Opinion
Quand l'OTAN se
montre pour ce qu'elle est
Kharroubi Habib
Dimanche 7 août 2011
Les tragédies
humaines en mer dont les malheureuses
victimes sont des migrants clandestins
ne se comptent plus. Celle qui s'est
jouée ces derniers jours au large de
l'île italienne de Lampedusa concerne
une centaine de migrants clandestins
ayant quitté la côte libyenne à bord
d'une embarcation vétuste. Ils auraient
tous péri, soit morts exténués des
suites des privations endurées, soient
noyés après que l'embarcation eut coulé.
Leur atroce fin est connue parce qu'elle
a eu pour témoins impuissants d'autres
migrants clandestins dont l'embarcation
a été arraisonnée par les gardes-côtes
italiens. Cet énième drame aurait pu,
semble-t-il, être évité, selon les
autorités italiennes, si l'OTAN, dont
les navires croisent au large, le long
de la côte libyenne, avait donné suite à
leur demande d'intervention. Le ministre
des Affaires étrangères de Rome a en
effet catégoriquement affirmé qu'il
était possible de secourir les
malheureuses victimes si l'un des
navires de l'OTAN, proche du lieu de la
tragédie, s'y était rendu comme l'ont
demandé les autorités italiennes.
L'OTAN, ce qu'elle récuse, aurait, selon
le ministre, refusé de faire ce geste
humanitaire, qui a qualifié son refus de
crime de «non-assistance à personnes en
danger».
C'est pourtant au nom du devoir
d'assistance humanitaire que l'OTAN
intervient en Libye. Sa mission est,
nous semble-t-il, de protéger la
population de ce pays. Les passagers de
l'embarcation qui a coulé non loin de
ses navires avaient embarqué de la côte
libyenne, fuyant ou les exactions des
belligérants ou les bombardements
effectués par l'armada aérienne de cette
OTAN. L'OTAN, dont les Etats membres se
targuent d'avoir des valeurs
civilisationnelles et humanistes, aurait
dû par conséquent prendre en compte par
obligation morale la demande
d'intervention de secours que lui ont
formulée les autorités italiennes, dont
le pays est l'un de ses membres.
L'attitude de l'OTAN, s'agissant de
migrants fuyant un pays où son
engagement militaire contribue au chaos
dans il est la proie, ne lui est pas
exclusive. Les Etats européens, dont les
forces militaires participent sous sa
bannière à l'intervention en Libye, se
désintéressent eux aussi du sort des
fuyards quittant la libye. La France par
exemple, qui justifie son acharnement
dans la crise libyenne par la défense de
la population, ferme ses frontières à
ceux parmi celle-ci qui ont tenté
l'aventure de quitter, à leurs risques
et périls, la Libye pour trouver chez
elle refuge contre les dangers encourus
par eux dans leur pays.
La fausseté de la raison humanitariste
de l'intervention occidentale en Libye
se révèle dans tout son cynisme par le
comportement qu'ont les Etats concernés
à l'égard de la migration provoquée par
le conflit qui se déroule dans ce pays.
Ils n'expriment de compassion et de
sollicitude pour le drame des gens
touchés par le conflit que pour faire
accepter par l'opinion internationale
une intervention qui s'est transformée
en ingérence tout court. Le sort des
fuyards et réfugiés victimes du conflit
leur est complètement égal.
Pour des raisons qui ne ressortent
nullement de l'indignation
humanitariste, le ministre italien des
Affaires étrangères a porté une
accusation de la plus haute gravité
contre l'OTAN. Tout ce que prétendra
apporter celle-ci pour sa défense ne
contrebalancera pas l'effet ravageur de
cette accusation sur les principes de
droit et de morale dont elle se prévaut
pour son action en Libye.
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