Opinion
Le MEDEF ne sent
plus d'arrogance !
Jean-Luc Mélenchon
Mardi 4 septembre
2012
Cette note est
longue. La deuxième partie traite du cas
Julian Assange. Je n’en avais rien dit
ici. Du coup mes lecteurs ont dû
découvrir avec un peu de surprise
l’échange que nous avons eu avec le
réfugié de l’ambassade Equatorienne au
cours de la clôture du remue méninge du
Parti de gauche à Grenoble. Comme il y
est question du rôle de la presse dans
la diffusion de la propagande des
services nord-américains, j’en viens à
la contagion des méthodes de rumeurs et
d’insinuations calomniatrices en prenant
l’exemple du « Nouvel Observateur
» et de son agression contre la
journaliste Audrey Pulvar et le ministre
Arnaud Montebourg. Mais avant cela, je
viens dans l’actualité politique
immédiate. Il s’agit de la piteuse
défense du traité européen par le
premier ministre et de l’arrogance
retrouvée de madame Parisot après qu’il
ait accepté d’inaugurer ses universités
d’été. Et de l’alarme qui sonne
dorénavant dans un nombre croissant de
cercles d’économistes contre l’absurde
politique d’austérité à laquelle
s’abandonne pourtant le nouveau
gouvernement comme tous les
gouvernements libéraux d’Europe. Quand
vous prendrez le chemin pour la
manifestation du dernier week-end de
septembre à Paris, vous savez que vous
accomplissez un acte de sursaut et de
survie bien plus urgent que ne le
croient les étourdis du nouveau
gouvernement.
Les dirigeants
socialistes font du zèle.
L’austérité est leur nouvelle ligne
d’horizon assumée. Les dégâts visibles
que cette politique a déclenchés chez
les voisins ne les impressionnent pas.
Ni le fait que cette politique ait
aggravé partout la crise qu’elle prétend
combattre! Le pays est en croissance
zéro, depuis neuf mois ? Plusieurs pays
européens sont entrés en récession ? «
Et alors ? » clament les
docteurs Diafoirus ! « La saignée !
La saignée », scandent-ils. Rien ne
les empêchera de ramener le déficit
public de 4,5 à 3% du PIB dès 2013 ! A
quel prix ? Peu importe à leur yeux. «
Il faut du sérieux budgétaire. Nous
bénéficions d’une certaine crédibilité
au niveau européen grâce à cette
politique" déclare Laurent Fabius.
"Même si la croissance est plus
faible, nous arriverons à trouver les
milliards nécessaires", s’est
étranglé Jérôme Cahuzac, le ministre du
Budget.
Pourtant, cette
façon de voir,
doctrinaire, étroite et suiviste
passe de plus en plus mal dans les
milieux des économistes que la réalité
concrète continue d’intéresser. « En
coulisses, c’est l’inquiétude »,
note le journal « Challenge ».
« De nombreux experts et conseillers
socialistes jugent dangereux de
maintenir cet objectif budgétaire malgré
la dégradation de la conjoncture. »
Et d’ajouter : « Cette inquiétude
est partagée par des économistes qui
n’ont pas pour habitude de se montrer
laxistes, comme Charles Wyplosz
(Université de Genève), Patrick Artus (Natixis)
ou Jean-Marc Daniel (Institut de
l’entreprise), qui nous confie:
"Maintenir les 3% alors que nous sommes
en récession, c’est idiot. » (…) Le
mouvement atteint aussi la Cour des
comptes, le temple du rigorisme
budgétaire, dont certains magistrats
estiment, en interne, que le maintien de
l’objectif des 3?% est trop "coûteux".
Dans l’Hexagone, cette charge va
connaître une nouvelle résonance, ces
prochains jours, avec la sortie quasi
simultanée de trois livres d’économistes
keynésiens. Le Français Daniel Cohen et
les Américains Paul Krugman et Joseph
Stiglitz, deux Prix Nobel, s’attaquent
aux Austériens (un surnom inventé par
l’analyste financier américain Rob
Parenteau), "l’élite mondiale des
décideurs" qui, selon Krugman, a appelé,
en 2010, "à la réduction des dépenses, à
l’augmentation des impôts et à la hausse
des taux d’intérêt malgré le chômage de
masse". Ils auraient ainsi tué la
croissance, en appliquant leur purge
trop tôt. Surtout, les Austériens ont
cru que les coupes dans les dépenses
publiques allaient susciter un rebond de
l’activité grâce au choc de confiance
dans l’économie. Une "fée confiance",
dixit Paul Krugman, qui n’est jamais
venue. »
J’ai fait cette
longue citation de « Chalenge »
avec la jubilation intellectuelle que
vous devinez ! N’est-ce pas exactement
notre thèse, répétées des mois durant et
notamment en campagne électorale ?
N’avons-nous pas été continuellement
nargués et raillés par tous les griots
médiatiques de la pensée unique libérale
? A présent le feu est à la maison. Qui
l’y a mis sinon les prétendus grands
génies de l’économie dont nous avons dû
subir les leçons et les mépris ? Et que
dire des petits malins qui nous
pourrissaient toutes les interview avec
des commentaires narquois tirés des
argumentaires des premiers ? Ce sont eux
qui ont protégé et justifié le travail
des incendiaires ! Et ça continue. Le
nouveau traité européen accentue la cure
d’austérité dans des proportions jamais
vues.
Le premier
ministre, qui voit bien l’inquiétude des
experts
rejoindre le diagnostic du Front de
Gauche, recourt donc à une
désinformation poussive. Il a affirmé
avec cet air de bedeau préoccupé qui
n’appartient qu’à lui : « il n'y a
pas d'inscription dans le marbre de
l’obligation d'équilibre budgétaire
». C’est à se demander si Jean-Marc
Ayrault a lu le traité ! En tout cas, il
ferait bien de relire l’article 3. C’est
celui qui institutionnalise la règle
d’or, car il interdit tout déficit
public de plus de 0,5% de la richesse
d’un pays. En novlangue bruxelloise, ça
donne cette merveille: « la
situation budgétaire des administrations
publiques d'une partie contractante est
en équilibre ou en excédent; [cette]
règle est considérée comme respectée si
le solde structurel annuel des
administrations publiques correspond à
l'objectif à moyen terme spécifique à
chaque pays, avec une limite inférieure
de déficit structurel de 0,5 % du
produit intérieur brut. ». Le
traité prévoit donc que la Commission
européenne propose un calendrier pour
que chaque Etat parvienne à cet
objectif. Il prévoit aussi qu’un «
mécanisme de correction » soit
déclenché « automatiquement »
en cas de non-respect de la limite de
0,5%. En un mot, le traité grave la
règle d’or dans le marbre, quoiqu’en
dise Jean-Marc Ayrault. Il le sait.
Comment pourrait-il ne pas le savoir ?
C’est
d’ailleurs pour cela que sa nouvelle
amie
Laurence Parisot, la présidente du
MEDEF, soutient ce traité de toutes ses
forces. Dans Le Monde du 28 août, elle
déclarait « on ne doit pas se poser
la question de la ratification du traité
européen : il faut le signer des deux
mains ». Si je vous parle de
Laurence Parisot c’est pour montrer à
quel point la danse du ventre de
Jean-Marc Ayrault et de dix ministres à
l’université d’été du MEDEF est lourde
de sens. Le MEDEF est plus que jamais à
l’offensive. Dans la même interview,
Laurence Parisot multiplie les
provocations libérales. Ainsi, elle
réclame : « le gouvernement doit
avoir une stratégie pro-business,
favorable aux entreprises. Pour cela, il
doit travailler à réduire les dépenses
publiques deux fois plus qu'il
n'augmente les recettes. Pour un effort
de 30 milliards d'euros en 2013, il faut
20 milliards de réduction de la dépense
publique et 10 milliards au maximum de
recettes supplémentaires, ce qui serait
déjà très lourd ».
Ces recettes
supplémentaires où les trouver ?
« Avec justice » annone
Ayrault. On connait notre réponse. Il
faut taxer les revenus du capital comme
ceux du travail. D’ailleurs dans la
phase où il nous collait à la culotte,
François Hollande avait repris cette
idée dans ses engagements. Forte du
défilé des bourgeois de Calais
ministériels à son université d’été,
madame Parisot ne sens plus aucune gêne
à avancer ses pions sans fard ! C’est
ainsi qu’elle s’est senti libre
d’affirmer sans autre démonstration : il
« serait également néfaste d'aligner
la fiscalité du capital sur celle du
travail ». Tel quel. Un des
fondements de l’égalité républicaine
c’est l’égalité devant l’impôt. Elle le
balaie d’un revers de main. Ce n’est pas
tout. Elle avance aussi que le projet de
taxation à 75% des revenus supérieurs à
un million d’euros « comporte de
sérieux risques » ! On frémit. Et
elle prévient : « une telle taxation
ne doit en aucun cas s'appliquer sur les
cessions d'entreprises ou de parts
d'entreprises ». C’est noté
Jean-Marc ? Oui c’est noté. Dès le
lendemain Pierre Moscovici rassurait les
masses patronales inquiètes. Il
suffisait de demander.
Sur cette
lancée pourquoi s’arrêter ?
Elle défend donc avec acharnement les
privilèges des grands patrons. Voici
comment. Elle s’oppose ainsi à ce que
les biens professionnels soient soumis à
l’impôt de solidarité sur la fortune : «
ce serait un hara-kiri de l'économie
française ! Il faut au contraire
préserver l'exonération d'ISF dont
bénéficie l'outil de travail ». De
quoi parle-t-elle ? Quel est cet «
outil de travail » aujourd’hui
exonéré d’ISF ? Un exemple. Médiapart
nous apprend que Liliane Bettencourt ne
payait pas l’impôt sur la fortune (ISF)
sur les actions « L’Oréal » qu’elle
détient parce qu’elles sont considérées
comme des « biens professionnels
». Le résultat est que Liliane
Bettencourt n’est pas assujettie à l’ISF
sur ces 14 milliards d’euros. Son ISF
n’est calculé que sur un patrimoine de
2,2 milliards d’euros alors que sa
fortune est estimée à 17 milliards
d’euros !
Décidément,
quel est le résultat
de la visite d’Ayrault au MEDEF ?
Madame Parisot ne fait même pas semblant
de prendre en compte ce que le premier
ministre est censé incarner après la
défaite de Nicolas Sarkozy. Dès lors en
reprenant ses poncifs éculés et refrains
de toujours, son propos fonctionne comme
un camouflet. Ainsi quand recommencent
les pleurnicheries pour « baisser le
coût du travail ». Elle défend
l’idée d’une baisse de cotisations
sociales qui serait compensée par une
hausse de la TVA et de la CSG ! Encore
plus fort que Sarkozy qui ne proposait «
que » la TVA ! Enfin, dans la discussion
sur la « sécurisation » des salariés,
elle exige que soit proposée davantage
de « flexibilité pour les
entreprises » ce qui en est
l’exacte négation. Bref, Laurence
Parisot s’oppose à tout partage des
richesses et tout rééquilibrage des
droits entre patronat et salariés. La
campagne électorale n’a pas eu lieu, les
citoyens n’ont pas voté. La droite n’a
pas perdu. Les droites passent, les
gouvernements changent, pas le MEDEF,
état-major du vrai pouvoir aujourd’hui
intact : celui de l’argent.
L’affaire Assange,
c’est une affaire d’Etat
pour les Etats Unis d’Amérique. Dès lors
que le gouvernement progressiste de
Rafael Correa s’est interposé, il a
déclenché contre lui l’assaut des boules
puantes des agences d’influence
nord-américaines. Les grands journaux de
la « boucle » se sont mis en mouvement.
Et aussi, de façon plus surprenante ceux
de la périphérie, comme « Charlie
Hebdo », à qui Maxime Vivas et «
Le grand soir » ont répliqué de
façon très argumentée compte tenu de
l’importance de ce journal dans nos
milieux de l’autre gauche. Mais
l’essentiel de la « grande presse »
s’est vite mis en ordre de tir à vue.
Insidieux d’abord puis carrément
accusatoires ensuite. Le pilonnage s’est
déroulé sur deux plans. Le premier
contre la personne d’Assange. Décrit
comme un personnage isolé, dont les
soutiens se seraient tous dédits,
instable psychologiquement et de
surcroit accusé de « viols et agressions
sexuelles », au pluriel, bien sûr !
L’autre plan d’attaque vise le
gouvernement et le président équatorien.
Ils ont été présentés fielleusement
comme ennemis de la liberté de la
presse, et professant une conception à
géométrie variable du droit d’asile.
Dans ces registres les modèles les plus
affligeants dans le domaine de la
reprise d’éléments de langage importés
sont dans certains articles du « Figaro
»
J’en donne un exemple, tout en
notant que tous les articles ne sont pas
de la même veine selon les rédacteurs.
Cela permet d’affiner la liste des gens
sous influence. La technique est
toujours la même : une addition
d’affirmations présentées comme des
évidences « bien connues », et qui sont
en réalité autant de mensonges éhontés
que le lecteur n’a aucun moyen de
deviner. Dans la même veine,
la demi-page du « Monde » à propos
du droit d’asile prétendument refusé à
un biélorusse en Equateur est aussi un
modèle de papier qui sent fort les
effets d’amicales influences. En tous
cas c’est une suite d’affirmations et
d’insinuations qui ont toutes été
démenties depuis !
En fait les «
arguments » des six famille
qui
tiennent la quasi-totalité de la presse
équatorienne sont repris par toute la
presse internationale. Mais qui les
relaie ? Veut-on croire que les
journalistes en sous-effectif des
rubriques internationales des grands
quotidiens s’astreignent à la lecture
quotidienne des journaux de l’Equateur ?
Non, bien sûr. Alors qui fournit les
synthèses ? En tous cas le résultat est
probant. Rafael Correa est décrit
partout, avec les mêmes mots et les
mêmes registres que la presse de droite
et d’extrême droite de l’Equateur comme
« peu soucieux des libertés
d'expression », et même,
sans aucune preuve ni commencement
d’explication comme « État qui est
connu pour ses violations continues de
la liberté de la presse » (Le
Figaro), comme « malmenant la
liberté d’expression chez lui » (Le
Monde), comme quand il n’est pas
carrément traité de « dictateur
» (dans les médias latino-américains).
Les « médias indépendants », nous
connaissons déjà chez nous ! Mais
ceux-là sont spécialement gratinés !
Les « médias
indépendants » équatoriens
sont la propriété personnelle de six
familles totalement engagées dans
l’opposition de droite et d’extrême
droite. Elles connaissent bien l’affaire
Assange puisqu’elles interdirent à leurs
journaux de publier les télégrammes de
Wikileaks. « Le Monde »,
« El Pais », « Der Spiegel », « The
Guardian » et « The New York
Times », l’avaient pourtant fait. Et
ce fut même à grand renfort de publicité
et avec toute sortes de « bla bla »
d’autocélébrations. On a pu mettre en
doute les intentions de leur zèle à
publier. N’était-ce pas un bon moyen de
mettre en scène ce qui leur convenait ?
Leur tri préalable des télégrammes avait
en effet parfois étonné. Néanmoins on
avait pu découvrir des scènes assez
hallucinantes. Comme ce défilé de
responsables socialistes venus assurer
les USA de leur soutien à la guerre du
Golfe que venait de refuser de faire la
France à l’initiative du président
Jacques Chirac.
Depuis ce
temps-là tout ce petit monde médiatique
a tourné casaque. Tous ont lâché
Assange, et avec lui la traditionnelle
doxa sur la protection des sources qui
vaut pourtant à Assange la vindicte
acharnée des agences de sécurité des USA
! De façon très significative, c’est
dire ayant valeur de signature, les
coups se concentrent sur la mise en
cause de l’Equateur et de son
gouvernement progressiste. On comprend
bien alors si l’on avait un doute qu’il
n’y pas d’affaire « Assange » mais une
affaire d’agence de sécurité dans une
partie où les pratiques impériales sont
mise en cause et ses bras armés tenus en
échec ! Au lieu de lire les « éléments
de langage » des ambassades et les
dépêches sous influence, il suffirait à
un journaliste de se rendre en Equateur.
Il y constaterait que la liberté de
calomnier et d’insulter le gouvernement
et le président dans la presse est
totale. Il verrait qu’il est même très
difficile de trouver quelque journal ou
quelque livre favorable au gouvernement
tant l’oligarchie locale est libre de se
déchainer contre le président. On devine
alors comment et sur quelle subvention
s’appuie « Reporter sans Frontières »,
la mangeoire du néo lepéniste Robert
Ménard, pour classer l’Equateur au
104ème rang sur 179 en matière de
liberté de la presse ! On attend de
connaitre les critères d’un tel
classement ! Car on devine que ce n’est
pas pour dénoncer la main mise des six
familles sur les médias. On comprend
alors que Le Figaro donne la
parole à une ancienne ministre d’Aznar
pour fustiger une « fraude à l’Etat
de droit » dans le cas Assange dans
la mesure où son avocat conseil est
l’ancien juge Baltasar Garzon sur lequel
son gouvernement s’est acharné, ce que
le noble journal « indépendant » oublie
de rappeler! Ce qui permet au grand
quotidien de droite de croire sans autre
question que la preuve du caractère
dictatorial du gouvernement de Correa
est donné par le fait qu’il soit soutenu
par l’Alliance Bolivarienne des
Amériques (ALBA) et donc par le
Venezuela et Cuba ! En effet, voila une
preuve fulgurante ! Et on saluera
l’exploit d’investigation du « Monde
», qui sans attendre que la Justice
équatorienne rende son verdict, dénonce
« l'hospitalité équatorienne à
géométrie variable » dans le cas du
biélorusse Alexandre Barankov. « Le
Monde » par simple respect de ses
lecteurs aurait pu mentionner que le
président Correa est tenu par la
séparation des pouvoirs entre l’exécutif
et le judiciaire à ne pouvoir se
prononcer sur l’extradition du
biélorusse Aliaksandr Barankov avant la
Cour Nationale de Justice ! Ces gens
mentent donc, insinuent, calomnient sans
vergogne. Leur rôle est de conditionner
l’opinion internationale pour qu’elle ne
réagisse pas en cas de coup d’Etat. Car
bien sûr, l’empire ne désarme pas et il
prépare et mène sans relâche des coups
d’état. Il en a tenté un contre Correa,
Chavez, Evo Moralès. Il en réussi deux
récemment celui contre Fernando Lugo au
Paraguay et contre Manuel Zélaya au
Honduras. Le chœur des griots avait
alors disparu. Et même leur corporatisme
ordinaire s’est tu. Dans ces deux pays
des journalistes ont été arrêtés et
assassinés sans que cela ne trouble la
sieste d’aucune de ces grandes
consciences à géométrie variables.
L’acharnement
contre le président Correa
a aussi un ancrage local si l’on peut
dire. Dans toute l’Amérique du sud en
voie de libération la question du rôle
des médias est posée ! Tous nos amis ont
défini des stratégies d’action
différente d’un pays à l’autre. Mais à
présent nous rendons les coups. Les
taches de libération et d’émancipation
sont étendues à la sphère médiatique.
Des lois de libération sont discutées et
votées. Elles visent toutes, sans
exception à briser les monopoles de
presse et à garantir la pluralité
d’expression. L’équateur aussi a pris à
bras le corps le problème.
Le gouvernement
est bien décidé
à faire appliquer la Constitution
équatorienne, adoptée par référendum à
63,9%. Celle-ci prévoit notamment à son
article 17 l’interdiction des oligopoles
ou monopoles dans les médias et le
soutien aux médias publics,
communautaires et privés. Afin de se
conformer à la Constitution, le
gouvernement propose une loi organique
de communication. L’opposition, donc en
premier lieu les médias eux-mêmes,
dénonce ce projet de loi qu’elle
surnomme la « ley mordaza » (« loi
bâillon »). En fait de « bâillon »,
cette loi interdit toute censure
préalable à la publication ou diffusion.
Un conseil de régulation de
l’information sera chargé de lutter
contre la censure. Et aussi, mais a
posteriori, contre toute apologie de la
violence, des discriminations, du
racisme, de la toxicomanie, du sexisme,
et de l’intolérance religieuse ou
politique, conformément à la
Constitution équatorienne. Le texte
astreint aussi les médias à la
transparence sur leur mode de
fonctionnement. Il oblige le
gouvernement à mettre en œuvre tous les
moyens nécessaire pour garantir l’accès
de tous les citoyens à une information
plurielle. Les sous-titres et la
traduction en langue des signes
deviendraient obligatoires. Quant à la
pluralité elle serait notamment assurée
par une division en trois du spectre des
fréquences de radio et de télévision :
1/3 serait privé, 1/3 serait associatif
(sans but lucratif) et 1/3 serait public
(propriété de l’état mais aussi des
collectivités territoriales). Voilà
quelle est la « terrible loi » qui
menace l’oligarchie équatorienne et que
les médias internationaux dénoncent en
chœur sans égard pour la pluralité de
l’information et le respect du vote des
équatoriens.
La guerre pour
la liberté des médias
contre les monopoles d’argent ou
d’opinion avance. Elle doit nous
inspirer. La tactique change suivant les
pays, cela va de soi. Mais la preuve est
faite d’abord qu’on peut se passer de
l’approbation et des compliments de la
presse, surtout écrite, à la condition
d’une claire stratégie frontale de refus
des connivences et d’assauts ciblés sur
leurs points faibles. Ces points faibles
nous les connaissons. Evidemment d’abord
le noir corporatisme qui sévit, sans
exception, jusqu’au détriment de la
vérité des faits qui est pourtant censé
justifier l’infaillibilité des nouveaux
grands prêtres. Ensuite la grossièreté
des insultes que profèrent les plus
importants bouddhas médiacrâtiques
contre qui leur déplait, démenti de leur
refrain contre l’agressivité et
l’intolérance qu’ils prêchent
hypocritement. Enfin il est rare que le
défaut de la cuirasse des intérêts qui
les dominent n’apparaisse pas. Voyez le
silence gêné qui entoure les révélations
de « Marianne 2 » et de « Médiapart »
sur le « contrat » pris par la
multinationale de l’eau contre Gabriel
Amard et sa régie publique de l’eau. A
l’exception du « Canard Enchainé » qui a
approfondi le cas, l’omerta est absolue.
Pourtant l’agence d’influence annonce
clairement dans le contrat qu’elle
compte obtenir de « bons articles de
presse » pour démolir Gabriel Amard.
L’homme chargé de l’opération, dont la
société a touché cent mille euros pour
le faire est à présent chef de cabinet
du ministre de l’agriculture ! Quand on
se souvient des investigations menées
pas les uns et par les autres sur
l’affaire Bettencourt dans les cabinets
des ministres et des juges, on s’étonne
! En fait on ne s’étonne pas. Les uns
donnait secrètement de l’argent à des
partis les autres à des journaux. Nuance
!
Dans tous nos
pays en voie de libération
nos amis gouvernent sans et contre la
plupart des médias. Nous aurons à notre
tour exactement la même situation, le
moment venu. Pourtant nos amis n’y
perdent rien quant à leur niveau de
popularité. Depuis des décennies les six
familles qui tiennent les principaux
médias équatoriens font la pluie et le
beau temps en matière de politique en
Equateur. Pourtant le président Correa
se maintient à 80% des intentions de
votes à la veille de nouvelles
élections. Pire pour elles : leurs
ventes chutent, les preuves des progrès
mis en œuvre par le gouvernement étant
assez tangibles pour que les équatoriens
et les équatoriennes soient lassés des
mensonges des médias. La même situation
se constate en Argentine dont nous
allons bientôt entendre parler et dont
je vous dirai mon mot ici avant peu.
Avant cela je parlerai dans mon prochain
post du Venezuela où la campagne
électorale s’avance bien. En septembre
en effet de nombreux articles et «
documentaires » vont faire couler des
torrents de boue sur nos amis. La
consigne des agences est en effet de
préparer les opinions en vue du coup qui
se prépare comme d’habitude. Si nous
gagnons largement les réactionnaires ne
pourront rien faire. Mais si nous
gagnons de peu nous aurons droit à une
grosse campagne de déstabilisation et
sans doute à des opérations violentes.
Je reviens au
cas de Julian Assange.
Il a fait couler beaucoup d’encre.
Bien des sottises ont été dites. Et du
coup il y a eu des inquiétudes assez
légitimes. Ne ferions-nous pas preuve
d’une insupportable indifférence à
l’égard du crime de viol dont il est
accusé ? Le journal « Médiapart a publié
une enquête sérieuse et documentée sur
cette accusation contre Assange. Elle
fait voir la situation sous un tout
autre jour que celui de la propagande
officielle ! Pour ma part je m’en
tiendrai ici à vous éclairer sur un
point : Julian Assange n’a jamais refusé
de répondre aux questions que la justice
suédoise veut lui poser dans le cadre de
l’enquête pour « viol mineur »
dont il fait l’objet. Vous avez bien lu
: « l’enquête ». Julien Assange n’est
inculpé ni mis en examen d’aucune façon
à ce jour. Il est accusé. Non pas par
les deux femmes en cause avec lesquelles
il a eu des rapports sexuels ce jour-là,
mais par des avocats. Il est prêt à
répondre à toutes les questions. Mais il
demande la garantie qu’il ne sera pas
extradé vers les Etats-Unis où il risque
la peine de mort ou la prison à
perpétuité pour « espionnage » ou «
terrorisme ». Ces peines qui sont
décidées aux USA par un tribunal
militaire et donc sans garantie de
respect des droits de la défense. Malgré
deux longs mois de négociations, le
gouvernement équatorien n’a pas pu
obtenir une telle garantie de la part de
la Suède. Pourtant ce pays ne devrait
pas permettre d’extradition de vers un
pays où une personne risque la peine de
mort, conformément à la Convention
européenne des droits de l’Homme dont il
est signataire ! L’Equateur n’a pas
obtenu non plus la garantie de la part
des Etats-Unis que Julian Assange ne
serait pas inquiété une fois arrivé en
Suède. Julian Assange n’essaie donc pas
de fuir la justice suédoise,
contrairement à ce que d’aucuns laissent
entendre. Il a même proposé, avec son
avocat Baltasar Garzon, de recevoir un
procureur suédois dans l’ambassade de
l’Equateur pour répondre à ses
questions. Cette possibilité a été
refusée par la justice suédoise. Notez
au passage que Le Figaro n’a pas
eu froid aux yeux lorsqu’il s’est agi de
publier la tribune de Madame Ana
Palacio, ancienne ministre des Affaires
étrangères d’Aznar, où celle-ci compare
Julian Assange à… Pinochet ! Faisant
mine de ne pas savoir que la Convention
de Genève sur le statut de réfugié tombe
en cas de crime contre l’Humanité, elle
s’est permis de fustiger le juge Garzon
en le décrivant en ces termes «
un défenseur fervent de
l'interprétation la plus étroite qui
soit de l'asile politique. Il bénéficie
d'une notoriété internationale depuis la
procédure d'extradition qu'il avait
lancée à l'encontre de l'ancien
dictateur chilien Augusto Pinochet. Or,
aujourd'hui, il défend une position
diamétralement opposée ». La
mobilisation de la droite espagnole
quand il s’agit d’un problème en
Amérique du sud montre la mentalité
coloniale toujours à l’œuvre dans ces
milieux. Mais, surtout, elle souligne
l’indécence de ces gens ! Ils avaient
milité pour la liberté de Pinochet et
obtenu son départ en liberté lorsqu’il
avait été retenu en Angleterre. Ceux qui
ont laissé partir Pinochet, meurtrier de
3000 chiliens, s’opposent au départ de
Julian Assange. Ce seul rapprochement
permet de mesurer l’infamie de ceux qui
travaillent dans l’ombre de ce dossier,
les USA, leurs agences d’influence et
leurs suppôts dans les médias.
Reste l’affaire
du réfugié Barankov
dont la presse internationale s’est
saisie dans le but évident de
discréditer le président Correa. Ainsi «
Le Monde » qui rappelle que
Barranco a obtenu le statut de réfugié
politique en Equateur et que la justice
équatorienne doit répondre à une demande
d’extradition déposée par la Biélorussie
en Juin dernier. Pourtant il se permet
d’émettre un jugement parfaitement
gratuit sur le gouvernement équatorien
en prétendant qu’il « apparaît moins
résolu dans le cas d'un autre réfugié
politique, le Biélorusse
Alexandre Barankov. » Le fait que le
Ministère des Affaires étrangères
équatorien ait déclaré, de même qu’il
l’a fait dans le cas Assante, qu’il ne
permettrait pas d’extradition si les
garanties de respect des droits de
l’Homme n’étaient pas suffisantes n’a
visiblement pas convaincu Le Monde.
L’article poursuit en disant « Loin
des assurances données au fondateur de
WikiLeaks - "Lorsqu'il est
question des droits de l'homme,
l'Equateur ne négocie pas",
proclamait encore, mercredi 22 août, le
président équatorien Rafael Correa -, M.
Barankov attend depuis sa cellule de la
prison numéro un de Quito la décision de
la Cour nationale de justice
équatorienne (CNJ) sur sa possible
extradition vers Minsk, décision qui
reviendrait à révoquer l'asile politique
dont il bénéficie dans le pays depuis
2010. » Le Monde demanderait-il à
Rafael Correa de revenir sur la
séparation des pouvoirs ? Pire : le
journal se permet même de laisser penser
que le président Correa pourrait
soutenir le régime de Louckachenko alors
même que l’Equateur avait déjà accordé
l’asile politique à Aliaksandr Barankov
! La cour s’est prononcée mardi soir :
le réfugié biélorusse ne sera pas
extradé ! Il a recouvré immédiatement sa
liberté ! On attend que l’info soit
donnée par le grand quotidien éthique et
indépendant ! Que valait la demi-page
d’insinuations fielleuses? De la
propagande sous influence, rien de plus.
Il ne faudrait
pas croire que le gout de l’injure
gratuite
et des pressions commensales sur le
pouvoir politique soit une spécialité du
folklore latino-américain qui peuple
l’imaginaire de nos chères plumes à gage
! La fainéantise professionnelle et le
gout des intrigues frappent aussi chez
nous. Cette semaine, « Le Canard
Enchainé » m’en a appris une bien
bonne à ce sujet. Non, je ne parle pas
de ses révélations sur le rapport
affectueux de la multinationale de l’eau
avec des responsables de toutes sortes.
Ça m’a aussi intéressé, c’est sûr. A la
une, sous le titre « hebdos à dos », il
y avait autre chose. Il s’agit de la
comparaison des sujets d’appel des
hebdos cet été. Il apparait que le «
Nouvel Observateur » a recopié
systématiquement une semaine après «
Le Point » les thèmes à la « une »
de ce dernier. Le prix de l’immobilier,
les philosophes du bonheur, les origines
de l’homme tout pareil comme le journal
de TF1 et celui de France 2 la plupart
du temps. Dieu aussi. Dieu ? Oui, sous
forme interrogative au « Point » («
Y a-t-il un Dieu ») et totalement
affirmative dans le journal de l’amie
d’enfance de madame Le Pen : « Dieu
: 10 raisons d’y croire ». La
gauche « relais et châteaux » déjà si
moderne va-t-elle faire un nouveau pas
en avant dans la modernité en devenant
aussi bigote ? Mais noooon, c’était
juste une audace estivale pour les Jean
Patou et Marie flocon d’avoine, les «
prout prout » de la branchouille qui
bronzent idiot. Ils ont frissonné de
plaisir devant cette transgression ! Une
autre transgression m’a fait frissonner
aussi. Mais de dégout. Je ne parle pas
des habituels couplets nauséabonds
contre moi. Je parle de l’insinuation
gratuite et sans aucune preuve destinée
à flétrir Audrey Pulvar et la tête à
claque du MEDEF, le sieur ministre
Montebourg. Sans aucune preuve il
s’agissait de faire croire que la
nomination de madame Pulvar était la
contrepartie d’un échange d’attribution
de marché public à la banque de Matthieu
Pigasse ! Naturellement personne
d’informé ne peut croire une histoire
pareille. Ni Audrey Pulvar de son côté,
ni la banque Lazarre du sien n’ont
besoin de tels arrangements pour
atteindre leurs objectifs. « Le
Nouvel Observateur » a donc menti
de sang-froid, pour nuire. Son fond de
commerce dans ce cas a été le voyeurisme
et le machisme ordinaire misant sur le
sentiment de méfiance généralisée que le
journal lui-même qualifierait
d’ordinaire de « populisme » et nous de
démagogie ! Le vrai scandale est
ailleurs. Pourquoi un gouvernement de
gauche fait-il appel à une banque privée
pour organiser une création de banque
publique ? Il n’a donc pas la ressource
intellectuelle dans ses propres rangs ?
Je ne suis pas dupe du coup de billard à
douze bandes qu’est cette ignominie.
C’est un clin d’œil au MEDEF qui hait
Montebourg et veut en faire la victime
expiatoire de son rapport de force avec
le gouvernement. Le vrai scandale est
qu’un hebdomadaire calomnie impunément
pour prouver au gouvernement sa capacité
de nuisance et accélérer certaines
promotions individuelles attendues !
Quand elles se révéleront dans les
nominations à la télé publique ou à la
radio publique vous saurez comment elles
sont parvenues à s’imposer. Parvenu,
c’est le mot.
Les dernières mises à jour
|