L'art de la guerre
Guerres bénies
Manlio
Dinucci
Carte postale reçue de Manlio Dinucci,
avec la rubrique du 4 octobre 2011 :
« Guerres bénies ». M-A P.
Mercredi 5 octobre
2011
Monseigneur
Vincenzo Pelvi, archevêque ordinaire
militaire et directeur de la revue de
l’Ordinariat « Bonus Miles Christi » (le
Bon Soldat de Christ), éprouve
« amertume et malaise » face à « ceux
qui invoquent la dissolution des armées
et l’objection contre les dépenses
militaires ». Ces mécréants ne
comprennent pas que « le monde militaire
contribue à l’édification d’une culture
de responsabilité globale, qui
s’enracine dans la loi naturelle et
trouve son fondement ultime dans l’unité
du genre humain ». De l’Afghanistan à la
Libye, « l’Italie, avec ses soldats,
continue à jouer son rôle pour
promouvoir la stabilité, le désarmement,
le développement et soutenir partout la
cause des droits humains ». Le militaire
rend ainsi « un service à
l’avantage de tout l’homme et de tout
homme, en devenant le protagoniste d’un
grand mouvement de charité dans son pays
comme dans d’autres nations » (Avvenire,
2 juin 2010). Monseigneur Pelvi perpétue
ainsi la tradition historique des
hiérarchies ecclésiastiques de bénir les
armées et les guerres. Il y a un siècle,
en 1911, dans l’église pisane de Santo
Stefano des Chevaliers, décorée de
drapeaux pris aux Turcs au 16ème
siècle, le cardinal Maffi exhortait les
fantassins italiens, en partance pour la
guerre de Libye, à « croiser les
baïonnettes avec les cimeterres » pour
rapporter dans l’église « d’autres
bannières sœurs » et ainsi « racheter
l’Italie, notre terre, de nouvelles
gloires ». Et le 2 octobre 1935, alors
que Mussolini annonçait la guerre
d’Ethiopie, Monseigneur Cazzani, évêque
de Crémone, déclarait dans sa
pastorale : « Vrais chrétiens, prions
pour ce pauvre peuple d’Ethiopie, pour
qu’il se persuade d’ouvrir ses portes au
progrès de l’humanité, et de concéder
les terres, qu’il ne sait pas et ne peut
pas faire fructifier, aux bras
exubérants d’un autre peuple plus
nombreux et plus avancé ». Le 28
octobre, en célébrant au Dôme de Milan
le 13ème anniversaire de la
marche sur Rome, le cardinal Schuster
exhortait : « Coopérons avec Dieu, dans
cette mission nationale et catholique de
bien, en ce moment où, sur les champs
d’Ethiopie, l’étendard d’Italie porte en
triomphe la Croix de Christ et rompt les
chaînes des esclaves. Invoquons la
bénédiction et la protection du Seigneur
sur notre incomparable Condottiere ». Le
8 novembre, Monseigneur Valeri,
archevêque de Brindisi et Ostumi,
expliquait dans sa pastorale :
« L’Italie ne demandait qu’un peu
d’espace pour ses enfants, en telle
augmentation qu’ils formaient une grande
Nation de plus de 45 millions
d’habitants, et elle le demandait à un
peuple cinq fois moins nombreux que le
notre et qui détient, on ne sait pas
pourquoi et de quel droit, une extension
de territoire quatre fois plus grand que
l’Italie sans qu’il sache exploiter les
trésors dont l’a enrichi la Providence à
l’avantage de l’homme. Pendant de
nombreuses années, on patienta, en
supportant agressions et abus, et quand,
n’en pouvant plus, nous eûmes recours au
droit des armes, nous fûmes jugés
agresseurs ». Dans le sillon de cette
tradition, don Vincenzo Caiazzo -qui a
sa paroisse sur le porte-avions
Garibaldi, où il célèbre la messe dans
le hangar des chasseurs qui bombardent
la Libye- assure que « l’Italie est en
train de protéger les droits humains et
des peuples, c’est pour cela que nous
sommes en mer » (Oggi, 29 juin
2011). « Les valeurs militaires
-explique-t-il- vont bras dessus bras
dessous avec les valeurs chrétiennes ».
Pauvre Christ.
Edition de mardi 4
octobre 2011 de il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20111004/manip2pg/14/manip2pz/311022/
Traduit de
l’italien par Marie-Ange Patrizio
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