Algérie
Elections
législatives en Algérie :
« ils ont fait voter les morts... »
Gilles
Munier
Gilles
Munier
Samedi 2 juin
2012
Abdelaziz
Bouteflika s’était engagé à ce que les
élections législatives du 10 mai soient
« transparentes et crédibles »
et, pour le prouver aux yeux du monde,
il avait invité des observateurs
étrangers à y assister. Il avait
présenté le scrutin comme « une date
historique tout aussi importante que le
1er novembre 1954 », jour
du déclenchement de la guerre de
libération nationale (1).
Le 7 mai,
commémorant à Sétif les massacres de
1945, Bouteflika avait appelé les
Algériens à voter en masse pour sa
famille politique, c'est-à-dire sans le
citer : le Parti du FLN.
Seulement, comme
chacun sait, la réalité est tenace et
les faits têtus. L’abstention et les
votes bancs ou nuls ont atteint des
records, les électeurs n’ont voté que
très modérément pour le Parti du FLN
qui a pourtant obtenu la majorité au
parlement, l’opposition a dénoncé les
fraudes massives et la trituration des
résultats (2).
Le coup de grâce
porté au discours officiel est venu de
la Cnsel (Commission nationale
indépendante de surveillance des
élection) qui a laissé filtrer dans
les médias algériens indépendants un
certain nombre d’informations sur le
déroulement des législatives confirmant
les accusations portées par les partis
politiques et par des députés élus. Le
pré-rapport de la Cnsel énumère
les fraudes constatées dans tout le pays
au profit du Parti du FLN et du
Rassemblement National Démocratique
(RND) : PV signés à blanc, électeurs
inscrits dans plusieurs centres de vote,
recours abusif aux procurations
délivrées aux membres des corps
constitués, taux de participation
passant de 4% à 15% en deux heures,
votes FLN considérables enregistrés dans
les régions militaires… et personnes
décédées comptabilisées parmi les
votants.
La Cnisel -
dont les représentants ont souvent été
interdits d’entrer dans les bureaux de
vote - a qualifié les résultats validés
par le Conseil constitutionnel algérien
d’«illogiques» et de
«bizarres». C’est le moins qu’on
puisse dire ! Bien que subissant des
pressions de la part du FLN et du
RND pour modifier certains
passages de son rapport, elle a demandé
l’ouverture d’une enquête sur le scrutin
du 10 mai. Plusieurs partis politiques,
députés et candidats exigent
l’annulation des résultats.
Curieusement, les
quelques 500 observateurs internationaux
– Union européenne, National
Democratic Institute (NDI), Centre Jimmy
Carter, Ligue arabe, Union Africaine
(UA), Organisation de la coopération
islamique (OCI) - n’ont rien vu et
rien entendu. Ils n’ont pas été gênés de
déclarer, unanimement, que le scrutin
avait été bien organisé, « libre », «
démocratique », « transparent » et «
crédible ». En d’autres termes,
cela signifie que l’Occident, très
sourcilleux à l’égard des régimes qui ne
conviennent pas à ses intérêts du
moment, décerne un brevet de bonne
gouvernance aux généraux qui dirigent le
pays en sous-main. Il n’y a là rien
d’étonnant, mais on aura tout vu…
(1)L’arrestation
de Mourad Dhina et les élections
législatives
http://www.france-irak-actualite.com/article-l-arrestation-de-mourad-dhina-et-les-elections-legislatives-de-mai-en-algerie-98841258.html
(2)
Algérie, les législatives du 10 mai
contestées
http://www.france-irak-actualite.com/article-algerie-les-legislatives-du-10-mai-contestees-105385898.html
© G. Munier/X.
Jardez
Publié le 2 juin 2012 avec l'aimable
autorisation de Gilles Munier
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