Algérie
Un scrutin qui a
faussé tous les pronostics
Kharroubi Habib
Photo: AFP
Samedi 12 mai 2012
Avant le scrutin,
dont les résultats sont maintenant
connus, les observateurs et
commentateurs nationaux et étrangers ont
quasi unanimement pronostiqué qu'il
allait donner lieu à une abstention
électorale record et à un «raz de marée»
islamiste. Dans les deux cas, leurs
prévisions ont été démenties.
Le 10 mai, l'abstention a été forte avec
un taux de 57,1%, mais moindre de 8
points toutefois que celle enregistrée
en 2007 pour le même scrutin législatif.
Un tassement qui a fait se réjouir les
autorités, à qui il a été prédit une
«bérézina électorale» sans précédent. Il
est indubitable que si plus d'électeurs
qu'en 2007 se sont rendus aux urnes,
cela est dû à l'impact qu'a eu dans
l'opinion publique le discours
«pathétique» prononcé à Sétif par le
chef de l'Etat quelques heures avant le
début du scrutin. Le pouvoir n'a pas
tort de considérer qu'un taux de
participation électorale de près de 43%
à des élections législatives n'est
nullement décrédibilisant pour leurs
résultats et que, par conséquent, la
nouvelle Assemblée nationale qui en est
issue va être tout à fait légitime pour
poursuivre avec lui le processus des
réformes politiques engagé dans le pays
par le président de la République.
Les chancelleries étrangères, dont les
parlements nationaux sont souvent élus
avec des taux de participation plus
faibles que celui enregistré jeudi en
Algérie, feraient preuve d'une douteuse
«intransigeance démocratique» si elles
en venaient à considérer que les près de
43% de participation ne constituent pas
une expression populaire dont ils
tiendront compte.
La «vague verte» tant annoncée ne s'est
pas vérifiée elle aussi. Les partis du
courant islamiste ont certes fait une
percée électorale, mais ils n'ont pas
surclassé, ainsi qu'ils le prévoyaient,
ceux du courant nationalo-républicain.
Le FLN, que tout le monde donnait fini
parce que démonétisé par l'usure du
pouvoir et les guerres de clans ayant
fait rage dans ses rangs à l'approche
des élections, est arrivé en tête un peu
partout, conservant ainsi son statut de
plus importante formation politique du
pays. Toute majorité dans la nouvelle
Assemblée nationale se fera par
conséquent autour de lui et à ses
conditions.
Quid maintenant de la transparence et de
la régularité du scrutin ? Les perdants
s'empresseront évidement de contester
les résultats du scrutin en faisant état
d'une fraude préparée par les autorités
avant même sa tenue et de dépassements
multiples constatés çà et là pendant le
déroulement des opérations de vote. Il
leur sera difficile néanmoins de faire
avaliser la thèse d'une fraude
d'envergure ayant totalement faussé les
résultats.
La victoire du courant républicain et
nationaliste dénote que les électeurs
qui ont été aux urnes ne veulent pas la
récidive d'une arrivée au pouvoir en
Algérie des islamistes leur donnant tous
les moyens de son exercice. Est-ce pour
autant qu'ils ont voté pour la
continuité du système dont le FLN et le
RND, à qui ils ont entre autres accordé
leurs voix, sont les symboles ? Du
changement, les Algériens en veulent et
réclament toujours, même si
paradoxalement ils ont permis à ces
partis de réaliser des scores qui leur
permettent de rester au pouvoir.
Bouteflika, et avec lui les dirigeants
de ces partis, doivent tenir compte de
leur demande de changement. En
commençant celui-ci par le renoncement à
la fausse alternance à la tête de
l'exécutif gouvernemental du «binôme»
Belkhadem-Ouyahia.
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