L'art de la guerre
L'incendie est
hors de contrôle
Manlio Dinucci
Manifestation à Diraz le 26 août 2011
Mardi 20 septembre
2011
On avait pensé à
Washington pouvoir dompter les flammes
de la rébellion populaire qui s’était
propagée dans les pays arabes qui leur
sont alliés, et mettre le feu à d’autres
qu’ils ne contrôlent pas (ils y sont
arrivés en Libye), de façon à construire
sur leurs cendres le « Grand
Moyen-Orient » dont ils ont toujours
rêvé, celui sous bannière étoilée,
flanquée de la rose des vents de l’OTAN.
Mais, bien qu’ils y mettent le paquet,
les choses ne vont pas comme ils
voudraient. Surtout au Bahrein et au
Yémen, supports importants de leur
stratégie. Au Bahrein les Etats-Unis ont
le quartier général des forces navales
de leur Commandement central. Situé à
200 Kms à peine de l’Iran, il dispose de
dizaines de navires de guerre,
porte-avions et unités d’assaut amphibie
compris, avec 28 mille soldats et 3
mille à terre, qui opèrent en Mer Rouge,
dans la Mer d’Arabie et dans d’autres
parties de l’Océan Indien, pour
« assurer la paix et la stabilité et
protéger les intérêts vitaux de
l’Amérique » (des Etats-Unis
d’Amérique, NdT).
En d’autres termes, pour conduire
les guerres en Irak et Afghanistan et en
préparer d’autres (Iran et Syrie sont
dans le collimateur). D’où l’importance
du Bahrein, que les Etats-Unis ont
désigné comme « plus grand allié
non-OTAN ». La monarchie
héréditaire, garante de la solide
alliance, continue cependant à être
assiégée par la rébellion populaire,
qu’elle n’est pas arrivée à étouffer
même avec l’aide de l’Arabie Saoudite,
des Emirats et du Qatar qui, en mars,
avaient envoyé des troupes au Bahrein.
Cinq mois après la « féroce répression
du soulèvement populaire », rapportée
par le New York Times (15
septembre), il y a tous les soirs à
Manama des jeunes qui descendent dans la
rue, et affrontent la police. Les
autorités ont conquis « une éphémère
victoire grâce aux tortures,
arrestations et licenciements », surtout
contre la majorité chiite (70% de la
population) discriminée par la monarchie
sunnite. Malgré cela, la secrétaire
d’Etat Hillary Clinton s’est déclarée
« impressionnée par l’implication avec
laquelle le gouvernement de Bahrein
avance sur la voie de la démocratie » et
en août, Washington a renouvelé son
accord militaire avec Manama, signé en
1991.
Au Yémen aussi, il y a
« d’encourageants signes d’une volonté
rénovée du gouvernement de promouvoir la
transition politique » : c’est ce
qu’assure le Département d’Etat le 15
septembre, au lendemain du jour où les
Nations Unies ont publié un rapport
documenté sur la féroce répression.
Confirmée par le fait que, trois
jours après à Sana, les militaires ont
ouvert le feu avec des mitrailleuses
lourdes sur une manifestation pacifique.
Les Yéménites n’ont aucun souci à se
faire : les Etats-Unis « continuent à
appuyer la transition pacifique et
ordonnée, répondant aux aspirations du
peuple yéménite pour la paix et la
sécurité ». C’est le New York Times
lui-même qui rapporte comment cela se
fait : « L’administration Obama a
intensifié la guerre secrète au Yémen,
en frappant des militants suspectés,
avec des drones armés et des
chasseurs-bombardiers ». La guerre est
conduite par le Commandement conjoint du
Pentagone pour les opérations spéciales
qui, sous prétexte de faire la chasse à
Al Qaeda, a installé à Sana sa propre
position. L’opération est coordonnée par
la Cia, qui a construit à cet effet au
Moyen-Orient une base aérienne secrète.
Mais les missiles Hellfire (Feu
de l’enfer) des drones Usa ne font
qu’alimenter les flammes de la rébellion
populaire.
Edition de mardi 20
septembre 2011 de il manifesto
Traduit de
l’italien par Marie-Ange Patrizio
Le dossier
Bahreïn
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