L'art de la guerre
L'Europe dans la «
rotation » des USA
Manlio Dinucci
Mardi 17 janvier
2012
Deux brigades
blindées lourdes étasuniennes, basées en
Allemagne, avec un total de 7mille
hommes, font leur bagages pour rentrer à
la maison : c’est ce qu’a annoncé le
secrétaire à la défense Leon Panetta.
Washington, sous la présidence d’un Prix
Nobel de la paix, a-t-il enfin pris la
voie du désarmement en commençant à
retirer ses forces d’Europe ? Loin de
là. Ces troupes vont descendre de
81mille à 74mille hommes, dont la moitié
de troupes terrestres, mais celles qui
se retirent seront remplacées par des
« unités tournantes ». Les Européens
peuvent donc être tranquilles : les USA
ne les laisseront pas seuls dans un
monde aussi dangereux.
Au contraire, « les Européens
verront plus de forces étasuniennes sur
leur sol », puisque les bases en Europe
serviront à une rotation plus fréquente
de forces étasuniennes au Moyen-Orient,
Afrique, Asie et Europe orientale. Les
troupes terrestres seront concentrées en
deux unités : une brigade blindée légère
en Allemagne, et une aéroportée à
Vicence. Un autre pas en avant dans le
« réalignement » stratégique effectué
par le Pentagone, qui redéploie ses
forces depuis l’Europe centrale et
septentrionale, à celle méridionale et
orientale, pour les projeter plus
efficacement dans les zones d’importance
stratégique.
Dans un tel cadre –écrit
l’ambassade USA à Rome dans un câble
filtré à travers WikiLeaks- l’Italie est
« devenue
la base du plus important
dispositif militaire déployé hors des
Etats-Unis, et avec le Commandement
Africa (qui a deux sous-commandements en
Italie) elle sera le partenaire encore
plus significatif de notre projection de
force ». Ceci est confirmé par le
dernier inventaire officiel des 4.214
bases militaires que les USA ont sur
leur propre territoire et des 611 bases
militaires qu’ils entretiennent dans
d’autres pays (Base Structure Report
2011) En Italie, le Pentagone possède
1.395 immeubles et en a en location ou
en concession 1.062 autres, pour une
superficie totale de presque 2 millions
de mètres carrés. Ceux-ci sont
distribués en 40 sites principaux,
auxquels s’en ajoutent d’autres mineurs,
portant le total à 60. Ce qui signifie
qu’après le Vatican, le plus gros
propriétaire immobilier en Italie est le
Pentagone. Un investissement très
rentable, non seulement parce que
l’Italie contribue économiquement à
l’entretien de ces bases, mais parce
qu’elles permettent une « projection de
force » plus rapide et moins coûteuse
que celle effectuée depuis le
territoire continental des Etats-Unis.
L’autre avantage fondamental est qu’en
Italie, tous les gouvernements, de
centre-droit ou de centre-gauche, ont
été jusqu’à présent à l’entière
disposition du Pentagone. Vicence,
Aviano, Ghedi Torre, Livourne, Pise,
Naples, Gaeta, Sigonella, Niscemi et
autres localités font désormais partie
de la géographie du Pentagone. Ici les
Usa basent leurs commandements, leurs
forces de projection rapide, leurs
armements (nucléaires compris), leurs
systèmes de télécommunications
militaires les plus avancés. D’ici les
forces étasuniennes effectuent leurs
rotations, en assumant non seulement
leur fonction militaire mais une
importante fonction politique : « Dans
la mesure où des forces étasuniennes
significatives demeurent en Europe
-explique une commission du Congrès- le
leadership peut être conservé ».
Pour cela, assure Panetta,
l’engagement militaire Usa en Europe est
« inébranlable ».
Edition de mardi 17
janvier 2012 de il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20120117/manip2pg/14/manip2pz/316572/
Traduit de
l’italien par Marie-Ange Patrizio
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