, de griffes et de
mâchoires de l'histoire est-elle
retournée dans la jungle des
origines. Certes, le mâle
dominant s'approche encore en
aveugle des disputeurs les plus
criards. Puis, sans s'informer
davantage ni de la nature de la
chamaillerie ni de son enjeu
politique et cérébral au sein de
la horde, il se contente de
grogner qu'il faut mettre fin
aux vains bruitages des
cosmologies mythiques; et
aussitôt tout le monde s'en va
dormir sur les deux oreilles.
Mais l'ensommeillement d'une
raison devenue dormitive dans le
silence d'un univers enfin privé
d'interlocuteur se révèle un
conseiller encore plus
scolastique de la politique
nucléaire que de la pensée
rationnelle. Car si vous
renoncez à vous demander dans
quel enracinement
psychobiologique le sacré semi
animal de notre espèce prend sa
source et comment l'apocalypse
atomique y sème ses particules
élémentaires, vous jetterez les
hordes simiohumaines dans un
embarras psycho-cérébral qui
bouleversera la définition même
de la politique au sein de nos
tribus.
7 - La bête
rattrapée par sa théologie
Passage par les
souterrains
On voit que cet excursus
sur nos chicaneries
terrestres et célestes
nous ramène tout droit à
notre premier sujet,
pour autant que nous
l'aurions jamais quitté;
mais il était nécessaire
de paraître nous en
éloigner un instant,
afin de sceller nos
retrouvailles avec la
question la plus
taraudante, mais la plus
fécondante, celle de
savoir quel regard de
l'extérieur - et
légitimé à ce titre -
rendra heuristique le
rendez-vous nouveau que
les sciences
simiohumaines ont pris
sur la pointe des pieds
avec la science
historique des ancêtres
et avec leur réflexion
politique embryonnaire
sous le sceptre d'une
bombe à la fois
terrifiante et
inutilisable.
Car l'arme qualifiée
d'apocalyptique et qui,
de ce fait, se rend
précisément imaginaire,
a fait débarquer
subrepticement dans la
stratégie
politico-militaire du
mâle dominant la
question du statut
psychogénétique d'une
espèce devenue onirique
il y a quelques
millénaires seulement -
à l'heure où elle a
commencé d'enterrer ses
morts, donc de mémoriser
leurs effigies. De nos
jours, cet animal semble
sur le point de
conquérir un regard
tenace sur les rêves de
type théologique dont il
demeure cependant la
proie sur une large
étendue de notre
astéroïde.
Je rappelle que les
mondes imaginaires dans
lesquels les théologiens
battent en vain la
semelle et font rugir
des lions de plus en
plus fatigués sont
demeurés plus réels dans
les esprits que ceux
dont l'existence se
trouve démontrée par le
témoignage inlassable de
nos appareils d'optique.
De plus, nos guerres de
religion nous ont
interdit de débattre
sérieusement et à tête
reposée de la nature de
nos rêves sacrés et de
nos trônes célestes - au
contraire, les massacres
religieux auxquels nous
nous sommes livrés
depuis la Renaissance
nous ont permis de
mettre davantage
qu'auparavant l'épais
bandeau de la sainteté
de notre semi-raison sur
les yeux. Et maintenant,
la civilisation des yeux
ronds se trouve
condamnée à traiter de
nos songes et de nos
carnages par le biais de
l'inspection des
entrailles et de la
cervelle de nos Etats
les plus stupides, ceux
qui gesticulent et font
les fiers à bras dans le
sillage du cyclope du
Déluge.
Tel est l'esprit dans
lequel nous nous
demandons maintenant si
la foudre suicidaire -
donc pseudo
apocalyptique par
définition - se révèlera
aussi inutilisable que
notre théologie des
tortures éternelles qui
attendaient les pécheurs
sous la terre. Car nous
savons maintenant qu'une
arme fantasmagorique par
nature, telle
l'excommunication
majeure du Moyen Age, a
néanmoins enregistré des
effets exemplairement
sanglants: un
tonitruement tout mental
a effectivement déchiré
le tissu du temporel et
du surréel confondus
dans l'imagination
religieuse de l'époque;
et, de nos jours encore,
on a vu un Premier
Ministre anglais et un
chef militaire américain
brandir une fiole
magique afin de
légitimer une guerre.
A ce titre, Téhéran nous
fait assister à une mise
en évidence nouvelle et
frappante des ressorts
semi zoologiques qui
commandent la technique
du déclenchement du
fantastique
psycho-cérébral au sein
du genre simiohumain de
tous les temps et en
tous lieux. De plus, si
nous observons les
fioles magiques qui
campent sous l'os
frontal d'un "sujet de
conscience" dont le
téléguidage échappe
encore à la pesée de
l'historien actuel, nous
constatons que ces
spécialistes décorés ne
disposent encore
d'aucune problématique
et d'aucune méthodologie
susceptibles de
seulement soulever dans
leur tête la question de
l'irrationalité de leur
ficellement intérieur à
un simulacre nucléaire
et à un chantage
politique à l'échelle
planétaire. Aussi l'Iran
actuel se révèle-t-il le
banc d'essai
providentiel de
l'enracinement de la
psychobiologie
simiohumaine dans les
gènes de la horde
primitive et de la
fausse sainteté de la
démocratie des
exorcistes.
8 - Le
rendez-vous des démocraties avec
l'hémoglobine de l'histoire
Au grand jour de
l'histoire
Revenons à l'examen du virus
Flame que la Maison Blanche
et Israël ont mis au point dans
l'espoir de combattre dans l'œuf
le programme nucléaire iranien:
"La paternité de Flame reste,
à ce jour, inconnue, mais la
thèse de l'implication des
Etats-Unis a été renforcée par
la publication, le 5 juin 2012,
d'un livre de David Sanger,
correspondant du New York Times
à Washington, intitulé
Confront and Conceal :
Obama's Secret Wars
(Attaquer sans le dire : les
guerres secrètes d'Obama). David
Sanger, très introduit à la
Maison Blanche, explique en
détail comment Stuxnet a été
conçu, puis utilisé contre
l'usine nucléaire iranienne par
les services secrets américains
et avec l'aide des Israéliens au
cours d'une opération baptisée
"Jeux olympiques". Il affirme
aussi qu'à la suite d'une erreur
de manipulation, Stuxnet s'est
répandu sur Internet et qu'il a
infecté près de cent mille
machines dans le monde, mais que
l'administration Obama aurait
décidé de poursuivre l'opération
sans se soucier des dommages
collatéraux. " (Le
Monde, 20 juin 2012)
La question anthropologique
nouvelle à laquelle le globe
oculaire de la démocratie
cyclopéenne mondiale se trouve
sommé de servir de réflecteur
sera de savoir si la politique
du monstre homérique de la
planète peut continuer de jouer
parallèlement et en continu le
jeu de la guerre et de la
sainteté politique
artificiellement, mais
étroitement confondues dans la
fiole du sacré , donc de
perpétuer impunément la double
rétine des papes saintement
guerriers du XVIe siècle, qui
administraient l'encéphale
dédoublé de l'humanité pour
avoir mis au feu deux fers des
dévotions simiohumaines. Si la
piété et le sang se révèlent les
pôles naturels de l'histoire
universelle, alors la notion
même d'existence
appliquée aux dieux requiert la
pesée des apprêts d'un verbe
être expressément
confectionné à l'usage des
religions bipolaires. Autrement
dit, la question de l'existence
dichotomique de l'arme nucléaire
nous renvoie aux composantes
psychobiologiques de la guerre
atomique.
Car une arme biphasée par nature
et devenues confessionnelle à
l'école du sang et de la mort
entraînera autant de difficultés
catéchétiques que celles de la
théologie de l'apocalypse
souterraine et posthume mise en
place au sein des trois
monothéismes cyclopéens. Mais
ces difficultés se trouvent
maintenant exposées et racontées
tout au long dans la presse
quotidienne, alors qu'on
n'imagine pas encore l'Osservatore
romano narrer à ses
lecteurs et jour après jour les
difficultés doctrinales que la
politique des docteurs de la
foudre ecclésiale a rencontrées
siècle après siècle. Les
catéchistes des relations que le
culte de la Liberté entretient
avec les tortures éternelles
suivent désormais d'heure en
heure les traces des "virus
d'Etat" chargés d'exterminer un
Satan iranien aussi mythologique
que son prédécesseur!
Et pourtant, l'absence de
réponse précise à la question du
statut simianthropologique de
l'arme nucléaire que le lion
divin et le lion humain se
partagent paralyse toute analyse
rationnelle de l'impasse
diplomatique dans laquelle le
monde entier du fabuliste
d'aujourd'hui se trouve englué
face au droit évident de l'Iran
de disposer de l'arme à la fois
imaginaire et censée réelle de
notre temps; et cette aporie
conduit les animaux malades de
la peste à une régression
dramatique de leur science du
sang et des sépulcres, tellement
il faut avoir posé les premiers
jalons d' une connaissance
abyssale du niveau cérébral de
l'anthropos tombal pour
seulement commencer d'élaborer
une stratégie rationnelle du
guidage de la politique de la
sainteté atomico-démocratique
mondiale. Notre science du sacré
est-elle plus digne de notre
époque que les reniflements du
mâle dominant des chimpanzés?
Qu'en est-il des épousailles du
dieu nucléaire avec notre
hémoglobine?
9 - Entre le
sceptre et le spectre
Passage par les
souterrains
Pour que l'anthropologie
fondamentale à venir se
fonde sur un
approfondissement de la
connaissance des
origines simiennes de
notre encéphale et pour
que cette discipline
radiographie les
neurones d'un animal
onirique de naissance,
il faudra radiographier
l'espèce d'animaux
schizoïdes que nous
sommes devenus. Car il a
fallu des siècles pour
que l'excommunication
majeure perdît son
crédit sur nos champs de
bataille: et cette
croyance n'a pas cessé,
loin s'en faut, de
demeurer réellement
dissuasive au plus
profond de notre monde
laïcisé seulement à
demi. En revanche, un
laps de temps fort court
suffira à décrédibiliser
l'arme monoculaire,
aussi bien dans l'ordre
politique que militaire.
Exemple: il y a
seulement quelques mois,
M. Netanyahou
brandissait le Livre
d'Esther sous les yeux
d'un Président des
Etats-Unis raidi et sur
ses gardes face aux
stratèges de
l'apocalypse biblique de
notre temps. Quelques
semaines plus tard, la
science historique a
commencé de cheminer à
une autre profondeur:
elle se demande, en
apprentie de la
simianthropologie
critique, de quelles
armes cérébrales Israël
a conquis en secret la
maîtrise pour soumettre
sous les yeux du monde
entier la démocratie
planétarisée à une
terreur eschatologique
et à une reviviscence
pseudo rationnelle de la
folie messianique.
Cette prise de
conscience encore
tâtonnante de la
dimension théologique de
notre espèce place la
question de la nature
mythologique par nature
des croyances
religieuses au cœur de
la pesée de l'histoire
contemporaine. Car si le
"sujet historique" du
IIIe millénaire est
condamné à subir une
évolution précipitée de
ses neurones, une lutte
de vitesse entre Israël
et le reste du monde
devient la clé
simianthropologique du
destin cérébral de la
civilisation mondiale;
car le peuple hébreu est
convaincu que son
expansion coloniale sera
devenue irréversible
dans toutes les têtes si
seulement le
gouvernement de Tel Aviv
dispose du temps
nécessaire à la conquête
biblique de la
Cisjordanie et de
Jérusalem. Mais, dans le
même temps, un printemps
arabe rebelle à
retourner au néant a
fait débarquer l'islam
de la pensée dans un
univers nucléaire en
attente de ses vrais
repères rationnels.
10 - Comment
catéchiser la civilisation de la
Liberté?
Au grand jour de
l'histoire
On voit qu'une classe dirigeante
mondiale construite sur le
modèle du mythe vétéro et néo
testamentaire ressuscité - donc
sur un sceptre de type mécanique
- ressortit nécessairement à la
discipline nouvelle dont les
lecteurs de ce site ont observé
les premiers pas en 2001: la
simianthropologie critique
radiographie un type de
chimpanzés évolutifs tout
proches de se rendre conscients
de la nature onirique des
masques sacrés qu'ils arboraient
depuis des millénaires; et cet
animal se trouve à deux doigts
de cesser de se laisser tromper
par ses subterfuges sacrés. Du
coup, ce bimane tardif se
retourne sur ses pas et tente
d'observer la bête désarmée et
piégée par ses plus vieux songes
religieux. Le simianthrope de
bonne foi est une bête dont le
cerveau, demeuré indivis, le
contraint de se colleter avec sa
nature biface et avec son
héritage dédoublé.
D'un côté, ce meurtrier se
distancie de son capital
psychogénétique de tueur-né et,
à ce titre, il comprend les
ressorts du fauve ambigu,
instable et torturé qu'il est
devenu à lui-même. Mais, de
l'autre, son recul intellectuel
à l'égard d'un animal enraciné
dans sa préhistoire n'est pas
encore suffisant pour qu'il
parvienne à mener en toute
lucidité une politique de
libération à l'égard de la bête
vengeresse et conquérante qui
l'habite. Flottant entre deux
eaux pour avoir égaré en chemin
les masques qu'il s'imaginait
avoir quittés, il se retrouve à
la croisée des chemins entre
l'homme et l'animal ; et il
redécouvre le plein emploi du
séraphin meurtrier qu'il est
devenu à lui-même entre temps;
et il se voit condamné à se
servir sans relâche et plus
férocement que jamais de l'arme
tardive dont la nature l'a doté,
celle du meurtre viscéralement
angélisé et mieux masqué en
séraphin que jamais.
11 -
Conclusion
Passage par les
souterrains
En résumé le
simianthrope actuel se
révèle une bête enfermée
à titre psychobiologique
dans la geôle d'une
lucidité infirme et
pourtant déjà devenue
torturante: du côté du
chimpanzé qu'il est
demeuré, il se voit
prisonnier de la bête
crucifante qui le
torture, du côté du
simianthrope qu'il est
partiellement devenu, il
retrouve, plus
inguérissable que
jamais, l'animal des
songes sacrés qui ne le
trompent plus, mais qui
habillent désormais sa
sauvagerie naturelle de
vocables pseudo
évangélisateurs.
Quelle aube d'un nouveau
"Connais-toi" que le
dialogue régénéré de la
"conscience" avec deux
bêtes à demi confondues
et enfin regardées droit
dans les yeux, celle qui
se voit semi rampante
sur la terre et celle
qui transporte ses ailes
et sa géhenne sur son
dos.
Note
Cette année,
la pause estivale durera jusqu'à
la fin du mois d'août.
Le
22 juillet 2012
Reçu de l'auteur pour
publication
Les textes de Manuel de Diéguez
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