L'art de la guerre
Les joueurs de
flûte de la « paix »
Manlio Dinucci
Mardi 24
avril 2012
Plus de 1.500
enfants, garçons et filles entre 3 et 14
ans (de la maternelle au collège),
seront conduits, le 27 avril à Pise, le
long du « chemin des libertés »,
visitant des lieux physiques de la ville
reliés à neuf articles de la
Constitution. Le mérite en revient à
l’Association Nicola Ciardelli, qui fait
depuis quatre ans la promotion de la
« Journée de la Solidarité » en souvenir
du major Ciardelli de la Brigade Folgore,
« victime d’un attentat le 27 avril 2006
à Nassirya, pendant la mission de paix
Antique Babylone ». Déterminant
est le soutien de la Municipalité à
cette initiative qui, déclare le maire
Marco Filippeschi (Parti démocrate),
lance un grand « message de paix et
solidarité ». Grâce à son
administration, Pise est devenue le
laboratoire le plus avancé de la loi
pour « la promotion et la diffusion de
la culture de la défense à travers la
paix et la solidarité ». Passée à la
Chambre grâce à une entente bipartisane
(Pd, Pdl, Idv, Ligue) la loi, en cours
d’approbation au Sénat, institue, en
particulier dans les écoles, une série
d’initiatives pour un « partage informé
chez les citoyens des politiques de
sécurité et de défense de la nation et
de l’action des Forces armées ». Ce
qu’on expérimente à Pise. Dans le
parcours « Liberté et Défense de la
Démocratie », par exemple, les élèves,
escortés par de sympathiques
parachutistes de la Folgore,
seront amenés au Centre d’entraînement
du parachutisme, où la Journée s’ouvrira
avec le Lever des couleurs et la Sainte
Messe. Là on leur expliquera que
Ciardelli était en Irak pour une mission
de paix, surtout pour aider les enfants.
On évitera de dire que l’officier, à sa
seconde mission en Irak comme
volontaire, appartenait au 185ème
Régiment acquisition d’objectifs, force
spéciale qui, infiltrée dans un
territoire, signale les objectifs à
bombarder. Et, pour ne pas impressionner
les enfants, on taira le fait qu’en 2004
(comme le reconnaît la Procure militaire
elle-même) des soldats italiens tirèrent
à Nassirya sur une ambulance, tuant
ainsi une femme enceinte et trois
personnes de sa famille. Après une étape
au centre universitaire de Sciences pour
la paix, pour une leçon sur la gestion
non-violente des conflits et la
répudiation de la guerre, les élèves
seront conduits à la Préfecture, au
siège de la Province et à la Mairie, où
on leur expliquera que l’Italie s’en
tient pleinement à ces principes : les
guerres effectuées en Irak, Yougoslavie,
Afghanistan et Libye, ne sont pas des
guerres mais des opérations humanitaires
et de paix. Silence par contre sur le
fait que Pise, « Cité pour la paix », a
été impliquée dans les guerres par le
biais de la base étasunienne de Camp
Darby qui l’an dernier a approvisionné
en bombes les avions Otan qui
attaquaient la Libye, et par l’aéroport
militaire, qui est à présent transformé
en Hub aérien national, où transiteront
toutes les forces et le matériel de
guerre pour les missions militaires à
l’étranger. Temps fort de la journée :
tandis que les paras de la Folgore
descendront du ciel sous les yeux
admiratifs des enfants, sera érigée « la
Maison des enfants de Nicola »,
représentation symbolique de celle où, à
Florence, seront soignées (pour montrer
combien nous sommes bons) quelques unes
des nombreuses petites victimes des
« missions de paix ». La « Maison »
reposera sur les neuf « piliers
constitutionnels » du « chemin des
libertés ». Mais on ne dira pas aux
enfants qu’il manque le pilier central :
l’Article 11 de la Constitution qui
répudie la guerre comme instrument
d’offense à la liberté des autres
peuples.
Edition de mardi 24
avril 2012 de il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20120424/manip2pg/14/manip2pz/321671/
Traduit de
l’italien par Marie-Ange Patrizio
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