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Al Manar
Hariri revient, Hezbollah continue,
jusqu'au bout des faux témoins
Leila Mazboudi
Photo: Al-Manar
Mardi 21 septembre 2010
Retour à l’accalmie ? Les appels se
bousculent, au même rythme que les espoirs s’estompent.
Depuis l’assassinat de l’ex-Premier ministre Rafic Hariri,
chaque accalmie n’a pu être que précaire, alors que perdurent
« les politiques du bord du gouffre ».
Cette fois-ci, ce retour à l’accalmie précaire s’est illustré
par le discours aussi apaisant qu’irritant du Premier ministre
libanais Saad Hariri. Discours contradictoire qui semble être
plus que jamais la pomme de discorde avec l’opposition.
De retour dimanche au Liban, (il était en vacances en Grèce
alors que la bataille médiatique et politique battait son
plein), il s’est directement réuni avec les membres de son bloc
parlementaire, leur demandant de mettre un terme au discours
confessionnel, leur rappelant que l’accord syro-saoudien est
toujours de vigueur, que la guerre civile est non permise.
Mais clic ! Il a insisté sur la poursuite de la procédure
judiciaire à l’encontre de l’ancien chef de la sureté générale,
le général Jamil Sayed .
Sayed avait été convoqué par le procureur général de la cour
d’appel, (sur demande du ministre de la justice proche des
Forces Libanaises), après avoir demandé au Premier ministre de
lui rendre justice, et de poursuivre certains de ses proches
qu’il soupçonne d’avoir fabriqué les faux témoins pour
fourvoyer l’enquête et lui adosser ainsi qu’aux trois autres
hauts-officiers l’assassinat de Hariri. Il n’a été libéré que
trois ans et demi après son arrestation arbitraire, pour manque
de preuves.
« Sinon je me rendrai justice de mes propres mains », avait
promis le général. Ce qui lui a valu l’opprobre des forces de la
coalition du 14 mars, sous prétexte qu’il a « porté
atteinte à la sécurité de l’Etat, à la constitution, et d’avoir
menacé le Premier ministre ».
Autre signe du discours contradictoire de Hariri : après avoir
affirmé son attachement au contenu de son interview pour Ash-Shark
AlAwsat, (dans laquelle il a reconnu pour la première fois avoir
accusé à tort la Syrie, et évoqué l’implication néfaste de faux
témoins), il a tenu à afficher son attachement à ses alliés, en
l’occurrence les Chrétiens de la coalition du 14 mars, en
allusion aux Kataëb et aux Forces libanaises.
Or, durant son absence, ses acolytes s’étaient directement
lancés dans une campagne pour vider ses propos au journal
saoudien de leur contenu.
D’aucuns se lançaient dans un discours frôlant l’absurde pour
dire que les faux témoins, ne le sont pas. D’autres s’attelaient
à vouloir disculper les suspects proches de Hariri d’avoir
fabriqué les faux témoins.
Alors qu’à l’extrême, le député des Kataëb Nadim Gemayel (fils
de Bachir) s’obstinait à répéter les accusations contre la
Syrie d’avoir tué l’ancien Premier ministre Rafic Hariri. Tandis
que son cousin, le député Sami (fils d’Amine), rappelait, non
sans se vanter, les anciennes relations (dangereuses) de son
parti avec l’ennemi sioniste, comme s’il brandissait la menace
d’un nouveau « pacte avec le diable ».
Ces positions n’ont pas manqué de préoccuper le chef de la
Rencontre démocratique, le député Walid Joumblatt lequel a
déclaré, pour le quotidien AsSafir que certaines parties dans la
coalition du 14 mars rejettent le repositionnement du chef du
Futur, et « ne veulent ni rapprochement avec la Syrie, ni
solutions communes, ni règlement commun de l’acte d’accusation
du TSL, » s’inquiétant « d’une plongée du pays dans l’abime ».
Sachant que Joumblatt a déjà entamé ses efforts de
réconciliation, dépêchant depuis mardi son conseiller le
ministre Ghazi Aridhi auprès du secrétaire général du Hezbollah
Sayed Hassan Nasrallah.
Après avoir reproché à l’opposition d’être « tombée dans le
piège », car selon lui, les aveux de Hariri étaient un
rapprochement, il a surtout critiqué certaines membres du
Courant du Futur qui se sont empressées de brandir un discours
confessionnel menaçant, les accusant de vouloir « attiser les
instincts en présentant le Premier ministre comme étant le
leader des Sunnites exclusivement, et non de tous les
Libanais ».
Le leader druze faisait surtout allusion au député du courant du
Futur à Tripoli Mohammad Kabbara lequel, s’offusquant contre le
Hezbollah a incité le Premier ministre « à défendre la dignité
de la communauté sunnite », contre « ceux qui sont contre
la vérité et la justice, le parti de l’Iran et compagnie, qui
ont torpillé l’Etat libanais en préparation à torpiller le
Tribunal international ».
Côté du Hezbollah, ces discours qui « attisent les instincts
confessionnels » dont il ne cesse de mettre en garde ne semblent
plus l’inquiéter.
Selon le député du bloc de la résistance, Nawwaf Moussaoui,
« celui qui brandit l’arme de la zizanie ne peut nullement
imposer des réalités politiques ».
Ayant accordé un fort soutien au général Sayed, suite au mandat
de convocation, l’accompagnant dans une escorte en grandes
pompes de l’aéroport de Beyrouth vers son domicile, à son retour
de France, il se trouve avec lui sur la même longueur d’onde
concernant le dossier des faux témoins.
« Le Premier ministre devrait joindre l’acte à la parole sur la
question des faux témoins », a réclamé Moussaoui, en allusion à
ce double langage de Hariri.
« Il devrait ouvrir un procès judiciaire (sur ce dossier)
et le poursuivre jusqu’à la fin, car il va révéler beaucoup de
vérités », précise son collègue Ali Fayyad.
Pour le général relâché, il est question de venger l’injustice
qui lui a été infligée. Pour le Hezbollah harcelé, il s’agit
d’esquiver l’injustice qui se trame contre lui, via le TSL.
Raison pour laquelle, accalmie ou pas, zizanie ou pas, il semble
résigné à aller jusqu’au bout.
Droits d'auteur© 2006 Al-Manar. Tous droits Droits réservés
Publié le 22 septembre 2010
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