L'art de la guerre
La stratégie de la
tension
Manlio
Dinucci
Mardi 22 janvier
2013
Les images dramatiques de l'attaque
contre le site gazier en Algérie, par un
commando qui se définit comme jihadiste,
font le tour du monde. Des techniciens
de BP et de Statoil attachés à des
explosifs au plastic, tués par ceux qui
les ont séquestrés ou pendant les
affrontements. Effet garanti. Le
ministre des affaires étrangères
français Fabius lance l'alarme sur la
dramatique situation algérienne. Le
premier ministre britannique Cameron
convoque le « Comité Cobra » pour les
situations d'urgence. Le président Obama
déclare que l'attaque nous rappelle une
fois encore la menace posée par Al Qaeda
en Afrique et que les Usa agiront pour
que des faits analogues ne se répètent
pas. Selon des informations diffusées
par des sources pas très identifiées, le
commando terroriste recevait les ordres
par téléphone satellitaire de l'émir
Moctar Belmoctar, ex chef de « Al Qaeda
au Maghreb Islamique », à présent à la
tête d'une nouvelle formation qui est
basée au Mali. Juste là où (comme par
hasard) la France est en train
d'intervenir militairement et où l'Union
européenne est sur le point d'envoyer
une « mission d'entraînement », formée
de 450 spécialistes de la guerre
(italiens compris), qui fournira aussi
du « conseil aux opérations de
commando ». Reste le mystère de comment
le commando, formé de dizaines d'hommes
lourdement armés, a pu parcourir à
découvert avec son convoi de véhicules
tous terrains des centaines de
kilomètres dans un territoire surveillé
jour et nuit par environ 300mille hommes
de l'armée algérienne, entraînée et
armée par la France et par le
Commandement Africa des États-Unis. Il
est légitime de soupçonner que l'attaque
contre le site gazier ait été orchestrée
et/ou facilitée par la France, avec la
couverture des Usa, pour impliquer
l'Algérie et d'autres pays
nord-africains dans l'opération
militaire au Mali, en en élargissant
l'aire. En Afrique, la France, la
Grande-Bretagne, les États-Unis et
d'autres puissances occidentales ne sont
pas en mesure de gérer, avec leurs
groupes multinationaux, la concurrence
économique de la Chine et d'autres pays
émergents. Voulant maintenir à tous prix
le contrôle des sources énergétiques et
des minéraux stratégiques du continent,
ainsi que de ses zones d'importance
géostratégique, ils soufflent sur le feu
des tensions et des conflits internes
pour justifier leur intervention
militaire, dont l'objectif est
d'étouffer les luttes de libération des
peuples. A cette fin ils n'ont aucun
scrupule à utiliser des groupes
jihadistes, dont les militants de base,
convaincus de combattre l'impérialisme
occidental, finissent par en être
l'instrument. Ils les ont utilisés en
Libye pour désagréger le pays de
l'intérieur, pendant que l'Otan
l'attaquait avec des
chasseurs-bombardiers et des forces
spéciales infiltrées. Même le New
York Times, après l'attaque en
Algérie, admet que Kadhafi avait raison
quand il prévenait que l'abattage de
l’État libyen aurait provoqué le chaos,
en laissant les mains libres aux
jihadistes. Le New York Times
cependant ne dit pas que l'Otan fait la
même chose en Syrie, confirmant que cela
entre dans sa propre stratégie de la
tension.
Bersani (Secrétaire du
Partito democratico, chef de
l' « opposition », NdT) a tout
compris. « Il faut arrêter les
formations djihadistes sanguinaires
-a-t-il déclaré- on ne peut pas laisser
seule la France, qui est intervenue au
Mali : il faut intervenir et il est
temps que l'Ue reprenne le bout de
l'écheveau». Celui, en réalité, que
l'Europe a déjà repris en main pour
dévider le vieil embrouillamini des
guerres coloniales.
Edition de mardi 22 janvier 2012 de
il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20130122/manip2pg/14/manip2pz/334844/
Traduit de l'italien par Marie-Ange
Patrizio
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