Opinion
Les chiens aboient
toujours - et regardent la caravane
s'éloigner...
Louis
Denghien
Juppé &
Longuet : un faux gaulliste et un
ex-nationaliste,
mais deux vrais exécutants de la
politique atlantiste
Dimanche 5 février
2012
Au lendemain du double véto
russo-chinois – qui
cause curieusement sensiblement plus
d’émotion que tous ceux que les
Occidentaux ont opposés jusques-là à une
condamnation d’Israël pour sa politique
palestinienne – les critiques
occidentales se déchaînent – surtout
contre la Russie, perçue comme « meneur
» dans l’affaire – avec une virulence à
la hauteur de la déception et de l’échec
subis, tant dans les milieux politiques
que médiatiques.
Juppé &
Longuet : arrogance & jactance sont dans
un bateau…
Une fois mentionnés
brièvement le ton contrit de l’ineffable
Ban Ki-moon, véritable « voix de ses
maîtres » américains, et celui, plus
hargneux, du chef de la diplomatie
qatarie Ben Jassem al-Thani, on s’en
tiendra à la France : Alain Juppé, avec
ce style de « père noble » de la morale
diplomatique qui lui sert de posture
tous-terrains, avertissait dès samedi
que la France »ne
resterait pas les bras croisés face au
martyr du peuple syrien« ,
stigmatisant au passage la «
terrible
responsabilité » qu’ont pris Moscou
et Pékin. Toujours tout en nuances, le
ministre « gaullo-atlantiste » avait, le
même jour, commentant les sanglants
événements de vendredi à Homs, osé dire,
sur une radio française, que les
opposants syriens affrontaient «
presqu’à
mains nues » les troupes du régime
: c’est donc par la
seule force de leurs poings rageurs que
les ASL et autres gangs armés équipés et
subventionnés par le Gollfe et la
Turquie – arrêtons nous là – auraient
tué plus de 2 000 soldats et policiers,
et des centaines de civils mal pensants
ou « mal croyants », ainsi que le
journaliste Gilles Jacquier !
S’il veut des exemples plus convaincants
d’héroïsme, Alain Juppé ferait mieux de
méditer sur la résistance désespérée des
derniers partisans de Kadhafi à Syrte,
accablés par les bombardiers dépêchés
sur place par la France sarkozyste.
La France sarkozyste dont
il semble bien que les jours soient
comptés : Bachar al-Assad, nous l’avons
déjà écrit ici, devrait survivre au
président français et son gouvernement,
et ce sera un autre ricanement du
Destin, même s’il ne faut pas trop miser
sur l’indépendance de son possible
successeur.
Citons tout de même, pour
mémoire, la sortie d’une autre
personnalité de ce gouvernement aligné
en toutes choses sur l’Amérique et
l’OTAN : Gérard Longuet, ministre de la
Défense, qui a déclaré que la Russie «
ne peut
pas tenir indéfiniment » sa
position au Conseil de sécurité :
« Nous
avons le devoir, nous européens, de
montrer que nous n’accepterons jamais ce
régime » a dit Longuet sur
RTL :
le «
régime » en question, c’est bien
sûr celui de Bachar al-Assad, pas celui
de l’Arabie Séoudite ou du Qatar, nos
lecteurs avaient rectifié d’eux-mêmes.
Où l’aveuglement se
marrie heureusement avec le
carriérisme..
L’aigreur
de
Libération
Jeux de
mots & soumission au Nouvel Ordre
mondial : c'est tout "Libé"!
Bien sûr la presse
française est sur la même longueur
d’ondes que le Quai d’Orsay, et de ce
point de vue-là non plus, il n’y a que
des différences stylistiques entre
Libération et
Le Figaro :
Libération qui se
surpasse en la matière – ce qui
forcerait presque l’admiration –
désignant sobrement Bachar comme le «
boucher de Damas« ,
évoquant bien sûr avec force détails
tirés des communiqués de l’opposition le
« massacre » de Homs
– qui n’est,
évidemment, pour les plumitifs de
Libération, qu’un massacre dans la
mesure où il serait commis par le régime
-, saluant les « nombreux
Syriens » expatriés – quelques
dizaines en réalité – qui ont participé
à l’attaque de plusieurs ambassades
syriennes à l’étranger. Evoquant même
avec des trémolos de plume l’ »indignation
» de pays arabes, et faisant de
Cheikh Ben Jassem al-Thani, chef du
gouvernement d’un micro-Etat
autocratique et ouvertement inégalitaire
comme le Qatar une sorte de « grand
témoin de la démocratie » ! La Tunisie
sous influence islamiste, qui semble
désormais disputer au Qatar le rôle
d’ennemi arabe n°1 de la Syrie, est
citée en exemple pour avoir annoncé
l’expulsion imminente de l’ambassadeur
de Damas.
Dans un autre article,
Libération énumère
les « derniers atouts de
Bachar al-Assad« . A la lecture, on
s’aperçoit que ceux-ci sont encore
puissants et assez nombreux :
Libération est bien
obligé d’énumérer, outre la Russie et la
Chine, l’Iran, le Liban, l’Irak. L’Irak
dont le quotidien bobo rappelle qu’il
doit prendre la présidence de la Ligue
arabe en mars et qui devrait tenter
alors « de promouvoir une
position moins tranchée de cette
organisation envers la Syrie« .
Quant aux possibilités de faire chuter
le régime par d’autres moyens que la
diplomatie, elles sont, de l’aveu même
de Libération, très
limitées : en l’état, le plan
de la Ligue arabe n’est «
sans doute pas » applicable ; la «
révolution de palais
» à Damas, espoir des Américains, est
très hypothétique,
Libération constatant après
d’autres qu’ »il y a peu
de dissensions connues au sommet de la
chaîne de commandement« . Le
quotidien gaucho-atlantiste cite bien
les propos belliqueux de la direction
qatarie, qui déterre son projet d’envoi
sur place de forces arabes : mais, note
tristement Libération,
« un tel déploiement de
forces, même arabes, semble improbable à
la fois en raison de l’opposition du
régime syrien et de la difficulté pour
les pays concernés de créer une force
commune« . Comme
quoi, le parti-pris haineux n’exclut pas
forcément une claire vision des réalités
– ce qui n’est visiblement pas le cas de
leurs amis du Qatar.
Cela dit, on ne peut
s’empêcher de s’étonner – encore un peu
– de la dérive idéologique de ces
ex-gauchistes de
Libération qui ont troqué dès les
années 80 le drapeau rouge contre la
bannière étoilée – et un autre drapeau
plus modestement étoilé -, le soutien
aux peuples en lutte contre
l’impérialisme américain contre l’appui
à toutes les opérations l’OTAN et de l’US
Army, Marx contre BHL. Et
l’ouvriérisme contre le culte des élites
mondialisées technocratiques et
profiteuses. Ces gens-là s’excusent
eux-même de leurs reniements en vous
expliquant que leur démocratie abstraite
est plus sûrement portée par les
stratèges néo-conservateurs et leurs
bombardiers furtifs que par les peuples
réels.
Quelques
suites ou à-côtés diplomatiques…
Un geste
libérateur, n'en déplaise à
Libération...
Bien sûr,
Libération accorde une bonne place
au communiqué rageur du CNS,
gouvernement en exil à dominante Frères
musulmans et sous influence
turco-américaine, qui parle lui de «
génocide » – le CNS a
compris que c’est un mot « porteur »,
même si banalisé, sous nos latitudes. La
structure radicale, dont une délégation
piaffait samedi dans les couloirs du
Conseil de sécurité, a annoncé qu’elle
comptait porter l’affaire devant
l’Assemblée générale de l’ONU dont les
votes, hélas pour le CNS, n’ont pas de
caractère exécutoire ou contraignant. Et
puis, exprimant en celà le sentiment
général de l’axe occidental, le CNS
appelle à des sanctions économiques et
diplomatiques contre les pays ayant
bloqué le texte sur la Syrie :
eh oui, le CNS part en
guerre contre la Russie et la Chine,
qu’il a dû sans doute confondre avec
Monaco et le Liechtenstein…
Plus sérieux, tout de même,
Hillary Clinton – encore une
ex-gauchiste, tiens – a promis de
nouvelles sanctions économiques contre
la Syrie, fidèle en cela à la ligne de
déstabilisation, typiquement américaine,
du pays par tous les moyens, y compris
la paupérisation de tout un peuple.
On retiendra quand même
qu’au moment du vote, deux importants
membres des BRICS, l’Inde et l’Afrique
du Sud, ont voté le projet de
résolution, se dissociant de Moscou et
de Pékin. Peut-être l’ont-il fait sous
la pression accrue des Occidentaux, qui
ont pu faire valoir que la dernière
mouture du texte avait fait déjà
beaucoup de concessions à la Russie.
Peut-être aussi
ont-ils voté un texte dont ils savaient
pertinemment qu’il serait bloqué par
Moscou et Pékin, faisant ainsi une
concession sans conséquence aux
Euro-américains. De toute
façon, on voit mal ces pays renoncer à
leur partenariat avec la Russie et la
Chine sur le seul dossier syrien,
surtout à partir du moment où celui-ci
semble échapper aux Américains et à
leurs suiveurs.
Enfin et surtout, Bachar
al-Assad et son gouvernement doivent
accueillir mardi 7 février – avec un
magnifique tapis rouge, on présume –
Sergueï Lavrov, chef de la diplomatie
russe. Les deux parties devraient
examiner ensemble la mise en place,
aussi rapide que possible, «
des réformes démocratiques
indispensables« , et insister sur
la nécessité d’un « large
dialogue national entre Syrien ».
Le ministre russe des Affaires
étrangères sera accompagné de Mikhaïl
Fradkov, chef des services de
renseignement extérieur, ce qui peut
laisser supposer que des questions plus
« militaires » pourraient être abordées.
Il est certain que Moscou
ne serait pas mécontent que la situation
se normalise en Syrie, et aimerait
pouvoir revendiquer un rôle dans ce
sens. Mais on est droit de penser que
Lavrov et son gouvernement sont
parfaitement conscients de la nécessiter
de disperser ou détruire les bandes
armées au préalable.
Damas,
après l'annonce du double véto....
Publié le 5 février
2012 avec l'aimable autorisation d'Info
Syrie
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